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Régionales : Jean Rottner sort conforté d’un scrutin qui a laissé indifférent deux électeurs sur trois

Avec un taux d’abstention record, le président sortant Jean Rottner (LR) a obtenu plus de 40% des voix au second tour des élections régionales du Grand Est. Le recul du Rassemblement National est confirmé avec 26,52% des suffrages pour Laurent Jacobelli, contre 36% en 2015. En troisième position, les écologistes accusent la mauvaise distribution des professions de foi. La ministre Brigitte Klinkert obtient 12,17% des bulletins de vote, principalement dans son département.

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Une élection sans surprise. Il est 20h30 passé, les premières estimations du second tour des élections régionales sont tombées il y a près d’une heure. Au restaurant La Bourse, à Strasbourg, le président sortant de la Région Grand Est, Jean Rottner, traverse la salle principale sous les applaudissements d’une foule pleine de robes de soirée et de costumes. La tête de liste divers droite (LR-UDI) se place derrière un pupitre, prévu pour une victoire confortable. Avec 40,30% des votes exprimés, il obtient la majorité des sièges au conseil régional. Mais l’abstention la plus haute de France (69,76%) dans sa région ternit sa victoire :

« Aujourd’hui, les électeurs ont fait le choix de nous placer en tête d’un scrutin compliqué, d’une abstention dont personne ne peut se satisfaire. Elle nous oblige à être au plus près des préoccupations de nos concitoyens, à construire le meilleur pour chacune et chacun d’entre eux, à redonner confiance. La crise nous a touché, ses conséquences se font sentir. Les doutes et les incertitudes ne se sont pas estompées. »

La revanche face au RN

Sur la terrasse du restaurant, Christian Debeve savoure la victoire sur le Rassemblement National. 19e sur la liste « Plus forts ensemble avec Jean Rottner », le président de la section bas-rhinoise de l’UDI dresse une critique au vitriol de la tête de liste Laurent Jaccobeli :

« Lors des élections régionales en 2015, le Front National était dix point devant nous (avec 36% des voix, ndlr), là c’est l’inverse (avec 26% des voix, ndlr). Il y a quelque chose qui s’est passé : c’est le travail de reconnaissance des élus qui sont sur le terrain. Laurent Jacobelli est arrivé parachuté, avec son bus, il n’habite même pas ici, il ne vient pas de chez nous. Ça a été sanctionné. On ne fait pas campagne aux régionales avec la thématique des présidentielles. »

La proximité. C’est l’argument principal de Jean Rottner et ses colistiers. Pour expliquer la victoire de la liste qu’il soutient, Claude Sturni, maire de Haguenau donne le résultat du président sortant dans sa commune : 43,66% des suffrages exprimés, contre 24,72% pour le RN. « C’est peut-être l’effet maire, cette connaissance des besoins des gens », dit-il. Tous les colistiers interrogés au restaurant La Bourse détenaient au moins un mandat électoral.

« On a essayé de renouveler le paysage politique »

Au QG des écologistes, les réactions sont plus mitigées. La victoire dans deux cantons strasbourgeois aux élections départementales suscitent la joie de certains. Mais les candidats aux élections régionales ne cachent pas leur déception. Dans un communiqué de presse envoyé avant les premières estimations, la tête de liste Éliane Romani dénonçait des « professions de foi manquantes dans le Bas-Rhin en raison des délais restreints imposés par la préfecture » et craignait « l’impact de cette désorganisation sur les résultats ».

Secrétaire régionale d’EELV en Alsace, Cécile Germain-Ecuer évoque aussi un résultat insatisfaisant (21,22% dans le Grand Est et 19,6 en Alsace), du fait de l’abstention record mais aussi d’une stratégie politique qui peine encore à porter ses fruits :

« On a essayé de construire une dynamique en renouvelant le paysage politique, avec beaucoup de personnes non-élues, très peu de cumul des mandats, et je pense que c’est quelque chose que les gens n’entendent pas encore forcément mais qui petit à petit va faire son nid. Les gens vont se dire, en fait il y a une liste qui nous ressemble, où on n’a pas besoin d’être chef d’entreprise, maire, député, sénateur, président de com-com… On peut venir en étant simple citoyen, en étant un militant et en se disant j’ai envie de changer les choses et j’ai envie de rejoindre une liste qui gagne. »

Réaction de la tête de liste écologiste en Alsace. (vidéo Lola Mannecy / Rue89 Strasbourg)

Les priorités de la liste de Rottner

Interrogé sur ses mesures prioritaires pour son second mandat, Jean Rottner ne s’est pas risqué à citer l’une de ses promesses de campagne : « Ce soir, je crois que les mesures seront surtout d’ordre économique mais aussi de mains tendues aux fragilités induites par la crise. »

Jean Rottner fête sa victoire aux élections au restaurant La Bourse Photo : GK / Rue89 Strasbourg / cc

Développement économique et mobilités. Un à un, les colistiers évoquent les mêmes priorités. la Strasbourgeoise Irène Weiss, 22e sur la liste du président sortant, évoque la promesse du « passeport mobilité emploi, pour 10 000 jeunes par an qui s’inscrivent à des formations, donner 1 000 euros pour passer le permis de construire. »

Irène Weiss détaille quelques mesures qui devraient être mises en place lors du second mandat de Jean Rottner (vidéo GK / Rue89 Strasbourg)

Pour Christelle Lehry, adjointe à la mairie de Muntzenheim et 14e sur la liste de Jean Rottner, « les électeurs s’inquiètent surtout de la sortie de crise. Nous allons devoir prendre le relais lorsqu’il n’y aura plus d’aide de l’Etat, pour que les entreprises puissent se stabiliser et continuer d’investir. »

Christelle Lehry, adjointe à la mairie de Muntzenheim et 14ème sur la liste menée par Jean Rottner. Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

Claude Sturni évoque de son côté le développement de « maisons de la Région », un objectif de 500 entreprises qui relocalisent leur production dans le Grand Est et la formation de 2 000 infirmières, 2 000 aide-soignantes et 2 000 aides à domicile au courant du mandat.

L’ancien sénateur Guy-Dominique Kennel se refuse à évoquer la sécurité, « ce n’est pas une compétence de la Région ». Mais sa colistière Pauline Jung, en 24e position, l’évoque comme « un enjeu fondamental de ces élections » L’adjointe au maire de Brumath précise : « Nous allons aider les communes à amener plus de sécurité, en investissant dans la police municipale et des caméras de vidéosurveillance. »

Ancien sénateur, ex-président du conseil général du Bas-Rhin, Guy-Dominique Kennel, 23e sur la liste de Jean Rottner. Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

Une majorité confortable au conseil régional

Jean Rottner dispose d’une confortable majorité au conseil régional, avec 94 sièges sur 169. Le Rassemblement National (26,3%) dispose de 33 sièges et siègera en tant que premier opposant à cette majorité divers droite (LR-UDI). La liste écologiste d’Eliane Romani fait son entrée au conseil régional avec 27 sièges, partagés avec des socialistes et communistes.

Enfin, la liste menée par la ministre déléguée à l’Insertion Brigitte Klinkert termine 4è avec 12,17%. Le nombres de sièges étant attribués selon les scores par département, il y aura 12 conseillers régionaux LREM d’Alsace (où la liste finit 3è avec 20,6%), contre trois de Lorraine et 0 de l’ex-Champagne-Ardenne.

Pour l’élu régional sortant, venu du PS, Christophe Choserot (LREM), réélu en Meurthe-et-Moselle ces mauvais scores hors d’Alsace étaient attendus car le parti présidentiel n’y est pas ancré :

« La faible participation ne bénéficie jamais aux listes challengers » (vidéo JFG / Rue89 Strasbourg)

Dans les soutiens de Birigtte Klinkert, on se console en disant que « nos idées ont obligé Jean Rottner à modifier son programme ». À défaut d’avoir provoqué une fusion ou des retraits de liste, on estime que le président sortant a davantage axé sa campagne sur la « proximité » et que le futur groupe veillera à une application de ces paroles.

Ancienne de « Les Républicains » comme Jean Rottner, Brigitte Klinkert, ne dit pas si elle se situera d’emblée dans la majorité ou l’opposition à ses ex-camarades :

« Pour moi la politique c’est ce n’est pas être dans la majorité ou l’opposition, ce sont des projets. Si nous pouvons travailler ensemble avec la majorité, construire ensemble, moi je dis d’accord. »

Au Rassemblement national aussi on essaie de se consoler. Laurent Jacobelli explique que son résultat est le « deuxième score en France pour le Rassemblement national« , après la Provence Alpes Côtes d’Azur, où Thierry Mariani a aussi été battu.


#élections régionales 2021

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