
Réunion tendue sur la rénovation urbaine de l’Elsau : un quartier divisé et des habitants fatigués d’attendre
Une centaine d’Elsauviens ont assisté à la présentation de la rénovation du quartier dans la soirée du lundi 7 mars. Une réunion de plus de trois heures, où l’ambition de la municipalité écologiste n’a pas suffi à rassurer des habitants lassés par des discours qui tardent à produire des effets concrets sur leur quotidien.
« On pensait pouvoir vous présenter la rénovation du quartier en une soirée. On est en train de se rendre compte que c’est compliqué… » Directeur du projet de rénovation urbaine de l’Elsau depuis 2016, François Desrue a dû admettre un excès d’ambition lors d’une réunion de présentation au centre socio-culturel. Dans la soirée du lundi 7 mars, élus de la Ville, sous-préfète et dirigeants de bailleurs sociaux devaient revenir sur le projet original de rénovation, datant de 2019, pour mieux présenter leurs nouvelles orientations. De quoi brosser des domaines aussi variés que la salubrité des rues, la circulation dans le quartier, les services et commerces à venir, les destructions d’immeubles et les rénovations… Les trois heures de réunion n’ont pas suffi.

Les projets pour l’entrée de quartier
L’entrée de l’Elsau est un enjeu fondamental pour les décideurs. Il en va de l’image du quartier. Avec le projet du promoteur Marignan, 100 logements et 1 000 mètres-carrés de surface commerciale sont en cours de construction (le détail ici). Première nouveauté annoncée lors de la réunion : une maison urbaine de santé, qui regroupe plusieurs professionnels médicaux, devrait occuper une partie du lotissement en construction. La municipalité écologiste a aussi évoqué un projet de « tiers-lieu » éphémère dans une ferme délabrée située au 40 de la rue de l’Unterelsau.
La municipalité écologiste compte donc aménager une voie de circulation pour piétons et cyclistes. Elle partirait du début de la rue du tram pour atteindre le square Nicolas Poussin. La réunion d’informations a aussi permis au président d’Ophéa Salah Koussa d’annoncer le déménagement futur de l’agence du bailleur social au 2, rue Mathias Grünewald. Interrogé sur le maintien de la Poste, l’adjoint en charge de l’équité territoriale a aussi promis le maintien de ce service essentiel dans le quartier. La seule question en suspens concerne son emplacement futur. Trois solutions sont envisagées : les surfaces commerciales du projet de Marignan, la future Maison des Services au Public ou l’actuel site de la mairie de quartier. « La décision sera prise d’ici 2025 maximum », a assuré Benjamin Soulet.
Le déménagement de l’école Martin Schongauer
De l’autre côté du Quartier Prioritaire de la Ville (QPV), la municipalité compte aussi implanter un parc partant du 80, rue Martin Schongauer jusqu’aux berges. L’école élémentaire Martin Schongauer sera détruite. Elle déménagera au cœur du quartier. Le futur groupe scolaire sera en effet construit à la place des deux immeubles situés au 43 et au 30 avenue Jean-Baptiste Pigalle. Un futur gymnase sera implanté au 6 rue Jean-Martin Weis.
Directrice de l’école maternelle, Céline Laperrouze a d’abord évoqué la déception de l’équipe pédagogique, « c’était une école en plein milieu d’un espace vert », puis elle a décrit la satisfaction des parents d’élèves : « Ils sont contents d’avoir une future école au centre du quartier, dans la verdure, où il n’y aura plus de voie à traverser pour s’y rendre. »
Une majorité d’habitants du quartier pavillonnaire
Les attentes et les critiques à l’égard de la municipalité écologiste n’émanaient pas seulement des habitants du QPV. Comme souvent, de nombreux habitants du côté pavillonnaire de l’Elsau se sont rendus à la réunion. Réagissant aux débats sur les rats, l’un d’eux a attribué le problème « à un manque d’éducation de certains », une phrase qui a suscité la colère d’autres Elsauviens présents.

Toujours côté pavillonnaire, le président de l’AREL Daniel Vidot a fustigé le futur plan de circulation du quartier. Un habitant de la rue de l’Unterelsau s’est aussi plaint de l’impact de la rénovation urbaine sur le nombre de places de stationnement, déjà insuffisantes selon lui. Réponse d’Hülliya Turan (PCF), élue référente de l’Elsau : « Nous allons encore retravailler cette question. Nous allons revenir vers vous, c’est un engagement. »
« On va vivre avec les rats pendant combien de temps ? »
Dès 21h30, la salle a commencé à se vider pour finir à moitié pleine. Beaucoup de questions restent sans réponse et laissent aux habitants un goût d’inachevé. « On va encore vivre avec les rats pendant combien de temps ? On peut pas tenir comme ça encore quatre à six ans », a ainsi lancé Lailla Anar, habitante du quartier. Cette représentante de parents d’élèves de l’école élémentaire Léonard de Vinci, répondait à l’adjoint en charge de l’équité territoriale. Benjamin Soulet a annoncé le début du passage à la collecte enterrée dès la fin de l’année 2022 pour les logements de CDC Habitat. Côté Ophéa, le changement de système de dépôt des déchets s’étalera jusqu’en 2025.

Les poubelles ont occupé une partie importante des échanges entre Elsauviens et élus. Hmida Boutghata, président de l’association de locataires Alis-Unli, s’est aussi lancé dans une diatribe contre les porteurs du projet :
« C’est du pipeau que vous nous racontez. Ca fait trente ans qu’on vit avec des déchetteries à ciel ouvert et des rats. Le système de collecte enterrée ne suffira pas à résoudre ce problème. Dirigeants de bailleurs sociaux ici présents, c’est aussi votre mission de m’entendre. Tant que vous ne remettrez pas des gardiens et des concierges dans nos immeubles, mes enfants continueront de voir des rats sur le chemin pour l’école. »
Concernant les concierges et gardiens d’immeuble, le directeur d’Ophéa a évoqué des « expérimentations de concierge au Neuhof et au quartier gare qui ont donné des résultats positifs. Mais Jean-Bernard Jambier a aussi indiqué « qu’on ne pourra pas déployer des concierges partout ». Moins prudent, le président du bailleur social Salah Koussa a rappelé l’embauche de gardiens et de concierges supplémentaires : « On va continuer à recruter, mais le quartier de destination du personnel reste à déterminer. »
Des réunions et un calcul peu judicieux
La réunion s’est achevée sur les calendriers de démolition et de rénovation des différents bailleurs sociaux. Côté Ophéa, une première démolition aura lieu au 8 rue Jean-Martin Weis à la fin de l’année 2022. Le directeur du bailleur, Jean-Bernard Jambier, a aussi annoncé une réunion de concertation à la fin du mois de mars pour recueillir les besoins des locataires de la rue Martin Schongauer.
Côté CDC Habitat, une réunion publique avec les locataires doit avoir lieu le 6 avril. Elle sera dédiée à la rénovation du bâtiment hébergeant des personnes âgées située dans la rue Nicolas Poussin. Le directeur d’Alsace Habitat, Nabil Bennacer, a aussi détaillé les projets de rénovation des 220 logements du bailleur à l’Elsau. Vidéoprotection, locaux vélos et poubelles, rénovation thermique… Ces travaux doivent commencer en 2022-2023.
Sans doute que la municipalité comptait garder le meilleur pour la fin. Mais la longueur de cette réunion a rendu le calcul peu judicieux. Face à des dizaines de chaises vides et d’habitants fatigués, aux alentours de 22h, l’équipe municipale a abordé l’enjeu le plus important pour les Elsauviens : les commerces et les services aux habitants. La Maison des Services au Public a ainsi été décrite. Ses 1 000 mètres carrés accueilleront la médiathèque, la direction de territoire, la mairie de quartier et le centre médico-social.
En cours de construction, la salle de boxe offrira 380 mètres carré pour le club de l’entraîneur Mehdi El Idrissi. Aussi président de la société d’économie mixte Locusem, Benjamin Soulet a fini par annoncer qu’ « un prix du mètre-carré a été fixé pour le rachat des surfaces commerciales » pour les rez-de-chaussée des futurs immeubles en entrée de quartier. La Locusem, qui propose des loyers modérés, deviendra donc l’intermédiaire pour de futures implantations. Reste l’éternelle question, encore sans réponse : quel supermarché, quelle boulangerie, quelle banque acceptera de s’installer à l’Elsau ?
Un projet contre l'intérêt des habitants
- 400 déménagements forcés. Qui souhaite cela pour sa famille ?
- Des délais allongés, 2 ans pour une rénovation contre 6 ans pour une démolition - reconstruction
- Les nuisances importantes des démolition (bruit, vibration, poussière, trafic de camions)
Un projet anti écologique qui contribue au réchauffement climatique et à la pénurie de matériaux de construction
Les démolitions augmentent de 10 000 tonnes les émissions de GES
0.3 t GES/m² x [4000 m² école + gymnase + 32000 (400 logt x 80 m²)] = 10800 tonnes de GES (gaz à effet de serre équivalent CO2)
Un projet qui gaspille l'argent public
Le surcoût du projet : 400 logt x 100 000€ surcoût démolition = 40 millions d'euros sans compter les démolitions de l'école et du gymnase. De quoi imposer ensuite la rigueur budgétaire !
Le Shift Project publie aujourd'hui ( 9.3.22) son nouveau livre « Vers la résilience des territoires pour tenir le cap de la transition écologique». Le programme du NPNRU Elsau a 20 ans de retard. Il passe à coté des enjeux d'aujourd'hui. La rénovation de l'école et des deux tours économiserait à elle seule 12 millions d'euros pour permettre une approche adaptée à la situation.
Une approche systémique est possible pour agir l'habitat, les modes de déplacements, l'alimentation, les loisirs, la réduction des déchets pour la résilience face à la crise écologique et augmenter le revenu disponible des ménages. L'école reste la priorité ainsi que la formation et l'insertion dans les métiers de la transition écologique.
Des solutions imaginées pour l'Elsau sont présentées sur cette page :
https://sites.google.com/view/novo-habiter/exp%C3%A9riences/ville-bas-carbone
Étonnant de parler de "déménagement" de l'école
Alors qu'il s'agit de la démolir pour la reconstruire 300 m plus loin ainsi que deux grands immeubles pour lui faire de la place.
Ces trois bâtiments sont structurellement sains. Leur rénovation économiserait 300 kgCO2/m² , coûterait un tiers du prix de leur démolition et serait réalisable en 2 ans contre 6 pour le "déménagement"!
ON MARCHE SUR LA TÊTE !
Le projet global pour le quartier est le assez bon, vu que l’état et l’anru ne laissent pas beaucoup de marges de manœuvre . Ce n’est donc pas l’équipe en place qu’il faut critiquer : elle bosse bien et tient compte des problématiques des gens et du quartier . Elle va beaucoup plus loin que les mairies précédentes qui refusaient par exemple la maison de santé où les poubelles enterrées pour tout le quartier (soutenu par l’amicale des habitants de l’Elsau).
Quand aux critiques, c’est normal les gens en ont marre et la mairie actuelle paie pour les manquements des 4 maires précédentes. Et puis il y avait les sempiternelles critiques des associations qui se sont fait une profession de râler. Il ne savent faire que cela. Non messieurs il se passe vraiment beaucoup de choses à l’elsau et il va y avoir beaucoup de changements pendant 5 ans. Mais c’est sur, 5 ans c’est long quand on attend depuis 20 ans.
Le projet de l’Elsau illustre que rien n’a changé dans l’esprit des investisseurs…
@Georges, la municipalité s’est engagée à co-construire. À l’Elsau elle maintient les fondements du projet initial, qui ne propose aucune pour ce quartier et s’assoit sur tout éventuel projet social. Les financements européens au profit du BTP le valent-ils ?
Siah ARMAJANI, qui a co-élaboré le gazebo lors de l’arrivée du tramway comme phare à l’entrée du quartier et espace de partage devra attendre pour que son utopie s’ouvre aux espaces urbains voisins de l’Elsau...
Siah ARMAJENI…
Pas d'espoir d'influencer les décisions à venir?
Par le biais d'articles comme celui-là.
Soutenons les collectifs du quartier et encourageons la Ville a s'engager à la hauteur des impératifs sociaux et urbains.
Il nous faut d' autres Céline Laperrouze inspirés par l'homonyme:
"L'historien et spécialiste de la Marine Étienne Taillemite dit de lui :
« Lapérouse représente le type le plus accompli du marin du xviiie siècle. Excellent navigateur, brillant combattant, chef très humain, esprit ouvert à toutes les sciences de son temps, il sut toujours habilement combiner prudence et audace, expérience et théorie. Aussi habile qu’infatigable, aussi aimable que ferme, il savait se faire aimer de tous. »"
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