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Après 13 années de saga judiciaire, 12 Alsaciens appelant au boycott d’Israël relaxés

Douze Alsaciens ayant mené des actions appelant au boycott des produits originaires d’Israël en 2009 et 2010 ont obtenu que leurs condamnations pour « provocation à la discrimination » soient annulées au bénéfice de leur liberté d’expression.

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Après 13 années de saga judiciaire, 12 Alsaciens appelant au boycott d’Israël relaxés
Mireille Pelka (à gauche), présidente de l’Association France Palestine Solidarité Alsace, et Siam, réfugiée palestinienne, lors de la soirée célébrant la relaxe des militants de BDS 68.

Douze militants de Boycott désinvestissement et sanctions Haut-Rhin (BDS 68), un collectif qui œuvre pour le boycott de produits israéliens en protestation contre les actions de l’État hébreu visant les Palestiniens, ont définitivement été relaxés de « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers un groupe de personnes ». Par deux arrêts du 14 mars 2024, la Cour d’appel de Paris a confirmé deux jugements de relaxe rendus par le tribunal correctionnel de Mulhouse le… 15 décembre 2011.

Douze militants alsaciens avaient alors dû répondre devant le tribunal après avoir appelé au boycott des produits en provenance d’Israël les 26 septembre 2009 et 22 mai 2010, dans les locaux du supermarché Carrefour d’Illzach, près de Mulhouse. Les militants, vêtus de t-shirts siglés « Palestine vivra, boycott Israël », avaient notamment distribué des tracts proclamant que « acheter les produits importés d’Israël, c’est légitimer les crimes à Gaza, approuver la politique menée par le gouvernement israélien ». Plusieurs marques étaient citées dont Jaffa, JordanValley, Carmel, King Solomon, Jafaden, et d’autres.

Un appel du parquet qui va durer 10 ans

Le ministère avait fait appel de la relaxe prononcée par le tribunal de Mulhouse en 2011. Les militants avaient ensuite été condamnés par la Cour d’appel de Colmar en 2013. Confiants dans leur position, les militants de BDS sont allés jusqu’à la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) pour faire valoir que ces actions s’inscrivaient dans le cadre de la liberté d’expression politique.

Une reconnaissance obtenue en juin 2020, à l’unanimité de la CEDH, et qui a permis la révision des procès d’appel. Les juges de Strasbourg ont considéré d’une part que les actes et propos des prévenus relevaient d’un sujet d’intérêt général, d’une expression politique et militante, et qu’à ce titre, ils devaient bénéficier d’un niveau élevé de protection de la liberté d’expression.

Les activistes, ils ne sont plus que onze, ont donc logiquement fêté samedi 4 mai à Mulhouse cette victoire, qui devrait installer une jurisprudence favorable pour de nombreuses actions militantes, et la fin de cette « saga judiciaire », selon le mot de Ghislain Poissonnier dans Dalloz Actualités.

Cette affaire aura au moins permis de consolider une des limites de la liberté d’expression et notamment, l’incitation à la haine ou la discrimination d’un groupe de personnes, en l’occurrence la communauté juive. Puisqu’il n’y a eu ni insulte ni violence dans le supermarché d’Illzach en 2009 et 2010, aucun préjudice ni aucune plainte, que les militants avaient prévenu le supermarché de la présence de produits importés d’Israël mal étiquetés, il s’agissait bien d’une expression politique et légale.

Cette décision va permettre à BDS de poursuivre ses actions. Dans un compte-rendu de la célébration du 4 mai, Alterpresse évoque de futures mobilisations pour l’antenne du Haut-Rhin à partir du 18 mai, dont une devant la Cour pénale internationale.


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