Pompiers, policiers, procureurs, communes, associations de locataires… L’État a rassemblé de nombreux acteurs pour renforcer un plan de lutte contre l’habitat indigne, présenté lundi 20 octobre à la presse. La préfecture estime à 9 200 le nombre de logements potentiellement indignes dans le Bas-Rhin.
Les autorités ont recensé 863 nouveaux signalements en 2024 dans le département, notamment grâce à la plateforme Signal logement (cliquez ici pour signaler un logement insalubre sur cette plateforme). Ce chiffre était de 748 en 2024 et de 630 en 2022. La capitale alsacienne concentre plus de 40% des signalements. Les pouvoirs publics prévoient cinq opérations de rénovation de l’habitat (OPAH-RU), à Sélestat, Saverne, Haguenau, Bischwiller et Koenigshoffen à Strasbourg. Dans ces zones où les cas de mal logement s’accumulent, des plans d’accompagnement financier et administratif sont imposés aux propriétaires pour la mise en œuvre des travaux.

Coopération avec les procureurs
Lorsqu’un logement insalubre est repéré, le préfet signe un arrêté qui peut mettre en demeure le propriétaire de réaliser des travaux, ou interdire la mise en location du bien. 27 arrêtés d’insalubrité ont été signés en 2024 dans le Bas-Rhin. Dans les situations les plus graves, où le propriétaire ne respecte pas les mesures, le parquet peut se saisir de l’affaire et engager des poursuites pénales. Ce 20 octobre, les procureurs de la République de Strasbourg, Saverne et Colmar annoncent améliorer la coopération avec les services de l’État pour systématiser les procédures.

« Nous avons sept procédures ouvertes à ce jour, précise Clarisse Taron, procureure de la République de Strasbourg. C’est vrai que les affaires peuvent mettre du temps à aboutir mais avant ce n’était même pas un sujet… » Policiers et pompiers ont également été impliqués, en tant que premiers maillons de la chaîne. « Ça arrive qu’on constate une situation d’insalubrité en rentrant dans un appartement », explique Jean Hayet, directeur interdépartemental de la police nationale du Bas-Rhin (DIPN 67). Les policiers et les pompiers pourront désormais remplir un formulaire s’ils remarquent un logement indigne et faire remonter l’information.
Une dizaine d’agents pour les contrôles de tout le Bas-Rhin
« Cela peut nous permettre de toucher les personnes les plus vulnérables, qui n’osent pas faire de signalements, par exemple parce qu’elles n’ont pas de titre de séjour », précise Maryline Poulain, préfète déléguée à l’égalité des chances. Une fois le signalement réalisé, trois employés de l’Agence régionale de santé (ARS) et huit fonctionnaires de la municipalité à Strasbourg, sont chargés de l’instruire.
Les communes doivent aussi s’impliquer en participant au repérage et en mettant un œuvre des mesures de sécurité si nécessaire. « Nous allons créer trois équivalents temps pleins supplémentaire avec l’expérimentation du permis de louer dans le quartier gare », affirme Aurélien Bonnarel, conseiller municipal (Parti communiste) de la Ville de Strasbourg, délégué au mal logement.
Vu le grand nombre de signalements et le peu d’agents dédiés, les procédures s’éternisent souvent, lorsque la situation n’est pas suffisamment grave pour un arrêté d’insalubrité. Et les propriétaires peuvent engager des procédures contre les services qui réalisent les contrôles ou temporiser lorsqu’ils sont visés par ces arrêtés d’insalubrité. La famille Benamran, qui possède via diverses sociétés un empire immobilier à Strasbourg dans lequel les plaintes des locataires sont innombrables, fait perdurer des situations de mal logement pourtant bien connues des autorités depuis plusieurs années.

Propriétaires récalcitrants
Ainsi la famille Benamran a contesté un arrêté d’insalubrité devant le tribunal administratif en 2024, concernant le bâtiment au 6 place Sainte-Aurélie. Le tribunal a rejeté la demande mais des locataires continuent de vivre dans des conditions d’insalubrité en attendant une décision d’appel… Les leviers les plus efficaces de l’État face à de tels propriétaires récalcitrants sont la possibilité de leur imposer des travaux avec des astreintes financières, de leur interdire de percevoir des loyers, ou encore l’arrêt des versements des allocations logement par la CAF. Une mesure prononcée 31 fois dans le Bas-Rhin en 2024.



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