Annoncé dès 2021 par la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian (Les Écologistes), le permis de louer va être expérimenté à partir de mai 2026. Votée en conseil de l’Eurométropole le 23 mai, la mesure sera examinée par le conseil municipal, lundi 23 juin.
L’expérimentation, limitée au quartier gare, vise à lutter contre la mise en location de logements indignes. Les propriétaires de logements loués à usage d’habitation principale et construits avant 2006 devront solliciter une autorisation de la Ville avant la mise en location de leur bien. Pour Jeanne Barseghian : « L’objectif est d’avoir des contrôles a priori et de ne pas attendre d’avoir des signalements de locataires pour agir. Nous allons ainsi pouvoir retirer des logements indignes du marché locatif avant qu’il y ait des locataires dedans, c’est une mesure de protection. »

Les services de l’État évaluent à 9 200 le nombre de logements indignes dans le département du Bas-Rhin. Sur le seul territoire de la ville de Strasbourg, 2 100 logements seraient concernés, selon une estimation des services municipaux. « Nous avons mené une étude approfondie et c’est le quartier gare qui ressort comme le plus vulnérable, ce qui explique son choix pour l’expérimentation », détaille Marie-Dominique Dreyssé, élue référente du quartier. En fonction des premiers résultats de l’expérimentation, la Ville pourrait élargir le périmètre de la mesure à d’autres secteurs.

« Un changement de paradigme »
Au travers de cette mesure, la Ville met en place un régime d’autorisation préalable avant toute location d’un bien immobilier. « Un changement de paradigme », selon la maire de Strasbourg. Le propriétaire devra ainsi déposer une demande accompagnée de tous les diagnostics techniques obligatoires : performance énergétique, électricité, amiante et plomb. Les services municipaux auront un délai d’un mois pour étudier le dossier et pourront réaliser un contrôle du logement en cas de doute. La Ville pourra autoriser la mise en location, émettre des réserves et demander au propriétaire de réaliser des petits travaux ou refuser la mise en location tant que le logement ne répondra pas aux conditions de dignité minimales.

« S’il y a des anomalies dans les diagnostics, cela va constituer des signaux d’alerte et déclencher un contrôle, explique Aurélien Bonnarel, élu en charge de l’expérimentation du permis de louer. Nous allons aussi regarder si l’immeuble est déjà connu de nos services, s’il y a déjà eu des signalements. » Pour l’élu communiste, l’objectif n’est pas d’empêcher les propriétaires de louer, mais de contraindre ceux qui n’entretiennent pas leurs appartements à le faire. « On sait quels sont les immeubles qui posent problème aujourd’hui, ajoute Suzanne Brolly, adjointe à la maire de Strasbourg. Sans donner de noms, on sait précisément où intervenir. »

Trois agents dédiés et des sanctions
Le quartier gare compte 5 149 logements concernés par le dispositif du permis de louer. Les services de la Ville estiment que chaque année, les agents municipaux devront traiter entre 1 300 et 1 400 demandes d’autorisation préalable. « Nous allons recruter trois agents qui seront dédiés uniquement au permis de louer », explique Aurélien Bonnarel. Ces agents risquent de ne pas manquer d’activité, en plus de l’étude des demandes et des visites de contrôle, ils devront s’assurer qu’aucun logement ne soit loué sans autorisation. « Les propriétaires s’exposent à des amendes de 5 000 à 15 000 € en cas de manquements, par exemple, si un logement est mis en location malgré un refus. Nous sommes déterminés à mettre en œuvre ces amendes », poursuit l’élu en charge du dispositif.

Pour Aurélien Bonnarel, le permis de louer va donner à la ville un nouveau levier d’action. « Jusque-là, on pouvait agir seulement dans les cas les plus graves, maintenant, on va pouvoir interdire à la location les logements indignes et plus seulement ceux qui sont insalubres. » L’élu espère que la mesure poussera les propriétaires à réaliser des travaux avant qu’il soit nécessaire de les sanctionner. Si la situation s’améliore dans le quartier gare, il envisage même d’élargir le périmètre à d’autres quartiers : « Nous voulons faire passer le message que les marchands de sommeil ne sont pas les bienvenus à Strasbourg. »
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