

Les travailleurs sociaux n’en sont pas à leur première mobilisation, ici en mai 2008 à Paris (Photo Damien Roué / FlickR / cc)
Obsession de l’évaluation et de la compétitivité, heures de paperasses, économies de bouts de chandelle, justification de la moindre dépense : bienvenue dans le quotidien des travailleurs sociaux strasbourgeois. Résultat : des salariés sous pression, moins de temps consacré aux usagers, dérives de tri à l’entrée des dispositifs d’aide. Autant de conséquences qui posent la question de la place accordée à la bientraitance des personnes aidées.
« Maintenant, le temps à consacrer aux personnes est limité et minuté. Il n’y a plus de place pour la parole, on déshumanise nos métiers. » Ce constat d’un travailleur social strasbourgeois résume le sentiment partagé par nombre d’entre eux. À Strasbourg, face au malaise, le « collectif 789 » s’est créé pour offrir un lieu d’écoute et de réflexion face aux mutations du secteur. Pour ses membres, l’introduction de méthodes de gestion issues du management menace le coeur de leur métier : aider les personnes en difficulté. Un des membres illustre :
« Dans les établissements et services d’aide par le travail (ESAT), aujourd’hui on sélectionne les personnes handicapées en fonction de leur productivité pour rentrer dans les financements. Résultat : des dérives. Depuis cinq ans dans les foyers d’hébergement, les travailleurs n’organisent plus d’activités avec les résidents le soir : on les mets devant la télé deux minutes et ils s’endorment tellement ils sont épuisés. »
La même question se pose pour ce travailleur social dans l’hébergement d’urgence, contraint d’accueillir des personnes dans une structure d’accueil prévue pour la journée et transformée en accueil de nuit, avec des chaises ou, avec de la chance, des matelas à même le sol pour dormir. Ou encore pour cet éducateur spécialisé censé accueillir 17 enfants quand il n’y a que dix places disponibles.
Le travail social soumis à la loi du marché
L’éducateur spécialisé développe :
« Les financeurs mettent la pression pour que les établissements soient remplis en continu. Mais dans le cas de placements en foyer, on ne peut pas remplacer le jeune parti quand le matelas est encore chaud ! Actuellement, les établissements doivent avoir un taux d’occupation annuel de 80% pour parvenir à l’équilibre budgétaire. Avec le nouveau schéma départemental, le seuil doit augmenter à 92%. »
Depuis les années 2000, sous l’impulsion de plusieurs directives européennes (le paquet Monti-Kroes et la directive Bolkestein), le travail social est considéré comme un secteur économique qui se doit d’être concurrentiel au même titre qu’un autre. L’application de la législation européenne a eu deux impacts : la limitation du financement par subventions et la généralisation du système d’appel d’offres. Pour Rudi Wagner, éducateur de rue retraité, membre du « collectif 789 », cette situation est dangereuse :
« La qualité des services offerts par ces groupes du secteur privé est moins bonne que dans le secteur public : ils embauchent du personnel moins qualifié pour baisser les coûts des services et faire plus de bénéfices pour les actionnaires. Au Royaume-Uni en 2011, un grand groupe Southern Cross, qui gérait 750 établissements de retraite, a déposé le bilan en raison d’une mauvaise gestion de son parc immobilier. 44 000 personnes étaient concernées et des communes ont dû reprendre la gestion des maisons de retraite pour que les gens ne se retrouvent pas à la rue ! »
Pour être concurrentielles, les directions des structures ont introduit des méthodes de gestion issues du secteur privé. La première porte d’entrée a été le changement au sein des directions, comme en témoigne Rudi Wagner :
« On a vu apparaître aux postes de direction des gens reconvertis du secteur commercial, du management. »
Un constat que relativise René Bandol, directeur de l’Arsea, une des plus grandes structures alsaciennes employant près d’un millier de salariés en Alsace :
« Si depuis quelques temps on voit apparaître ce type de profil, la grande majorité des directeurs reste issue du secteur social. »
Refondation des diplômes, le travail social se requalifie
La « marchandisation » du social et la promotion de cadres issus du secteur privé sont aussi à l’œuvre dans les formations car les diplômes du social sont en pleine réforme. Un des membres du « collectif 789 » explique :
« Ces formations sont conçues pour permettre la mise en place de méthodes de management. On parle d’efficience, d’efficacité. Dans le référentiel, le mot éducation a disparu ! Le but c’est de faire des étudiants des opérateurs dociles qui soient en capacité d’élaborer des projets et des réponses à coûts réduits à des appels d’offre, tout en omettant la question du sens et du relationnel. »
Pour Rudi Wagner, cette refondation des diplômes participe d’une tendance générale à la « déqualification » du travail social :
« Pour réduire le coût des prestations, les directions embauchent des gens moins qualifiés . Par exemple, le travail avec les enfants, les personnes handicapées ou délinquantes est réalisé par des aides-soignants, moniteurs-éducateurs ou aide médico-psychologiques (AMP) et non plus des éducateurs spécialisés. Comme on réduit le taux d’encadrement en même temps, la qualité des services est moindre. »
René Bandol réfute en partie :
« Les nouveaux diplômes ouvrent le travail social en permettant à des gens moins diplômés de se former et d’obtenir des postes à responsabilité. »
Des salariés sous pression
Les travailleurs sociaux interrogés s’inquiètent de la précarisation du travail. Les départs en retraite ne sont pas renouvelés et le turn-over des chefs de service est inquiétant : un foyer de jeunes en est ainsi à son septième chef de service en deux ans. Les membres du « collectif 789 » rapportent deux cas de licenciements à Strasbourg qui ont eu lieu selon eux après des prises de positions fortes des personnes concernées. Pour Michel Poulet, travailleur social et secrétaire du syndicat départemental de l’action sociale FO 67 :
« Les méthodes de direction sont brutales : on attaque les délégués du personnel ou des délégués syndicaux, mais surtout les conventions collectives nationales sont peu à peu vidées de leur substance. »
Un point de vue que ne partage pas René Bandol :
« J’entends la question de la peur de la déqualification mais les métiers ont évolué depuis les années 1990-2000. Les conventions collectives 51 et 66 datent de ces années-là et un paquet d’avenants a été rajouté depuis. Il est temps de remettre tout ça à plat ! »
L’obsession des évaluations
Au sein des structures sont apparues des techniques de management comme « l’étude comparative » que les membres du « collectif 789 » dénoncent :
« Les associations sont mises en concurrence entre elles et même en interne entre les différents services. En prévention spécialisée, on demande à telle équipe d’intervention d’éducateurs de rue de faire autant qu’une autre sur un autre quartier en matière de scolarisation, de retour à l’emploi. Les équipes sont jugées selon les mêmes critères même si le nombre et le type de personnes concernées diffèrent, c’est absurde ! »
Pour un travailleur social dans l’hébergement d’urgence, les économies sont devenues le maître-mot :
« Les financeurs sont très pointilleux sur chaque dépense. Début septembre, on était en plein dedans : les établissements d’hébergement d’urgence ont dû rendre l’évaluation nationale des coûts. L’objectif, c’est d’évaluer le coût des prestations de services pour parvenir à calculer le coût moyen de l’hébergement. »
Un double mouvement d’évaluation s’est mis en place : des évaluations propres à chaque structure et des évaluations externes mises en place par les financeurs. Un travailleur social remarque une tendance à l’uniformisation :
« Les établissements sont évalués selon les bonnes pratiques de l’agence nationale d’évaluation du secteur social (ANESM), véritable usine à formatage. On se doit de suivre ses recommandations. Toutes ces évaluations représentent un travail administratif énorme, très chronophage. Ça nous éloigne du cœur de notre travail qui est d’être auprès des usagers, pas de remplir de la paperasse. Surtout, ces évaluations ont un coût car elles nécessitent l’embauche d’un consultant externe d’un cabinet de conseil : la facture peut monter jusqu’à 30 000 euros soit 200 journées de prise en charge facturées à 150 euros ! »
Un des travailleurs sociaux analyse:
« On ne se pose plus la question des besoins des personnes qu’on aide, on part du budget qu’on nous donne et on essaye de faire avec. On ne s’interroge pas sur le bienfondé d’une pratique mais sur le rapport qualité/prix. Et on se retrouve avec une uniformisation de la prise en charge et de l’accompagnement.»
« On fabrique des incasables »
En plus des évaluations, progressivement un financement sur objectif se met en place. Un travailleur social observe :
« Dans l’insertion, des financeurs comme le fonds social européen (FSE) soutiennent l’accompagnement vers l’emploi par rapport au nombre d’heures : ils se moquent du contenu. Le financement est conditionné à des objectifs chiffrés : il faut obtenir 65% de sorties positives. Sinon les budgets sont retoqués. Une des conséquences à terme, c’est le risque de voir une partie des subventions versées en différé : les financeurs pourront décider de verser une base de 80% de la subvention et de conditionner les 20% restants à l’atteinte des objectifs fixés. »
Mais pour Laurent Schleret, directeur adjoint du pôle aide sociale au Conseil général, cette tendance va de pair avec une extension des fonds :
« Dans le domaine de l’insertion professionnelle, le cofinancement représente une vraie aubaine : pour la période 2015-2021 : le FSE met à disposition 4 millions d’euros par an contre 1,3 million sur la période 2007-2014 ! »
En raison des impératifs de résultat, le tri à l’entrée des dispositifs commence à s’instaurer. Un travailleur social dans l’hébergement d’urgence dénonce :
« En raison des difficultés budgétaires, les associations choisissent en priorité des personnes qui ont des ressources et peuvent contribuer financièrement à leur hébergement. Autre exemple, si une personne a refusé un logement stable et qu’elle appelle le 115, elle se voit refuser l’hébergement d’urgence pendant le mois qui suit son refus. Or, légalement aucune loi ne justifie ça. Et que dire des réunions du service intégré accueil et d’orientation (SIAO) : avec 10 places d’hébergement d’urgence pour 500 demandes, forcément, les directeurs de structures se retrouvent à choisir. Chacun choisit un numéro sur la liste d’attente. Le problème, c’est qu’un directeur va dire à un autre : on a déjà eu des problèmes avec cette personne dans notre structure et le directeur va alors choisir un autre numéro sur la liste. C’est un peu le marché au pauvre. »
Un autre dénonce :
« Cela se pratique déjà dans les entreprises d’insertion. À terme, les personnes les plus en difficulté seront laissées sur le carreau. En prévention spécialisée, on nous demande maintenant de quantifier les difficultés : décrochage, conflits familiaux, toxicomanie etc. Cette approche est dangereuse car elle peut amener à choisir les jeunes : si le parcours s’annonce long, on ne pourra pas le quantifier en sortie positive. On fabrique des incasables. »
Aller plus loin
Livre : Trop de gestion tue le social – Essai sur une discrète chalandisation
Sur Rue89 : Jusqu’ici tout va bien, blog d’un travailleur social
Sur Rue89 Strasbourg : Aide aux victimes, Accord liquidée
Jamais je n'aurais pensé que je connaitrai la grandeur et la décadence.
J'ai tout perdu suite à un grave accident et le pire... mes capacités cérébrales il y a 10 ans.
Certes j'ai bien récupéré, je remarche, je repense, j'arrive à avoir des réflexions, des analyses... Mais beaucoup plus difficilement que ce qu'il n'y parait.
Je leur ai expliqué ma situation des dizaines de fois (certificats médicaux à l'appui).
Bref, en apparence j'arrive à duper des inconnus mais en réalité cela est beaucoup moins facile pour moi.
La structure dans laquelle je réside m'a fait découvrir un milieu où le social n'est qu'une infime partie très mal pratiqué (quoique le médical aussi avec un pré retraité à mi temps).
Soit les employés sont incompétents (ce n'est pas de leur faute vu qu'on demande un travail d'ingénieur à un ouvrier), soit ceux qui le sont interviennent trop rarement.
Ce sont les personnes dans le besoin qui en subissent les graves conséquences.
Il est tellement facile d'arranger la vérité face à des gents ignorants, de culpabiliser ceux qui sont réalistes, de tester l'administration quand quelqu'un ne dépend pas d'elle financièrement..
J'ai encore l'espoir que tout est question de la "qualité de l'équipage" et que je suis tombé sur le mauvais.
Je ne retenterai pas l'expérience pour m'en assuré.
Je voulais juste vous apporter mon témoignage afin de vous confirmer que vous avez raison, que cela se passe comme vous le décrivez.
Je n'ai pas de solution à vous donner, je vous amène juste une confirmation.
JEUDI 2 AVRIL 2015 à 18h30
Conférence-débat sur la refonte des diplômes du travail social
Invité : Jean-Marie VAUCHEZ, Président de l’ONES, Organisation Nationale des Educateurs Spécialisés.
Lieu: Maison des associations à Strasbourg, à 18h30.
Je ne vois pas en quoi un Moniteur éducateur serait moins légitime dans le travail avec des populations spécifiques s'il connait leurs spécificités justement.
Ce discours clivant est particulièrement détestable d'autant qu'un ME d'expérience et d'un certain âge sera largement aussi pertinent qu'un ES tout frais émoulu de son centre de formation, plein de théorie mais sans aucune réflexivité.
Cette guéguerre est totalement contre productive en regard des enjeux globaux dont il est question.
Pour ce qui concerne les autres professionnels cités. Je pense que certains pourraient largement en apprendre à des ES imbus de leurs 3 ans de formation et qui parfois ont tendance à voir le monde uniquement par le petit bout de leur lorgnette.
Tiens, sur ce coup en fait ils me font penser aux enseignants détenteurs de LA solution .
Allez bon week-end et ne lâchez rien
Néanmoins, ce qui me semble pointé c'est une déqualification. Si aujourd'hui ce sont majoritairement des ME qui sont embauchés c'est avant tout pour une question de coût. Et encore pouvons-nous nous estimer heureux lorsque ce sont des ME. Car bien trop souvent ce sont des faisant fonction qui sortent de différentes formations.
Si aujourd'hui certains s'élèvent contre la déqualification à l'oeuvre dans le travail social c'est bien parce que ce qui était fait par des éducateurs est aujourd'hui fait par des ME voire des AMP ou encore Educ sportif etc. Cela conduit à rémunérer moins des personnes pour le même travail mais là n'est pas le plus important, le plus important c'est que cela conduit à proposer aux personnes accompagnées un interlocuteur ayant moins de formation.
Sauf à vouloir dire que les ME ont la même formation que les éducateurs spécialisés, cela équivaut à un an de formation en moins, donc à une déqualification...
Bonne semaine à vous et à bientôt peut-être.
Le collectif 789 du Bas-Rhin
En2002, une association « 789 vers les états généraux du social » s'est constituée au niveau national à partir d'une volonté de prendre la parole sur la crise du social et sur la souffrance à facettes multiples des personnes accompagnées et des professionnels.Cette association nationale , présidée par Michel Chauvière et Jean-Michel Bélorgey se donnait comme horizon le fait de tenir dans toute la France des Etats généraux du social pendant une semaine en octobre 2004.
Michel Chauvière écrivait alors : « après des années de silence, le monde de l'action sociale se remet en marche et sa protestation prend de l'ampleur. Nous constatons en effet non seulement que la misère et les besoins sociaux s'aggravent, mais aussi que les conditions dans lesquelles les nombreux intervenants sociaux et les institutions sociales et médico-sociales exercent leur mission sont de plus en plus dures. Ce qui tourne le dos aux « droits des usagers »... Ce qui heurte également le sérieux et l'expérience maintenant longue de tout un secteur d'activité qui globalement fait honneur à notre pays. Cette situation ne peut plus durer. Il s'agit que... les citoyens concernés, usagers, professionnels, administratifs et autres reprennent la parole et écrivent ce qui ne va pas et fasse des propositions constructives à qui de droit... Nous serons alors porteurs de doléances et de revendications essentielles concernant la conduite des politiques et des pratiques d'action sociale dans notre pays aujourd'hui. Car il y a urgence de restaurer les conditions de la république sociale, selon les termes de notre constitution. Que nous l'appelions cohésion sociale ou solidarité nationale, il s'agit dans tous les cas de ne pas laisser se déliter davantage nos outils administratifs, associatifs, professionnels, bénévoles.... Les gens qui souffrent, ce qu'on appelle de plus en plus souvent des usagers, exigent avant tout d'être entendus par de vrais interlocuteurs. Ils exigent aussi plus de cohérence, plus de simplification et surtout une vraie volonté politique de la part des pouvoirs publics dans la transparence démocratique. Nous sommes avec eux »...
C'est par rapport à cette mobilisation nationale, et pour préparer des états généraux du social en Alsace, que le collectif 789 du Bas-Rhin a été créé en 2002.Ce collectif était au départ formé de travailleurs sociaux , de formateurs,d'usagers, citoyens, et quelques institutions du social.Cette mobilisation a abouti à la construction de Cahiers de doléances , à une semaine de conférences, de débats et d'échanges à l'ESTES et dans certains services sociaux... Le collectif constitué a encore fonctionné pendant trois ans pour tirer une conclusion de la semaine des états généraux, offrir un lieu de parole régulier pour les travailleurs sociaux, manifester publiquement certaines revendications, continuer à organiser des débats et des conférences sur l'évolution du social et du travail social.
Depuis deux ans, et parce que la situation ne s'est pas du tout améliorée depuis 2004, parce que les travailleurs sociaux et les usagers sont en grande souffrance (confère l'article de Rue 89), un certain nombre de travailleurs sociaux ont décidé qu'il était urgent de reconstituer le collectif 789 du bas Rhin pour ouvrir un lieu de parole aux professionnels qui sont en grande difficulté dans de nombreux secteurs et établissements et qui sont menacés au point qu'ils ne peuvent s'exprimer publiquement sur l'état du secteur social sans risquer d'être sanctionnés professionnellement.Le collectif a aussi pour but de réunir les professionnels pour des débats voire des actions, et de faire savoir via les médias les difficultés dans lesquelles se meuvent professionnels et personnes accompagnées ; car comme l'écrivait Michel Chauvière en 2002 : « la république sociale est en danger... Et il faut restaurer le débat public sur les conditions générales de l'action sociale des métiers du social. »
collectif789@gmail.com
faux que ça sortes, ça fait du bien...
et plus sérieusement faire remonter ces réalités sociales dans le débat, que ce soit auprès des pouvoirs publics, ou des citoyens à commencer par ceux qu'on rencontre et accompagner d'ailleurs..
Quelque part c'est sans doute aussi que le travail social a du sens et re-trouve un sens!
C'est en tant que citoyen(ne)s et salarié(e)s de l’I.M.Pro (appelé aujourd’hui S.I.P.F.P) de Corbie dépendant de l'ADAPEI 80, que nous vous interpellons aujourd'hui.
Depuis quelques années nous constatons, en tant que travailleurs sociaux, que les difficultés rencontrées par les familles pour faire entrer en structure spécialisée leur enfant souffrant de pathologie(s) sont grandissantes. Nous savons, puisque nous le vivons quotidiennement, qu'un grand nombre d'enfants et jeunes adultes se trouvent sans solution d'accompagnement faute de places disponibles et/ou d'ouverture de structures. S'il est de prime abord "concevable" d'entendre parler d'économie compte tenu de la conjoncture actuelle, il nous semble intolérable que celle-ci se fasse au détriment des effectifs des établissements. Il est en 2015 inadmissible de savoir des enfants et des familles non accompagnés dans leur souffrance.
Nous savons aujourd'hui qu'un grand nombre d'enfants (qui ne cesse d'augmenter) sont reconnus par les instances "personnes en situation de handicap" et ayant donc droit de ce fait à une prise en charge adaptée...ces mêmes enfants sont aujourd'hui encore dans le milieu ordinaire (école, collège) avec les souffrances psychologiques que cela implique et sans solution d'admission dans un établissement spécialisé. Certains ne sont pas scolarisés et au domicile de leurs parents.
Pour information, sur cette fin d'années 2014, sur l'ensemble de tous les IME de l'ADAPEI 80, 235 jeunes sont sur une liste d'attente c'est-à-dire reconnus en situation de handicap mais n'ayant à ce jour pas de prise en charge adaptée. Nous savons, selon les estimations faites, qu'en 2019 cette liste d'attente pourrait atteindre les 425 enfants (soit un délai d'attente potentiel d'au moins cinq années)...soit autant de familles en situation de détresse, incertaines quant à l'avenir de leurs enfants, petit ou grand. Parce que s'il est question de s'alarmer sur l'entrée d'un jeune enfant en IME, il faut savoir que celle-ci dépend également de la sortie d'un jeune adulte en structure adaptée à son âge.
Ainsi, un jeune de 20 ans devrait pouvoir, au titre de son handicap reconnu et de sa prise en charge passée, accéder sans difficulté à une place en secteur adulte...or, dans la Somme, nous devons faire face à une pénurie de structures de ce type.
Au vu des nouvelles décisions prises à l'heure actuelle, notre inquiétude est grande. Nous craignons voir de plus en plus de personnes, enfants ou adultes, au domicile à temps plein ou à mi-temps, obligeant ainsi les familles à arrêter de travailler (avec les difficultés supplémentaires que cela impliquera) faute de places accordées aux établissements médico-sociaux. Pour réaliser des économies, il nous est imposé de réduire le nombre de jeunes pris en charge...moins 16 jeunes entre 2014 et 2019 pour l'I.M.Pro de Corbie.
Nous souhaitons que chacun prenne conscience que dès maintenant, dans notre département, le nombre des "laissés pour compte" est réel et qu'il s'accroît de jour en jour...
Réunis par l'inacceptable de ce que nous vivons (en tant que témoins) et de ce qu'ils vivent, nous avons décidé de mobiliser les citoyens et concitoyens que nous sommes et que vous êtes et vous proposons donc de vous joindre à nous pour défendre ce qui pourrait vous paraître essentiel.
PARLEZ-EN AUTOUR DE VOUS !
Pour cela vous est-il possible de diffuser à un large public notre pétition :
https://secure.avaaz.org/fr/petition/Ministre_des_Affaires_Sociales_et_de_la_Sante_Mariesol_Touraine_Places_supplementaires_dans_les_etablissements_medico_so/?nlfOajb
Merci de bien vouloir nous tenir informer.
Collectif Places en Danger
Pour autant, les nouveaux comptables du social et leur calculette sont tout aussi détestables car ils font le jeu de la politique actuelle, dont on connait la teneur et les profondes injustices. Ni l'un, ni l'autre ne m'intéresse.
La solution doit se trouver ailleurs, hors des frontières de l'action sociale. Elle est politique et citoyenne.
Nous sommes d'accord qu'elle est nécessairement complémentaire à d'autres domaines, politique et/ou citoyenne, comme vous le suggérer. Aussi, elle est sans doute à redéfinir, en cherchant d'autres formes dans laquelle s'incarner.
Barbaboulette, pouvez vous donner plus de formes à votre idée ? Connaissez-vous des acteurs ou des collectivités qui suscitent ce type de démarche ? Cela m'importe pour spéficier mon champ d'investigation professionnelle.
Mais lorsque je dis ça, les travailleurs sociaux ne veulent pas l'entendre. "Nan, mais tu comprends", c'est pas notre job. On fait pas de politique."
Effectivement, c'est un problème politique, et il s'agit de sursaut citoyen. Mais je crois qu'il peut rester, au début, dans le cadre de l'action sociale. Alors la question est : le "cas soc' " est-il un citoyen, et l'action sociale peut elle s'apparenter à de l'action politique contre la structure qui la nourrit ?
Les évolutions sociétales, la crise économique et les crises en général ont changé la donne. Le travail social doit il épouser les changements sociaux, s'adapter ? Oui, mais s'adapter à quoi ? à une société de plus en plus dure et injuste, où l'humain est évacué pour le profit... de quelques uns. Soit on va à l'encontre des mouvements actuels, et on se fait taxer de ringard etc.. mais est-ce si ringard de défendre l'humain ? On le sait, plus on l'efface, plus il revient en force, violemment. C'est normal.
Soit on se soumet à la demande et on devient un piètre prestataire de service. Il n'y a plus de raison de former des professionnels du social.
Les associations ont signé un pacte avec le diable en s'acoquinant avec la politique. Elles ont perdu leur militantisme, leur liberté et leur raison d'être. Bien sûr, on les comprend : c'est la guerre des subventions qui veut ça ...
Finalement, il n'y a pas de grande différence entre la gestion par des managers cités ci -dessus et la gestion comptable des associations. Sauf que les premiers savent mieux faire que les seconds dans ce domaine et je crois ce monsieur quand il dit qu'il traite mieux les salariés que les associations...
Je pense que si la forme, la structure (association ou fondation privée) ne permet plus l'émergence, le changement, on peut faire germer des choses dans la pratique, en respectant ou favorisant ou encore orientant vers d'autres façons de penser, de consommer, vers d'autres alternatives. Affirmer cela suppose de croire que notre travail est un outil de transformation, pas seulement des personnes (je ne suis pas là pour les faire entrer dans le rang), mais aussi transformation de la société, de petites choses", soyons humbles. Ce qui est obtenu ou gagné pour l'un prouve une survivance et un espoir d'exister aussi pour les autres. C'est un travail de fourmi, de terrain...invisible, qui fait partir de l'expérience..
Les structures de type SCOP sont intéressantes, mais sont surtout utilisées pour les entreprises d'insertion. Mais, leur expérience pourrait être élargie.
Par ailleurs, j'ai appris dans le secteur marchand à traiter correctement les salariés. J'ai pu me rendre compte que sur ce plan, le secteur associatif est parfait à la traine, et la fonction publique apocaliptique.
Le travail social n'a pas attendu le secteur économique pour être en concurrence et l'évaluation est un bien fait quand on regarde juste 10 ans en arrière et l'approche de biens de professionnels sur des questions de citoyenneté, droit, respect des usagers. La prévention spécialisée rêve des années 80 et tente de nous faire oublier que c'est par elle dans les années 82-84 que sont arrivées les chiffres, les stats, les fiches évaluations...
Au final, deux attitudes, le "mieux avant", on pleure tous ensemble et rien ne se construit de différent. Ou, on innove, on s'appuie avec l'existant, on se forme, on arrête la paranoïa, on créé. Bien des pays autour de nous ont des contextes bien plus concurrentiels dans le social et pourtant, ils font preuve d'une vraie énergie à créer avec les personnes. J'entends le 789 et je me dis qu'ils se comportent encore comme des barons du travail social qui n'entendent pas la société qui bouge.
Une dernière chose, le peu de personnes qui veulent se former à ces métiers doit aussi nous alerter. Le travail social ne bouge pas assez vite et sous l'effet "passéiste mou" ne sait plus (pas) produire un savoir légitime, appuyé et innovant.
Que le social soit en crise, réjouissons nous. Il est temps de faire autrement, nous ne sommes pas des catéchistes du partage et des bons sentiments, on se doit de proposer un service efficient et aidant pour les personnes.
Des perdants, il y en a plein dans le secteur social et ils ressortent toujours plus perdants surtout dans un secteur en mutation où l'on recherche désormais la performance et l'on sélectionne "les meilleurs". Et ne dites pas que c'est la société, c'est le but du travail social de pouvoir permettre à chaque personne de pouvoir s'en sortir. Vous parlez de passéisme, mais c'est vous et votre idéologie qui sont passéistes. On ne dit pas qu'il ne faut pas évaluer, qu'il ne faut pas mettre en place certaines procédures nécessaires pour le bien être et la sécurité des personnes mais qu'il faut sortir de cette marchandisation du secteur social. Il faut rapprocher le secteur social et médico-social de l'économie sociale et solidaire, des valeurs de partage afin de permettre à l'individu de passer de sujet à acteur. Je vous conseille de lire Saul Alinsky "Rules for Radicals" et sa théorie de l'empowerment: celle du pouvoir d'agir de l'individu en opposition avec la vision individualiste et concurrentielle du travail social actuel.
1/ Par l'état économique, social et professionnel du secteur social ou médico-social. C'est une honte pour un pays comme la France, dont la seule crédibilité repose encore sur son système social.
2/ Par ces structures associatives qui jouent le jeu d'un système pervers et ravageur tout en se revendiquant de l'humanisme et de la solidarité.
2/ Par la vacuité des propos de ce Collectif qui mélange tout et n'importe quoi sans poser les enjeux réels qui traversent ce secteur.
Bref, c'est le Comité Invisible avec le talent en moins.
C'est une époque minable que nous vivons.
Le travail social est considéré comme un secteur économique, la Feantsa ne cessent de le crier, via des directives européennes très claires à ce sujet, et la qualité des services offerts n'a rien à voir avec celle du secteur public.
La misère est devenue un business a gérer et ces directeurs ou chefs viennent du secteur des banques, des mutuelles, du management, de la communication. Ceux qui viennent encore du social se pavanent avec leur 30 ans d'expérience... Expérience vite transformée en gestionnaire.
Faire rentrer la Fondation Auteuil à l'Estes est la preuve que les formations sont formatées pour aller dans ce sens. Mulhouse est moins atteinte avec l'ISSM pour le moment.
Et le Collectif 789 a raison de rester le plus possible dans l'ombre ! Car ces gestionnaires sont sans scrupule. Combien de TS participent aux réunions ? qui veut que remontent ce qu'ils constatent sur le terrain ?
L'argent public est détourné, les impôts vont dans les poches de la mafia du social, de l'insertion, de la formation, ... Et les politiques s'en arrangent bien, quel que soit leur bord. Le business n'a pas de frontière.
dans les institutions sociales et médico-sociales la mise en place de la gouvernance et de son cortège de démarche-qualité, de normes Iso, d’évaluations de prestations de service, les injonctions à la bientraitance engendrent des retombées des plus funestes:
* la négation de la subjectivité que ce soit chez les usagers ou les professionnels: le professionnel doit sans broncher exécuter des politiques sociales de plus en plus débranchées du terrain, qui se perdent dans des protocoles, des grilles d'évaluation etc. qui amputent plus de 10% du temps, temps qui serait plus utile auprès des usagers;
* la discontinuité des prises en charge et des actions;
* la perte du plaisir du travail bien fait, de la belle ouvrage. La négation de la relation humaine au cœur de la clinique et du travail d’équipe;
* l’écrasement des responsabilités des professionnels;
* la peur engendrée par des contrôles incessants et des contrats d’objectif inatteignables; le flicage et le soupçon entre professionnels;
* la tricherie : devant les soupçons qui pèsent sur leurs actions les professionnels se pourvoient en écrits professionnels, rapports d’activité, synthèses… inconsistants. Faut pas faire de vagues;
* la négation du travail d’équipe et de la dimension collective au profit de l’individualisme d'où une division et un cloisonnement du travail;
* une logique d’appels d’offre et de prestation de service calqués sur le commerce et l’industrie qui conduit à un éclatement des actes, une comptabilisation par grille d’évaluation
Que les politiques qui font appel aux cadres issus des écoles de management aient aussi l'honnêteté d'évaluer le coût du traitement social de cette nouvelle approche déshumanisée et dictée par la Loi du marché!
Et maintenant on parle lus de cantonales mais de départementales ;-)
pas un mot sur le travail du service social de la ville ...
Qui évoque les raisons de la disparition de ces associations dont tout le monde vantait le travail ?
Qui évoque toutes ces nouvelles associations ou groupes aux objectifs flous ?
Solidarité avec ce Collectif, 7-8-9 en espérant un réveil
Pour se faire "remplacer" par des "travailleurs sociaux" sans diplôme, sans expériences, moins chers et qui surtout ne vont pas poser de questions car trop contents d'avoir du travail....
Un climat de pression, de peur s'est installé dans ce secteur.
Le virage (évoqué dans cet article) imposé au travail social me consterne de plus en plus.
A Strasbourg, ni la CUS, ni la Ville n'a bougé pour aider ACCORD et le business social était déjà prêt à récupérer le marché. Ce fut pareil pour Sport Solidarité Insertion, les exemples sont nombreux.
Le bon travail n'est pas recherché ! Les bons résultats ne se comptabilisent pas. On additionne des chiffres, on doit respecter des quotas.
Les fondamentaux du travail social sont morts !
Aujourd'hui on gère la misère, on ne va pas la combattre, ça tuerait le business. Et c'était prévisible !
La Fondation Auteuil a évidemment la côte en Alsace, jusqu'à être présente à l'estes ; c'est tellement mieux de se décharger sur ces rouleaux compresseurs qui reçoivent des financements privés, dont on va taire les sources. L'argent n'a pas d'odeur.
Emmaus qui fait du chiffre d'affaire en millions, qui se place sur TOUS les secteurs de la misère comme Auteuil ; personne n'est choqué...
Et tout le monde applaudit quand une association ouvre une boutique, ouvre dix places, fait un truc, alors que c'est au mieux une rustine sur une plaie béante.
Pauvres travailleurs sociaux, surtout tous les précaires sous-payés, mal traités, aux CDD qui s'enchaînent, qui les enchaînent.
Les actions citoyennes se multiplient ! On aura plus besoin de vous car elles se rendent même dans les accueils !!!!
Certaines ont des intentions à peine voilées, des objectifs peu avouables ; ou êtes-vous quand on essaye de garder un oeil là-dessus et d'éviter le pire ?
Maintenant il faut passer à l'action, pas besoin d'être nombreux, car on sait bien que si les syndicats s'en mêlent, vous serez incapables de vous entendre sur un sujet aussi essentiel !
Actions simples, flash, visibles, rapides ... sur des cibles précises.
Sinon, vous pouvez aussi écrire des tracts.
Par ailleurs, le modèle caritatif démontra au XIXe que s'il a pu réguler quelques problèmes qui choquèrent la presse et la société de l'époque (stead ou booth de l'armée du salut sur la prostitution infantile dans l'Angleterre Victorienne, ligue de médecins contre l'alcoolisme en Allemagne, création du délit d'ivresse publique en France à cette époque), il n'a jamais démontré sa pertinence pour faire durablement baisser la pauvreté... tout juste jouait-il sur l'émotion collective de situations inacceptables, en imposant leur vision morale, à un problème sociale qui les dépassait.
Plus largement, et sans amalgame aucun avec les exemples cités plus haut,
revenons au bon vieux libéralisme économique social et politique du regretté XIXe siècle qui amalgamait l'infra-classem au danger ou péril social...
On verra alors refleurir des semblants de Workhouses avec leurs travailleurs "sociaux" à la sauce anglaise, fleurir de bons vieux penseurs libéraux revendiquant le progrès par l'intermédiaire du darwinisme social, sans avoir besoin de référence nationale-socialisme qui n'existait pas alors (des fois que certains pensent que l'eugénisme est un cadeau originaire des années trente)
Apprennent-ils cela à l'Estes? J'avoue que je n'en sais rien... Et on y va tout droit... avec les enquêtes d'opinion citées plus haut...
Bien à vous...
Les usagers qui s'expriment ici l'ont en tout cas compris bien avant beaucoup de travailleurs sociaux...
Un ancien travailleur du secteur "social", non qualifié à l'époque, dont la structure fut absorbée par l'un des groupes cités dans l'article dans des conditions très discutables... pensées à ceux qui y sont restés; beaucoup d'entre-eux étaient des professionnels remarquables et qualifiés...
Mais il n'en reste pas moins qu'on est tous, un peu au moins, des petits "Eichman" qui nous défendons pour tenir, en se disant qu'on ne conduit que des trains... un certain nombre d'entre eux le font avec zèle...
Pas un mot sur les structure associative qui se sont cassées la figure ces dernières années, pas un mot sur le but et le fond de ce travail, pas un mot sur leur projet associatif. Non nous avons un discours interchangeable entre deux gros drill qui se tirent la bourre pour savoir qui à la plus grosse… Pourquoi d'ailleurs ce sont les drill qui répondent ? Ils sont les où les présidents ? les administrateurs ?
Quand on fait le choix de sortir d'un modèle associatif et de rentrer dans le secteur marchand il faut avoir le courage de ses convictions et aller au bout des choses en changeant de statut. Une association c'est pas cela à la base.
Courage au 7-8-9 y'a du pain sur la planche !!
Sinon je suis partant pour une caravane chauffée, la bouffe, les aides publiques ou un appart, comme d'autres ont facilement. Sachant que pressée de vider les campements on se tape la racaille qui profite de tout, envahie les points de distribution, accapare nos points de manche et nous menace. Ca va vous péter à la gueule je vous dit pas. On en a marre des associations, on en veut pas