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Sur un balai, au fond de la piscine, en armure : cinq sports excentriques à pratiquer à Strasbourg

Quand on a fait le tour des disciplines sportives classiques sans trouver son bonheur, on peut en tester de plus originales. Voici cinq clubs qui, sous des dehors farfelus, permettent de s’éclater. Et même de s’engager en compétition.

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Sur un balai, au fond de la piscine, en armure : cinq sports excentriques à pratiquer à Strasbourg

Le Quidditch avec les Valkyries

Les seigneurs des anneaux s’entraînent le dimanche à 14 heures sur le terrain de STAPS (Document Remis)

Ces Valkyries ne chevauchent pas des chevaux ailés mais des manches à balais en PVC. Dans le Quidditch moldu, cette adaptation du sport inventé par J.K. Rowling, les équipes sont obligatoirement mixtes. Elles se composent de sept personnes qui marquent des points en envoyant le « souafle » (un ballon de volley sous-gonflé) au travers d’un des trois anneaux de l’en-but opposé.

En même temps, les joueurs essayent de mettre temporairement hors-jeu leurs adversaires à coups de « cognards » (des ballons de dodgeball). Le joueur atteint doit retourner dans son en-but avant de revenir en jeu. On gagne aussi des points en attrapant le « vif or » (une balle de tennis dans une chaussette qu’un coureur neutre porte à la manière d’une queue). Sa prise marque la fin de la partie.

Les équipes se composent de sept personnes qui marquent des points en envoyant le « souafle » (un ballon de volley sous-gonflé) au travers d’un des trois anneaux de l’en-but opposé. (Document Remis)

Un sport tactique et physique

Les joueurs évoluent sur le plancher des vaches. Alors pourquoi le manche à balais ? Laura Desquiens (n°5 sur la photo de groupe), la présidente, explique :

« Le balai sert à gêner la course et la prises de balle, puisqu’on n’a pas le droit de le laisser tomber par terre. C’est une contrainte, comme le dribble au hand ou l’en-avant au rugby. Au début, on s’emmêle un peu, mais on intègre rapidement. Ensuite, on ne pense plus qu’au plaisir d’un sport à la fois tactique et physique ».

Car au Quidditch, les joueurs parcourent le terrain ovale de 55 mètres sur 33 à pieds. Alors il faut être en forme :

« A l’entraînement on court beaucoup, on fait du fractionné. On travaille les gestes techniques, comme le placage, la réception de balle et les tirs. Et on prépare les schémas tactiques. Le jeu est très différent selon le poste qu’on tient, ce qui permet à chacun de se placer selon ses préférences. Et d’évoluer au fil des années pour renouveler son intérêt. J’ai commencé coureuse, et maintenant je suis batteuse. Et puis on joue, bien sûr ! »

Le souafle dans la main droite, le balais dans la gauche.

Ne pas se prendre au sérieux

Au Quidditch, il ne faut pas avoir peur du contact : en jeu, ils sont fréquents. Voilà pourquoi le protège-dents est obligatoire. Aujourd’hui, les Valkyries de Strasbourg sont 13, mais ne refuseraient pas du renfort pour faire tourner l’effectif en cours de match. Mais faut-il nécessairement être dingue d’Harry Potter pour intégrer le club ?

« Pas forcément. On ne passe par notre temps à se raconter les films ou à parler des bouquins. Nous, ce qui nous plaît avant tout, c’est de pratiquer ce sport en équipe. La chose indispensable pour jouer au Quidditch, c’est la bonne humeur, l’ouverture d’esprit, et ne pas se prendre au sérieux. »

Laura Desquiens, présidente de l’association Strasbourg Quidditch
Tir au but

Le sabre laser pour l’Ordre du Rhin

Un autre sport directement inspiré d’une œuvre de fiction… (Document remis)

Voici un autre sport directement inspiré d’une œuvre de fiction. Mais pour le sabre laser, pas question de communiquer sur l’univers Star Wars ou de faire officiellement référence à la saga : la maison Disney surveille jalousement les termes sous licence.

Ce qui n’empêche pas les membres de l’académie d’avoir en tête l’origine de leur hobby. On peut ainsi voir les membres du club vêtus de tenues inspirées de celles des jedi, s’affrontant dans des combats chorégraphiés, ou réalisant des katas minutieux et précis que ne désavoueraient pas Qui-Gon Jinn.

On peut voir les membres du club vêtus de tenues inspirées de celles des jedi. (Document Remis)

Trois sports en un

Dans le même gymnase, d’autres membres de l’académie portent masque, plastron, gants, genouillères et coudières. Eux pratiquent le combat sportif. Dans une arène circulaire de 8 m de diamètre, ils ont 3 minutes pour marquer jusqu’à 15 points en touchant leur adversaire.

Toutes les zones comptent : 5 points pour la tête et le tronc, 3 pour le bras et la jambes, 1 pour la main et la poignée du sabre. Attention : il est interdit de frapper d’estoc (avec la pointe).

Autre impératif, les deux combattants doivent alterner leurs attaques. Et avoir des gestes amples. Fabien Guieu (veste rouge sur les photos), fondateur et animateur du club, explique :

« En escrime classique, ça va si vite que les spectateurs ne savent qui a marqué qu’en voyant s’allumer son témoin lumineux. A contrario, dans le sabre laser il faut que les engagements soient lisibles. Sinon les arbitres ne valident pas la touche. C’est presque une note artistique. »

Même les combats sportifs doivent avoir un caractère esthétique. (Document remis)

Spectaculaire et esthétique

Si la Fédération Française d’Escrime reconnaît depuis 2018 le sabre laser, la discipline garde néanmoins sa spécificité :

« Nous sommes très attachés à l’esthétique. C’est une démarche assez proche des arts martiaux. Mais combattre dans une sorte de ballet n’empêche pas de se prendre à la compétition. »

Compétition où garçons et filles peuvent s’affronter : c’est une autre spécificité de cette escrime-là. Et le 5 avril, plusieurs des 25 membres de l’Ordre du Rhin iront à Paris disputer leur premier tournoi national. Les qualités requises ?

« Avoir envie de s’appliquer pour trouver le geste exact. Pas besoin d’avoir une grosse condition, même si c’est un avantage pour le combat sportif. Et puis savoir se laisser prendre au jeu. D’accord, nos sabres laser ne sont que des tubes en polycarbonates avec une LED de couleur, mais ça donne des combats magnifiques et impressionnants ! ».

Des katas inspirés des arts martiaux orientaux.

Le béhourd aux armes des Ostlanders

Des combattants arborant les couleurs de l’Alsace. (Document remis)

Avec le béhourd, nous sommes aux antipodes de la chorégraphie. Seule compte l’efficacité pour faite tomber l’adversaire. Héritier d’un combat « amical » du moyen-âge, le béhourd est un sport très codifié. Les armures sont soigneusement vérifiées, ainsi que les armes, émoussées.

De même, certains coups sont interdits : les coups d’estoc, les coups derrière le genou, au pied, aux parties et à la nuque. Les engagements sont brutaux, les attaques violentes. Pourtant, d’après le président Xavier Depeyre (2e rang à droite sur la photo de groupe), le béhourd n’est pas dangereux :

« Du moins quand on le pratique sérieusement, en respectant les règles de sécurité. Comme nous le faisons, notre affiliation à la Fédération Française en est la garantie. Bien sûr on s’en sort rarement sans bleu. Et on peut se faire mal, comme dans n’importe quel sport de combat. Mais moins que dans la plupart des sports de combat, grâce à notre armure. »

Deux contre un : pas très chevaleresque mais efficace.

Une passion coûteuse

L’armure est une protection de métal pesant jusqu’à 40 kg. Elle limite la vision, réduit la mobilité et requiert une excellente condition physique. Il est donc conseillé de pratiquer parallèlement un sport développant la musculature, comme la natation ou la boxe.

Cette protection a aussi un prix : jusqu’à 3 000 €. Sans compter sa maintenance.

« Cela peut paraître énorme, mais ce n’est pas plus que pour un bel instrument de musique, un VTT de compétition, ou l’entretien d’un cheval. Côté maintenance, on limite les frais en étant bricoleur, pour changer une sangle, remplacer un rivet ou utiliser une meuleuse. Et nous nous apprenons les techniques. »

Ce n’est pas le seul aspect collectif du béhourd : on s’y affronte le plus souvent en groupes de 5 à 30 combattants, voire 150 dans les rassemblements internationaux :

« Le combat de masse n’est pas une mêlée aveugle où seule la force fait la différence. On a besoin de la bonne tactique pour rompre une ligne, isoler un adversaire, l’attaquer en surnombre ».

Jusqu’à 40 kg et 3 000 € : vertige de l’armure…

Armure et troisième mi-temps.

Pas très chevaleresque, mais conforme à la réalité historique, à laquelle les pratiquants de béhourd ne sont pas spécialement attachés :

« Parmi nous, certains sont férus d’histoire, mais ce qu’on cherche en composant un équipement, c’est l’efficacité, pas l’authenticité. »

Le béhourd n’est donc pas une reconstitution historique. Autre idée battue en brèche : ses pratiquants sont bagarreurs.

« Je ne suis pas du genre à me lancer dans une baston de rue. En fait, je ne me bats qu’en armure. Pendant les tournois, une fois sortis de la lice où on s’est copieusement tapés les uns sur les autres, on fait la fête tous ensemble. »

Ce sport « viril » n’est pas réservé aux hommes : sur la quinzaine de combattants, on compte quatre femmes, les Iswiewer. Et d’autres sont espérées.

Sur la quinzaine de combattants, on compte quatre femmes, les Iswiewer

Le trollball chez les Enfants Terribles

Toujours de l’escrime, mais ici les armes sont en mousse et en latex.

Toujours de l’escrime, mais ici les armes sont en mousse et en latex. Côté sauvagerie, il y a bien la tête de troll qui donne son nom au sport, mais elle aussi est factice. Le sport, en revanche, c’est du vrai.

Sur un terrain de 32 mètres sur 18, deux équipes de cinq bretteurs, filles et garçons mélangés, se disputent la fameuse tête de troll. Objectif : l’apporter dans le camp adverse et, idéalement, la jeter dans le « puits » (un seau). La partie s’arrête au bout d’un temps ou d’un nombre de points convenus à l’avance.

Trois des équipiers tiennent une arme à une main, ce qui leur laisse la seconde pour porter la tête de troll. Les deux autres joueurs ont les deux mains occupées par une arme longue, ou deux armes courtes, et sont plus occupés à combattre. Une touche suffit à éliminer un adversaire pour la manche.

Prise de tête

Priorité à la sécurité

Julie Garçon, présidente de l’association, explique :

« Nous utilisons des règles qui évitent le duel interminable, ça joue vite. Les règles favorisent la fluidité et elles permettent de varier les tactiques. On peut tenter de passer en force, miser sur les courses pour essayer de se faufiler entre les adversaires, ou chercher à les éliminer tous. On peut mélanger les équipements. Pas le temps de s’ennuyer. On est là pour s’amuser ! »

La qualité première pour pratiquer ? L’endurance ? La coordination ? La précision ?

« Être fair-play. La priorité absolue, c’est la sécurité des joueurs. Tout contact physique est interdit, ainsi que frapper à la tête, frapper d’estoc, frapper trop fort, ou avec le bouclier. Sous peine d’exclusion, temporaire et même définitive. Et on fait très attention à ce que personne ne se sente agressé dans le jeu. En fait, on passe plus de temps à rigoler qu’à refaire le match ! »

Armes à une ou deux mains, bouclier, c’est une question de choix.

Un délire grandeur nature

Autre aspect important : le décorum. Chaque trollballeur compose sa propre tenue, souvent à partir de fripes. C’est l’occasion de faire parler sa créativité. Le plus souvent dans le style médiéval, ou heroïc fantasy. Mais pas toujours :

« Il y a des équipes post-apocalyptiques, d’autres antiques, d’autres… on ne sait pas trop quoi ! J’ai déjà vu une sorcière qui se battait avec une grande louche. Et d’autres avec des balais de Quidditch ! Ce qui compte avant tout, c’est l’ambiance. A l’entraînement comme en compétition. quand on se retrouve en tournoi, c’est la fête. Un grand délire collectif entre joueurs qui partagent la même passion. »

Cette passion, c’est le jeux de rôle grandeur nature. Les Enfants Terribles participent souvent à des évènements de ce type, en organisent, et sont régulièrement appelés pour animer diverses manifestations ouvertes à un public plus large.

Les Enfants Terribles en animation au Festival du jeu de rôle de Kaysersberg

Le hockey subaquatique avec le SHS

Haut les crosses ! (Document remis)

En sport d’équipe aquatique, on connaît la natation synchronisée, le water polo… mais il y a aussi le hockey subaquatique. Comme son nom l’indique, il se joue sous l’eau. D’après Anthony Meckert, fondateur du Strasbourg Hockey Sub, c’est la première explication de son manque de notoriété :

« Quand vous passez à la piscine, vous ne voyez pas ce qu’il se passe au fond du bassin. Comme on ne peut pas mettre tous les spectateurs dans l’eau, pour les compétitions nationales il y a des écrans qui diffusent les images en direct ».

Et que peut-on y voir ? Deux équipes de six nageurs, poussant sur le carrelage un palet circulaire de 8 cm sur 5 cm, au moyen de crosses de 30 cm, pour l’envoyer dans un but métallique de 3 m sur 12 cm. Le tout pendant deux mi-temps de 15 minutes pour les adultes.

Un palet pris de haute lutte.

Chercher les crosses

Sur les écrans, les spectateurs peuvent voir une sacré bagarre aquatique :

« Tu dois être très vigilant, vu que tes adversaires peuvent arriver de gauche, de droite, de derrière mais aussi d’au dessus ! On finit avec des bleus, parfois des foulures, mais on ne se fait pas aussi mal qu’au rugby, par exemple. »

Un sport musclé et de contact mais où tout n’est pas autorisé. Interdit de faire de l’obstruction, de jouer le palet sans la crosse, d’agripper le maillot et, bien entendu, de maintenir son adversaire sous l’eau.

Les contrevenants sont sortis pendant 2 ou 5 minutes, voire envoyés se rhabiller. Le hockey subaquatique est donc sans danger. Mais même si chaque équipe dispose de quatre remplaçants, les hockeyeurs doivent être en bonne forme :

« Il faut enchaîner les apnées, pendant lesquelles on se donne à fond. Ça nécessite de bosser sa condition de son côté. Faute d’un second créneau de piscine, on se concentre sur la technique et la tactique sans travailler la natation. »

Un fond bagarreur

Bain mixte

La maîtrise de la natation semble être la base pour participer… pourtant ce n’est pas un impératif pour rejoindre le SHC :

« On a déjà eu des gens qui savaient à peine nager, voire qui avaient peur de mettre la tête sous l’eau. Le hockey sub, ça a été une sorte de thérapie pour eux. »

Reste que la vocation première du club n’est pas le soin, mais bien la compétition, qu’il dispute avec ses équipes cadette et séniore où se côtoient hommes et femmes : la mixité est admise jusqu’à la troisième division nationale. Pour l’instant, le SHC évolue au niveau régional et apprécierait du renfort :

« L’ambiance est excellente. On fait des sorties collectives. Par exemple au karting, ou pour faire du wakeboard, un genre de ski nautique tiré par câble ».

Un sport que nous vous présenterons peut-être une prochaine fois.

Anthony Meckert : « Tu viens ? »

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