

On a dit non aux classes bilingues. (Photo MM)
« Tu ne l’as pas mise en bilingue ? » Question rituelle, à laquelle je réponds par un « ben non » gêné, me sentant obligée de me justifier ensuite. Car dans mon cercle d’amis, majoritaires sont les parents à avoir inscrit leurs enfants en classe bilingue français-allemand. Mon laïus, le voici.
Ces arguments pro-bilingue, je les entendais régulièrement avant même d’avoir des enfants. A fortiori bien avant avril 2011, date à laquelle j’ai dû répondre à cette interrogation existentielle : « Dois-je ou non inscrire ma fille en maternelle bilingue » ?
L’exposé favorable aux classes bilingues (liste non-exhaustive) : « A cet âge, les enfants sont de vraies éponges ; ce qu’ils apprennent maintenant est un acquis pour la vie », « un enfant en bilingue en maternelle aura des facilités pour apprendre toutes les langues plus tard », « en Alsace quand même, faire bilingue, c’est un vrai plus », « les classes bilingues sont les meilleures classes quelle que soit l’école », etc. Traduction : « En n’inscrivant pas vos enfants en bilingue, vous les privez de tout ça ». La culpabilité parentale, un levier imparable.
Former des super-élèves
Bien sûr, j’ai également entendu l’inverse : « Pour réussir en bilingue, il faut qu’un ou les deux parents soient germanophones », « si ton enfant a des problèmes de diction ou de vocabulaire, il va s’enfoncer en bilingue », « être en classe bilingue, c’est se croire au-dessus des autres », « les classes bilingues qui prétendent former des super-élèves, introduisent une hiérarchie au sein d’une même école », etc.
Le sujet fait donc débat ; il est même passionnel (presque autant que l’allaitement, le cododo ou la fessée). Une découverte désarmante pour le parent qui ne s’est pas encore fait sa religion en la matière et doit procéder à ce choix délicat (et irréversible) qui pèse lourd sur le cursus scolaire de son rejeton.
Ce qui nous a décidé « contre » l’inscription de notre fille aînée en petite section de maternelle bilingue à la rentrée 2011, c’est finalement que :
- nous ne parlons pas l’allemand, ni mon mari (pourtant né d’un père allemand) ni moi (anglais-espagnol à l’école… pas en Alsace, donc !),
- nous ne nous sentions pas les épaules pour accompagner nos enfants sur ce chemin, que nous estimons semé d’embûches dès le plus jeune âge,
- nous avons peur que nos enfants soient si tôt, potentiellement, en situation d’échec et que nous ne puissions rien faire sinon leur payer des leçons en dehors du temps scolaire (bonjour l’angoisse étant donné les emplois du temps déjà bien chargés des petits écoliers français !),
- nous n’avons pas eu envie de choisir l’école de notre enfant en fonction de cette option… déjà.
Bien sûr, ces raisons sont subjectives et chacun a sa sensibilité et son opinion sur le sujet. J’ai donc hâte de lire vos commentaires, qui pourront, le cas échéant, nourrir la rédaction d’un second billet sur ce thème, à peine ébauché ici.
Dérogation de secteur
Par ailleurs, pour ceux qui souhaitent emprunter cette voie « royale » dès la maternelle (difficile de prendre le train en marche au CP…), voici les infos disponibles sur le site de la Ville :
« L’enseignement bilingue paritaire français-allemand est dispensé dans certaines écoles strasbourgeoises ; la semaine se décompose en 12 heures de cours en français et de 12 heures de cours en allemand. Le cursus démarre en principe dès l’école maternelle. » Deux situations peuvent se présenter. Soit votre école de secteur propose une filière bilingue, à ce moment-là, la demande se fait directement auprès de la direction de l’école. Si en revanche, ce n’est pas le cas, vous pouvez demander une dérogation, la plupart du temps acceptée.
Les écoles proposant une filière bilingue : écoles maternelles et élémentaires Albert-Le-Grand, Branly, Brigitte, Gustave-Doré, Gustave-Stoskopf, Musau, Neufeld, Niederau, Pasteur, Saint-Jean, Saint-Thomas, Schoepflin, Stockfeld. Mais également les école maternelle C.A.Wurtz et élementaire Sainte-Madeleine.
Pour aller plus loin
Les éditions de La Nuée Bleue ont publié lundi 19 mars un livre qui aborde ce sujet. Son titre : « Bilinguisme et religion à l’école, l’Alsace divisée ». Selon l’éditeur Pascal Schweitzer, « ce livre prend des positions iconoclastes ». A lire donc.
Moi qui ai mis mes deux enfants en bilingue par soucis d'ouverture et par cohérence avec notre histoire familiale, j'ai eu le temps d'en revenir puisque mon aîné est dyslexique et qu'on a voulu le sortir du bilingue dès le CE1 (on a tenu bon... il est en 6eme bi-langue mais aurais parfaitement pu continuer en bilingue; il y aurait un article à faire à ce sujet...) Pourquoi? Parce que cet enseignement est effectivement élitiste, parce que les élèves en difficultés n'y sont pas tolérés, parce qu'il y règne un niveau de pression défiant l'entendement et parce qu'on demande aux parents d'assurer le suivi. Et c'est là où il y a encore beaucoup à dire parce que de l'autre côté il y a un déficit énorme d'enseignants en allemand, ils ne sont pas formés puisque pas diplômés ( déjà les diplômés...) Le bilingue est en vogue, les classes commencent à exploser, les moyens ne sont pas déployés. Il faut savoir que le collège Foch accueille les bilingues (et les autres) des écoles primaires du centre ville mais que le département ne se donne pas les moyens de lui fournir une cantine, ces petits bilingues de centre ville privilégiés suivent de fait souvent le cursus du privé. Les autres font ce qu'ils peuvent et essaye d'avoir une place au Fossé des treize (mais là aussi il faudrait un autre article) Il serait grand temps de travailler sur cette filière dont l'Alsace est si fière mais qui n'est pour le moment qu'une gare de triage de plus.
Le secret, bien sûr, c’est que jamais ma fille n’a entendu chez nous un seul mot contre les Allemands ou contre l’Allemagne. À dix ans elle m’a demandé ce que signifiait le mot « Boche », qu’on n’avait bien sûr jamais prononcé dans son entourage, et, de retour à la maison, regardait souvent des émissions enfantines sur la télévision allemande. Le tout est de savoir équilibrer, mais ce n’est pas donné à tout le monde.
Faites surtout la part des choses entre les avis et conseils que peuvent vous donner des parents motivés par des considérations parentales ou par des enseignants motivés par leurs expériences du terrain... et des considérations motivées par des idéologies autonomistes, indépendantistes voire pangermanistes qui participent aussi à passionner le débat en Alsace.
Il est pas là le problème (ou la solution, question de point de vue) au fond ?
j'ai inscrit mes 2 enfants dans un cycle bilingue paritaire en poussant un peu mon épouse non-alsacienne. aujourd'hui alors que mes enfants sont au collège et que mon fils devrait intégrer un 2nde abibac, elle est enthousiaste car elle reconnait aisément l'ouverture culturelle et intellectuelle qu'est un cycle ouvert sur d'autres réalités que les réalités françaises.
- une demande d'indépendance
Désolé pour les quelques fautes, je suis fatigué, je crois...
Mais quel élitisme au fait? Celui de permettre à des enfants d'apprendre plus facilement une langue? Il est prouvé que plus l’apprentissage d'une langue est tardive, plus il est compliqué de l'apprendre. Pourquoi compliquer la vie des enfants alors?
Autant essayer l'école bilingue et voir si ça marche. Si ça ne marche pas, on peut toujours lui donner une aide scolaire ou changer et mettre l'enfant dans le circuit classique.
L'éveil aux langues une solution? J'ai de gros doutes car j'ai eu le droit à cette solution, on apprends des chants, histoires, est-ce que ça aide un enfant? Globalement ça ne m'a pas vraiment aidé, on sait quelques mots mais à part ça... C'est surtout un moyen de rassurer des parents qui ont peur de mettre trop de pression à leurs enfants... Puis en primaire j'ai eu les bases, mais l'allemand étant assez mal enseigné en cours classique, c'était terriblement ennuyeux.
J'ai du rattraper mon retard (comme bien d'autres élèves) avec des courts privés et des séjours en Allemagne pour compenser le manque par rapport aux enfants ayant des parents dialectophone, suisse-allemand ou allemand. Une perte globale de temps et d'argent...
Maintenant je parle allemand, c'est d'ailleurs grâce à cette langue que j'ai décroché de belles opportunités d'emplois.
Pourquoi l'allemand en Alsace? Parce que c'est un plus pour la future vie des enfants, parce que les langues s’additionnent, une langue ne remplace pas une autre. Parler anglais, espagnol n'a rien d'exceptionnel aujourd'hui, c'est le minimum. Parler allemand c'est améliorer ses compétences linguistiques (moins de personnes qui apprennent la langue et forte demande de personnes germanistes), un peu comme le chinois, le russe et le portugais.
Le chômage dans les régions voisines en Allemagne et Suisse est de 3,9 et 4,2 %, donc vos enfants peuvent viser le niveau régional avec des offres d'emplois en abondance et aussi l'international ou cette langue va être un plus.
Après franchement apprendre une langue étrangère ce n'est pas du régionalisme, ce serait du régionalisme si on apprenait majoritairement le dialecte, c'est pas le cas ici. En Bretagne, en Corse c'est le cas, pas en Alsace. C'est de l'allemand et parfois une touche de dialecte. De plus les identités ne se remplacent pas en Alsace, elles s’additionnent, nous sommes français, alsaciens, strasbourgeois (mulhousien, colmarien, ludovicien, etc..) . L'Alsace n'est pas la Corse, il n'y a pas une demande indépendance, il existe des micro-partis qui sont régionalistes (4,98% aux dernières élections régionales)... En Corse c'est 35,74% pour les autonomistes et indépendantistes... Bref pas de quoi fouetter un chat, j'encourage les parents a essayer, de ne pas avoir peur et de s'adapter en regardant les résultats. =P
P.S. : le texte est un chouia trop long n'est ce pas... ^-^'
Pour parler en connaissance de cause (enseignante en bilingue), il s'avère que si un élève n'a pas le niveau, il est sorti du bilingue. Grosso modo, on a donc mécaniquement deux profils de classe, de plus en plus marqués au fur et à mesure qu'on s'approche du collège :
- des classes bilingues, qui contiennent quasiment tous les élèves "tête de classe" (écrémé, donc, au fur et à mesure de l'école primaire), dont les parents sont souvent très investis dans la scolarité de leur enfant (ce qui amène donc à de meilleurs résultats).
- des classes monolingues, qui, au lieu d'avoir un profil de classe "ordinaire" (locomotives/tête de classe, "ventre mou" et élèves en difficulté), n'ont plus les éléments moteurs qui font avancer le groupe (puisqu'ils sont en bilingue), mais ont en plus deux fois plus d'élèves en difficulté (puisqu'ils sont sortis du bilingue).
Voilà, cet élitisme-là.
Pourtant, en tant qu'enseignante, je ne mettrai pas mon enfant dans la filière bilingue. Pourquoi, alors qu'au fond il s'agit de classes avec les meilleurs éléments, qui ont donc globalement un meilleur niveau ?
1. Je parle allemand comme une vache espagnole. Impossible pour moi de suivre la scolarité de mon enfant pendant la moitié du temps, puisque je n'y comprends fichtre rien.
2. Tout le programme de français sur deux jours, c'est absolument indigeste (4h de français sur 6h de classe par jour). C'est du bourrage de crâne, et les élèves ont un moins bon niveau, car font des erreurs de confusion avec l'allemand (type majuscule aux noms communs, structures erronées comme "il a 20 euros payé").
3. Il y a un problème au niveau de tout le vocabulaire qui n'est vu qu'en langue allemande dans certaines matière : géographie, sciences, mathématiques...
Notre fille est inscrite en section bilingue depuis la maternelle. Elle est en CP. Elle a participé à ce choix. Apprendre dans les deux langues, c'est naturel pour elle.
Mon épouse avait des craintes, qui se sont vite dissipées. Dans notre village et canton, l'enseignement bilingue (50/50) existe de la maternelle jusqu'au lycée, et ce depuis plusieurs années. Les équipes pédagogiques sont rodées, et il n'y a aucun pression à mettre son enfant dans un cycle plutôt que dans un autre.
Nous habitons l'Alsace. Nous ne considérons pas le Rhin comme une frontière. L'allemand est la première langue native parlée en Europe. Les régions Lorraine, Alsace, ainsi que le canton de Bâle et les Länder du Bade-Würrtenberg et de Sarre offrent des moyens commens en terme de transports, culture, éduction, enseignement supérieur, recherche, etc...
Pourquoi tourner le dos à ce qui se passe dans le Rhin supérieur ?
J'ai moi-même une fille en classe bilingue en 4è , elle est à présent très autonome mais en 6è et 5è j'ai dù ingurgiter le programme d'histoire -géo en allemand , pas évident !
Pour moi la question ne s'est même pas posée (alors que l'école qui faisait du bilingue était dans notre rue, plus près que celle de notre secteur, ça aurait été une bonne excuse :-)), pour plusieurs raisons.
Et la première : pourquoi l'allemand ?? Bon, en vrai je sais pourquoi (culture locale, proximité, tout ça), mais pour moi ce n'est pas une bonne raison. C'est une forme de régionalisme, et le régionalisme m'effraie un peu je dois dire. Je me sens française avant de me sentir alsacienne (ou autre chose d'ailleurs), et en ce sens le choix de l'allemand ne fait pas sens pour moi justement, par rapport à une autre langue plus répandue par exemple.
Ensuite, pour les raisons que tu as évoquées : on ne parle pas du tout allemand à la maison, et nous aurions été incapables de l'accompagner sur ce chemin là.
Quant à l'objectif de le rendre bilingue à partir de 3 ans... bof, il aura bien le temps d'avoir des défis plus tard. De plus cela relève à mon avis (mais je me trompe peut-être) d'un "élitisme" (aller dans les meilleures classes) que je trouve un peu dur dur dès la maternelle.
Bref, le bilinguisme pour les tout petits, quand ce n'est pas une histoire familiale, je ne suis pas pour. En revanche un éveil auX langueS alors là mille fois oui !!
Mon conjoint, lui, ne se débrouille pas trop mal, sans parler de bilinguisme, il a largement le niveau pour communiquer.
Nous ne nous sommes pas mis de pression particulière. Notre fille commencera l'allemand l'année prochaine. Ca passe ou ça casse.
Nous nous sommes dit que c'était une opportunité qui lui est offerte alors pourquoi ne pas la saisir. si ça ne l'amuse pas, si elle n'accroche pas ce sera la fin de l'expérience.
Disons que j'ai suffisamment râlé contre le système d'enseignement des langues pour ignorer cette nouvelle façon d'apprendre!
Comme vous le dites, l'avenir nous dira si nous avions raison ou tord!
Comme toi j'ai à la fois eu la culpabilité de maman mais aussi celle d'enseignante (comment vous, qui enseignez en classe bilingue, n'en faites pas profiter vos filles?!)
Comme toi je ne parle pas allemand et je ne me sentais pas capable de pouvoir suivre et aider mes filles dans leur scolarité.
Non les enfants ne sont pas éponges, et non comme cela est vendu lors des réunions de présentation en maternelle, les conditions pratiques de travail ne sont pas les meilleures. Ce sont les "pires" que j'ai connues depuis le début de ma carrière : depuis 7 ans j'enseigne à des CE2/Cm1 et des CM1/CM2 qui tournent entre 25 et 28 enfants par classe selon les années.
Nous devons faire face en CM à des parents démoralisés car ne maîtrisant pas suffisamment l'allemand il ne peuvent plus aider leur enfant.
Nous avons des élèves en énormes difficultés scolaires du fait d'être en filière bilingue (le programme doit être bouclé en 2 jours au lieu de 4, difficultés vis à vis de langue qui bloquent des enfants en mathématiques car leur enseignement se fait en allemand, une autonomie et une organisation nécessaire à l’alternance d'un enseignant un jour sur deux que beaucoup n'ont pas...) , ces mêmes enfants seraient bien plus à l'aise en filière monolingue. Cela fait des années que je dis aux inspecteurs qui viennent me voir qu'il faut cesser lors des réunions de maternelle de faire croire aux parents que tous les enfants peuvent réussir en bilingue, c'est faux! Pour certains c'est vraiment les mettre dans des difficultés dont ils se seraient bien passés. Mais il y a une politique anti-élitiste à défendre... ce qui se comprend mais bon il faut aussi penser à chaque enfant et le mettre dans les meilleures conditions de réussite.
Ensuite pour les enfants qui en sont capables, dont les parents peuvent apporter un encadrement nécessaire c'est en effet une opportunité exceptionnelle. Je me régale à enseigner à ces élèves, malgré la charge de travail phénoménale d'enseigner sur trois niveaux et d'être disponible pour une cinquantaine de famille.
C'est vraiment un choix qui ne doit pas se faire à la légère, ni répondre à un effet de mode ni à des influences externes.
je suis maman d'une petite fille qui est en dernière année de maternelle bilingue et je suis perdu, quel choix prendre pour la rentrée au CP.
Nous sommes incapable de l accompagner dans cet apprentissage.Mais nous essayerons à notre niveau.
Les enseignants nous déconseille de poursuivre, ils pensent quelle a déjà des lacunes en français....et qu'elle manque de maturité..elle est née en fin d'année civil...mais notre fille s'y intéresse beaucoup, elle nous pose beaucoup de questions ( comment on dit ça en allemand ?...)
Notre choix est difficile, suivre le conseil des enseignants ou essayer ?