
Un salarié du service de maintenance technique des Dernières Nouvelles d’Alsace s’est suicidé dans l’enceinte de l’entreprise jeudi matin, en sautant du 4e étage. L’entreprise est sous le coup d’une restructuration depuis plusieurs mois.
Il avait 43 ans et s’était présenté normalement ce jeudi matin à sa réunion d’équipe à 7h30. Mais à l’issue, Régis, technicien de maintenance des Dernières Nouvelles d’Alsace (DNA) n’a pas rejoint son poste. Il s’est rendu au 4e étage du bâtiment donnant rue de la Fonderie et s’est jeté au sol.

La direction d’Ebra, le groupe de presse du Crédit Mutuel dont les DNA font partie, s’est rendue sur place et un comité social et économique (CSE) extraordinaire a été organisé entre 11h et 12h30. Une minute de silence s’est tenue dans la cour de la rue de la Nuée-Bleue à midi. Le quotidien, en deuil, ne paraîtra pas vendredi.
Les employés des DNA présents sont tous extrêmement choqués par ce suicide sur le lieu de travail, alors que l’entreprise est sous le coup d’une restructuration depuis que le Crédit Mutuel en a pris le contrôle fin 2011. Les employés ont dû d’abord subir un management autoritaire et un rapprochement forcé avec L’Alsace sous le patronage de Michel Lucas, qui était président du Crédit Mutuel et d’Ebra (décédé en 2016).
Une restructuration très dure
Depuis 2017, le Crédit Mutuel a confié la direction d’Ebra à Philippe Carli avec comme objectif le retour à l’équilibre de cet ensemble lourdement déficitaire (60 millions d’euros de pertes en 2017, 15 en 2019). La nouvelle direction s’est alors attachée à regrouper de nombreuses fonctions au sein des titres, entraînant un plan social avec la suppression de 386 postes.
En outre, une structure de support doit être créée, Ebra Services, pour externaliser les fonctions des 386 salariés qui travaillent actuellement au sein des titres. Mais cette structure n’embauchera que 286 personnes, et avec une convention collective moins-disante sur le plan social et une augmentation du temps de travail. Cette mesure doit permettre à Ebra de réaliser 9,4 millions d’euros d’économies.
Nombreuses alertes du CHSCT
Selon les premiers témoignages recueillis, le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) a depuis de nombreux mois alerté la direction sur les risques psycho-sociaux au sein des DNA, sans pour autant recevoir de retours.
Lors du CSE extraordinaire, la direction a refusé de revenir sur les restructurations en cours et a demandé aux représentants syndicaux de « l’alerter lorsqu’il y avait des problèmes. » Une phrase qui a fait bondir Nadia Slimani, déléguée syndicale de la Filpac-CGT :
« On a envoyé des quantités d’alertes depuis des mois ! Ils n’en font rien du tout. Personne ne nous écoute. C’est une nouvelle forme de mépris que vient de nous renvoyer cette direction. »
Selon plusieurs témoignages, Régis aurait laissé une lettre avant de se donner la mort. Elle a été récupérée par la police, en charge de l’enquête sur ce drame. S’il était sous pression comme les autres employés des DNA, rien ne laissait supposer son geste. Il a participé à la fête de Noël des salariés le samedi précédent, avec ses deux enfants.
La fête de Noël a eu lieu samedi et non mardi.
Merci pour votre article qui est très fidel.
Personnellement, je ne cherche jamais d'information auprès des entités concernées; cher Bill (ang. facture), vous donnez l'impression d'en représenter une...
Lamentable signature de chez Tarantino!
J adresse mes sincères condoléances à sa famille.
J ai été moi même licencié du journal l Alsace l année dernière,
ce n est pas facile tout les jours psychologiquement.
Amicalement à la famille.
Christian Burkhardt.
Une semaine culturelle et sociale de cette fin novembre-début décembre chargée, Le Misanthrope au TNS, un documentaire TV sur les 287.000 tonnes d’armes chimiques jetées et abandonnées en mer du Nord, rouillant petit à petit, qui très certainement empoisonneront d’ici peu des millions de poissons et d’individus, et puis ce film, « Les Misérables », qui prend la suite de « La haine », version 2019, et montre révolte de jeunes de quartiers contre l’autorité, la police, mais aussi contre les caïds qui les ont trahis.
Justement, cet après-midi suis allé visiter un ami en burn out dans cette nouvelle unité psychiatrique installée dans un de ces quartiers, classé QPV, zone urbaine sensible, zone de non droit,….
J’y ai retrouvé Ahmed, jeune psychotique qui me rendait visite lorsque j’y travaillais, j’y ai croisé Helga, elle aussi habitante et maltraitée par son mari, dépressive, à l’abri pour quelques temps ici.
En repartant à vélo, je suis passé par un rond-point tenu par des gilets jaunes avec des grandes affiches, « On veut du fric ».
Pour terminer, tags au cimetière de Westhoffen, manifestation contre la réforme des retraites passant sous ma fenêtre et à la Une d’un journal « Un électricien se suicide sur son lieu de travail !!.»
« Douce France, doux pays de mon enfance », où es-tu ?
Cette génération de Boomer, comme on les appelle à présent, a produit autant de voitures polluantes que de voitures brulées, autant d’inégalités que d’armes guerrières, autant de désespoir que de cocaïne, autant de délinquants sexuels que de films pornos visibles par n’importe quel collégien sur son iPhone, autant d’injustice sociale que de ripoux avec leurs parachutes dorés, autant de frustration que de pauvreté accumulée, autant de morts que de morts vivants.
Nous fabriquons de la haine à tour de bras, et je la vois de plus en plus souvent dans le regard de nos enfants désemparés.
Je sors de cette semaine tel un zombie, avec l’impression sourde de n’avoir rien transmis de bon pour les générations à venir.
A quoi bon, comme dirait mon voisin, revenu de tout, revenu de solidarité active.
Malgré tout, je crois que je ne vais pas faire comme Alceste, qui quitte la société à la fin du Misanthrope. Oui, je ferai mieux que fuir ce monde, je veux une autre Histoire, sans pactole et sans pétrole, et je veux bien la commencer avec celles et ceux qui ont décidé de ne plus alimenter toutes ces fabriques de haine !
Louis Schalck
5 décembre 2019
Laurence Rey (ancienne journaliste DNA)