
Déchirés entre le choc des attentats et leur douleur face aux caricatures du prophète Mahomet, les Français musulmans s’interrogent sur l’opportunité de punir l’insulte aux religions. La question a révélé les divisions au sein même du Conseil régional du culte musulman d’Alsace et dans les familles, la diversité des pratiques de l’islam en France.
Au lendemain de la tuerie de Charlie Hebdo, les représentants musulmans d’Alsace affichaient leur unité contre la barbarie et le détournement de l’islam par les terroristes. Puis l’émotion des attentats a fait place au malaise alors qu’une partie des musulmans se désolidariserait du slogan « Je suis Charlie », à cause des satires à répétition sur l’islam de l’hebdomadaire. Difficile pour eux de supporter sa liberté d’expression.
Signe que la question est brûlante, elle a déclenché la semaine dernière un cafouillage inédit au sein du Conseil régional du culte musulman (CRCM) d’Alsace. La veille de l’attentat contre Charlie Hebdo, le 6 janvier, Abdelhaq Nabaoui, vice-président du CRCM et délégué de l’union des organisations islamiques de France (UOIF), s’était rendu à Paris avec les représentants des cultes reconnus d’Alsace pour défendre le régime local des religions d’Alsace-Moselle devant l’Observatoire de la laïcité. Cet organe de conseil du Premier ministre doit prochainement rendre un avis sur ce statut local.
À l’occasion de l’audition, les représentants catholiques, protestants, juifs et musulmans de Strasbourg s’étaient alors dits favorables à l’abrogation du délit de blasphème, qui existe toujours dans le droit local. Dans leur déclaration commune écrite par les responsables chrétiens, ils le jugeaient « largement tombé en désuétude ». Cette proposition n’est pas passée inaperçue à la lumière des tragiques événements qui ont suivi.
Au lendemain de la grande marche républicaine, Abdelhaq Nabaoui confirmait à l’AFP qu’il se rangeait bien « sur la même ligne » que les cultes reconnus d’Alsace au sujet de l’abrogation du délit de blasphème. « Ce qui nous importe c’est la liberté d’expression », ajoutait-il. Aussitôt publié, aussitôt regretté. Dans l’équipe strasbourgeoise du CRCM, ces propos tranchés suscitaient l’embarras alors que la question du blasphème n’avait encore fait l’objet d’aucune discussion en interne.
Le président du CRCM pour l’interdiction du blasphème partout en France
Depuis Mulhouse, le président du CRCM, Eyup Sahin, du mouvement islamique conservateur d’obédience turque Millî Görüs, se fendait d’un communiqué pour clore tout débat. Alors que Charlie Hebdo s’apprêtait à publier en couverture une nouvelle caricature du prophète Mahomet, Eyup Sahin demandait aux autorités de faire interdire la parution du dessin. Selon le même communiqué, le CRCM ne se prononçait pas pour l’abrogation du délit de blasphème en Alsace-Moselle, mais souhaitait au contraire « son extension à tout le territoire national ».

Abdelhaq Nabaoui et Eyup Sahin côtes à côtes lors du rassemblement place de la République le 9 janvier. (Aline Fontaine / DR)
En fin de semaine, une longue explication entre les responsables du CRCM n’a pas permis de dépasser leurs divergences. L’institution a finalement fait savoir le 17 janvier qu’elle laissait la question ouverte :
« Le temps n’est pas venu de modifier nos règles de droit, le temps est venu de comprendre comment l’innommable a pu arriver dans notre pays. Dans un esprit d’apaisement, et compte tenu des nombreux chantiers dans lesquels il est engagé, le CRCM Alsace se réserve le temps de la réflexion, sur le sujet sensible et complexe de l’abrogation de cette disposition du Code pénal local. »
« Trouver un juste milieu »
Pour le troisième homme du CRCM, le vice-président Murat Ercan de l’organisation turque Ditib, la sortie d’une nouvelle caricature de Mahomet n’était pas opportune :
« Ce n’est pas très intelligent dans cette période où nous avons besoin de fraternité et d’union. Bien sûr que nous devons défendre la liberté d’expression et de la presse. Mais celle-ci doit être responsable. Il faut qu’on essaie de se mettre à la place des uns et des autres. Pour ceux qui réfléchissent avec leurs émotions et ne regardent pas le message, cette publication présente le prophète qui s’identifie à Charlie Hebdo. Ce sont des cultures différentes et il faut que l’on arrive à trouver un juste milieu. »
À la grande mosquée de Strasbourg, gardée jour et nuit par trois militaires en armes, le président Ali El Jarroudi déplore la tournure du débat autour du blasphème.
« Toucher le prophète nous a tous vexés. Mais l’islam est une religion de sciences. On se devait de répondre aux caricatures et aux textes par des textes et par des caricatures. Je regrette que les intellectuels musulmans ne l’aient pas assez fait. »
Pour le Marocain, l’attitude de Charlie Hebdo a déçu la solidarité des musulmans :
« Charlie Hebdo a une liberté d’expression très ouverte sur l’islam. J’aurais souhaité qu’ils évitent de blesser à nouveau les musulmans dans leur dernière parution, d’autant plus qu’il y avait un soutien fort de toute la communauté musulmane. »
« Les journalistes n’ont rien compris »
Au centre commercial du Baggersee, l’amertume est palpable chez les musulmans qui acceptent de parler, tout autant choqués par l’attentat contre Charlie Hebdo, que blessés par les caricatures du journal satirique. Nadir, 35 ans, se désole de la nouvelle caricature du prophète qui ne fait qu’attiser les tensions :
« Les journalistes de Charlie Hebdo n’ont donc rien compris. Regardez les manifestations dans les pays arabes. Il y a eu des morts. Ils sont irresponsables. Avec ça moi je crains de nouvelles catastrophes. Il faut comprendre qu’une caricature du prophète, pour un musulman, c’est pire qu’une insulte faite à sa propre mère. On ne devrait pas toucher aux religions. »
« La liberté d’insulter »
Pour Eshgueraï, mère de famille voilée de 26 ans, la nouvelle caricature de Charlie Hebdo ne fait qu’ajouter au climat de rejet décomplexé qu’elle vit depuis deux semaines :
« Dans un rayon, j’ai frôlé une dame avec mon chariot. Je me suis tout de suite excusée, mais elle m’a insultée. Puis elle a dit à son petit-fils de se dépêcher d’avancer avant que je les fusille. Elle a dit ça devant mes deux enfants. »
Eshgueraï, comme beaucoup de musulmans rencontrés, ne connait pas l’existence d’un délit de blasphème dans sa région mais elle l’appelle de ses vœux. Pour elle, la liberté d’expression invoquée partout depuis les attentats a bon dos :
« La liberté d’expression, c’est pouvoir critiquer le gouvernement quand on n’est pas d’accord. Ces caricatures, ce n’est pas de la liberté d’expression, c’est de la liberté d’insulte. »
Youssef, 41 ans, tente quant à lui de prendre du recul même s’il se dit « déchiré » :
« En tant que français, je suis touché par ce qui s’est passé, et en tant que musulman je suis aussi touché par les caricatures. Mais nous sommes dans un pays libre. La liberté d’expression même si elle peut faire mal, c’est la démocratie. Charlie est libre de publier ce qu’il veut. Et nous musulmans devrions accepter que ce n’est que de l’humour. Après, c’est à chacun d’être intelligent pour ne pas tomber dans le piège de l’autre. Je pense qu’aujourd’hui, les musulmans sont tombés dans le piège de Charlie et que Charlie est tombé dans le piège des terroristes. »
Né en France de parents marocains, Rida, 24 ans, est « un peu offensé » par les caricatures de Mahomet mais passe vite à autre chose :
« Mes parents m’ont appris que ce qui relevait du sacré ne devait pas être moqué. Bon, mais voilà… Charlie Hebdo est un journal contre les religions, ça a toujours été le cas donc quand ils caricaturent, ça me fait soupirer mais je ne vais pas militer pour l’instauration d’un délit de blasphème. Je suis pour la liberté d’expression. Je suis beaucoup plus choqué par les messages racistes que je lis sur les réseaux sociaux, accolés au slogan “je suis Charlie”. Quand on voit ce qui se passe en Allemagne (des manifestations publiques d’opposition à l’islam, ndlr), voilà qui m’inquiète beaucoup plus que des caricatures. »
L’interdiction du blasphème, pour prévenir la violence
Nilufer, gérante d’une épicerie halal à la Meinau, hésite à donner son avis sur les événements, par peur de choquer :
« Ce qui est passé est passé. Ici personne ne parle de ça, tout le monde a peur. Les musulmans sont fragiles et les caricatures ont blessé beaucoup d’entre eux. Les journalistes n’auraient pas dû dessiner et ils n’auraient pas dû mourir. » Pour la quinquagénaire, le massacre aurait pu être évité : « Si le dessinateur avait été puni par la loi, il ne serait pas mort. »
À la mosquée de la Meinau, l’imam Saliou Faye tire à mots couverts les mêmes conclusions que la commerçante :
« La liberté doit avoir des limites pour sa propre protection. Je suis pour une interdiction du blasphème qui limiterait les dégâts. Il y a des lois contre l’antisémitisme et le racisme, il doit y avoir des lois qui protègent de l’islamophobie. Pas pour protéger la religion, mais pour protéger la vie humaine. On condamne les attentats sans réserve mais on n’est pas Charlie, pour une simple raison : on est pour le respect, on est pour l’ordre public. »
L’imam temporise cependant :
« Les nouvelles caricatures sont un peu différentes des anciennes. Dans celle où le prophète déclarait “c’est dur d’être aimés par des cons”, les musulmans se sentaient directement insultés. La dernière couverture est moins agressive et pour moi elle n’a rien à voir avec le prophète, ni dans le message ni dans le dessin. Je ne me donne pas de temps à gaspiller avec ça, c’est inutile et futile. »
« Admettre d’avoir un cerveau français »
À la mosquée du Neuhof, le conférencier Mohamad Sbat invite les jeunes du quartier à suivre l’exemple du prophète Mahomet lui-même qui de son vivant a beaucoup été moqué sans jamais se défendre. Pour le jeune homme, la meilleure réponse est d’ignorer le journal :
« À propos de ceux qui vous moquent, le prophète a dit “ne vous asseyez pas avec eux jusqu’à ce qu’ils changent de sujet”. Charlie Hebdo n’a pas de message. Ce n’est qu’une petite publication, le prix de l’entreprise n’était que de 200 000 euros en 2006 lors de sa vente. Elle n’en vaut pas la peine. »
Comédien, Fayssal se définit comme un athée, « musulman de culture ». Pour lui, cette affaire de caricature doit surtout interroger l’islam et la France dans le monde :
« Il faut bien voir que la laïcité à la française, c’est un beau combat que je soutiens totalement, mais à l’échelle du monde, la France est seule à le porter ! Partout ailleurs, les pays ont des religions d’État et les populations sont croyantes. Donc c’est à l’islam de s’adapter à la France mais ça prendra du temps car les musulmans n’ont pas la culture revendicative. Moi même, il m’a fallu du temps pour admettre que j’avais un cerveau français. »
Aller plus loin
Sur Rue89 : Peut-on représenter le prophète Mahomet ? (tribune)
Sur Rue89 : L’humour arabe comme étendard démocratique (tribune)
Sur Orient XXI : Checkpoint Charlie, un trait d’union à sens uniqueSur Rue89 Strasbourg : aujourd’hui tous Charlie, mais demain ?
Sur Rue89 Strasbourg : tous nos articles sur Charlie Hebdo et ses implications
et c'est tant mieux , on respire mieux
Le communisme et le nazisme.
Bien vu....
mais encore faut il limiter les références à notre beau continent!
ou oublier le mot genocide
Le M’PEP appelle à signer la pétition lancée par le CLR (Comité laïcité république), ÉGALE (Egalité, Laïcité, Europe) et l’UFAL (Union des familles laïques).
Le 21 janvier 2015.
En France, cette liberté fondamentale implique le droit de critiquer les religions, et de les tourner en dérision. Ce que les dogmes religieux appellent « blasphème » est relatif aux seuls adeptes d’un culte donné, et ne saurait donc s’appliquer à l’ensemble des citoyens. Le blasphème est non seulement inconnu du droit de la République, mais légitime et autorisé. Seules sont interdites et sanctionnées pénalement les attaques contre les personnes ou les groupes de personnes, quand elles revêtent un caractère diffamatoire, raciste, antisémite, xénophobe, ou discriminatoire.
Or nous rappelons qu’il subsiste encore, dans les départements d’Alsace et la Moselle, un « délit de blasphème », vestige dans le « droit local des cultes » de l’occupation bismarckienne de 1870. Il est toujours prévu et réprimé par l’art. 166 du droit pénal local.
Les associations laïques soussignées exigent l’abrogation immédiate, par voie législative, de ce délit de blasphème dérogatoire aux lois de la République, et à jamais lié à la justification prétendue de meurtres barbares.
Une telle abrogation ne porterait aucunement atteinte au libre exercice des cultes, puisque celui-ci est garanti partout en France par la Constitution et la loi du 9 décembre 1905. Cet acte hautement symbolique nous paraît un devoir minimal du Parlement et du Gouvernement français, à l’égard de la mémoire des victimes de la liberté d’expression, saluée le 11 janvier par des millions de personnes. Mettre fin à cette dérogation locale potentiellement meurtrière aura en même temps la valeur d’une réaffirmation, pour l’ensemble du territoire, de la portée des libertés républicaines.
Pour signer la pétition :
http://www.m-pep.org/spip.php?article3905
Charlie Hebdo n'est pas un journal de satire....
Lisez un peu la définition!
Depuis quand les religions font chier les gens??????
J'ai cru que les laiques étaient des gens normaux jusqu'à présent ou je me rend compte que
LAIQUE= RELIGION!
La laïcité n'est assurément pas une religion. Depuis des années, la laïcité a été attaquée, directement ou sournoisement. On parle désormais de « fondamentalisme » ou « d’intégrisme » républicain, on ajoute « ouverte » à la laïcité sous le mauvais prétexte qu’elle serait « fermée ».
La pensée laïque ne méprise pas les modes de représentation portés par les discours religieux mettant en jeu les forces de l’ « autre monde » (les dieux), mais leur dénie toute légitimité pour définir le lien politique dans la cité, notamment lorsqu’ils contestent les bases scientifiques du savoir.
La laïcité est un instrument d’émancipation. L’individu peut alors s’extraire de sa détermination sociale : il ne se réduit pas aux caractéristiques hasardeuses et subies de son origine familiale, ethnique, religieuse ou de genre.
La laïcité, dans son principe même, est une arme très efficace, qui prémunit notre société contre une dérive majeure confirmée par l’histoire : la tendance à l’invasion de l’autorité publique par le religieux.
L’idée laïque a toujours permis de lutter contre une mainmise de l’ordre religieux et moral sur la loi qui se traduit inévitablement par une oppression arbitraire sur la liberté de conscience et d’expression, sur les religions minoritaires et sur la condition féminine.
La loi de 1905 donne à la laïcité un contenu positif : la garantie de la liberté de conscience.
L’Etat laïque permet à tous de choisir, ou non, une option spirituelle et religieuse, d’en changer ou d’y renoncer.
Les religions ont pris une place exorbitante dans l’espace public, alors que les athées et les agnostiques, objectivement plus nombreux qu'aucun "groupe confessionnel de croyants", sont ignorés.
Enfin, sur ce que vous écrivez :
- pour ma part, je ne confonds pas la question de la laïcité ni celle du délit de blasphème avec celle de Charlie, qui pour toutes sortes de raisons m'a indisposé depuis longtemps mais qu'heureusement personne ne me force à lire. Arrêtons de tout ramener à Charlie.
- je ne comprends pas quelle "définition" vous demandez de lire.
- c'est très étonnant que vous sembliez affirmer que les religions ne font "pas chier" les gens. Avez-vous vu ce qui arrive aux athées en Egypte, au Qatar ou en Arabie Saoudite, en ce moment ?
Vous n'en avez pas marre de colporter la bien pensance qui est responsable du KO dans le monde?
La laïcité n’est assurément pas une religion. Depuis des années, la laïcité a été attaquée, directement ou sournoisement. On parle désormais de « fondamentalisme » ou « d’intégrisme » républicain, on ajoute « ouverte » à la laïcité sous le mauvais prétexte qu’elle serait « fermée ». HEIN???
quel rapport entre religion et guerre du pétrole?
Syrie, irak, lybie, ukraine, etc..
Quel rapport entre religion et la crise économique? wall street?
Quel rapport entre religion et pauvreté, chomage ?
- c’est très étonnant que vous sembliez affirmer que les religions ne font « pas chier » les gens. Avez-vous vu ce qui arrive aux athées en Egypte, au Qatar ou en Arabie Saoudite, en ce moment ?
VOUS HABITEZ EN FRANCE NON?
quel rapport entre egypte et france???????
La laicité à permis de mettre en prison des gens pour des tweets sur internet!
Vive la laicité et la liberté d'expression
Au faite, je suis un homme Athée pour info ;)
Alors, la religion ne "fait pas chier les gens" ?
Vous aurez le choix des sources pour documenter, mais allez, au hasard, prenez dans Marianne :
http://www.marianne.net/martinegozlan/1-000-coups-de-fouets-10-ans-de-prison-pour-un-blog-c-est-l-Arabie-Saoudite_a107.html
Comprenez-vous qu'en effet la laïcité dite "à la française" est hyper minoritaire dans ce monde, que plein de gens souffrent et meurent de ne pas en bénéficier, et qu'elle se meurt en France si des citoyens comme vous veulent ignorer ce qu'elle signifie ?
Pour le reste, je dois malheureusement vous dire qu'en l'état il est juste impossible de discuter car je ne comprends pas du tout de quoi vous parlez, c'est une question d'énonciation. Mélange de citations sans guillements, de "???????" incessants, de questions décousues, sans articulations ni argumentation.
Cela ne peut produire que des dialogues de sourds.
Je dois travailler.
Passez un bon après-midi.
Nous sommes en France, pas au Arabie Saoudite!
Pourquoi confondre religion et état religieux?
Vous n'êtes pas très honnête.
Notre pays "laïque" fait des guerres pour les droits de l'homme et la liberté d'expression ^^
Détruit des pays, armes de rebelles religueux en syries, en irak, au levant...
Pourriez-vous un peu être honnête et rester en France dans vos idées :)
Quel rapports entre ISLAM ou RELIGIONS et les derniers événement de Charlie??
Le sacré est de l'ordre de la conviction intime de ce qui est sacré et ce qui ne l'est pas. Je n'admettrai jamais que qui que ce soit vienne me dire ce que je dois considérer comme sacré si, auparavant, je n'ai pas déclaré mon adhésion et ma confiance envers l'autoirité qui serait censée le faire. En d'autres termes, si je suis musulman, je ne vais pas apprendre à un chrétien ce qu'il doit ou non considérer comme sacré. Si je suis catholique, l'Eglise catholique me dis ce que je dois considérer comme sacré, mais si je suis protestant, j'ai encore une autre approche. Etc.
Dans tous les cas, je n'ai pas à imposer mon sens du sacré à qui que ce soit.
La loi, en France, ne fait pas référence à un ordre divin, quel qu'il soit et c'est heureux. Ainsi, la loi n'a pas à définir le blasphème, c'est à dire fixer ce qui est sacré et ce qui ne l'est pas. Car le danger alors serait par exemple de privilégier une religion au détriment d'une autre. La loi de la République n'a pas à se mêler de religion, c'est une attitude qui, certes, reste française, mais je ne peut m'empêcher de penser que si d'autres pays n'adhèrent pas à ces principes, c'est parce qu'ils sont encore embourbés dans des archaïsmes : monarchie, omniprésence de l'Eglise catholique, surdose d'Eglises en tous genres, mélange nuisible entre religion et politique, etc...
Elle dit deux choses :
1. De nombreux Musulmans ont de la peine qu'ont ait tué en leur nom. Ce sont eux que représente le Prophète la larme à l'oeil. C'est un remerciement et une manière simple de dire "on sait que vous n'êtes pas tous des assassins".
2. L'interdit religieux de représentation du Prophète ne nous concerne pas, nous ne sommes pas musulmans. Merci d'en tenir compte.
Bref, si vous persistez à être choqué par cette couverture, c'est soit que vous n'êtes pas un Musulman à qui le meurtre répugne, soit que vous n'êtes pas un citoyen français que la loi, laïque, contraint de ne pas imposer ses préceptes religieux à qui n'en veut pas.
Personne n'est obligé d'ouvrir et de lire Charlie (d'ailleurs pas grand monde le lisait, comme on sait), alors en quoi sa simple existence est-elle si intolérable ? Surtout pour des Yéménites, des Nigérians, ou des Afghans, qui même s'il tombent sur un dessin via internet, ne peuvent pour la plus part pas en lire les légendes et les bulles en V.F. !
Personnellement je n'ai ni Bible, ni Coran, ni Thora, ni traité de confucianisme sur ma table de nuit, parce que je n'ai rien à voir avec les idées que véhiculent ces écrits d'un autre temps.
Ainsi le matin je peux commencer ma journée sereinement... sans avoir envie de tuer tout le monde !
l'usage de ce mot dans les medias me fait penser à celui fait par les gamins de "blamer" : me suis fait blamé etc..
Dans ma culture blasphémer était outrager volontairement et gravement une personne ou un symbole connu et respecté par la majorité des TEMOINS DU BLASPHEME..
Les pratiques de certaines sectes, groupuscules etc taguant, brulant , urinant sur des figures de cultes chretiens , musulmans , juifs etc...ou simplement nationaux comme des monuments aux morts, cimetières etc...sont des atteintes claires à la dignité ...au respect dû ...à l'HUMAIN en nous tous...donc à mon sens des blasphèmes.
Elle aurait pu avec l'aide de calligraphes émérites qui ne manquent pas en France (Calligraphie Arabe Vivante de Hassan Massoudy par ex) retrouver le dessin "écrivant " " Dieu est clément ou compatissant" en forme de visage pour donner des leçons à ceux qui ne connaissent pas leur propre culture.
La diffusion exceptionnelle et internationale de ce numéro "in memoriam" méritait qu'on y attache un soin particulier.
Si votre question est de dire peut on blasphemer en marmonnant dans le secret de sa barbe en disant Spaperlotte ou sacré non de D...! ? non a l'evidence
Pour le reste vous devez être jésuite parce que dire que la une d'un journal en devanture de tous les kiosques reprise par tous les medias ....resterait confidentielle et libre d'accès et de provocations...!!!
hum hum....
accompagné d'une illustration superbe que je vous laisse découvrir
Citation
[U]ne image, dans le fond, c’est comme une bouteille à la mer. J’écris un message que je mets dans une bouteille, que je lance à la mer. Elle peut arriver chez quelqu’un qui ne peut pas lire mon écriture ou chez quelqu’un qui me lit mais qui ne comprend rien à ce que je lui dis.
- Hassan Musa [1] http://postcolonialist.com/arts/poetique-du-tableau-offert-entretien-avec-hassan-musa/
Photo Source: hassanmusa.com
l'equipe de Charlie pourrait inviter ce Hassan Musa ...elle vendra sa prochaine publication à la rubrique beaux-arts!
Quel magnifique principe que la liberté d'expression. N'est ce pas M. Sahin?
Au passage il serait peut-être le temps de passer directement du 19e au 21e siècle en Alsace en tournant définitivement la page du Concordat, statut obsolète qui fait la part trop belle aux communautaristes de tous poils.
http://www.bas-rhin.gouv.fr/content/download/4693/33328/file/Recueil%20sp%C3%A9cial%20DROIT%20LOCAL%20du%2029%20ao%C3%BBt%202013%20-%20publication%20traduction%20lois%20et%20r%C3%A8glements%20locaux%20maintenus%20en%20vigueur%20par%20les%20lois%20du%201er%20juin%201924%20.pdf
Il n'y a donc pas de délit de blasphème opposable...
Mais ce texte allemand avait peut-être été traduit lors d'un autre arrêté de traduction, plus tôt, non ?
En France, pas de loi sans texte, donc si tout le monde dit qu'il y a une interdiction du blasphème en Alsace/Moselle, c'est soit qu'il s'agit d'une légende urbaine, soit qu'il y a un texte quelque part, librement consultable par les citoyens dans une des langues officielles de la République. Mais où ?
4e tentative pour vous passer une info, grâce aux recherches d'un ami, j'espère que cela vous éclairera comme moi :
En Alsace-Moselle le blasphème est un délit encadré par l'article 166 du droit local hérité de la période bismarckienne. Une traduction (non officielle) se trouve sur http://www.legirel.cnrs.fr/spip.php?article528
Dans la pratique, l'article 166 n'a jamais été retenu par un tribunal.
On trouve une justification ici : https://groups.google.com/forum/#!topic/fr.lettres.langue.francaise/hiUBltrIR00 :
[...] suite à un arrêt du Conseil Constitutionnel de 2012 dans une
affaire d'inscription obligatoire à la Chambre des métiers:
« Considérant que les dispositions contestées, rédigées en allemand, n’ont pas donné lieu à une publication de la traduction officielle
prévue par les lois du 1er juin 1924 susvisées ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article 2 de la Constitution (…) : « La langue de la
République est le français » ; que si la méconnaissance de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi,
qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, ne peut, en elle-même, être invoquée à l’appui d’une question prioritaire
de constitutionnalité sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution, l’atteinte à l’objectif de valeur constitutionnelle
d’accessibilité de la loi qui résulte de l’absence de version officielle en langue française d’une disposition législative peut être invoquée à
l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité ; que, toutefois, compte tenu de la déclaration d’inconstitutionnalité
prononcée au considérant 11, il n’y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel d’examiner le grief tiré de la violation de ces exigences constitutionnelles;"
Cela semble logique. La langue de la République étant le Français, les seules lois valides sont celles écrites en Français. Donc le gouvernement s'est dépêché de traduire les lois locales en 2013. Ici la traduction : http://www.bas-rhin.gouv.fr/content/download/4693/33328/file/Recueil%20sp%C3%A9cial%20DROIT%20LOCAL%20du%2029%20ao%C3%BBt%202013%20-%20publication%20traduction%20lois%20et%20r%C3%A8glements%20locaux%20maintenus%20en%20vigueur%20par%20les%20lois%20du%201er%20juin%201924%20.pdf
On constate que l'article 166 n'y figure pas. Il est donc inapplicable.
Ou du moins, tant que la charte des langues minoritaires et régionales ne sera pas généralisée. A noter que dans le Bas-Rhin, deux communes l'ont déjà adoptée...
Voilà et comme je ne suis pas raciste ni obscurantiste je ne peux croire que j'ai vexé quiconque en donnant mon opinion !