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Dans le Grand-Est, la seconde vague de Covid-19 a fait autant de morts que la première

Les mesures nationales et un couvre-feu anticipé dans plusieurs villes ont peut-être évité aux hôpitaux du Grand-Est d’être saturés par la reprise de l’épidémie de Covid-19. Mais malgré un pic moins intense, le bilan humain vient de dépasser celui de la vague de printemps. Rue89 Strasbourg fait le point en graphiques.

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Dans le Grand-Est, la seconde vague de Covid-19 a fait autant de morts que la première

Entre le 19 mars 2020 et le 8 février 2021, 7 645 décès imputés à la Covid-19 ont été comptabilisés dans les hôpitaux du Grand-Est, selon Santé Publique France. Une accalmie de plusieurs mois a succédé à la « première vague », mais depuis octobre, un « plateau » tout aussi meurtrier s’est installé. Au printemps, la centaine de morts quotidiens a été dépassée au plus fort de la vague tandis que depuis l’automne, le nombre de morts oscille autour de quarante par jour.

Dans le Grand-Est le plateau d’automne a fait autant de morts que la vague du printemps (Visualisation RDS / Rue89 Strasbourg).

Nous avons distingué deux périodes épidémiques, de durée équivalente. La première du 19 mars au 14 juillet 2020, la seconde du 13 octobre 2020 au 8 février 2021. D’un côté 118 jours et 3 728 morts, de l’autre 119 jours et 3 729 morts de l’autre. Un bilan équivalent, avec cependant des disparités entre les départements peuplés et moins peuplés.

Moins de morts en Alsace-Moselle

Entre le 19 mars et le 14 juillet 2020, environ deux morts sur trois dans le Grand-Est ont été enregistrés dans un hôpital d’Alsace ou de Moselle. À l’automne, cette proportion n’était plus que d’environ un mort sur deux comptabilisé dans un hôpital d’Alsace ou de Moselle. La seconde vague dans ces trois départements est sensiblement moins létale, avec 600 décès de moins, de 2 402 à 1 802 personnes.

L’influence des trois principaux départements a diminué à l’automne (Visualisation RDS / Rue89 Strasbourg).

Le cas du Haut-Rhin est particulier, avec le rassemblement évangélique de Mulhouse qui avait été un évènement de super-propagation en février 2020. La flambée épidémique a démarré avant la publication de statistiques détaillées par Santé Publique France. Ainsi, 872 décès covid-19 ont eu lieu dans un hôpital haut-rhinois, entre le 19 mars et le 14 juillet. Pour la deuxième vague, c’est moitié moins : 415 entre le 13 octobre et le 8 février 2021.

Dans le Haut-Rhin, la mortalité hospitalière a diminué de moitié pendant l’automne (Visualisation RDS / Rue89 Strasbourg).

Dans le Bas-Rhin, en revanche, le « plateau » d’automne et d’hiver s’approche du bilan de la « première vague » : 579 décès du 13 octobre au 8 février, contre 677 au printemps. Compte tenu du niveau soutenu d’hospitalisations et de réanimations, ce total devrait s’alourdir en février et mars 2021.

Dans le Bas-Rhin, un plateau conséquent à l’automne (Visualisation RDS / Rue89 Strasbourg).

La Moselle est devenue le département du Grand-Est comptabilisant le plus grand nombre de décès covid-19 à l’hôpital, avec 1 704 morts entre le 19 mars 2020 et le 8 février 2021. Très proche du bilan haut-rhinois lors de la première phase épidémique avec 853 morts, la Moselle a connu ensuite un automne presque aussi meurtrier en enregistrant 808 décès.

En Moselle, un plateau hospitalier très meurtrier à l’automne

Ailleurs, un automne plus meurtrier

Si les hôpitaux d’Alsace et de Moselle ont enregistré moins de décès lors du plateau d’automne, il en va autrement dans les autres départements. La Meurthe-et-Moselle, la Marne et les Vosges totalisent 1 227 morts, soit 321 de plus en automne qu’au printemps (+35%). À Nancy, le maire Mathieu Klein (PS) a demandé un « reconfinement local » lors des fêtes de fin d’année.

La Meurthe-et-Moselle, la Marne et les Vosges ont connu un automne et un hiver plus meurtrier Photo : Visualisation RDS / Rue89 Strasbourg

La mécanique de ces plateaux de décès est toujours floue. Comme le détaille Christian Rabaud, infectiologue et président de la Commission médicale d’établissement du CHRU de Nancy :

« Nous avons connu le couvre-feu plus tôt que d’autres, suivi le même confinement que l’ensemble du pays, et après nous sommes restés sur un haut plateau. Pourquoi ? Ce n’est ni le climat, ni l’observance des mesures qui semble l’expliquer. Et la période est trop ancienne pour incriminer les variants. Donc… C’est le mystère ! »

Cette tendance observée en Meurthe-et-Moselle est similaire à celle de la Marne et des Vosges. Dans ces dernières, le total de morts covid-19 dans les hôpitaux s’élève à 620 entre le 19 mars 2020 et le 8 février 2021, soit 1,6 décès pour 1 000 habitants.

Les hôpitaux de Meurthe-et-Moselle rattrapés à l’automne Photo : Visualisation RDS / Rue89 Strasbourg

Les départements moins peuplés accusent la plus forte hausse de décès

Les quatre départements restants sont les moins peuplés des dix que compte le Grand Est. Ainsi, les Ardennes, l’Aube, la Haute-Marne et la Meuse pèsent peu dans le bilan. Mais la deuxième phase y a représenté l’augmentation la plus forte de décès, avec 66% de plus qu’au printemps. Depuis l’automne, ils concentrent environ un décès sur cinq dans le Grand Est, contre un sur dix au printemps.

Dans les autres départements, la vague d’automne-hiver a fait davantage de morts dans les hôpitaux qu’au printemps (Visualisation RDS / Rue89 Strasbourg).

Leurs bilans s’avèrent chargés pour certains quand on les rapporte au nombre d’habitants. On compte alors 1,6 décès pour 1 000 habitants dans la Meuse et 1,4 en Haute-Marne. Des proportions similaires à la Moselle et le Haut-Rhin, qui présentent les totaux les plus importants.

Voici un tableau récapitulatif des départements de la région pour la période du 19 mars 2020 au 8 février 2021 :

Décès covid-19 à l’hôpitalDécès pour 1 000 habitants
Moselle1 7041,6
Haut-Rhin1 3121,7
Bas-Rhin1 3061,1
Meurthe-et-Moselle8951,2
Marne6711,1
Vosges6201,6
Meuse3031,6
Aube2930,9
Ardennes2841
Haute-Marne2571,4
Source : Santé Publique France + INSEE

Ce plateau prolongé de mortalité dans le Grand-Est témoigne d’une tension constante des hôpitaux depuis l’automne. Christian Rabaud prévient :

« Si l’épidémie repart, on a très peu de réserves pour encaisser cette accélération. Avec des hôpitaux pleins de patients covid, mais surtout des patients non-covid qui ne peuvent plus attendre, on sera très vite dans le rouge. »


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