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80% de grévistes lundi à Strasbourg parmi les greffières « méprisées du corps judiciaire »

Une centaine d’auxiliaires de justice – principalement des greffières rejointes par quelques magistrats et avocats – était rassemblée lundi matin devant les portes du tribunal judiciaire de Strasbourg. Au total, environ 80% de ses fonctionnaires de greffe se sont mis en grève, contre un projet de revalorisation salariale jugée insuffisante.

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80% de grévistes lundi à Strasbourg parmi les greffières « méprisées du corps judiciaire »

La mobilisation est nationale, et la lassitude générale. En cette matinée du lundi 3 juillet, sur le parvis du tribunal judiciaire de Strasbourg, une porte-parole décompte environ 80% de grévistes au sein des fonctionnaires de greffe du tribunal judiciaire.

La nouvelle grille indiciaire des greffières, un métier féminisé à 88%, prévue par le ministère de la Justice – qui devrait entrer en vigueur à partir du 1er octobre – en a irrité plus d’une. L’appel à la mobilisation a été lancé mercredi dernier par l’intersyndicale Unsa Services judiciaires, la CGT Chancelleries et services judiciaires, le Syndicat des greffiers de France (SDGF-FO) et la CFDT-Interco Justice. Théa Wassenberg, greffière au tribunal judiciaire de Strasbourg, détaille leur colère :

« Nos revendications pour une meilleure considération de notre profession ne datent pas d’hier, mais cette nouvelle grille a tout enflammé. On essaie de nous faire croire qu’elle est positive alors que la réalité est toute autre. »

Les greffières étaient en grève lundi 3 juillet Photo : Emilie Terenzi / Rue89 Strasbourg / cc

Contre une maigre augmentation, une ancienneté mise à mal

« La proposition est indécente », accuse de son côté Inès Willer, greffière et porte-parole du mouvement strasbourgeois :

« Au-delà de cette revalorisation ridicule (augmentation de 92,15€ bruts maximum, NDLR), la grille nous fait baisser d’échelon, engendrant une perte d’ancienneté qui peut aller, pour certains, jusqu’à 9 ans ! »

À titre d’exemple, Théa Wassenberg explique que les greffiers principaux perdent trois échelons et six ans d’ancienneté. Ils se retrouvent alors au même échelon que ceux qui viennent de passer le concours. Par ailleurs, ce concours n’est accessible qu’à partir du 5e échelon. Les greffiers devront ainsi patienter davantage avant d’évoluer dans leur carrière. Autre conséquence qui découle de cette mise à niveau : certains ne pourront atteindre le maximum de cette nouvelle grille salariale avant leur retraite.

30% de postes vacants

Au-delà de la déconsidération ressentie par ce corps de métier, Inès Willer pointe la problématique du sous-effectif permanent. Pour le tribunal de Strasbourg et pour ses ressorts, 30% des postes réservés aux fonctionnaires de greffe ne sont actuellement pas occupés, alourdissant de fait la charge de travail des greffières présentes. Hervé Bonglet, secrétaire général de l’Unsa Services judiciaires, met en lumière un enjeu plus global dans un entretien réalisé par RFI :

« Si nous étions sur les standards européens comme l’Italie, le Portugal ou l’Espagne, nous devrions être 39 000 personnels de greffe, mais nous ne sommes que 22 000 en France. »

Les greffières permettent à l’institution judiciaire de fonctionner (Photo Emilie Terenzi / Rue89 Strasbourg / cc

Métier « indispensable » de l’institution judiciaire

En comparant avec les évolutions récentes des autres professions du ministère de la Justice, l’imcompréhension s’accroît. Suite au décret du 28 avril 2022, les fonctionnaires du Service de probation et d’insertion pénale (Spip) sont passés en catégorie A. Deux ans plus tôt, les éducateurs de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ont connu le même schéma. Si cette même revalorisation n’avait pas été rejetée pour les greffiers, elle aurait signifié une augmentation nette de leur salaire de 200€ par mois.

Les premiers présidents des cours d’appel et les procureurs généraux rappellent dans un communiqué commun que les greffières sont « indispensables au bon fonctionnement des juridictions ». Les magistrats, déjà passablement échaudés par les réformes du gouvernement notent que « l’engagement [des greffiers] sera déterminant pour poursuivre les évolutions en cours de l’institution »…

En raison de cette grève, plusieurs audiences du tribunal judiciaire de Strasbourg ont dû être renvoyées. L’intersyndicale doit être reçue mardi 4 juillet par la Chancellerie.


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