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À Pfettisheim, les trois-quarts des asperges seront perdues malgré la main d’œuvre locale

L’année 2020 sera terrible pour la ferme Lux à Pfettisheim, l’exploitation d’asperges pourrait perdre jusqu’à 80% de sa production en raison de l’absence de main d’oeuvre qualifiée.

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À Pfettisheim, les trois-quarts des asperges seront perdues malgré la main d’œuvre locale

Dans les champs autour de Pfettisheim, dans le Kochersberg, l’air du printemps est frais et sec. Sous un ciel bleu lumineux, c’est un temps parfait pour récolter l’asperge. Elles poussent sur les parcelles cultivées par Dominique Lux, dont c’est la production principale depuis qu’il a repris la ferme de ses parents en 1986.

Des lignes de monticules de terre bâchées s’étendent à perte de vue autour du village, seulement arrêtés par le chantier de l’autoroute du GCO. Il y en a pour 35 hectares à récolter cette année, avec sous chaque monticule, 4 à 8 000 kilos d’asperges blanches par hectare.

Les monticules de terre sont bâchés pour produire une asperge blanche, la préférée des Alsaciens. Photo : Abdesslam Mirdass / Hans Lucas
La main d’œuvre locale manque pour pallier l’absence des saisonniers polonais et roumains. Une partie de la production sera perdue. (Photo Abdesslam Mirdass / Hans Lucas)
Une vingtaine de personnes ont été recrutées pour la récolte cette saison, il en faudrait plus du double (Photos Abdesslam Mirdass / Hans Lucas)

Mais Dominique Lux est inquiet. Parmi les 55 saisonniers polonais et roumains qu’il mobilise chaque année, seuls huit ont fait le déplacement. Les autres ont préféré rester à l’écart de l’Alsace, dont la réputation comme foyer endémique du coronavirus s’est répandue en Europe :

« Ils ont peur et je ne peux pas leur en vouloir. Ce sont des gens qui viennent depuis 10 ans, 15 ans, chaque année et qui triplent leurs salaires habituels en travaillant chez nous. S’ils choisissent de ne pas venir, c’est qu’ils ont leurs raisons. »

Les saisonniers sont payés au Smic et logés, ce qui représente le triple de leur salaire habituel pour les Polonais et les Roumains. (Photo Abdesslam Mirdass / Hans Lucas)
Chaque hectare contient entre 4 et 8 000 kilogrammes d’asperges (Photo Abdesslam Mirdass / Hans Lucas)
La récole d’asperges nécessite un coup de main qui ne s’acquiert qu’avec l’expérience. (Photo Abdesslam Mirdass / Hans Lucas)
L’asperge met trois ans à pousser mais une fois qu’elle est là, il faut la cueillir dans la journée. (Photo Abdesslam Mirdass / Hans Lucas)

Payés au Smic, les saisonniers étrangers sont en outre hébergés par l’exploitant, dans des chambres de 4 situés sur l’exploitation. Ils travaillent dans les champs de 7h à 13h voire 15h, en fonction de leur technique. Les rares saisonniers d’Europe de l’Est qui ont bravé les informations alarmantes pour la saison se repèrent bien dans les champs, ils ont 50 mètres d’avance sur les Alsaciens et leurs cageots sont remplis d’asperges plus longues.

Car c’est tout le problème de Dominique Lux, un bon cueilleur d’asperges se forme en plusieurs saisons :

« On a beau expliquer, ça ne sert à rien. Il faut avoir le coup de main. Il faut sentir la taille de l’asperge en plantant la gouge, la dégager sans l’abîmer et la sortir sans la casser. Ce savoir-faire ne peut que se transmettre… »

Résultat, même si des Alsaciens sont venus suppléer les saisonniers d’Europe de l’Est, Dominique Lux est dans l’incapacité de les former. Ils sont vétérinaires, cuisiniers, animateurs périscolaires, étudiants ou au chômage et appartiennent au cercle de connaissances étendu de Dominique Lux :

« Je ne peux accueillir qu’une vingtaine de débutants au maximum. Mais la plupart sont surtout motivés par l’envie de sortir du confinement, ce qui nous inquiète un peu. Surtout, ils produisent des asperges plus courtes et l’an prochain, ils ne reviendront pas… Nous les formons en pure perte. J’estime qu’on va perdre entre 60 et 80% de la récolte habituelle cette année. »

Les asperges prêtes à être récoltées ne peuvent attendre… sinon elles sont perdues. (Photo Abdesslam Mirdass / Hans Lucas)
Chaque jour, la ferme Lux produit environ 500 kg d’asperges, dix fois moins qu’en saison normale.

Cette saison, la ferme produit environ 500 kg d’asperges par jour quand elle devrait en sortir 5 000 ! En aménageant le bâchage, Dominique Lux a anticipé la crise, retardant au maximum la pousse des asperges mais selon ses prévisions comptables, il lui faudra une dizaine d’années pour rattraper la perte de chiffre d’affaires de cette saison.

Dominique Lux, 4e génération d’agriculteur à Pfettisheim, s’est spécialisé quasi-exclusivement dans la production d’asperges. (Photo Abdesslam Mirdass / Hans Lucas)

#agriculture

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