
Au coeur du quartier de l’Elsau, les habitants de la rue Watteau subissent l’activité des dealers, de jour comme de nuit. Face au sentiment d’inaction des pouvoirs publics, Rue89 Strasbourg révèle les projets de la police nationale, des associations et de l’Eurométropole de Strasbourg pour lutter contre le trafic de drogues.
Certains l’appellent le « four ». D’autres « point de fixation. » Dans la rue Watteau, au cœur de l’Elsau, le trafic de drogues s’est installé dans les recoins abandonnés du quartier. Cannabis surtout, mais aussi cocaïne et héroïne sont cachés dans un snack inactif, derrière le rideau fermé d’un supermarché, dans des voitures à l’abandon. Quatre Elsauviennes ont accepté de témoigner de leur quotidien de voisines et victimes du deal.
Enfants et seringues
Les mères de famille s’inquiètent surtout des dangers du deal pour les enfants. « Place Nicolas Poussin, les petits jouent à côté des dealers », lâche Ayşe (les prénoms des habitantes ont été modifiés) en regrettant l’époque des sorties insouciantes dans le parc.
Aujourd’hui, elle garde un oeil constant et inquiet sur sa nièce de sept ans : « Par terre, il y a parfois des seringues ou des pochons. » Nilifaş craint plutôt l’influence des jeunes dealers sur son fils : « Il m’a dit qu’il avait entendu parler de salaire de 1 500 euros par mois… »

Dans la rue Watteau, le trafic s’est immiscé jusque dans les caves et les appartements vides. Dans plusieurs immeubles, la porte principale ne ferme plus et les caves servent à se shooter, de toilettes, de cachette ou de chambre. Les vols de poussettes ou de vélos sont courants. La musique et les conversations, dehors en pleine nuit, empêchent de dormir. Mais peu de riverains de la rue Watteau osent s’opposer aux dealers, estime Ayşe : « On est toujours les mêmes à dire quelque chose. Les gens ont peur… »

Aysel, Ayşe, Nilifaş et Demet ont appelé plusieurs fois la police, alerté le bailleur social, tenté de lancer une pétition… Mais rien ne change, selon elles. Pire : les tensions montent entre habitants et dealers. « Combien de fois mon oncle les a foutus dehors… Il faut attendre que ça finisse mal pour que ça change ? Le trafic a déjà tué le quartier ! », s’énerve Ayşe qui dénonce des interventions « inutiles » de la police : « Ils n’arrêtent personne alors qu’ils savent très bien où la drogue est cachée… »
Objectif : « Inculper les têtes du réseau »
« Les riverains ont l’impression d’être abandonnés, c’est tout le contraire », veut rassurer Jean Hayet, directeur central adjoint de la Sécurité publique du Bas-Rhin. Depuis le 1er janvier 2019, la police a relevé 80 affaires de stupéfiants dans le quartier, entre usage, revente de petites quantités et trafic. Les policiers constituent un dossier afin d’inculper les têtes du réseau : « Pour les Elsauviens, cela semble mieux que l’on patrouille et que l’on coffre. Mais l’expérience montre que ça ne fait que déplacer le problème. »
Une action coordonnée
Dans le cadre du projet gouvernemental « Police de sécurité du quotidien », un réserviste de la police nationale intervient dans le quartier pour tenter de nouer une confiance avec les habitants. Sur de petits prospectus, les Elsauviens sont invités à « signaler des situations relevant d’incivilités » et à exprimer leurs « interrogations ou observations sur des problématiques de sécurité. » Tous les quinze jours, policiers, bailleurs sociaux, responsables de la sécurité pour l’Eurométropole ou associations se réunissent pour coordonner leurs efforts. Jean Hayet poursuit :
« Cela nous permet aussi de mieux cibler notre action, sur des créneaux horaires plus intéressants, en priorisant la sécurité des voisins du deal. En parallèle, on récolte les informations pour nos investigations. »

La police ne suffit pas
Suite à une plainte d’une Elsauvienne pour « menaces, agressions et dégradations », la police a ainsi pu intervenir pour assurer la sécurité de l’habitante. Mais le problème s’est effectivement déplacé au pied d’une autre tour… Jean Hayet l’admet : « Quand on clôt un dossier (lié au trafic de drogues, ndlr), c’est toujours temporaire. » Comprendre, quand un réseau est démantelé, son territoire est rapidement réinvesti par d’autres trafiquants. Plusieurs acteurs proches du dossier parlent d’un « cercle vicieux ».

Sur le terrain, des habitants et des travailleurs sociaux s’activent pour réagir à « la promesse d’égalité républicaine non-tenue. » Rue Martin Schongauer, des bénévoles de l’association Mémoires Vives veulent lancer une « université populaire des quartiers. » Ils espèrent bien bénéficier d’une partie des fonds alloués à la rénovation urbaine à venir. Hasard du calendrier, l’Elsau, ainsi que le Neuhof et la Meinau vont immédiatement bénéficier de 100 000 euros de subventions dans le cadre du label « Cités éducatives ». Le projet gouvernemental a débloqué 34 millions d’euros au niveau national pour améliorer la réussite des élèves de 80 quartiers.
Un projet d’insertion à venir ?
Au cours des deux dernières années, l’Eurométropole de Strasbourg a travaillé à l’élaboration d’un projet de prévention et d’insertion pour l’Elsau. « Face au problème du trafic, il n’y a pas une seule solution. On n’arrive pas sur un territoire comme ça, c’est de la dentelle », confie une source proche du dossier.
S’il obtient un financement, le « Travail alternatif payé à la journée (TAPAJ) » devrait être mis en place dans le quartier. Luc Gillmann, adjoint (PS) au maire en charge du quartier Elsau, décrit le dispositif :
« TAPAJ, c’est une régie de quartier pour pouvoir embaucher des jeunes de moins de 25 ans afin de les aider à s’insérer dans le monde du travail. Ils seraient payés à la journée pour ramasser les seringues ou faire de la médiation auprès des habitants. J’ai donné un avis favorable pour le financement du projet (qui devrait être débattu au conseil municipal d’octobre, ndlr) »
« Où est-ce qu’on va aller ? »
Victimes du trafic, les habitants de la rue Watteau côté pair devront déménager. La rénovation du quartier prévoit la destruction de leur immeuble. Luc Gillmann explique ce choix urbanistique :
« L’ouverture de la rue Watteau sur la place du centre social et culturel devrait mettre fin au trafic dans cette zone. Sans cachette, au milieu d’une grande place, le deal devrait disparaître, même si l’on sait qu’il ne fera que se déplacer. »
« Et nous, où est-ce qu’on va aller ? », se demandent les quatre Elsauviennes. Certaines partiraient volontiers, d’autres restent attachées à leur quartier. Ailleurs, les loyers seront-ils toujours aussi abordables ? Les familles installées dans plusieurs logements de l’Elsau seront-elles séparées ? Voilà de nouvelles sources d’inquiétude pour les habitants des logements bientôt détruits. Elles feront l’objet du troisième épisode de la série « Rue Watteau – Au cœur de l’Elsau délaissé. »
Pravda : la vérité... si je mens !
Bref, seule l'anarchie rétablira l'ordre ! Belle leçon paradoxale de Pravda (la Vérité en russe...)
Si seulement sa vente pouvait alimenter les caisses de l'Etat plutôt que celles de criminels....
Vous êtes naïf, manipulateur ou stupide, on cherche encore...
La prostitution est très largement un trafic d'êtres humains, ce qui est intolérable. Le cannabis est une drogue moins dangereuse et moins addictive que l'alcool...
Et actuellement, non seulement la France, plus gros consommateur par tête d'Europe (ça fonctionne, bien, la répression...) ne gagne rien sur sa vente, mais les actions de police ciblées sur ce trafic empêchent les forces de l'ordre de se concentrer sur d'autres. Et en plus, le trafic de cannabis sert de socle financier aux mafias que vous évoquez.
Mais bon, c'est moi le manipulateur naïf stupide....
Mais non on durcit la réglementation sans que la prostitution disparaisse et on voit toujours des femmes sur les bors des routes aux proies à des mafias d'Europe de l'Est ou de client potentiellement dangereux.
Ici, il s'agit bien de délinquance. A-t-on peur d'employer le mot juste?
rue89strasbourg, je m'attends à lire des articles sur tout ce qui se passe à Strasbourg. Et oui malgré vos réactions, les articles tournent très souvent autour de la culture, de combats sociaux et de gentilles associations. Oui ok, un autre combat de la gauche bobos, l’environnement. Mais toujours dans le même sens.
Il y a tellement d'autres sujets qui préoccupent les français. Je pense que ce commentaire qui donne mon avis n'a rien d'agressif et apporte ma vision. une vision. Comme à quelques reprises, il ne va pas dans le sens de la rédaction. Il sera donc certainement censuré.
"Le terme est bien choisi, il y a du tapage diurne, nocturne, du rodéo, celui qui met la musique trop fort n'est pas forcément un délinquant... Délinquance ne convient pas pour ce genre de situation. Ce flyer n'a pas été spécialement fait pour les stupéfiants, c'est surtout pour la tranquillité du public. Le fait de trafiquer des produits stupéfiants, la personne qui voit ça n'est pas victime du trafic mais des incivilités qui sont liées au trafic. Si vous mettez trafic sur le flyer vous mettez tout, c'était un terme générique. Il y a pas de peur particulière, on ne mâche pas nos mots, le flyer touche tellement de thématiques qu'il fallu trouver un mot pour appeler les habitants à nous joindre..."
insuffisant certainement, seulement il faudrait déjà avoir les autorisations pour que le dispositif puisse avoir lieu dans le quartier et se faire une idée
L'absence de réponse aux difficultés de la jeunesse alimente la boucle infernale de l'exclusion et du développement des trafics. Cette boucle construit progressivement un ghetto de non droit et compromet l'espoir que la rénovation promise transforme effectivement le quartier.
Malheureusement, il semble que seule la co-construction d'un autre avenir avec ces jeunes soit susceptible de changer leur situation et par conséquent celle de tous les habitants du quartier.
Pourtant l'élus en charge de la rénovation urbaine et de la jeunesse a dit "pour les problèmes de drogues, appeler le 17" dans la salle bondée du CSC le 27 mars 2019. Hors seuls les moyens importants alloués à la rénovation urbaine permettraient de travailler à des solutions de fond crédibles.
Je pense avoir pourtant suggéré une piste. Cesser le laxisme de la justice et le sentiment d'impunité qui est pire que tout. Je pense que la prison n'est pas une solution mais des obligations de soins pour les uns et des travaux d’intérêt general (réels) et suivi pour les dealers. Pour ceux qui ne comprennent pas, la prison.
Un gros problème vient des parents qui font de nombreux enfants et ne parviennent pas à les contenir et les éduquer. Les mineurs guetteurs devraient systématiquement être renvoyé dans leur foyer. Les parents convoqués. suivis.
Et encore une fois, j'ai posé la question, pourquoi n'y avait-il pas ce problème il y a 50 ans. Réfléchissez bien à la question, ce n'est pas compliqué. Et vous aurez la vraie solution.
Pourquoi ça ne suffit pas? ....réfléchissez-y. ;-)
Avec des YAKAFOKON derrière son écran, on peut tout faire... en théorie.
Et relisez donc les propos de Laurent. À aucun moment il ne dit que la rénovation urbaine va sauver le quartier.
Votre problème à vous, en fait, c'est que vous êtes constamment dans la réaction et omettez trop souvent de passer par les cases "lecture attentive" et "analyse".
Il parle de renovations urbaines, Relisez bien. Les solutions que je donne ne sont pas mis en oeuvre ou alors très très partiellement. Les mineurs guetteurs sont dehors, les parents ne sont pas inquiétés, la justice est laxiste, le discours victimaire, les agresseurs jamais inquiétés...
Arnaud, Il serait judicieux d'apporter des contre arguments plutôt que d'invectiver. Votre commentaire en fait ne sert à rien. Il est pathétique d'une personne de gauche qui pense qu'il n'y a rien à faire.
Je cite vos propos:
"La rénovation urbaine va sauver le quartier. N’importe quoi."
Si ça ce n'est pas de l'invective!
Au départ de ce fil, les propos de Laurent Garczinsky étaient, eux, autrement plus nuancés et votre procédé de sophisme dit "de l'homme de paille", consiste, lui, à caricaturer sa position pour l'attaquer.
Pour ma part, contrairement à vous, je ne viens pas avec des solutions toutes faites, c'est donc à vous et non à moi que revient la charge d'argumenter vos YAKAFOKON, et pour ce que j'en lis, ça reste très léger.
Ceci étant dit, fin du thread pour ma part.
Bonne soirée.
Un concept promu et porté aux nues par la gauche bobo des beaux quartiers ? (Hidalgo, Ries...).
Comme le souligne Yop, c'est une sacrée révolution culturelle pour Rue89 de se préoccuper d'insécurité en défendant les victimes !
C'est un premier pas de comprendre et reconnaître que les premiers à souffrir de l'insécurité et des incivilités sont les plus modestes de nos concitoyens.
Projets d'insertion, actions coordonnées. Vous y croyez vraiment ? La drogue est un fléau, le trafic aussi. Il y a des solutions évidemment. Pourquoi n’y avait-il pas autant de trafic et de drogués il y a 50 ans ?