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Strasbourg veut utiliser ses terrains et bâtiments vides contre la saturation de l’hébergement d’urgence

Après deux projets à Strasbourg, la municipalité pense de nouveau à l’habitat intercalaire pour soulager les centres d’accueil de sans-abris, en utilisant provisoirement des bâtiments ou des terrains inoccupés.

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photo de l'extérieur de l'hôtel de la rue

Un hôpital désaffecté qui attend d’être converti en logements, une ancienne usine en attente des travaux qui la transformeront en bureaux… Pendant des mois, voire des années, ces bâtiments restent inutilisés, dans l’attente du début du chantier. Face à la saturation des dispositifs d’hébergement d’urgence, la Ville de Strasbourg mise sur l’habitat intercalaire pour accueillir des personnes sans-abris ou mal-logées. Elle travaille sur plusieurs projets d’habitat intercalaire, tout en précisant qu’il est encore « trop tôt pour communiquer sur le nombre et la localisation des lieux, toujours à l’étude ».

L’habitat intercalaire, synonyme d’un meilleur accompagnement social

Les premières traces d’habitat intercalaire à Strasbourg remontent à 2019, à travers le projet Odylus, au Neudorf. Pendant 18 mois, en attendant le début des travaux qui devaient transformer l’ancienne clinique Sainte-Odile en logements, les associations L’Étage et Horizome ont hébergé et accompagné 94 personnes dans des locaux mis à leur disposition par le promoteur immobilier, Eddy Vingatamarin.

photo de l'extérieur de l'hôtel de la rue
Vendredi 23 octobre, les derniers habitants de l’Odylus quittent le bâtiment avant le début des travaux de l’ancienne clinique Sainte-Odile, au Neudorf. Photo : PF / Rue89 Strasbourg

Brice Mendès, directeur des services de L’Étage, assure que cet hébergement intercalaire a permis un meilleur accompagnement social des occupants :

« Les personnes en difficulté locative, à la rue ou à l’hôtel, sont souvent très isolées. Avec l’habitat intercalaire, on les regroupe dans un même bâtiment et on recrée du lien social. De notre côté, ça rend l’intervention sociale différente : les gens sont plus détendus quand on vient les voir à domicile que quand on les convoque dans un bureau. »

À la fin du projet, en octobre 2020, 12 ménages soit 20% des personnes accueillies, sont retournés à l’hôtel. Mais selon Brice Mendès, la qualité de l’accompagnement social reste prioritaire vis-à-vis du nombre d’habitants relogés :

« Le relogement n’est pas la mission première de la formule intercalaire. Parfois, soigner la toxicomanie est plus important que de trouver un logement stable par exemple. C’est l’accompagnement social et pas le type de logement, intercalaire ou pas, qui améliore les situations à la sortie, que ce soit en termes de relogement, d’emploi ou de santé. »

Des projets de constructions modulaires sur des terrains de la Ville

Plus récemment, l’Hôtel de la rue a régularisé sa situation en signant une convention d’occupation avec la Ville, faisant de l’ancien squat la deuxième expérience d’habitat intercalaire à Strasbourg. Alors que l’occupation du bâtiment de Koenigshoffen doit prendre fin en septembre, la Ville de Strasbourg continue d’explorer cette voie, à la fois pour soulager les centres d’hébergement d’urgence, mais aussi pour éviter l’installation de squats dans des bâtiments vides.

photo d'une pièce vide
L’ancien squat de l’Hôtel de la rue, qui occupe un bâtiment municipal à Koenigshoffen depuis juillet 2019, a signé en janvier une convention d’occupation avec la Ville de Strasbourg. Photo : GK / Rue89 Strasbourg

« On a identifié des terrains. Même si on ne sait pas encore précisément ce que l’on va en faire, on pense à des constructions modulaires, comme à Lyon, où la métropole a mis des tiny houses à disposition de familles précaires« , explique Floriane Varieras, adjointe à la maire en charge des Solidarités. « Notre palette de projets va de l’Odylus aux Grands Voisins (à Paris, un ancien hôpital qui accueille entre autres hébergement d’urgence, salle de concerts et recyclerie en attendant sa transformation en éco-quartier, ndlr) ». Si les plans sont encore flous, l’adjointe promet un « coup d’accélérateur » à partir de septembre, avec des évaluations des sols.

Le parc privé, trop important pour être ignoré

Si Floriane Varieras parle de terrains, c’est parce que la plupart des bâtiments inoccupés appartenant à la Ville de Strasbourg sont détériorés et ne permettent pas l’accueil de résidents. Dans ces circonstances, installer des constructions modulaires est « financièrement bien plus avantageux que de rénover des bâtiments parfois destinés à la destruction », explique l’adjointe en charge des Solidarités :

« Il y a bien une pénurie de logements mais les moyens financiers de la collectivité sont limités. On peut financer un accompagnement social mais pas la location de bâtiments. L’objectif est plutôt de développer une sorte de mécénat, que des promoteurs immobiliers prêtent des bâtiments inoccupés, comme ça a été le cas avec l’Odylus. Le privé est une force de frappe trop importante pour être ignorée. »

Pour intégrer des promoteurs immobiliers à la démarche, Floriane Varieras évoque l’idée d’une plateforme de repérage et de recensement des bâtiments vacants à Strasbourg, où les propriétaires pourraient inscrire leurs biens. « Parce que le nerf de cette guerre du logement, c’est l’argent et le bâti », résume-t-elle.


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