C’est la fin de ce direct, merci à vous de nous avoir suivi.
Fin de mobilisation. Une colonne de tracteurs de la Coordination rurale défile sur l’avenue des Vosges dans un concert de klaxons. Quelques policiers suivent le cortège.
Les agriculteurs bloquant la M35 ont voté à main levée la fin du barrage. « On est entrain de ranger, on va partir », annonce le secrétaire général de la FDSEA 67 Gérard Lorber au téléphone, en rangeant son matériel. « On attend les annonces nationales, demain », déclare le syndicaliste, en promettant d’autres mobilisations selon le contenu des annonces.
Thomas Lux, secrétaire général des Jeunes Agriculteurs du Bas-Rhin, résume la fin de la mobilisation :
« On a décidé de lever le camp pour deux raisons. D’abord, on a eu des avancées au niveau local, pour des problèmes très précis, touchant certains agriculteurs individuellement. De manière plus globale, la préfète nous a assuré que le Bas-Rhin suivrait les règles nationales et qu’il n’y aurait pas de mesures plus dures appliquées localement. On attend quand même les annonces de Gabriel Attal demain. Si celles-ci ne sont pas satisfaisantes, on se mobilisera de nouveau. »
La Confédération paysanne appelle à un rassemblement à Sélestat, ce mardi à 16h, place de la gare. Le porte-parole du syndicat, Pierre-Luc Laemmel, explique son souhait de se démarquer de la FNSEA :
« Pour nous, l’agriculture productiviste de la FNSEA piège les agriculteurs dans un modèle absurde où ils sont dépendants des prix du marché, d’investissements lourds et de charges importantes. Avec par exemple le prix des pesticides qui augmentent. On appelle les personnes qui aimeraient un autre modèle, basé sur une agriculture paysanne et nourricière, à venir à notre rassemblement. »
Germain Krantz est exploitant de céréales à Wasselone, et trésorier de la Coordination rurale 67. Il s’est mobilisé avec son syndicat devant la Direction départementale des territoires, sans se joindre à la FDSEA :
« Nous avons décidé de cette manifestation il y a trois jours, de notre côté. Nous ne sommes pas avec les autres syndicats parce que nous n’avons pas les mêmes revendications. Tout ce qui se passe, maintenant c’est à cause de leur politique. Ils voulaient s’ouvrir sur le marché mondial, pour exporter nos produits. Ces syndicats ne peuvent pas avoir un discours mondialiste à Bruxelles et se mobiliser contre l’importation par la suite. »
Dans le Haut-Rhin, près de 200 tracteurs roulent sur l’A35 pour organiser un blocage de l’autoroute, dans les deux sens. Le cortège se dirige vers Oberhergheim, et devrait se tenir jusqu’à 16h vendredi.
Le président de la FDSEA Franck Sander a été reçu par le secrétaire général de la préfecture en fin de matinée. En sortant de la préfecture, l’agriculteur ne fait aucune annonce sur la fin du blocage : « Même si vous avez une administration qui a envie d’avancer au niveau local, c’est les décisions de Paris qui bloquent l’ensemble des sujets. Pour moi la priorité, c’est les annonces de Gabriel Attal de demain. »
Ce compte-rendu en direct est mis en pause, en attendant de savoir comment les différentes institutions répondront aux revendications des syndicats. Deux cortèges sont installés, celui de la FDSEA sur les voies métropolitaines de Strasbourg, celui de la Coordination rurale dans la Krutenau, près de la DDT.
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Éric Lachmann est apiculteur professionnel à Benfeld. Il est devant la DDT, dans le cortège de la Coordination Rurale, pour soutenir ses collègues agriculteurs, « car ce sont eux qui nous nourrissent ». Avec son gilet vert, il admet avoir, lui aussi, des revendications :
« Nous sommes concurrencés par du miel à bas coût, en supermarché. Je vends tout en direct, sinon on s’en sort pas. Les supermarchés nous payent un quart du prix qu’on aimerait. »
L’apiculteur a choisi de se joindre au cortège de la Coordination Rurale plutôt qu’à celle de la FDSEA et de Jeunes Agriculteurs. « En tant qu’apiculteur je suis contre les pesticides et ce n’est pas leur position », détaille-t-il.
Depuis 10h30, la Coordination Rurale est donc positionnée devant la DDT. Les manifestants sont désormais une soixantaine. Marie-Paul Boehler, secrétaire départementale de la Coordination Rurale : « Nous sommes venus ici parce que c’est là que tout se décide ».
« Nous ne sommes pas avec l’autre mobilisation car nous ne sommes pas le même syndicat. Nous avons des revendications distinctes : on demande juste à vivre de notre travail. Depuis quelques années c’est de pire en pire. »
Marie-Paul Boehler, secrétaire départementale de la Coordination Rurale et productrice d’épeautre
Le syndicat a rendez-vous avec le directeur de la DDT à 13h30 et compte manifester jusqu’à 17h environ. Pour les soutenir, quelques agriculteurs allemands ont fait le déplacement.
De son côté, la Coordination Rurale est place du Foin, dans le quartier de la Krutenau à Strasbourg. Avec leurs gilets verts, 16 tracteurs et leurs agriculteurs et agricultrices manifestent devant la Direction Départementale des Territoires du Bas-Rhin – une administration qui « veille au développement équilibré et durable des territoires, tant urbains que ruraux, par la mise en œuvre des politiques agricoles, d’environnement, d’aménagement et d’urbanisme, de logement et de construction, de prévention des risques, de transport ».
« La sécheresse, elle est où ? Y’a de l’eau stagnante partout dans les plaines d’Alsace. Mais on a eu des restrictions d’eau. On a dû moins irriguer. Alors que tout ce qu’on fait, c’est parce qu’on en a besoin. Ça coûte cher d’irriguer, on le fait parce qu’on n’a pas le choix. C’est pareil pour les produits phytosanitaires. »
Fabien, producteur de lait à Ergersheim
« Avec la guerre en Ukraine, les prix de nos céréales ont augmenté mais tout comme le prix de l’énergie. Là, nos prix sont revenus à ceux avant la guerre alors que l’énergie est au moins deux fois plus chère qu’avant la guerre. »
Dominique, producteur de céréales et betteraves sucrières
Gilles Hermann est en fin de carrière. Céréalier et éleveur de poules pondeuses à Benfeld, il avoue décourager sa fille de prendre sa relève.
« Il y a trop de contraintes. Je travaille entre dix et douze heures par jour et je prends moins de plaisir qu’avant. On nous dit que c’est notre choix, de faire ce métier. Certes, mais pas dans ces conditions. Même avec les habitants des villages, c’est devenu difficile : ils nous font des réflexions quand on travaille le dimanche, quand on fait de la poussière… »
Depuis 1996, Gilles travaille sur son exploitation et voit les contraintes et les charges financières augmenter. Il se souvient de la pandémie du Covid-19, où les consommateurs venaient dans son magasin de vente directe : « Tout le monde nous encensait, les gens étaient contents d’avoir de bons produits. Mais une fois les supermarchés ouverts, ils ne sont pas revenus »
Il n’hésite pas à prévoir de bloquer longtemps la M35 : « On reste jusqu’à avoir des annonces positives, s’il faut qu’on reste une deuxième nuit, on le fera ».
François Vix fait partie des Jeunes Agriculteurs venus du canton de Brumath : « La nuit a été courte, on s’est couché tard. On a fait des jeux de cartes et bu un coup tous ensemble. On était bien installés, donc ça allait pour dormir. »
À 32 ans, il est céréalier sur l’exploitation familiale de 200 hectares.
« La plus grande contrainte, ce sont les démarches administratives qui concernent l’eau. Quand on fait une demande de forage, on attend six mois pour avoir une réponse. À l’époque, nos grands parents creusaient un puit comme ça, sans plus de démarche. En Alsace nous avons une grande nappe phréatique, et des contraintes d’eau malgré tout. Ce n’est pas possible. »
François Vix, 32 ans
C’est avec la préfète du Bas-Rhin que la question de l’eau est en train d’être discutée. Pour les autres revendications des syndicats, des annonces nationales sont attendues.
Deuxième jour de direct auprès des agriculteurs et agricultrices mobilisées sur la voie métropolitaine 35 à Strasbourg. Sur place, les tracteurs sont toujours là.
« On a dormi dans nos tracteurs. Bon c’est vrai qu’on dort mieux dans un lit ! » rigole Laurent, agriculteur à Marmoutier.
« Ce n’est pas la première fois qu’on manifeste mais c’est toujours la même chose… Notre métier, ce n’est pas d’être sur une autoroute. Donc là on va rester jusqu’à avoir de vraies annonces du gouvernement », Cyril, agriculteur du côté de Saverne.
À 9h30, les représentants de la FDSEA et des Jeunes Agriculteurs sont allés à la rencontre de Josiane Chevalier, préfète du Bas-Rhin. Mercredi soir, cette dernière est passée sur le blocage rencontrer plusieurs manifestants.
Et c’est la fin pour aujourd’hui de ce compte-rendu en direct. Merci à toutes et à tous de l’avoir suivi !
Rendez-vous demain pour une reprise du compte-rendu en direct, notamment pour savoir si les agriculteurs lèvent ce blocage des voies métropolitaines ou s’ils restent sur place une journée de plus…
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Franck Sander détaille :
« Vendredi, il y aura des annonces du Premier ministre. Soit il nous donne du concret et c’est bon. Soit il n’arrive pas à rassurer le monde agricole et on continuera à se battre, on ne cédera pas. Pour la question de l’accès à l’eau, on va discuter avec la préfète du Bas-Rhin. »
Des prises de parole sont prévues à 18h30. Nous rendrons compte ici même des annonces qui seront faites.
Bérénice Schwab est apprentie au centre de formation de Pixérecourt, près de Nancy. Elle est venue avec le canton de Benfeld :
« C’est une cause qui touche mon avenir. Mon but est de reprendre une exploitation familiale à Boofzheim, qui fait de l’engraissement de taurillons, du fois gras, du canard, en vente directe. Mon frère est déjà installé dessus. Le fond du problème aujourd’hui, c’est les normes qui nous sont imposées : les restrictions d’eau, les normes sanitaires quand on fait de la transformation… On doit installer de nouveaux dispositifs régulièrement. Dernièrement on a dû installer un sas. C’est des coûts à chaque fois et beaucoup de paperasse. On nous promet des aides mais quand on voit les dossiers à remplir, on se dit qu’on peut s’en passer. Des fois, on fait des journées entières d’administration. Heureusement que nous sommes en vente directe, ce qui nous permet de fixer nos prix. »
« La France a importé 8 millions de tonnes de maïs. On est en concurrence avec les producteurs au Brésil, où ils ont le droit d’utiliser 178 molécules phytosanitaires différentes. Parmi elles, 92 sont autorisées en Europe et 40 en France. Il faudrait davantage nous protéger ou alors qu’on ait les mêmes possibilités. Cette distorsion de concurrence est insupportable. La commission européenne devrait se doter de moyens pour maîtriser de ce qui rentre dans le territoire. »
« Je suis dans une ferme de polyculture certifié HVE 3, je produis du maïs, du blé du blé dur du soja et de la moutarde. L’effet ciseau entre la hausse des charges et la baisse du prix de vente est marquant. Pour la moutarde, j’ai un contrat particulier : on se rencontre entre producteurs et la coopérative de Hochfelden, qui stocke et conditionne avant de revendre au moutardier. On parle prix ensemble. C’est stable. Sur le reste c’est difficile. J’achète les engrais super cher alors que le prix des céréales a baissé de 30% : je suis passé d’une tonne de maïs à 300 euros en 2022 à 200 euros en 2023. C’est ça l’effet ciseau qui est difficile. Niveau revenu, je n’ai pas encore fait les comptes mais je risque d’avoir une baisse de 30%, je serai tout juste… »
Quelques kilomètres plus loin, Fabien Metz poursuit :
« C’est un métier où ne coupe jamais. J’y pense le soir quand je rentre. À cause des normes de traçabilité qu’on nous impose depuis dix ans. Toute cette charge repose sur nous. Je dois noter la date de semis, la localisation du champ, la surface du champ, le nom de la semence. Les kilos de blé semé… Chaque travail sur une culture, il faut noter tout ces détails. Globalement, les charges administratives représentent un matin par semaine. C’est très conséquent. »
Durant le trajet, Steve Conrad, agriculteur céréalier, précise :
« On sent les effets de la sécheresse. Pour avoir un rendement suffisant, je dois irriguer 70% de la surface aujourd’hui, contre 10% il y a 30 ans. C’est pour ça que je fais aussi de la culture de tournesol qui demande moins d’eau. Peu être que je pourrais passer à davantage de tournesols mais le problème c’est que le marché de cette plante s’est effondré. Elle se vend 400€ la tonne, alors que c’était 800 il y a encore un an. Ça on ne le prévoit pas quand on plante… Ces prix qui varient à ce point, c’est vraiment ce qui nous plombe. »
Steve Conrad, agriculteur céréalier, avoue qu’il manifeste aussi pour sa fille, qui aimerait reprendre l’exploitation :
« Parfois j’hésite à lui dire de ne pas reprendre et de trouver autre chose tellement ça devient dur. Je n’aurai pas envie qu’elle travaille autant avec si peu de rémunération… Mais en même temps, dans le fond, c’est ce que je préfèrerais qu’elle reprenne la ferme. »
Dans le tracteur vers Strasbourg avec Steve Conrad, céréalier à Geudertheim :
« Je fais du mais, du blé du Colza et du tournesol… Ces dernières années c’est de plus en plus délicat. Nos revenus baissent et les contraintes administratives augmentent. C’est un truc de fou. Si on veut irriguer, c’est six mois de boulot pour avoir l’autorisation de creuser un puit. Tout ce qui est Politique agricole commune (PAC), il y a de plus en plus de critères à respecter. Le dernier pilier : il faut accumuler le plus de points possible en faisant des rotations. Selon la culture ça donne des points. »
Quant aux charges, Steve Conrad note :
« Ils veulent arrêter de nous prendre en charge une partie du gasoil agricole (on consomme 25 000 litres par mois donc c’est énorme). L’azote c’est passé de 260 tonnes à 780 en un an. On ne peut pas répercuter sur le prix de vente. Le cours des céréales baisse. Mon revenu a baissé de 30%, grosso modo alors que je travaille 70 heures par semaine pour l’équivalent d’un Smic. »
Célia Henches est étudiante en BTS stratégie d’une exploitation agricole :
« J’aimerais reprendre l’exploitation familiale. Mon père cultive des céréales à Geudertheim, du maïs et du blé. L’optique serait de diversifier plus tard : se lancer dans d’autres cultures pour s’adapter au réchauffement climatique. C’est effrayant de vouloir faire un métier quand on ne sait pas ce qu’il y aura demain. Il faut qu’on puisse dégager un revenu. La passion ne paye pas les factures. Si on regarde l’agriculture française par rapport au Brésil, on peut être fiers de notre qualité environnementale, mais il faut nous protéger face à cette concurrence. »
Point d’organisation tenu par Fabien Metz :
« On attend un autre cortège qui vient de Bischwiller pour partir vers Strasbourg. L’idée c’est de garder en tête l’aspect sécurité aussi. On a tous une pensée pour la famille qui a été renversée hier. Les tracteurs devront rester en rang serré. La police va nous encadrer. Restez bien dans le périmètre de sécurité. On essaye en même temps d’obtenir une réunion avec la préfète demain pour exposer nos revendications. »
Eliott Hirsch est étudiant en BTS agronomie production végétale :
« Pour l’instant, je file des coups de main sur une exploitation à La Wantzenau. Lancer une exploitation, ça me fait peur, quand on voit ce que c’est au niveau de la paperasse, des normes qu’il faut faire et des investissements, donc je ne sais pas si je pourrai. Je vais plutôt essayer de me faire embaucher dans une exploitation. »
Johan Vogel est le président des Jeunes agriculteurs pour le canton de Brumath. Il est producteur de pommes :
« On a deux gros soucis aujourd’hui : la loi Egalim non respectée dans les grandes surfaces. On devrait pouvoir discuter directement de nos prix. Là c’est eux qui fixent sinon ils vont voir ailleurs. Je fais partie d’une coopérative de production de pommes. On travaille avec toutes les enseignes de grandes surfaces, chaque enseigne veut être moins chère que l’autre. Quand on vend 1 kg de pommes à 1,40€ au magasin, derrière il est vendu 2,50€, ou 2,60€ et ça va encore mais ils nous imposent de plus en plus des promos, on passe sous la barre de 1€ le kg. Ou moins. Et pendant ce temps, les charges augmentent, une augmentation de 150% du prix de l’électricité… »
Arnaud élève des vaches pour le lait :
« En ce moment je vend mon lait à Alsace Lait. Mois de décembre 480 euros pour mille litres. Ce n’est jamais suffisant. Avec toutes les charges qui augmentent les derniers temps, c’est difficile, le gasoil, l’énergie, les cotisations. Le revenu ne permet pas de me rémunérer moi et mon père donc je suis obligé de faire un mi temps à côté depuis que je suis sorti du BTS en 2019. Ça dépend des saisons mais je peux faire des semaines 40 heures sur l’exploitation en plus du mi-temps. Il faudrait une diminution des charges et réguler les prix pour qu’on s’en sorte. »
Au comptoir agricole de Vendenheim, les premiers tracteurs arrivent.
Une dizaine de tracteurs au départ de Sélestat. « Ça commence à prendre forme… », se félicite la FDSEA du Bas-Rhin sur sa page Facebook vers 13h30.
En train de manger avant de rejoindre une vingtaine d’exploitants agricoles au départ de Vendenheim, Fabien Metz accepte de répondre à nos questions sur les revendications portées par le mouvement social en cours. Très vite, l’agriculteur et vice-président de la FDSEA du Bas-Rhin décrit une revendication concernant le prix des énergies :
« On attend une vraie garantie sur la défiscalisation du carburant. Aujourd’hui, pour que je puisse bénéficier de la défiscalisation sur le carburant GNR (Gaz Non Routier), je dois donner toutes les factures à la fin de l’année. On pourrait imaginer des taxes déduites du carburant dès l’achat du carburant GNR.
Concernant l’électricité, le ministre Bruno Le Maire a annoncé sans gêne une augmentation de 10% des tarifs. Nos activités agricoles sont très dépendantes des prix de l’électricité. Que ce soit pour le maraîchage, avec l’alimentation des chambres froides ou que ce soit pour l’élevage, avec les besoins de réfrigérer les tanks à lait. Nous attendons donc des annonces sur les charges liées à l’énergie. »
L’agriculteur de la Wantzenau, en polyculture labellisée à Haute Valeur Environnementale, réclame aussi des normes moins contraignantes. Il évoque par exemple les périodes d’épandage autorisées qui sont, selon lui, trop courtes : « La directive nitrate est clairement un texte que l’État devrait pouvoir adapter au contexte local. » De même, concernant la mise en jachère obligatoire de 4% des terres agricoles, Fabien Metz attend « un report de la mise en non production qui devait se faire en 2024. »
Fabien Metz espère enfin, à plus long terme, une réforme du système de fixation des prix des denrées agricoles : « Selon les productions, nous faisons face soit à des prix de vente fixés en toute opacité par les grandes surfaces, soit à un marché mondial dont on a cru trop longtemps qu’il suffisait de faire jouer la concurrence sur un marché libre. Il faut trouver un autre système de construction du prix des denrées agricoles. »
Interviewé sur France Bleu Alsace dans la matinée du mercredi 24 janvier, le président de la FDSEA du Bas-Rhin Franck Sander décrit une mobilisation qui durera jusqu’au jeudi 25 janvier dans la soirée. Interrogé sur l’explosion d’un bâtiment de l’administration publique par le Comité d’Action Viticole à Carcassone (Aude), le responsable syndical a réagi :
« Le mouvement de l’automne, avant Noël, c’était un mouvement de retournement des panneaux. C’était un mouvement tout doux pour dire : « On est là, on a un problème, écoutez-nous. On marche sur la tête. On retourne les panneaux. » Il y avait pas de casse. Ca n’embête personne. Toutes ces manifestations et ces actions sans casse de l’automne dernier, on voit bien que c’est pas utile. Donc le monde agricole et les agriculteurs en sont à un stade où ils se disent : « De toute façon, je n’ai plus rien à perdre. » C’est ça qui est en train de se dire. En tant que responsable agricole, je ne cautionne pas la casse. L’objectif aujourd’hui ce n’est pas de casser. Mais je peux comprendre qu’il y ait par endroits des dérapages au vu du désarroi qu’on connait aujourd’hui dans nos campagnes. »
Selon le directeur du syndicat FDSEA 67, les premiers tracteurs partent de tout le département du Bas-Rhin à partir de midi. Yohann Lecoustey décrit des départs d’Ebersheim, Marmoutier, Roppenheim ou encore Mundolsheim. Il estime qu’environ 400 tracteurs arriveront à Strasbourg entre 14 et 15h. Le responsable syndical évoque une « organisation très intense » :
« On va monter des groupes électrogènes, des chapiteaux, des tables, des chaises, des barbecues pour passer la nuit sur la M35. Les cantons s’organisent pour les couches. Certains ramènent des vieux canapés et des bâches. Ça suffit pour faire un petit loft. »
Dans un communiqué diffusé hier soir, la préfecture du Bas-Rhin prévoit « de fortes perturbations de circulation dans l’agglomération strasbourgeoise ». Selon les services de l’État, « plusieurs convois agricoles se regrouperont sur la M35 au niveau de la nécropole de Cronenbourg à Strasbourg et bloqueront la M35 dans les deux sens de circulation à partir de ce mercredi 24 janvier 14h jusqu’à ce jeudi 25 janvier 23h59. »
En conséquence, des déviations obligatoires sont mises en place sur la M35 :
- depuis le nord, dernière sortie au Marché-Gare (sortie 1)
- depuis le sud, dernière sortie sur la M351 (sortie 3 « Porte blanche »)
En raison de la manifestation des agriculteurs, la préfecture du Bas-Rhin conseille aux automobilistes « d’éviter ce secteur et, dans la mesure du possible, d’avancer ou de retarder leurs déplacements ».
Bienvenue sur ce compte-rendu du blocage de l’autoroute A4/A35 organisé par les syndicats d’exploitants agricoles FDSEA et Jeunes Agriculteurs. Annoncée dans la soirée du lundi 22 janvier, cette manifestation est présentée comme l’acte 2 d’une mobilisation initiée en novembre 2023. Les agriculteurs avaient alors retourné les panneaux de signalisation des communes et défilé à Strasbourg avec pour mot d’ordre « Pas de transition sous pression ». Par communiqué, la FDSEA du Bas-Rhin dénonçait alors « des sujets réglementaires qui s’accumulent depuis des mois, venant plomber la compétitivité et la productivité des exploitations agricoles. »
Deux mois plus tard, la colère reste intacte. Yohann Lecoustey, directeur de la FDSEA 67, s’insurge face à une « politique agricole qui marche sur la tête » : « On force les agriculteurs à prendre en compte des exigences environnementales. Ce ne serait pas un problème si les consommateurs répondaient aussi à cette exigences environnementales. Or force est de constater que les consommateurs se détournent des produits français et de l’agriculture biologique. » Les syndicats productivistes fustigaient également « l’obligation de mettre en place au moins 3% de jachères sur le territoire » alors « qu’une année sur deux, les éleveurs manquent de fourrage ».
Selon un communiqué de la FDSEA du Bas-Rhin, le blocage doit durer 24 heures minimum.
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