
Au tribunal de commerce, la liquidation de Fast Despatch, sous-traitant d’Amazon, enfin engagée
Le tribunal de commerce de Bobigny a démarré la liquidation du sous-traitant d’Amazon Fast Despatch Logistics. Sans activité, les ex-livreurs vont pouvoir reprendre un emploi mais leur indemnisation reste floue, l’entreprise britannique ayant déserté.
C’est un soulagement pour les centaines de chauffeurs-livreurs de Fast Despatch Delivery en France, dont environ 80 à Strasbourg. Les salariés de ce sous-traitant d’Amazon ont vu leur activité s’arrêter brutalement le 9 août (voir notre article). Mais sans nouvelles de leurs dirigeants, partiellement payés, ces ex-employés n’ont pas encore le droit de postuler auprès d’une autre entreprise ni de s’inscrire à Pôle Emploi.
Des licenciements sous trois semaines
Lundi 5 septembre, le tribunal de commerce de Bobigny, le siège français de la société britannique étant situé à Villepinte, a ouvert la procédure de liquidation judiciaire. C’est déjà une petite victoire pour les salariés. « Grâce à nos actions, les syndicats ou les élus de la France insoumise (Emmanuel Fernandes, député LFI de la 3e circonscription de Strasbourg s’est rendu plusieurs fois au dépôt de la Meinau, NDLR), cette affaire a été prise très au sérieux. On va pouvoir avancer maintenant », se satisfait Lucas Nomine, livreur strasbourgeois depuis trois ans qui a fait le déplacement jusqu’à Bobigny.

Fast Despatch Logistics (FDL) n’était pas présent à l’audience. Un mandataire financier a été nommé par le tribunal. Les licenciements devraient intervenir sous trois semaines, avec le versement d’indemnités. Grâce à cette procédure, les salaires correspondant à la période entre la fin d’activité (vraisemblablement le 9 août) et le licenciement effectif fin septembre seront versés par l’Assurance de garantie des salaires (AGS), un organisme para-public financé par les cotisations d’entreprises.
Un précédent pour impliquer les donneurs d’ordres ?
Le cas de Fast Despatch Delivery est particulièrement scruté, car des syndicats et des parlementaires de La France insoumise, souhaiteraient que, dans une telle situation, la responsabilité du donneurs d’ordres soit partiellement engagée, soit Amazon dans ce cas. Certaines lois récentes, comme celle sur le devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordres pourraient être mobilisés dans d’autres procédures. « On en n’est pas là », tempère Me Étienne Colin avocat du Comité social et économique (CSE) de l’entreprise :
« Cette procédure sert à ce que les licenciements soient engagés sous trois semaines et les salaires garantis jusqu’à la fin de la procédure, c’est la loi. Notre travail maintenant va être d’aider le mandataire à reconstituer chaque situation, ce qui s’annonce comme un vaste travail. Même sur le nombre de salariés, on a des chiffres très partiels. Sont-ils 700 ? 1 200 ? On ne sait pas. »
Mais l’avocat note que le dossier pourrait avoir d’autres répercussions juridiques :
« Le parquet a quasiment annoncé l’ouverture d’une information judiciaire, en demandant au greffier de bien prendre en compte chaque élément ».
« Mêmes les camionnettes ne sont plus là »
Reste qu’en raison de la désertion de Fast Despatch Logistics, le contexte juridique et économique demeure flou regrette Me Colin :
« C’est un gros groupe anglais avec des ressources, mais qui est parti. Même les camionnettes ne sont déjà plus en France. Sur le plan indemnitaire, c’est aussi très flou. Depuis les ordonnances Macron, il y a tout intérêt à dissoudre une filiale européenne. »
On peut même imaginer la création d'une caisse de solidarité face à ce type de situations absurdes que nous imposent les délocalisations outrancières ...
D'accord avec vous.
Sauf sur un point, ce genre de situation n'est pas absurde. Elle est, du côté du patronat, le fruit d'une réflexion capitaliste mûrement réfléchie, tactiquement préparée de longue date (dès la création de la société FDL). Cette méthode mafieuse existe depuis longtemps. Un exemple : dès les années 1980, le groupe Bouygues (BTP) créait un service "contentieux" au sein même de sa société dès qu'il décrochait un gros marché. Ce service n'était et est toujours composé que de juristes et avocats retors et pervers. Il anticipait les situations conflictuelles avec les PME sous-traitantes. Bouygues savait pertinemment que ces dernières ne pourraient pas réaliser les chantiers qui leur étaient attribués en utilisant les bons matériaux, ceux correspondant aux normes internationales et principalement européennes et aussi parce que ces PME étaient /sont obligées d'accepter des contrats au "moins disant". Ainsi, quand il y a révélation de malfaçon, le client (le promoteur ou la ville) ne pouvait/ne peut se retourner que contre la PME. Laquelle, entre temps, a "fondu les plombs", a déposé le bilan et disparu. Bien souvent cela se conclu par la disparition du patron de la PME qui est parti à l'étranger.
Et la société internationale, multinationale, s'en sort toujours les fesses propres. Tout cela n'a rien d'absurde, c'est seulement calculé à l'avance.