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À Strasbourg, d’anciens détenus dénoncent une prison insalubre où l’on meurt

Une cinquantaine de personnes ont manifesté devant la maison d’arrêt de Strasbourg samedi 5 juillet. Parmi elles, plusieurs anciens détenus décrivent une prison insalubre où les morts se succèdent.

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À Strasbourg, d’anciens détenus dénoncent une prison insalubre où l’on meurt
Une cinquantaine de personnes ont répondu présentes à l’appel des prisonniers pour des conditions de détention dignes.

« Solidarité, avec les prisonniers ! » Une cinquantaine de personnes ont donné de la voix samedi 5 juillet en début d’après-midi. Empêchés d’approcher l’entrée de la maison d’arrêt de Strasbourg, manifestants et manifestantes ont fini par crier pour tenter de se faire entendre des détenus à une centaine de mètres. Le rassemblement a eu lieu à l’appel de plusieurs prisonniers strasbourgeois suite au décès de Serge Meckes dans sa cellule. Plusieurs membres d’organisations de gauche ont répondu présents, comme la CNT, les syndicats Solidaires Alsace et FSE ou encore l’Action antifasciste. Le député insoumis Emmanuel Fernandes était aussi venu grossir les maigres rangs de la manifestation.

« Tout ce que j’attends maintenant, c’est la vérité sur les circonstances de la mort de Serge. »

Lucien, neveu de Serge Meckes

Neveu du défunt, Lucien Meckes a tenu à rendre hommage à Serge Meckes. Il est aussi venu exprimer son incompréhension :

« Tout ce que j’attends, c’est la vérité sur les circonstances de sa mort. Pourquoi est-ce qu’on a laissé un aveugle seul en cellule ? Combien de temps les surveillants ont mis pour intervenir après le début de l’incendie ? J’ai lu avant d’arriver qu’il y a des centaines de morts chaque année dans les prisons françaises. Pour moi, ce qui est arrivé à Serge aurait pu être évité. J’ai l’impression qu’à cause du manque de personnel, les prisons sont mal gérées. »

Des morts en série

Aux côtés de Lucien, Mehdi se tient aussi sur ce bout de trottoir en solidarité avec la famille Meckes. Devant la prison qu’il a connue entre 2005 et 2006, il se souvient des décès qui ont eu lieu pendant sa détention à Strasbourg :

« Quand j’étais à l’Elsau, il y a eu trois morts. Deux s’étaient pendus. Et pour le troisième, c’était déjà un décès dans l’incendie d’une cellule. Alors 20 ans plus tard je me demande : comment est-ce possible qu’on n’arrive pas à ouvrir assez vite une cellule en feu dans une prison ? Il n’y a pas de surveillants qui font des rondes ? Il n’y a pas de détenus qui crient et tapent sur la porte pour alerter ? »

Appel au contrôleur général des prisons

Après avoir garé sa voiture devant la prison, Tourpal (le prénom a été modifié) place un carton qu’il a peint aux couleurs du drapeau français. Ancien détenu à la maison d’arrêt de Strasbourg, il a inscrit au marqueur noir les revendications de ses anciens camarades de détention (à retrouver au bas de cet article). Et des questions qui naissent de la mort de Serge Meckes :

« Il y a quelques jours, un mort, brûlé dans sa cellule à Strasbourg. Un prisonnier reste un être humain, même s’il purge sa peine. Où sont les droits de l’Homme ? Où est le contrôle général des lieux de privation de liberté ? »

Les revendications n’ont pas manqué d’en appeler aux valeurs de la République française.

Une prison insalubre

Samir, 21 ans, n’a pas connu la détention. Il s’est rendu à la manifestation car il connaît la réalité de la prison strasbourgeoise à travers les témoignages d’amis incarcérés : « Ils m’ont surtout raconté l’insalubrité, les punaises de lit, les cafards, les moisissures dans les douches, les câbles électriques dénudés… » Il n’est pas le seul à relayer la colère des détenus musulmans face à l’absence de viande halal dans les denrées à cantiner : « Ce n’est pas possible de priver les musulmans de viande. Certains en viennent à se faire livrer de la viande par drone ! »

Un peu en retrait, vêtu d’un maillot de l’Olympique de Marseille et d’une casquette Tn sur la tête, André se souvient de sa détention il y a vingt ans. Il sait que les conditions de vie dans la prison se sont durcies ces dernières années. Par un cousin incarcéré, il sait que la promenade n’a lieu plus qu’une fois par jour contre deux avant la pandémie de covid : « Si t’as pas le mental, quand tu passes ta journée à deux dans neuf mètres carrés, c’est le genre de truc qui peut te faire craquer… » Quand on l’interroge sur sa priorité pour améliorer les conditions de détention, André répond sans l’ombre d’un doute : « Rénover la prison, voire même la raser pour la reconstruire… »


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