Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Samedi 14 septembre, c’est la Rentrée des luttes au Phare citadelle

Samedi 14 septembre, c’est la Rentrée des luttes au Phare citadelle

Rue89 Strasbourg organise une université d’été citoyenne : la Rentrée des luttes. Une journée pour se rencontrer, débattre et prendre de la hauteur sur les enjeux politiques, sociaux et environnementaux alsaciens. Rendez-vous samedi 14 septembre au Phare citadelle.

Chaque année à la fin de l’été, les partis politiques se réunissent pour réfléchir, prendre de la hauteur et renforcer leurs liens. En tant que média politique, nous publions chaque jour des articles pour aider les citoyens à se forger des opinions. C’est pourquoi nous organisons une « université d’été citoyenne », la troisième Rentrée des luttes, en partenariat avec le Phare citadelle, samedi 14 septembre à partir de 13h.

La Rentrée des luttes, c’est une journée pour se rencontrer, échanger et débattre autour des enjeux locaux avec d’abord un grand forum formé par les stands d’une trentaine d’organisations, associations et collectifs de Strasbourg et d’Alsace (voir la liste ci-dessous). Leurs membres sont régulièrement sollicités par les journalistes de Rue89 Strasbourg, vous pourrez les retrouver et évoquer avec eux leur actualité ou leurs combats.

Trois tables rondes

Trois tables rondes sont proposées et animées par des journalistes de la rédaction, avec des intervenants et des intervenantes issues de la sphère militante, de la recherche et du monde politique.

    14h : Tram nord, stationnement : pourquoi la bataille pour l’espace public est aussi féroce ? Avec :
    – François Nowakowski, enseignant chercheur en urbanisme ENSA Strasbourg,
    – Pierre Ozenne, adjoint à la maire en charge de l’espace public,
    – Lucile Rimbert, directrice de la compagnie Lu², 16h : Géothermie et lithium : comment rester vigilant ? Avec :
    – Guillaume Barjot, militant écologiste et hydrologue,
    – Jean Schmittbuhl, directeur de recherche EOST / CNRS,
    – Michel Lorentz, maire de Roeschwoog.
    17h30 : Après le choc, comment répondre à l’extrême droite ? Avec : 
    – Benjamin Chevalier, professeur agrégé à Sciences Po Strasbourg
    – Elisabeth Mathis, déléguée syndicale CGT à Saverne,
    – Myriam Zekagh, candidate NFP dans le nord de l’Alsace.

Des ateliers pour se former

Nouveauté 2024 : des organisations proposent des ateliers pour se former en petits groupes. D’une heure maximum, ces rendez-vous visent à partager les connaissances sur un aspect précis.

    14h30 : Quelles sont les conséquences des dernières lois contre l’immigration ? Par D’ailleurs nous sommes d’ici, 15h : Qu’est-ce que le technocentre qui doit remplacer la centrale nucléaire à Fessenheim ? Par Stop transport – Halte au nucléaire, 15h30 : Comment efficacement communiquer auprès des médias ? Par Thibault Vetter, Rue89 Strasbourg, 16h : comment désamorcer la loi asile et immigration ? Par Amoureux au ban public, avec La Cimade et le SAF Strasbourg, 16h30 : Quelles collectivités interpeller selon les luttes ? Par Roni Gocer de Rue89 Strasbourg, 17h : Comment lutter pour la Palestine sans être accusé d’antisémitisme ? Par le Collectif Judeo-Arabe et Citoyen pour la Palestine 17h30 : Comment lancer une alerte sans se griller et pourquoi le faire ? Par Roni Gocer, Rue89 Strasbourg.

D’autres ateliers sont susceptibles de s’ajouter à cette programmation.

Un cadre convivial

Nous savons bien qu’il est toujours plus tentant de rester en terrasse que de venir s’informer sur les enjeux politiques locaux. Grâce aux services de restauration du Phare citadelle, nous vous proposons de faire les deux ! Et même de vous cultiver, grâce à une sélection de livres militants proposés par la librairie La Tache Noire.

En outre, à partir de 20h, la Rentrée des luttes continue avec une programmation musicale concoctée par Florian.

Nous remercions vivement toute l’équipe du Phare citadelle pour avoir accepté d’accueillir cet événement et de l’organiser avec nous. Toute la rédaction sera présente et nous espérons vous retrouver nombreux à cette occasion.

« Je sais qu’on est déjà mort » : colère et dépit chez les ouvriers de Dumarey Powerglide

« Je sais qu’on est déjà mort » : colère et dépit chez les ouvriers de Dumarey Powerglide
Après 34 ans dans l’usine Dumarey Powerglide, André Dulery ne compte pas partir avec le minimum.

À partir du samedi 31 août, les ouvriers de l’usine Dumarey Powerglide située à Strasbourg ne produiront plus une boîte de vitesses automatique qui représentait près de 80% du chiffre d’affaires de la société. Suite à ce fiasco, les ouvriers s’attendent à une fermeture du site qui emploie plus de 500 personnes.

« Vous avez vu le panneau les gars ? C’est parfait pour la photo. » Bras dessus bras dessous, la petite délégation d’ouvriers de l’usine Dumarey Powerglide se serre pour rentrer dans le cadre. Devant l’objectif, les salariés lèvent le poing, sourient, alors qu’au-dessus de leur tête trône un petit panneau rouge, marqué des lettres blanches : « Sans issue ».

Quelques instants plus tôt, ils avaient participé à une réunion au sein de la Maison des syndicats, vendredi 30 août, évoquant les emplois menacés dans le secteur automobile. Un sujet qu’ils maîtrisent bien : la survie de leur usine Dumarey Powerglide, au Port du Rhin, est désormais menacée avec le départ du plus gros client de l’entreprise, l’équipementier allemand ZF.

À Strasbourg, le site de Dumarey Powerglide se situe au Port du Rhin.Photo : Roni Gocer / Rue89 Strasbourg

Spécialisée dans les boîtes de vitesses, l’usine Dumarey produisait essentiellement pour le groupe allemand le modèle « 8HP »- cette pièce représentait près de 80% de la production du site. À partir du samedi 31 août, cette production s’arrête. La perte de chiffre d’affaires attendue pourrait être fatale pour la société. Le tribunal de Strasbourg examinera lundi 16 septembre une demande de procédure de sauvegarde.

591 emplois menacés

« Ce produit concernait à peu près 200 personnes en CDI », traduit André Dulery, délégué CGT au sein de l’entreprise, qui dénonce en intersyndicale avec la CFDT les répercussions de cette perte de clientèle. « Nos volumes de production étaient initialement de 100 000 à 80 000 pièces. La semaine dernière, la DRH nous annonce que les volumes ne seraient plus que de 52 000 pièces. » Précis, l’ouvrier raconte la chronique d’une débâcle annoncée. Onze ans plus tôt, en 2013 quand Dumarey Powerglide produisait pour ZF, l’usine comptait près de 1 000 salariés, elle n’en compte plus que 591 en CDI en août. Dans une réunion extraordinaire du comité social d’entreprise (CSE) en avril, la direction indiquait ne pas prévoir de plan social ni de chômage partiel.

« Sur l’ensemble des salariés en CDI, 267 s’occupent de la production » précise Haydar Turan, lui aussi délégué à la CGT. Le syndicaliste précise tout de suite : « Tous les postes vont être touchés. Les personnes qui s’occupent de la maintenance, la qualité, les méthodes… » André Dulery renchérit : « C’est l’affaire de tout le monde, de tous les salariés de l’entreprise. Dès qu’un secteur est touché, c’est tous les secteurs qui sont concernés. » Les quelques 200 salariés intérimaires risquent d’être les premiers à voir leurs missions réduites.

À droite, Haydar Turan accuse la direction et l’actionnaire principal, Guido Dumarey, d’avoir pris de mauvaises décisions.Photo : Roni Gocer / Rue89 Strasbourg

Dépendance économique dangereuse

En aparté, dans l’un des couloirs de la Maison des syndicats, le syndicaliste soupire. Il n’a pas beaucoup d’espoir pour les emplois : « Je ne connais pas l’échéance mais je sais qu’on est déjà mort. » Après 34 ans dans la boîte, il espérait un départ plus digne :

« Moi je suis en fin de carrière, j’ai 61 ans, je suis tiré d’affaire. Mais pour les plus jeunes, ça m’inquiète. La moyenne d’âge est de 52 ans dans l’entreprise, et sur le marché du travail on est déjà “senior” à 45 ans. Il faut imaginer ceux qui ont plus de 50 ans refaire un CV, une lettre de motivation… »

En dehors de la production de boîtes 8 HP, l’usine produit également des composants en plus petites quantités, notamment pour Stellantis et ZF. Des pièces qui ne concernent qu’une centaine d’emplois, estime Haydar Turan. Son collège André fulmine, sur la dépendance de son usine à un seul client, ZF : « Ça fait des années qu’on tire la sonnette d’alarme. Il n’y a eu aucune volonté de la direction locale de se diversifier et de trouver de nouveaux clients. Aujourd’hui, elle est responsable de cette situation. »

« On ne veut pas être virés comme des malpropres »

André Dulery, syndicaliste

Si le syndicaliste ne se fait pas d’illusions sur le maintien des emplois, il reste déterminé à ne pas accepter passivement la situation :

« La priorité, c’est de conserver les emplois bien sûr. Mais le problème, c’est que face à cette situation on en est pas là. Alors on fera des actions spontanées pour obtenir un fonds de garantie, qu’on estime à la CGT à 60 millions d’euros, ce qui représente 100 000 euros par salarié. On ne veut pas partir avec le minimum légal après 20 ou 25 ans d’ancienneté. »

« On ne veut pas être viré comme des malpropres », reprend Haydar Turan. « On est des êtres humains, on a plusieurs centaines de salariés, avec des familles là dedans. Dumarey doit payer la casse sociale. » Dans les semaines qui viennent, les salariés entendent se mobiliser, notamment à l’occasion du prochain Salon de l’auto, qui débutera le 14 octobre. « On prévoit aussi de descendre dans la rue en septembre, pour se faire entendre », assure l’ouvrier. « On espère que les politiques ne laisseront pas faire. »

Vélhop augmente sa flotte de vélos et revoit ses ambitions

Vélhop augmente sa flotte de vélos et revoit ses ambitions
De nouveaux modèles viennent gonfler la flotte de Vélhop, plus accessibles aux publics.

En cette rentrée, le service de location de vélos de l’Eurométropole de Strasbourg, géré par Strasbourg mobilités, a dévoile une flotte supplémentaire d’un millier de bicyclettes.

« La révolution des mobilités, ce n’est pas uniquement le tram, c’est aussi le vélo », annonce d’emblée Alain Jund, vice-président chargé des mobilités à l’Eurométropole de Strasbourg (EMS), lors d’une conférence de présentation de la nouvelle flotte de vélos Vélhop, jeudi 29 août. Heureux de cette avancée, l’élu a présenté avec Camille Janton, présidente de Strasbourg mobilités, une filiale de la CTS, la vingtaine de modèles qui composent désormais l’offre de location composée de 6 000 vélos en précisant que « le temps n’est plus au modèle de vélo unique ».

Des vélos partout mais toujours fixes

Dans le cadre du plan vélo initié au début de la mandature, l’EMS s’était engagée à développer la pratique cyclable en investissant 100 millions d’euros afin d’atteindre 20% de déplacements quotidiens à vélo d’ici 2030. « À travers cette nouvelle offre, nous avons deux messages à faire passer : le vélo pour tous et le vélo partout », explique Alain Jund. Le vice-président chargé des mobilités se félicite du développement territorial de l’offre de location « afin que toutes les communes de l’Eurométropole puissent bénéficier du Vélhop ». Une agence mobile se déplace dans les communes concernées par le service depuis juin mais elle ne compensera pas la fermeture des agences de proximité. En parallèle, sept nouvelles stations de vélos en libre-service vont être installées d’ici la fin de l’année et trois en 2025. Leur arrivée complètera les 32 stations déjà présentes sur le territoire.

Sous le soleil, Camille Janton et Alain Jung ont défilé en tandem sur la place Dauphine.Photo : Steeven Pellan / Rue89 Strasbourg

En revanche, il faut toujours rapporter les vélos à la même borne où ils ont été loués. Pour éviter des transferts de vélos en camion, et à devoir entretenir bien plus de bornes, l’Eurométropole refuse un système à la Vélib, où les vélos peuvent être déposés à une borne différente de celle de départ.

Depuis septembre 2023, l’offre s’est diversifiée avec des vélos électriques, pliants, cargos, à destination des enfants ou adaptés aux personnes à mobilité réduite. Comme le vélhop se veut « plus accessible », la location longue durée a également été étendue aux personnes travaillant ou étudiant dans l’Eurométropole mais n’y résidant pas.

Les nouveaux modèles de Vélhop se veulent « plus adaptés ».Photo : Steeven Pellan / Rue89 Strasbourg

Des syndicats appellent les enseignants à ne pas faire passer l’évaluation nationale aux élèves

Des syndicats appellent les enseignants à ne pas faire passer l’évaluation nationale aux élèves
Le gouvernement souhaite imposer des évaluations nationales standardisées régulières pour évaluer le niveau des élèves de primaire.

Les syndicats FSU, FO et UNSA estiment que l’évaluation nationale standardisée est inutile, chronophage et basée sur des critères trop restreints. Ils appellent les enseignants des écoles primaires à refuser cette consigne du ministère à la rentrée.

« C’est vraiment une conception à l’ancienne de l’enseignement », déplore Jonathan Welschinger, du syndicat d’enseignants FSU pour le premier degré. Accompagné de ses homologues de l’UNSA et de Force ouvrière vendredi 30 août, il étrille les nouvelles évaluations nationales standardisées voulues par le gouvernement.

Les trois organisations appellent les enseignants à ne pas les faire passer aux élèves. « Nous soutiendrons évidemment les collègues s’ils rencontrent des problèmes avec l’Inspection », assure Jacques Pousse, de Force ouvrière. Parallèlement, à l’échelle nationale, la CGT, Sud et FSU prévoient une journée de grève dans les écoles maternelles et élémentaires le mardi 10 septembre.

L’évaluation nationale est l’une des composantes du « choc des savoirs », cette mesure visant à séparer les élèves selon leur niveau dès leur entrée au collège et initiée par Gabriel Atal lorsqu’il était ministre de l’Éducation. À la rentrée, dans toutes les sections élémentaires, les acquis des élèves doivent être évalués dans le cadre de tests nationaux. Les CP devront repasser une évaluation en milieu d’année. « Tout est centré sur le français et les maths, donc c’est déjà très restrictif pour estimer le niveau », considère Jonathan Welschinger.

Diagramme de compétences pour chaque élève

« Pour le français, le but de ces évaluations est de voir si les élèves lisent vite, mais pas du tout s’ils ont compris ce qu’ils ont lu. C’est absurde, abonde Didier Charrie, de l’UNSA. Le ministère n’a besoin que d’éléments mesurables facilement, donc ils évaluent sur des critères qui ne correspondent pas à la compréhension. Et tout est contrôlé, même la manière dont on donne les consignes… »

« Les enfants auront tous, à la fin, un diagramme en toile d’araignée, probablement déterminé par un algorithme, qui les suivra pendant leur cursus dans le premier degré », explique Jonathan Welschinger :

« On leur collera une étiquette de niveau sur la tête, et cela sera censé guider nos actions auprès d’eux. Ce type de catégorisation peut avoir des conséquences négatives sur la perception qu’un élève a de lui. Nous n’avons absolument pas besoin de ça, nous organisons des évaluations au quotidien qui sont bien plus efficaces pour connaitre les niveaux. »

D’ailleurs, les syndicats estiment que le non respect de cette évaluation n’aura « strictement aucune conséquence sur les élèves ». « On ne se servirait pas de ces toiles d’araignées de toute façon. Les élèves ont leurs bulletins, qui sont de meilleurs indicateurs », souffle Jonathan Welschinger.

Jonathan Welschinger, syndicat FSU.Photo : TV / Rue89 Strasbourg

Perte de sens

« Ce procédé serait très chronophage. Nous sommes censés enregistrer dans un logiciel les réponses que les élèves auront noté à l’écrit », poursuit Jacques Pousse de Force ouvrière. « Il y aura le temps de passation et la remontée aux parents, tout ça pour une évaluation que l’immense majorité des enseignants jugent inefficace, expose Jonathan Welschinger. C’est typiquement ce genre de réforme qui crée de la souffrance dans notre métier parce qu’il y a un sentiment de perte de sens. »

Les trois syndicats voient dans cette directive une volonté de contrôle permanent, allant à l’encontre de la liberté pédagogique, de la marge de manœuvre nécessaire aux enseignants. « Nous avons besoin de nous adapter aux élèves en tenant compte de leurs réalités », précise Jacques Pousse : « J’ai une classe dans laquelle une bonne partie des élèves ne parlent pas français à la maison. Forcément cette évaluation standardisée n’est pas adaptée à eux par exemple… »

« Pour améliorer les conditions d’apprentissage, nous avons besoin d’un choc des moyens, pas de leur choc des savoirs. Cette année nous aurons 10 postes en moins [en premier degré] dans le Bas-Rhin par rapport à l’année précédente », conclue Jonathan Welschinger.

Les Alsaciens, ces déséquilibrés…

Les Alsaciens, ces déséquilibrés…
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En 1951, le pasteur Frédéric Hoffet estimait qu’il y avait matière à sonder les âmes alsaciennes tourmentées après trois guerres franco-allemandes et autant de changements de camps. Vraiment ? Étendons-nous sur son divan et voyons où ça mène.

« L’Alsace a un immense besoin d’être aimée », implorait Frédéric Hoffet, alors qu’il couchait les Alsaciens sur le divan au sortir de la Seconde guerre mondiale dans son ouvrage Psychanalyse de l’Alsace. Ce classique du patrimoine littéraire régional paru en 1951 chez Flammarion a depuis été réédité à quatre reprises, la dernière fois en 2018 (éditions La Nuée bleue), alors que l’absorption de l’Alsace dans la nouvelle région Grand Est déchaînait les passions. 

Le pasteur alsacien s’y emploie à analyser par le menu « la névrose alsacienne, pour comprendre un peuple qu’un destin trop complexe a déséquilibré ». Un peu limite les généralisations peut-être ? Pour l’auteur l’enjeu n’est rien de moins que politique :

« Pour comprendre les attitudes politiques des hommes, il importe d’avantage de comprendre leurs complexes que leurs idées. (…) Les faits politiques (…) plongent leurs racines dans un inconscient collectif dont ils sont l’expression. »

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À la Neustadt, Jeanne Barseghian prend son café en terrain miné

À la Neustadt, Jeanne Barseghian prend son café en terrain miné
Le café avec la maire se tenait en extérieur, sur la place Gisèle Halimi.

Pour la rentrée, Jeanne Barseghian proposait aux habitants de la Neustadt de prendre un « café avec la maire » sur le parvis du palais de justice, mardi 27 août. Dans un quartier mobilisé contre le passage du tram nord par l’avenue des Vosges et contre la hausse du prix du stationnement, la colère reste courtoise.

André n’a rien vu venir. En se rendant sur la place Gisèle-Halimi devant le tribunal judiciaire, mardi 27 août, l’homme aux cheveux grisonnants s’était préparé à la confrontation, au choc, avec la maire de Strasbourg. Habitant tout proche, il est ulcéré par l’augmentation récente du tarif du stationnement : « Ce n’est plus une augmentation, c’est du racket ! J’aimerais des explications sur cette folie. » Dans la petite foule qui se forme, plusieurs personnes approuvent. Eux aussi profitent du « café avec la maire » que la municipalité organise dans chaque quartier, pour se faire entendre. « Je n’attendais rien d’elle quand elle a été élue, mais j’ai été désagréablement surpris quand même », fulmine André, prêt à en découdre.

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Pollution, leptospirose… Se baigner dans la Bruche demeure risqué

Pollution, leptospirose… Se baigner dans la Bruche demeure risqué
Plusieurs sites sur la Bruche sont prisés par les baigneurs.

Tous les étés, des personnes se plongent dans la Bruche pour se rafraichir. Aucune autorité publique ne mesure si l’eau de cette rivière est baignable mais les communes concernées identifient plusieurs risques.

Quand la chaleur arrive, des Alsaciens et des Alsaciennes choisissent la Bruche pour se rafraichir. Elle prend sa source dans les Vosges vers Climont, traverse la vallée du même nom, passe par une vingtaine de communes comme Schirmeck, Mutzig, Molsheim, Ernolsheim, Eckbolsheim et se jette dans l’Ill à Strasbourg. Moins fréquentée que les sites surveillés du Baggersee ou de la Ballastière, cette rivière offre par endroit des conditions de baignade agréables, avec de petites plages bucoliques à l’ombre des arbres.

Mais s’immerger dans la Bruche se fait « à vos risques et périls », avertit la commune de Eckbolsheim : « Il n’y a pas d’arrêté municipal réglementant la baignade dans la Bruche. » Pareil à Holtzheim, « où la baignade n’est ni autorisée, ni interdite. On va dire tolérée. Nous ne l’encourageons pas et avons placé des panneaux listant les risques encourus », expose Bertrand Furstenberger, adjoint au maire. Les risques en question : « Courants forts, matériaux et rochers sous l’eau, instabilité des berges, pollution notamment après des épisodes de pluie et d’orage. »

À Strasbourg en revanche, la Ville interdit de nager dans tous les fleuves, rivières et canaux depuis un arrêté municipal pris en 1955 à cause des courants et des potentielles contaminations bactériologiques.

La leptospirose, issue de l’urine des rongeurs

Les communes d’Holtzheim et d’Eckbolsheim font état d’un risque d’attraper la leptospirose. Cette maladie est bénigne dans la majorité des cas, mais elle peut conduire à la mort chez 5 à 10% des personnes contaminées d’après l’institut Pasteur. Elle est causée par une bactérie véhiculée par les déjections des rongeurs, et peut donc apparaitre dans n’importe quel cours d’eau où vivent des rats et des ragondins. « Un chien est décédé quelques jours après une baignade dans la Bruche en 2023. Coïncidence ou leptospirose canine, nous n’avons pas eu la conclusion », indique Bertrand Furstenberger.

Des populations de rats et de ragondins sont bien établies dans la Bruche, ce qui implique un risque de leptospirose.Photo : TV / Rue89 Strasbourg

Contactée par Rue89 Strasbourg, l’Agence régionale de santé (ARS), chargée de surveiller les zones de baignade signalées par les communes, affirme qu’aucun secteur « n’a été déclaré dans les cours d’eau du Bas-Rhin, y compris dans la Bruche. Cette rivière ne fait donc pas l’objet d’un suivi spécifique ». La liste des plans d’eau contrôlés est disponible sur le site de l’ARS.

L’organisme d’État précise que les relevés réalisés pour établir s’il est possible de se baigner (qui ne concernent donc pas les rivières alsaciennes) se font en général deux fois par mois :

« Il s’agit d’analyses des paramètres physico-chimiques (température de l’eau et de l’air, transparence) et microbiologiques, ainsi que de détection d’entérocoques et d’Escherichia Coli, qui sont des indicateurs de contamination fécale. Depuis 2021, la chlorophylle A est également recherchée, servant d’indicateur pour estimer la biomasse phytoplanctonique. Les pesticides ne sont pas inclus dans les analyses des eaux de baignade à ce jour. »

Une eau en mauvais état chimique

De son côté, l’Agence de l’eau Rhin Meuse réalise des mesures dans la Bruche comme dans les autres cours d’eau de la région. Ils sont publiés sur la plateforme du système d’information sur l’eau Rhin-Meuse. Que ce soit à Schirmeck en amont ou près de Strasbourg à Holtzheim et Kolbsheim, la Bruche présente ces dernières années un état chimique qualifié de « mauvais », essentiellement à cause de la présence de molécules de la familles des hydrocarbures.

Quant aux pesticides, ils sont peu détectés dans la rivière mais ils ne sont pas tous recherchés et leur concentration peut augmenter en cas de précipitations. À noter que ces éléments ne sont pas des critères utilisés pour déterminer si une zone est baignable ou non mais qu’il est tout de même mauvais pour la santé de se baigner dans un bain d’hydrocarbures ou de pesticides.

La Ville de Strasbourg rappelle de son côté qu’elle continue d’envisager « l’installation de baignades urbaines à Strasbourg. Des études sont en cours pour définir la faisabilité et les contours d’un tel projet ». Dans l’attente des résultats, la municipalité n’en dit pas plus. Pas sûr que rendre l’Ill baignable à Strasbourg sera plus simple que la Seine à Paris, sachant que Mediapart a révélé que la qualité de l’eau était insuffisante pendant presque toute la durée des Jeux olympiques, alors que des épreuves s’y sont tenues.

La baignade très dangereuse dans les cours d’eau VNF

Pour ce qui est de la baignade dans l’Ill, l’Aar, le Rhin ou les canaux du Rhône au Rhin et de la Marne au Rhin, elle est très déconseillée. Ces cours d’eau empruntés par des bateaux sont gérés par Voies navigables de France (VNF), qui communique régulièrement sur les risques de noyade en raison de la présence de courants parfois très violents, de remontées sur les berges difficiles, ou encore d’une mauvaise visibilité sous l’eau.

VNF interdit totalement de nager à proximité des écluses à cause de l’apparition de tourbillons ou du risque de heurter des embarcations. L’organisme évoque également les dangers en cas de sauts depuis un pont (même de faible hauteur) :

« Dans l’eau trouble des canaux et rivières se cachent des ouvrages qui peuvent se révéler mortels : blocs de béton, pieux métalliques, amoncellement de roches. Les canaux et rivières sont peu profonds, ce qui accentue le risque d’accidents. »

Voies navigables de France rappelle que 40% des noyades mortelles ont lieu dans des canaux ou des rivières, soit environ 400 par an à l’échelle du pays.

Franck Leroy sort la Région Grand Est de l’Office pour la langue alsacienne

Franck Leroy sort la Région Grand Est de l’Office pour la langue alsacienne
Les locaux de l’OLCA à Strasbourg

La Région Grand Est et la Collectivité d’Alsace ont toutes les deux annoncé le départ d’élus du Grand Est du conseil d’administration de l’Office pour la langue et la culture alsacienne (OLCA). Une nouvelle passe d’armes entre les deux présidents, sur fond de rivalité à propos des contours institutionnels de l’Alsace.

La bataille entre la Collectivité européenne d’Alsace (CeA) et la Région Grand Est a repris mardi 27 août. Cette fois, c’est Franck Leroy, le président (ex-Horizons) qui a dégainé : dans un communiqué diffusé hier, la Région Grand Est (RGE) annonce qu’elle se retire de l’Office pour la langue et la culture alsacienne (OLCA), un organisme financé par la RGE et la CeA :

« Si la participation régionale pour 2024 sera bien versée afin de ne pas mettre en difficultés le tissu associatif concerné, la Région soutiendra à l’avenir sous d’autres formes la promotion de la culture et de la langue alsacienne. »

(suite…)

En déficit à chaque saison, le Racing embrasse le foot-business

En déficit à chaque saison, le Racing embrasse le foot-business
Les salaires des joueurs sont tellement élevés que malgré des dizaines de millions d’euros de chiffre d’affaires, le Racing est déficitaire.

Les revenus générés par le Racing ne couvrent pas les salaires des footballeurs depuis sa montée en Ligue 1. Pour sortir de l’impasse, le club s’est fait racheter par un consortium américain qui peut dépenser des dizaines de millions d’euros sans se soucier du déficit structurel du club, mais aussi sans garantie de progression sportive.

« Depuis une quinzaine d’années, globalement, les clubs de Ligue 1 sont déficitaires. Le Racing club de Strasbourg est complètement dans cette logique. » Directeur de recherches en économie au CNRS, Luc Arrondel travaille sur le secteur du football. Selon lui, les clubs français sont condamnés à avoir de grosses difficultés pour progresser :

« Les droits de diffusion des télévisions et les revenus commerciaux ne comblent pas le coût des salaires des joueurs. Avant son rachat par BlueCo, le Racing était contraint d’avoir un bilan positif lors du mercato en vendant les meilleurs joueurs pour éviter la faillite. »

Rue89 Strasbourg a épluché les comptes du Racing club de Strasbourg Alsace (RCSA) publiés par la DNCG, l’autorité de contrôle chargée de surveiller les finances des clubs français. Les résultats disponibles les plus récents datent de la saison 2022-2023, juste avant la vente du club au consortium BlueCo. Cette saison là, le RCSA avait gagné 18 millions d’euros de droits audiovisuels, 15 millions pour le sponsoring, 8 millions de recettes lors des matchs, et 20 millions d’autres revenus commerciaux, comme la vente de maillots par exemple, soit 62 millions d’euros de produits au total.

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Contre la loi immigration, un cercle de silence vendredi 30 août

Contre la loi immigration, un cercle de silence vendredi 30 août
Cercle de silence en mars 2010

Un Cercle de silence est organisé vendredi 30 août à Strasbourg, pour protester contre la publication des décrets d’application de la loi immigration. Cette manifestation d’une heure existe depuis plus de dix ans.

Le collectif des Cercles de silence appelle à un rassemblement vendredi 30 août, entre 18h et 19h, place Kléber dans le centre de Strasbourg. Depuis plus de dix ans, les organisateurs entendent démontrer par leur silence leur refus d’accepter la politique migratoire pratiquée par les différents gouvernements depuis 2007.

Dans un texte publié sur le blog de l’organisation, le collectif du Cercle de silence alsacien déplore qu’une « politique du pire » soit appliquée contre les migrants se dirigeant vers la Grande-Bretagne depuis Calais, une politique de fermeté absolue qui n’a pour effet que de rendre le parcours des migrants plus dangereux.

En outre, le collectif dénonce la publication en juillet des décrets d’application de la loi immigration, avec notamment un délai de rétention initiale, « sans contrôle d’un ou une juge, qui passe de deux à quatre jours », la levée du secret médical au profit de l’Office français de l’immigration, le renforcement du niveau de maîtrise de la langue française… La loi prévoit désormais des « exceptions » pour les « métiers en tension », à condition de prouver 12 mois d’activité antérieure et 3 ans de résidence ininterrompue en France.

Des élus haut-rhinois « mettent en danger d’inondation le Bas-Rhin »

Des élus haut-rhinois « mettent en danger d’inondation le Bas-Rhin »
Les inondations graves se multiplient ces dernières années en Europe.

Des maires bas-rhinois accusent leurs homologues haut-rhinois de refuser une réflexion globale sur les aménagements autour de l’Ill. Selon eux, cette posture met en danger leurs communes alors que le risque d’inondation augmente avec le changement climatique.

La rivière de l’Ill prend sa source tout au sud de l’Alsace, elle traverse le Haut-Rhin et se jette dans le Rhin au nord de Strasbourg. Ce que décident les élus haut-rhinois, en amont, a donc des conséquences sur ce qu’il se passe en aval, dans le Bas-Rhin. Mais cette responsabilité commune est à l’origine d’un conflit ouvert entre des acteurs des deux territoires, qui a pris une nouvelle dimension depuis l’été 2024.

Rivières de Haute Alsace, le syndicat des eaux haut-rhinois, refuse la proposition du SDEA, le syndicat des eaux bas-rhinois, de créer un établissement public compétent sur l’ensemble du bassin de l’Ill pour imaginer des systèmes de protection contre les inondations.

« Votre positionnement n’est malheureusement pas à la hauteur des enjeux. » Cette phrase est issue d’une lettre envoyée le 23 juillet par 18 maires et trois présidents de communautés de communes, tous administrateurs au syndicat des eaux bas-rhinois (SDEA), à destination de Michel Habig, président de Rivières de Haute Alsace (RHA), le syndicat des eaux haut-rhinois :

« Que diraient nos concitoyens alsaciens en cas de crue dévastatrice, de l’impossibilité constante de dialogue avec les acteurs haut-rhinois pour aboutir à un projet de bassin versant co-construit et fondé sur des bases rigoureuses, étayées par des études indépendantes ? »

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Engagée contre les atteintes à l’environnement, la rédaction suit de près les enjeux écologiques et travaille sur les alertes qui lui sont transmises. Sans Rue89 Strasbourg, la pollution de l’eau potable par les pesticides et des projets comme un stade de biathlon dans les Vosges, ou une route sur la colline de Lorentzen seraient bien moins connus des Alsaciens.

Thibault Vetter suit les collectifs militants et les associations qui se mobilisent partout dans la région face aux projets écocides, comme de nouvelles zones d’activités sur des terres cultivables. Il enquête sur diverses sources de pollution, les pesticides, les usines, et leurs impacts sur la santé publique. Un travail de l’ombre, qui nécessite beaucoup de contacts et le décorticage de nombreuses alertes.

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Contestée par des écologistes, la rénovation du canal du Rhône au Rhin débute

Contestée par des écologistes, la rénovation du canal du Rhône au Rhin débute
La section concernée par le projet constitue un refuge pour la biodiversité.

La Région Grand Est annonce le début du chantier de rénovation du canal du Rhône au Rhin entre Artzenheim et Friesenheim lundi 26 août. L’opération est contestée par des organisations écologistes car ce cours d’eau abandonné abrite désormais une grande biodiversité.

C’est un projet à 46 millions d’euros (le détail ici) : la rénovation d’une section de 24,5 kilomètres du canal du Rhône au Rhin, entre Artzenheim et Friesenheim, pour y permettre la navigation de plaisance.

Lundi 26 août, la Région Grand Est déclare le lancement de la première phase des travaux qui doit durer de août 2024 à fin 2025, un investissement de 12 millions d’euros. Il s’agit pour l’instant de « la rénovation et l’automatisation des trois écluses sud au niveau de Artzenheim et Marckolsheim ».

Parallèlement, « la consolidation de la digue Ouest », et le travail sur la rive Est débuteront respectivement en septembre et en novembre. La piste cyclable bordant le canal sera donc déviée sur le kilomètre et demi concerné par cette première phase du chantier. La seconde phase des travaux, essentiellement de la consolidation de digues sur 23 kilomètres, doit être conduite entre 2026 et 2029.

Des organisations écologistes mobilisées

Fermée depuis les années 60, cette partie du canal a été recolonisée par la nature. Elle accueille désormais de nombreuses espèces d’oiseaux (poule d’eau, foulque, martin pêcheur…), de poissons (bouvières), d’éponges ou encore de coquillages d’eau douce. Certaines sont menacées d’extinction. La reprise de la navigation détruirait d’office les milieux comme les arbres morts dans l’eau ou les berges abandonnées accueillant ces animaux.

Le Collectif du Chaudron des alternatives et les associations Porte du Ried nature ainsi que Wittisheim vies et nature, s’opposent à ce projet, estimant qu’il s’agit là d’un gâchis d’argent public qui « ne profitera qu’aux personnes possédant un bateau de plaisance » en plus de ses conséquences sur la biodiversité. Ils prévoient de déposer un recours contre l’autorisation du chantier devant le tribunal administratif et préparent une mobilisation à Marckolsheim samedi 5 octobre au matin.

Sur le marché des soins à domicile, des travailleuses précaires et des patients maltraités

Sur le marché des soins à domicile, des travailleuses précaires et des patients maltraités
Les personnes très âgées ont besoin des auxiliaires de vie pour toute une série de tâches ménagères.

Les entreprises d’aides à la personne peinent à recruter des auxiliaires de vie sociale, un métier complexe et payé au SMIC. Résultat, la qualité des soins se dégrade pour des personnes âgées et vulnérables.

Quand elle entre chez certains de ses patients, lors de sa tournée, Charlotte, une infirmière libérale anonymisée, s’attend au pire. Comme d’autres de ses collègues avec lesquels Rue89 Strasbourg a échangé, elle rencontre régulièrement des situations de négligence, voire de maltraitance de ses patients en perte d’autonomie ou vulnérables. Au moins une fois par mois, Charlotte, qui travaille à Strasbourg depuis vingt ans écrit aux proches de ses patients, pour les en informer:

« Bonsoir, est-ce que les douches sont encore d’actualité chez votre maman ? Ce matin, je lui ai fait une petite toilette au réveil et nous avons convenu ensemble qu’elle s’habillerait après la douche. Sauf que ce soir, elle est toujours en chemise de nuit, rien n’a bougé à la salle de bain, pas même un gant de toilette. »

Ce message, en date du 17 juin, fait partie d’une série de SMS envoyés, d’appels passés et de discussions menées entre l’infirmière et les familles de ses patients. « Ce soir à mon arrivée, votre maman n’a pas été douchée, l’assiette de midi trainait à la cuisine, à moitié mangée. Votre maman n’avait pas de chaussures, donc risque de chute important », décrivait-elle dernièrement, dans un SMS envoyé le 3 juillet 2024.

Ces situations devraient pourtant être réglées par les auxiliaires de vie sociale (AVS), qui interviennent au domicile des personnes très âgées ou en perte d’autonomie. Charlotte a multiplié les signalements aux services d’aides à domicile (SAAD) qui emploient les AVS. « Chez M. X, Entre lundi matin et lundi soir, rien ne bouge, pas même les miettes. Le frigo est toujours très sale aussi », écrivait-elle, le 25 juillet, dans un courriel. « Entretien du domicile pas fait », « aliments périmés dans le frigidaire », « client laissé seul pendant les courses ». Les mêmes sujets reviennent, dans les échanges entre infirmières et les entreprises, que Rue89 Strasbourg a pu consulter. Mais d’après les infirmières, une fois ces signalements faits, « rien ne bouge ».

Des emplois très précaires

Thierry Toussaint, gérant de l’Adhap, un petit service de soins à domicile strasbourgeois d’une vingtaine de salariés et de 120 clients, confirme avoir des difficultés à réagir face à ces signalements :

« C’est compliqué de contrôler nos travailleuses qui sont seules au domicile, chez des personnes qui ne peuvent pas toujours s’exprimer ou qui peuvent mal juger les gestes. Chez nous, les nouvelles recrues travaillent en doublure, et on pose des questions aux clients pour savoir comment se déroulent les visites. Mais je ne peux pas garantir que tout fonctionne à 100%. »

D’après le gérant, les situations de négligence peuvent s’expliquer par un « manque d’attention lors du recrutement » :

« En entretien d’embauche, la plupart des candidates veulent un emploi coûte que coûte, pour survivre ou garder un logement… Elles sont souvent dans des situations très précaires et comme le métier d’AVS est rapidement accessible, elles postulent. Mais toutes n’ont pas toutes pour motivation première le soin ou l’attention aux personnes âgées. »

Pour travailler dans un SAAD en tant qu’AVS, il est nécessaire de détenir un diplôme d’État d’accompagnant éducatif et social (DEAES), ou alors justifier de trois années d’expériences dans le secteur de l’aide aux personnes dépendantes, en tant qu’aide ménagère par exemple. Ce dernier métier ne nécessite pas de diplôme particulier.

Thierry Toussaint n’emploie « que des gens diplômés car c’est un métier difficile où il faut savoir comment déplacer des personnes par exemple. Mais c’est de plus en plus difficile à trouver. » Le gérant explique refuser régulièrement des clients, car n’arrive pas à recruter de nouvelles AVS :

« Cette année j’ai dû refuser trois fois plus de clients que l’année dernière. Par exemple, j’ai une dame qui a besoin de 75 heures de présence d’une AVS par mois. Mais au vu de mes effectifs, je ne suis pas en capacité d’y répondre. D’autres entreprises, où il y a beaucoup de turn-over, ne sont pas aussi regardants sur le personnel pour y répondre. »

À peine le SMIC au bout de 15 ans

« C’est un métier super, on aide les gens, le relationnel est très important », témoigne une AVS diplômée depuis dix-neuf ans, qui préfère rester anonyme. Ses tâches sont très variées : aide à la toilette, au coucher, aux repas, aux courses, balade, lecture, jeux, etc. En France, on compte 177 000 auxiliaires de vie à domicile, dont la plupart sont des femmes. Mais un poste sur cinq n’est pas pourvu et d’ici 2030, il faudra en recruter au moins 300 000 pour accompagner le vieillissement de la population.

« Le problème, c’est le salaire », regrette la quinquagénaire. Elle gagne 1 200€ nets par mois, pour un CDI à temps partiel de 32 heures dans un SAAD, ainsi que six heures qu’elle exerce en complément, directement auprès d’un client. D’après Vincent Jarousseau, journaliste et auteur du livre Les femmes du lien, les aides à domicile doivent attendre une quinzaine d’années pour percevoir l’équivalent d’un SMIC mensuel.

Les AVS sont rarement à temps plein mais elles commencent tôt le matin et terminent tard le soir. Elles ne peuvent pas faire plus d’heures, car le code du travail oblige les salariés à avoir une pause minium de 11 heures entre deux journées d’activité. « J’ai très peu de temps libre, explique notre AVS. Je travaille du mardi au vendredi, de 8h à 20h ou 22h, avec une longue pause méridienne, ainsi qu’un week-end sur deux. »

Le marché du soin à domicile étriqué

« C’est un métier qui a besoin de plus de reconnaissance, estime Thierry Toussaint. Forcément, j’aimerais pouvoir augmenter le salaire de mes employés, mais cela voudrait dire augmenter nos tarifs pour nos clients, ce qui n’est pas tenable. » À l’Adhap, le tarif horaire d’une prestation est de 32€, ce qui correspond au prix moyen sur le marché.

L’aide à domicile a été mise en place dans les années 1940, par des associations caritatives. Elle a été rémunérée à partir des années 1980, principalement par des associations, les CCAS (Centre communal d’action sociale), ou par l’emploi direct. Des entreprises privées, les SAAD, se sont intéressées à ce secteur dans les années 1990, le considérant comme lucratif. La libéralisation s’est parachevée en 2005 avec la loi Borloo pour la cohésion sociale, qui a incité créateurs et usagers à développer le secteur, par des exonérations de charges patronales et des réductions d’impôts.

Seulement, en se transformant en un marché où pour être performante, une entreprise doit présenter de faibles coûts, les prestations ont été considérées comme des services marchands, standardisées et interchangeables, ce qu’ont documenté les chercheuses Emmanuelle Puissant et Anne Le Roy. « Un coucher c’est trente minutes et ça coûte tant, explique l’AVS. Toutes les tâches sont recensées dans un tableau et le client paye pour cela. » Résultat, la relation humaine devient une relation marchande, ce qui vient ébranler le sens du travail des salariées. « Votre maman me dit qu’après avoir servi le repas, l’AVS est partie « faire une course », puis est revenue au bout d’une heure », écrit une infirmière dans un signalement daté du 3 juillet.

Signalements dans le vide

La Collectivité européenne d’Alsace (CeA) travaille avec les SAAD, car elle accorde à leurs clients de plus de 60 ans une allocation personnalisée d’autonomie (APA), pour les aider à financer l’intervention au domicile d’AVS. Une assistante sociale du Département se rend chez les clients, évaluent avec eux leurs besoins d’aide et les oriente ensuite vers un SAAD. Une infirmière libérale témoigne auprès de Rue89 Strasbourg avoir déjà contacté la CeA pour signaler directement à la collectivité certaines situations parmi les plus graves. Mais selon elle, « rien ne change. Ils ont déjà contacté une boîte, puis ils n’ont plus donné suite. Ils ne cherchent pas à aller plus loin. »

De son côté, la CeA indique avoir eu connaissance de 24 « évènements » à ce jour. Dans un message écrit, elle assure :

« Ces informations très diverses font toujours l’objet d’un traitement dans le respect du contradictoire. Selon la situation, la CeA exige que le service d’aide à domicile prenne les mesures nécessaires pour trouver des solutions pour la redresser. »

Au delà du Département, « ça se joue au niveau de l’État », estime François, un infirmier libéral. « La dépendance n’est pas assez prise en charge de manière globale par la société. » Dans son rapport de 2019, Dominique Libault, président du Haut-conseil au financement de la protection sociale, avait évalué les besoins de financement public supplémentaire à 9,2 milliards d’euros par an d’ici 2030 pour prendre en charge la dépendance. Des moyens « impossibles à déployer », selon l’ancien gouvernement. Une loi pour le « bien-vieillir a été adoptée le 8 avril, mais aucun budget n’a encore été défini.

Sur l’île Maurice, les conséquences de la capture des singes pour l’Université de Strasbourg

Sur l’île Maurice, les conséquences de la capture des singes pour l’Université de Strasbourg
Les singes s’habituent vite à l’homme, ils sont donc visibles dans les zones rurales comme plus urbanisées

Le centre de primatologie de l’Université de Strasbourg se fournit majoritairement en singes issus de l’île Maurice dans l’Océan indien. Ces macaques à longue queue proviennent de fermes ayant recours aux pièges, parfois installés chez des agriculteurs. Une pratique qui divise la société mauricienne et bouleverse l’écosystème.

Quelque chose agite les feuilles de l’avocatier à la fenêtre de Poonam Ramrichia. Elle s’approche calmement, sort la tête et aperçoit, sur l’une des branches les plus hautes, deux grands yeux jaunes. Un regard vif, inquisiteur, visiblement à peine effrayé par la présence d’un étranger. Un bras velu qui se dresse vers Poonam. « Attendez, je vais lui donner un morceau de pain, il n’en a pas eu aujourd’hui. »

Les singes vont et viennent dans le quartier de Poonam, situé en périphérie de la commune de Crève-Coeur, nichée dans l’une des vallées les plus boisées de l’île Maurice. Ici, la cohabitation avec les macaques date d’il y a 25 ans au moins, l’époque à laquelle Poonam s’est installée dans le village. « Ils descendaient déjà des montagnes pour venir chercher à manger chez les humains, se souvient Poonam alors que l’animal s’éloigne de nouveau, une miche de pain dans la bouche. Mais ils remontaient ensuite. Aujourd’hui, à cause des pièges, ils restent dans les alentours. »

Depuis 2022, de grands pièges ont été installés sur l’ensemble du secteur de Crève-Coeur, village de près de 3 000 habitants situé au centre de l’île. Des cages grillagées d’environ 30 mètres carrés (m²), sur lesquelles s’affiche un nom : Bioculture. Il s’agit de l’une des six fermes d’élevage de singes homologuées sur l’île Maurice, et de l’un des fournisseurs historiques du centre de primatologie de l’Université de Strasbourg. L’établissement alsacien est régulièrement visé par les associations de défense du droit des animaux, car il constitue un maillon de l’expérimentation animale en Europe. Silabe accueille chaque année des centaines de singes venus en grande partie de l’île Maurice. Selon nos informations, sur les 1 524 macaques à longue queue importés depuis 2021 par Silabe, 945 viennent de Maurice, soit 65% d’entre eux.

Poonam Ramchida est opposé à l’élevage et à la capture des singes sur l’île Maurice.
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Sur les hauteurs d’Orbey, les jours heureux d’une colonie en lutte contre l’obsolescence

Sur les hauteurs d’Orbey, les jours heureux d’une colonie en lutte contre l’obsolescence
Au centre de vacances La Chaume, à 30 kilomètres de Colmar, les enfants peuvent dormir en tente.

Au centre de vacances La Chaume, à Orbey, le nombre d’enfants et d’animateurs diminue au fil des étés. Ceux qui restent gardent le sourire et tentent de transmettre aux enfants la passion des colonies, pour qu’elles survivent.

L’ambiance est calme ce début d’après-midi du jeudi 22 août, au centre de vacances La Chaume, à Orbey sur les hauteurs des Vosges. Quelques voix et rires de jeunes âgés de 11 à 14 ans sortent d’une pièce du rez-de-chaussée de cet imposant chalet en bois sombre. Ils sont une dizaine à rester au centre cet après-midi, les deux autres groupes de pré-adolescents de ce séjour en montagne sont partis en activité.

« Normalement on avait quatre groupes thématiques cette semaine (olympiades, adrénaline, survie et koh lanta), mais on a dû supprimer Koh Lanta car il n’y avait que deux enfants inscrits », raconte Karim, directeur de la colonie. Depuis dix étés qu’il prend la tête du centre, à chaque fois les deux dernières semaines du mois d’août, l’homme de 35 ans, en short, t-shirt noirs et claquettes à carreaux, a vu le nombre d’enfants baisser régulièrement : « Cette semaine, on a que 50 enfants, c’est la moitié de la capacité de La Chaume. »

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#Orbey

Un rassemblement pour célébrer l’indépendance de l’Ukraine, samedi 24 août

Un rassemblement pour célébrer l’indépendance de l’Ukraine, samedi 24 août
L’association Promo Ukraina organise un rassemblement afin de commémorer l’indépendance de l’Ukraine, ce samedi 24 août.

Pour célébrer l’indépendance de l’Ukraine, envahie depuis deux ans par la Russie, un rassemblement aura lieu samedi 24 août à Strasbourg. Une marche s’élancera depuis le Parlement européen.

« Cette journée est dédiée aux Ukrainiens qui se sont battus et se battent encore pour l’indépendance de l’Ukraine », témoigne Tetiana Gryn, bénévole ukrainienne au sein de Promo Ukraina. L’association strasbourgeoise organise samedi 24 août une commémoration du Jour de l’indépendance de l’Ukraine prononcée le 24 août 1991.

Elle débutera par une marche lancée depuis le Parlement européen en direction du Conseil de l’Europe à 15h30. « Pour nous, l’action est symbolique. L’Union européenne nous soutient énormément en nous fournissant des aides humanitaires. Elle a aussi accueilli des Ukrainiens et on la remercie. Cette marche entre ces deux lieux permet d’appuyer la demande d’adhésion de l’Ukraine pour rejoindre l’Union européenne », explique Tetiana Gryn. Des prises de paroles de réfugiés sont également prévues. À partir de 17h30, une célébration aura lieu à Pourtalès plage afin de promouvoir la culture ukrainienne. Des danseuses proposeront des danses traditionnelles avant un set de DJ Disco Borisco.

Un combat pour la liberté

Depuis le 24 février 2022, l’Ukraine est envahie par la Russie. Les territoires du Donbass sont occupés et les bombardements ont toujours lieu à l’Est, que ce soit à Kharkiv, à Kherson ou encore à Donetsk. « Notre indépendance nous coûte les vies de nos compatriotes. Notre pays se bat pour sa liberté, la justice et la paix », souligne Tetiana Gryn. Le rassemblement permet de ne pas oublier le combat mené par les soldats ukrainiens afin de défendre l’indépendance de leur pays. « En tant qu’Ukrainienne, c’est un besoin important de se rassembler et encore plus ce samedi. Pour nous, c’est la possibilité de se sentir unis. On rappelle aux Français, aux Européens que nous continuons de nous défendre pour notre liberté ».