Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

« Exclure ou réinsérer ? » Jeudi 4 mai, d’anciens détenus racontent la maison d’arrêt de Strasbourg

« Exclure ou réinsérer ? » Jeudi 4 mai, d’anciens détenus racontent la maison d’arrêt de Strasbourg

La Ligue des Droits de l’Homme et Rue89 Strasbourg organisent une table-ronde au Foyer de l’Étudiant Catholique jeudi 4 mai. Trois anciens détenus de la maison d’arrêt de Strasbourg y témoigneront de leurs conditions de détention et de réinsertion.

Des témoignages rares. Jeudi 4 mai, à 19h, au Foyer de l’étudiant catholique (FEC), Rue89 Strasbourg et la Ligue des Droits de l’Homme organisent une conférence dédiée à la prison strasbourgeoise. L’accès à l’événement sera libre et gratuit, dans la limite des places disponibles. Trois anciens détenus seront présents, dont Val, membre de l’association Au-delà du pénal (ADP). Ce collectif a pour objectif de faciliter la réinsertion de détenus en mettant en place une relation de confiance avec une personne en dehors de la prison. C’était le rôle de Lune, qui témoignera des difficultés pour les proches de détenu. Le délégué du Défenseur des droits en Alsace, Robert Blanc, témoignera aussi de son activité, en lien avec le milieu carcéral local.

Affiche de la conférence : « La prison : exclure ou réinsérer. Parole aux anciens détenus ». Photo : Ligue des Droits de l’Homme Strasbourg

Deux thématiques : la détention et la réinsertion

La première partie de la conférence donnera la parole aux anciens détenus de la maison d’arrêt de Strasbourg. Accès restreint à la cour de promenade depuis le début de la pandémie, téléphone portable en cellule, manque de moyens des services pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip) et dérives parfois violentes de certains surveillants… La parole sera libre pour raconter la prison strasbourgeoise telle qu’ils l’ont vécu.

Une seconde partie permettra d’aborder la problématique de la réinsertion des détenus. À ce sujet, les errances de l’État sont aussi nombreuses : nombre de prisonniers par conseiller trop élevé, manque de travail dans les ateliers, manque de places d’hébergement d’urgence

Plus de deux semaines après la disparition d’Enzo, un corps retrouvé dans l’Ill

Plus de deux semaines après la disparition d’Enzo, un corps retrouvé dans l’Ill

17 jours après la disparition d’Enzo, un corps a été retrouvé dans l’Ill mardi 18 avril, selon Actu Strasbourg. L’identification est en cours.

Mardi 18 avril, selon Actu Strasbourg, un corps a été retrouvé dans l’Ill « non loin du lieu de sa disparition », 17 jours plus tard. « Des expertises sont en cours afin d’identifier le corps repêché hier dans l’Ill, celles-ci prendront plusieurs jours », précise la secrétaire du procureur de la République à Rue89 Strasbourg.

Un rassemblement s’est tenu mercredi 19 avril dès 10 heures devant le commissariat central de Strasbourg, pour « demander une accélération et [l’]intensification des recherches pour lever les doutes qui pèsent sur cette disparition », selon France 3 Alsace. La famille a été prévenue par la police.

Plusieurs battues ont déjà été organisées pour tenter de retrouver l’adolescent avec l’aide de l’association Icared, mais toutes sont restées vaines.

Battue Enzo
Le 12 avril, des bénévoles ont tenté de retrouver le corps d’Enzo. Photo : CB / Rue89 Strasbourg / cc

Six jours après la disparition de l’adolescent, sa mère a porté plainte contre X pour « non-assistance à personne en danger », visant « le policier ayant vu son fils se jeter à l’eau sans lui porter secours » – selon ses déclarations et le communiqué du parquet de Strasbourg.

Malgré un important dispositif policier, Emmanuel Macron copieusement hué à Sélestat et Muttersholtz

Malgré un important dispositif policier, Emmanuel Macron copieusement hué à Sélestat et Muttersholtz

Des centaines d’opposants aux politiques d’Emmanuel Macron se sont mobilisés pour le déplacement du président de la République en Alsace ce 19 avril. Tenus à distance par les forces de l’ordre, les manifestants ont tout de même réussi à lui faire entendre leurs slogans, à Muttersholtz et à Sélestat alors qu’il tentait de prendre un bain de foule.

« Il m’a foutu un coup de pied cet enfoiré ! » Il est environ 11 heures, ce mercredi 19 avril, et la situation se tend déjà à Muttersholtz. Une trentaine de manifestants expriment leur opposition au président de la République quand des gendarmes les repoussent après sommation. Vêtu d’une chasuble CFDT, un homme s’emporte face à un gendarme : « C’est ça la police ? Elle donne des coups de pied ? »

« Il m’a foutu un coup de pied cet enfoiré ! » Un manifestant s’emporte alors que le groupe d’opposants est repoussé par les gendarmes. (Vidéo Roni Gocer / Rue89 Strasbourg / cc)

« Je trouve pas les mots tellement je suis énervée »

Emmanuel Macron n’est pas encore arrivé dans cette petite commune, voisine de Sélestat. Mais l’entame de sa tournée de réconciliation avec les Français commence mal. « C’est une honte, tout se passe calmement et on nous bouscule. Je trouve même pas les mots tellement je suis énervée », souffle Claudine, membre de la CFDT Métallurgie.

Manifestant emporté par la police hors du trajet présidentiel. Photo : Abdesslam Mirdass

C’est seulement une demi-heure plus tôt, à 10h30, que la préfecture du Bas-Rhin a publié sur son site un arrêté préfectoral spécial pour la visite présidentielle. Ce dernier instaure plusieurs périmètres de protection à Muttersholtz et à Sélestat et interdit les manifestations dans ces zones. La presse n’a pas été informée par la préfecture et les manifestants ne peuvent pas connaître cette interdiction préfectorale. Énième sentiment d’injustice pour les opposants à la réforme des retraites.

« Où qu’il aille, il trouvera des opposants »

Depuis l’annonce du passage d’Emmanuel Macron dans l’usine Mathis à Muttersholtz, des militants s’organisent pour manifester leur mécontentement. Mais le déroulé détaillé de la visite présidentielle n’est connu de personne. Dans les groupes d’activistes, chacun y va de son hypothèse : le président viendra en hélicoptère directement sur le site de l’entreprise Mathis, Emmanuel Macron passera par la mairie de Sélestat en milieu d’après-midi… Au cours d’une réunion à Muttersholtz, dans la soirée du mardi 18 avril, les activistes ont acté du flou total autour de cette visite : « Les gens ont quand même envie qu’il y ait des images de contestation. Où qu’il aille, il trouvera des opposants », glisse un habitant de Muttersholtz et participant à la réunion.

Depuis l’annonce du passage d’Emmanuel Macron à Muttersholtz, les opposants à la réforme des retraites s’organisent pour manifester leur mécontentement. Photo : RG / Rue89 Strasbourg / cc

Au milieu des manifestants dès 10 heures du matin, le maire de la commune de Muttersholtz Patrick Barbier ne souhaitait pas « faire un procès » au président de la République : « S’il ne sortait pas de son palais, on lui reprocherait de ne pas aller au contact. » L’élu écologiste, indépendant du parti EELV depuis 2017, sait seulement de cette visite présidentielle qu’il a rendez-vous dans l’entreprise Mathis à 13h30. Il note l’important déploiement de forces de l’ordre nécessaire pour la venue d’Emmanuel Macron : « Je n’ai jamais vu autant de cars de gendarmerie dans ma commune. Il y a plus de gendarmes que de manifestants pour l’instant. C’est ça qui est exceptionnel. »

Les gendarmes ont dégagé les abords de la mairie aux alentours de 11 heures. Photo : RG / Rue89 Strasbourg / cc

Le cortège du président hué

Des opposants supplémentaires affluent vers Muttersholtz à 12h car l’intersyndicale a appelé à un rassemblement pour accueillir le président avec des casseroles. Ancien candidat de la France insoumise aux dernières élections législatives, Samy Ahmed-Yahia est bloqué à l’entrée du village, comme d’autres manifestants :

« La police a commencé par nous laisser entrer tout en nous interdisant de porter le moindre signe distinctif, casserole ou drapeau syndical. Puis ils ont fini par bloquer complètement l’entrée. Il s’agit d’une atteinte grave au droit de manifester notre mécontentement. »

Les manifestants ont hué le cortège de voitures du président de la République. (Vidéo Roni Gocer / Rue89 Strasbourg / cc)

À 13h30, Emmanuel Macron arrive avec un cortège de voitures copieusement hué et sifflé par les militants qui ont réussi à entrer dans la commune, maintenus à distance par les forces de l’ordre. Certains scandent « Macron démission ». Plusieurs petits groupes de manifestants sont éparpillés dans Muttersholtz.

Dans la commune, plusieurs petits groupes de personnes sont bloqués à distance d’Emmanuel Macron. (Vidéo RG / Rue89 Strasbourg / cc)

L’eurodéputée du groupe Agir et ancienne maire de Strasbourg Fabienne Keller est également invectivée à son passage.

Fabienne Keller a répondu aux manifestants par un doigt sur la bouche. Photo : RG / Rue89 Strasbourg / cc

Interrogé dans l’usine Mathis, première étape de sa visite, sur la présence de manifestants dans la commune, le président rétorque que les manifestants « cherchent à faire du bruit » et que « ce n’est pas les casseroles qui feront avancer la France ». Au milieu de la journée, la CGT revendique une coupure de courant sur le site, qui ne plonge visiblement pas les lieux dans l’obscurité. Emmanuel Macron enchaine avec un passage à l’hôtel de Ville de Sélestat à 16h pour y rencontrer des élus locaux. Là aussi, des centaines de d’opposants l’accueillent avec des huées et des slogans. Une poignée de soutiens ont pu lui parler directement.

La foule siffle le président de la République à Sélestat. (Vidéo RG / Rue89 Strasbourg / cc)
Les manifestants scandent « Macron démission ». (Vidéo RG / Rue89 Strasbourg / cc)

Clément, étudiant en archéologie, est venu pour interpeller Emmanuel Macron. Il raconte l’important dispositif de protection du président :

« C’est vraiment hyper contrôlé, on ne peut pas du tout échanger avec lui. On est au quatrième contrôle pour arriver jusqu’à cette place. À la télé, on montre plein de gens qui parlent directement avec lui, c’est tout l’inverse ici. Si c’est un bain de foule avec les CRS et les journalistes qu’ils voulaient, qu’ils le disent. »

Emmanuel Macron a été lourdement hué pendant son bain de foule à Sélestat. (Photo Abdesslam Mirdass)Photo : Abdesslam Mirdass / Rue89 Strasbourg

Devant les journalistes, Emmanuel Macron a reconnu « la colère » tout en indiquant qu’il continuera à se déplacer en France. Infatigables, des manifestants sont restés en position jusqu’à la sortie du président de l’hôtel de ville à 18h, pour le huer une nouvelle fois. Après une très courte apparition, il est entré dans une voiture pour quitter Sélestat.

Des opposants à la réforme des retraites ont conspué Emmanuel Macron une nouvelle fois à 18h devant la mairie de Sélestat. (Vidéo RG / Rue89 Strasbourg / cc)

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Roni Gocer et Abdesslam Mirdass étaient auprès des militants et des manifestants toute la journée jusqu’au début de la soirée pour vous rendre compte de cette visite présidentielle.

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Des informaticiennes strasbourgeoises témoignent de la difficile féminisation du métier

Des informaticiennes strasbourgeoises témoignent de la difficile féminisation du métier

En France, l’industrie du numérique ne compte que 17% de femmes. Malgré les opportunités financières et d’emploi, les candidates aux formations en informatique sont encore rares. Trois Strasbourgeoises racontent leur éprouvante insertion professionnelle dans ce milieu très masculin. 

« Les remarques et les comportements sexistes, c’est des pratiques qui découragent beaucoup de jeunes femmes à se lancer dans l’informatique », observe Harmonie, présidente de Hackstub, une association notamment engagée en faveur de l’informatique libre. À 28 ans, elle est experte en sécurité et vie privée chez Eyeo, la maison mère d’AdBlock (un bloqueur de publicités). Elle fait partie des 17% de femmes qui travaillent dans l’industrie du numérique en France. Pourtant après son bac scientifique et malgré son appétence pour l’informatique, Harmonie s’était d’abord orientée vers une licence de droit. Parallèlement, elle avait rejoint l’Amicale des informaticiens de l’Université de Strasbourg (AIUS). 

Harmonie est experte en cybersécurité et présidente du hackerspace de Strasbourg Photo : Axelle Auvray / Rue89 Strasbourg / cc

Elle raconte son expérience à la faculté de mathématiques et informatique à partir de 2015 :

« J’étais toujours flanquée à la fac de maths-info et je peux dire qu’il y a beaucoup de harcèlement sexiste et sexuel dans les études en informatique. Moi même j’ai subi de nombreuses remarques sexistes, mais je savais tenir tête, ce qui n’est pas le cas de tout le monde. »

En 2022-2023, la filière informatique de l’Université de Strasbourg compte 184 femmes pour 933 hommes, soit 16 % de femmes. Et ce manque de parité est, en lui-même, un facteur de découragement. Selon le rapport 2023 sur l’état des lieux du sexisme en France, 22% des femmes de 25-34 ans ont déjà redouté, voire renoncé à s’orienter dans un métier majoritairement composé d’hommes, « par crainte de ne pas y trouver leur place ou de s’y sentir mal à l’aise, mais aussi par peur du harcèlement sexuel pour 18% d’entre elles ».

Après sa Licence, Harmonie a choisi un Master en droit du numérique malgré les réserves de son professeur référent : « Il me disait que ce n’était pas un domaine porteur alors que c’est le cas. De toute façon, je savais que j’étais faite pour ça donc je me suis encouragée toute seule. » Avant d’intégrer Eyeo en 2020, elle a débuté sa carrière dans un cabinet de conseil juridique puis à la Direction interministérielle du numérique (DiNum) à Paris. La Strasbourgeoise assure y avoir été confrontée à un sexisme ambiant : 

« C’est souvent des hommes en costume qui m’ont posé problème. À la DiNum, on me prenait régulièrement pour une stagiaire. Même des jeunes hommes en stage étaient plus pris au sérieux que moi. Le sexisme — parce que j’étais une femme, en plus d’être jeune et racisée — était beaucoup plus pernicieux que des mots. Dans le cabinet de conseil, on ne me faisait pas confiance si je n’avais pas l’aval d’un supérieur hiérarchique masculin. À tel point que mon chef de service m’a conseillé de le mettre en copie de tous mes mails, pour que je puisse avancer sur mes dossiers. Ce n’était pas le cas des hommes. » 

Selon l’étude Gender Scan 2022 qui mesure l’évolution de la féminisation dans le secteur des technologies et du numérique, 46% des femmes qui travaillent dans le secteur de la technologie déclarent avoir été victimes de comportements sexistes, de harcèlement moral et sexuel voire d’agressions au sein de leur milieu professionnel.

« Il y a urgence à diversifier le secteur du numérique »

Entre 2013 et 2019, le nombre d’étudiantes dans le domaine en France enregistrait une baisse de 2 % — contrairement à la moyenne européenne en hausse de 6 %. En février, les premières Assises nationales de la féminisation des métiers et filières numériques ont été organisées au ministère de l’Économie à l’initiative de l’association Femmes@Numériques en février 2023, au vu de « l’urgence de diversifier le secteur ». Selon le gouvernement, la France nécessitera 400 000 experts et expertes du numérique formés d’ici 2030. Hormis le besoin de main d’œuvre, c’est un enjeu crucial d’équité dans la mesure où ce secteur, qui attire de nombreux investissements, représente une opportunité d’autonomie financière pour les femmes. 

Lou est ingénieure système à la Direction du numérique de l’Université de Strasbourg Photo : Axelle Auvray / Rue89 Strasbourg / cc

Lou est ingénieure système à la direction du numérique (DNum) de l’Université de Strasbourg. Elle expose la situation sur son lieu de travail :

« Au département infrastructure, on est deux femmes sur une trentaine de salariés. On galère tellement à recruter (environ 10 % de postes vacants à la DNum) que la disparité des genres n’est pas un sujet, on n’a pas ce luxe. »

Avant de s’insérer professionnellement dans ce milieu, cette Strasbourgeoise de 30 ans a connu un parcours sinueux, en lien avec les préjugés entourant l’informatique : 

« Au lycée, je kiffais l’informatique et je rêvais de faire Épitech. Mais je n’étais pas bonne en maths et mes parents ne m’ont pas encouragée. Aujourd’hui je sais qu’en fonction des domaines, ce n’est pas nécessaire. »

Après un bac en Sciences et Technologies de l’Industrie (STI), et alors que l’informatique la passionne depuis l’enfance, Lou s’est dirigée vers une licence de langues. C’est seulement huit ans et divers métiers plus tard qu’elle s’est réorientée, bien qu’elle n’ait en réalité « jamais arrêté de bidouiller des choses sur l’ordinateur ». En 2020, elle a profité du confinement pour suivre une formation de développement web, « The Hacking Project », et a poursuivi en autodidacte, avant d’être embauchée par l’Université de Strasbourg en mars 2022.

Attirer les candidates, un enjeu pour les formations aux métiers du numérique

Faire de l’informatique sans avoir brillé en mathématiques, c’est possible. Élodie Motsch, chargée de communication de l’école d’informatique Épitech de Strasbourg le confirme : 

« Il n’y a pas besoin d’être bon en maths pour faire de l’informatique. C’est une idée reçue à laquelle nous tentons de sensibiliser les étudiant·es et leurs parents. » 

En 2021, l’école privée a commandé une enquête sur les raisons de la faible orientation des lycéennes vers l’informatique. À Strasbourg, les femmes ne représentent que 13% de la soixantaine d’étudiants de première année, 7% en deuxième année et 4% en troisième. À l’origine de cette sous-représentation, des préjugés et un faible encouragement des jeunes filles par leur entourage. Selon l’étude en question, 33% des lycéennes sont encouragées par leurs parents à s’orienter vers les métiers du numérique contre 61% des garçons. Pour attirer les candidates et encourager la féminisation de ses promotions, l’école prend quelques initiatives. La chargée de communication d’Épitech Strasbourg explique : 

« Pour les journées d’orientation et les salons étudiants, on essaie de mettre en scène la parité pour permettre aux lycéennes de s’identifier à nos étudiantes. »

L’école organise aussi des ateliers de code informatique dans les lycées alsaciens, en partenariat avec l’association EMM-A qui promeut la mixité dans les écoles de la tech. Ces ateliers sont en mixité choisie, en l’absence des garçons. Dans ce cas, cet outil « d’auto-émancipation » vise à favoriser un climat rassurant entre participantes afin qu’elles apprennent sereinement le code informatique.

Mais preuve que la démasculinisation de l’industrie du numérique n’en est qu’à ses débuts, les professeurs d’Épitech Strasbourg sont exclusivement des hommes et aucune cellule dédiée à la prise en charge du harcèlement ou des violences sexistes et sexuelles n’est en place dans l’école. À titre de comparaison, l’université de Strasbourg compte 25% d’enseignantes-chercheuses au sein de la section informatique du Conseil national des universités (CNU). 

Pour des outils numériques inclusifs

La conception d’outils informatiques plus inclusifs est aussi un enjeu majeur de la diversification des salariés de l’industrie du numérique. Le plaidoyer publié en février à l’issue des Assises dénonce « les impacts d’une conception et d’une gestion des outils et solutions numériques sans la participation des femmes, [qui] introduisent des biais de genre se [faisant] déjà ressentir. Il n’est pas acceptable que seul 50% du vivier de talents soit aujourd’hui impliqué et mobilisé dans la conception, l’administration et la sécurisation des outils numériques qui régissent notre société ». 

Maddie (le prénom a été modifié, NDLR) est graphiste et développeuse web indépendante à Strasbourg. Elle explique :

« La démasculinisation de l’industrie du numérique est importante pour que des personnes qui ne sont pas des hommes blancs se sentent à l’aise de participer, d’apporter leurs visions du numérique, et leurs besoins avec. Tout l’enjeu est de rendre le numérique moins discriminatoire, par exemple dans le domaine de l’accessibilité et du médical. »

À 32 ans, cette Strasbourgeoise originaire des Vosges du nord est diplômée de l’école d’art du Havre. « Je suivais l’option design graphique et interactivité, donc l’ordinateur était mon principal outil de travail, mais avec une approche artistique », relate-t-elle. Comme Lou et Harmonie, Maddie s’est formée en autodidacte grâce à des ressources en libre accès sur internet et ne doit pas son insertion professionnelle à une formation traditionnelle :

« J’ai encore un sentiment d’imposture parce que je n’ai pas de diplôme en informatique. Et cela s’ajoute au fait d’avoir intériorisé l’idée essentialiste qu’en tant que femme, je suis moins apte. »

En 2016, elle a rejoint la communauté de Hackstub. Elle a vu sa fréquentation changer au fil des années. D’un vrai « boysclub » — selon les mots de sa présidente — à une association où des femmes, minorités de genre et personnes racisées participent. Pour encourager ce mouvement, Hackstub a publié en 2021 une charte prônant l’inclusivité. Maddie poursuit :

« C’est important de trouver une communauté de semblables pour affronter des situations d’oppression ou d’isolement, comme cela peut être le cas dans le milieu informatique. Sur le plan économique aussi, cela permet de se créer des opportunités professionnelles, lorsque nous en sommes globalement exclues dans ce milieu. »

Elle cite Les Oubliées du numérique d’Isabelle Collet : « Quand vous imaginez un groupe de programmeurs, est-ce que vous pensez à des filles ? Évidemment que non ! » Malgré de timides améliorations, la démasculinisation de l’industrie du numérique, en pratique et dans les esprits, n’en est qu’à ses débuts. 

#epitech

La municipalité annonce la construction du plus grand quartier en habitat participatif de France à Strasbourg

La municipalité annonce la construction du plus grand quartier en habitat participatif de France à Strasbourg

Jeanne Barseghian a annoncé mardi 18 avril que le quartier Citadelle va accueillir 102 nouveaux logements conçus par leurs habitants d’ici 2030. Deux appels à projet seront lancés en 2023.

Mardi 18 avril, la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian, annonce la future construction, quartier Citadelle, de 102 logements conçus en « habitat participatif » : les futurs occupants seront inclus dans la conception des logements. L’élue explique aussi que l’objectif est de laisser une grande place aux écosystèmes dans la zone :

« C’est un projet de très grande envergure, qui ne sera achevé qu’à l’horizon 2030, voire même au delà. C’est un espace de nature que nous souhaitons reconquérir pour garantir un bouclier bio-climatique dans ces prochaines années et décennies. »

De gauche à droite : Alain Jund, conseiller municipal délégué en charge du développement de l’habitat participatif, Jeanne Barseghian, maire de Strasbourg, Jean Werlen, conseiller municipal et président de la société publique locale (SPL) Deux-Rives, Suzanne Brolly, adjointe à la maire en charge du programme local de l’habitat et Antoine Dubois, élu référent du quartier Neudorf-Musau. Photo : Camille Gantzer / Rue89 Strasbourg / cc

Alain Jund, conseiller municipal en charge du développement de l’habitat participatif, affirme :

« L’habitat participatif n’est plus un ovni. Il y a aussi la future résidence senior dans le quartier du Neudorf. Le quartier Citadelle est une étape historique pour Strasbourg, et aussi au niveau national. Nous sommes en train de franchir un cap : la création d’un quartier entier en habitat participatif. »

Strasbourg, ville pionnière

Selon la municipalité, le quartier Citadelle sera le plus grand quartier en habitat participatif de France, avec 102 logements conçus de la sorte. La Ville souhaite également que les habitations soient abordables financièrement.

La Société publique locale (SPL) Deux-Rives, aménageur public de la collectivité qui va porter la démarche, s’apprête à lancer deux appels à projets « cette année », destinés à des groupes d’habitants prêts à s’investir en amont. Ces deux projets se situeront au nord du quartier et rassembleront chacun cinq à sept logements avec des espaces partagés. 100 autres logements répartis en plusieurs immeubles seront conçus dans cette démarche mais proposés en accession libre ou dans le parc locatif.

Une réunion publique pour exposer ce projet du quartier Citadelle aura lieu le 26 avril à l’espace Coop à 18h.

#quartier citadelle

Près d’un millier de casseroles contre l’intervention d’Emmanuel Macron lundi soir

Près d’un millier de casseroles contre l’intervention d’Emmanuel Macron lundi soir

Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées lundi soir vers 20h devant l’Hôtel de ville de Strasbourg, place Broglie, pour contrer l’intervention télévisée du président de la République. Une partie des participants ont poursuivi la soirée en manifestation sauvage jusqu’à l’avenue du Rhin.

À l’appel d’une partie des syndicats opposés à la réforme des retraites et du collectif On crèvera pas au boulot, promulguée dans la nuit de vendredi à samedi 15 avril, plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées lundi à 20h sur la place Broglie, devant l’Hôtel de ville avec des casseroles et d’autres ustensiles bruyants afin de protester contre l’intervention du président de la République Emmanuel Macron au même moment.

Plusieurs centaines de personnes sont venues jouer une musique de la discorde sous les fenêtres de l’Hôtel de ville (vidéo TV / Rue89 Strasbourg / cc)

Les manifestants sont restés sur place pendant plus de 40 minutes. Puis une partie d’entre eux est partie en cortège vers l’avenue de la Liberté un peu avant 21h.

Le rassemblement s’est transformé en manifestation vers 21h. (Vidéo TV / Rue89 Strasbourg / cc)

Un cortège réduit s’est ensuite rendu en direction du campus de l’Université de Strasbourg à l’Esplanade. Ces manifestants ont créé des barricades de fortune sur leur trajet, à l’aide de poubelles, de barrières de chantier ou d’autre mobilier urbain, suivis de près par des policiers en tenu anti-émeutes. La vitrine d’une banque a été brisée.

La manifestation sauvage s’est dispersée vers 22 heures après avoir atteint l’avenue du Rhin.

(vidéo TV / Rue89 Strasbourg / cc)

Après trois nuits de détention, quatre opposants à la réforme des retraite condamnés

Après trois nuits de détention, quatre opposants à la réforme des retraite condamnés

Quatre des neufs personnes interpellées lors de la dernière manifestation contre la réforme des retraites ont été jugées en comparution immédiate, lundi 17 avril, au tribunal judiciaire de Strasbourg. Toutes ont été reconnues coupables de délits mais aucune n’est interdite de manifestation.

Après une journée de garde à vue et trois nuits au centre de détention de l’Elsau, quatre manifestants, interpellés jeudi 13 avril en marge de la 12e journée de mobilisation contre la réforme des retraites ont comparu devant la juge du tribunal correctionnel de Strasbourg, dans l’après-midi du lundi 17 avril.

Parmi eux, Jérôme, 45 ans, membre du service d’ordre de la CGT. « C’est le premier de nos camarades qui est interpellé depuis le début du mouvement social, et surtout la première fois qu’un d’entre nous est placé en détention provisoire », déplore Joëlle, travailleuse sociale, venue pour le soutenir.

Dès 14h, une cinquantaine de militants se sont rassemblés devant le tribunal, en soutien aux interpellés. « On était déjà devant le commissariat jeudi soir mais on n’avait aucune nouvelle de Jérôme », raconte Frédéric en revêtant son chasuble rouge vif. « Ça a dû lui faire un sacré choc, même lorsqu’on fait des piquets de grève on est rarement interpelés, encore moins placés en détention », poursuit le syndicaliste de la branche CGT-Fapt.

Faire de ces interpellations des « exemples »

« Normalement, la détention provisoire doit être une exception », explique Me Caroline Bolla, avocate des quatre manifestants. À l’issue d’une garde à vue et en attendant un jugement en comparution immédiate, c’est en effet le procureur qui demande ou non la détention provisoire de la personne interpellée. « On voit bien que le parquet a pour consigne de faire de ces interpellations des cas d’école, des exemples », estime Me Bolla, qui ne pensait pas que le juge de la détention et des libertés (qui doit valider les mesures demandées par le ministère public) allait « céder à cette politique répressive ».

À l’entrée du palais de justice, une quinzaine de policiers montent la garde. Peu avant le début de l’audience, le couloir menant à la salle comble est rempli de curieux venus soutenir les interpellés. Le début des échanges baigne dans le vacarme de ceux qui ne peuvent entrer dans la salle. Faute de place. « L’audience est publique, donc on ne peut pas fermer la porte, mais je vous prie de faire moins de bruit », énonce calmement la présidente du tribunal correctionnel, Isabelle Karolak. Devant la juge et ses deux assesseures, Claire Rueff et Laurence Glesser, les prévenus se présenteront, l’un après l’autre.

Les profils des personnes interpellées sont divers. Du syndicaliste Jérôme, à Jean (le prénom a été modifié), journaliste, en passant par Luc ou Marie (les prénoms ont été modifiés), sans emplois, tous ont entre 20 et 45 ans. « Chaque dossier est unique, j’en prendrai compte dans mes réquisitions », précise immédiatement Élise Wolton, substitute du procureure de la République.

« J’ai l’impression de ne pas être respecté par l’État »

Parmi eux, deux manifestants sont accusés d’avoir lancé des projectiles sur les forces de l’ordre – tantôt la police nationale, tantôt la gendarmerie. « C’était pour riposter, par réflexe, j’ai honte car ça ne correspond pas à mes convictions », poursuit Jean, évoquant le climat de tension en fin de manifestation ainsi que les « salves de gaz lacrymogènes » tirés pour disperser les manifestants.

« Je pense que ma réaction est liée à la séquence politique que l’on traverse, j’ai l’impression de ne pas être respecté par l’État », explique Jean, simplement. Très à l’aise à l’oral, le jeune homme reconnaît les faits qui lui sont reprochés et affirme les regretter. « Que mon projectile ait ou non touché quelqu’un, mon geste est condamnable et je ne saurais pas l’expliquer », conclut-il. « J’ai perdu mon sang froid » explique Jérôme de son côté, avec moins d’emphase. « Heureusement que personne n’a été blessé ».

CGT Tribunal interpellations
Une cinquantaine de personnes se sont mobilisées lundi 17 avril, dès 14 heures, pour soutenir Jérôme, le membre du service d’ordre de l’intersyndicale interpellé jeudi 13 avril. Photo : CB / Rue89 Strasbourg/ cc

Dans l’un de ses quatre réquisitoires, la substitute du procureur le concède : « Le climat social est tendu, la jeunesse veut exprimer sa colère et son désarroi ». Avant de préciser qu’à ses yeux, « participer aux dégradations lors de manifestations participe à dégrader le lien social ».

Tous évoquent une ambiance générale de révolte, une énergie de groupe en réponse à un « déni de démocratie » de plus en plus « flagrant », comme le répètent plusieurs soutiens aux manifestants, à l’extérieur de la salle d’audience. « C’était ma troisième manifestation, je n’avais rien dégradé et je suis restée calme mais cette fois-ci, j’ai fait comme tout le monde », explique Marie, accusée d’avoir dégradé des abribus. Faits qu’elle ne conteste pas. « Je sais bien que ce n’est pas la CTS qui décide de la réforme des retraites, ce n’est pas à eux que j’en veux », précise-t-elle.

La loi « anti-casseur » invoquée par le parquet

« J’ai été pris dans l’élan de la foule », plaide Luc, accusé d’avoir brisé une vitrine de banque et de posséder des feux d’artifice. Les réquisitions du ministère public se font plus sévères à son égard. Élise Wolton estime que Luc est « venu pour casser », qu’il est « connu des services de renseignement comme un perturbateur » et qu’il ne « doit vraiment plus jamais pouvoir participer à une manifestation ».

Trois d’entre eux sont mis en examen pour avoir participé à une manifestation en ayant volontairement dissimulé leur visage dans le but de ne pas être identifiés. Un délit créé en 2019 par l’article 10 de la loi dite « anti-casseur » et faisant encourir jusqu’à an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende. Tous les prévenus s’en défendront et plaideront avoir dû utiliser lunettes de protection et masques pour se protéger des gaz lacrymogènes, largement utilisés pour disperser les manifestants à Strasbourg depuis le 20 mars.

À l’aide de photos, la substitute du procureur exprime des doutes sur l’intention des manifestants de « simplement » se protéger des gaz. Tous seront pourtant relaxés sur ce fondement.

À chaque réquisition, le parquet demande également au tribunal de prononcer une peine d’interdiction de manifester entre un et trois ans. Pendant le délibéré d’une trentaine de minute, Odile, secrétaire générale adjointe de la CGT du Bas-Rhin, fulmine. « Je suis très inquiète pour l’avenir, c’est comme si la répression allait de plus en plus loin de manière progressive et que personne ne s’en rendait compte », estime-t-elle. Constitutionnaliste de formation, elle estime qu’Emanuel Macron en utilisant le 49-3 a certes respecté la lettre de la Constitution, mais pas son esprit. « On est au tribunal maintenant, on sera place Broglie à 20 heures pour faire du bruit lors de son intervention télévisée », poursuit-elle.

Aucune interdiction de manifestation retenue

Pour le verdict, tous les prévenus semblent calmes à la barre. Ils arrivent et repartent menottés dans l’isoloir vitré les séparant de la salle d’audience, flanqués de trois policiers. Me Bolla plaide pour des peines ayant du « sens » en fonction des profils de ses clients. Selon leurs casiers – vierges ou non – et leurs aspirations pour le futur. « Il est important que mon client soit toujours autorisé à manifester, car c’est un droit fondamental », précise-t-elle à plusieurs reprises.

Quelques dizaines de minutes après s’être retirées pour délibérer, la présidente et ses deux assesseures reviennent. Aucun des interpellés ne sera interdit de manifestation, malgré les réquisitions de la substitut du procureur. Les peines vont de travaux d’intérêts généraux à de la prison ferme pour l’une des personnes accusées. Pour certains, le délibéré comprend des peines obligatoires d’interdiction de port d’arme et d’inéligibilité. « Certaines infractions s’accompagnent forcément de peines complémentaires, c’est automatique », précise Me Bolla. Tous ont dix jours pour faire appel.

Odile CGT Tribunal interpellations
Odile, secrétaire générale adjointe de l’union départementale de la GCT, dit avoir peur pour le futur de ses camarades syndicalistes : « En 40 ans, je n’ai jamais vu une telle répression ». Photo : CB / Rue89 Strasbourg/ cc

16 heures 30. Après l’annonce du délibéré, la confusion règne parmi les soutiens aux manifestants, sur le parvis du palais de justice. « Il va falloir les chercher à l’Elsau », lance une militante en étudiant l’itinéraire pour s’y rendre.

La condamnation de son camarade à trois ans d’inéligibilité fâche Michel, présent sur le parvis depuis 13 heures 30. « Je trouve ça très sévère comme peine, mais ça aurait pu être pire », estime-t-il. Après 42 ans à la CGT, le retraité avoue avoir peur pour la suite. « Tout ce que fait Macron aujourd’hui fait office de jurisprudence, imaginez si un dirigeant autoritaire prend le pouvoir, ce que ça va légitimer », explique-t-il. Un peu plus loin, la femme de Jérôme discute avec Me Bolla. « Il va certainement falloir un peu de temps pour que tout ça redescende », estime-t-elle avant de prendre le chemin de la prison de l’Elsau, pour chercher son mari.

« Je trouve les peines justes », commente Caroline Bolla. « Symboliquement le message est fort, poursuit elle, étant donné la relaxe sur l’infraction de dissimulation de visage ainsi que l’absence d’interdiction de manifester. Je pense que les juges ont voulu rétablir quelque chose », conclut-elle. Pour le moment, aucun de ses clients ne pense faire appel des décisions de première instance.

Après le cinéma Odyssée, premières toiles au Cosmos début juin

Après le cinéma Odyssée, premières toiles au Cosmos début juin

Après des mois de travaux de rénovation, le cinéma Cosmos (ex-Odyssée) à Strasbourg ouvrira au public vendredi 2 juin. L’inauguration sera accompagnée d’une série d’événements.

Lors d’une conférence de presse lundi 17 avril, l’équipe du cinéma municipal Cosmos, à Strasbourg, a dévoilé la date d’ouverture du lieu au public : rendez-vous à partir du mardi 2 juin pour assister aux premières diffusions. La fin des importants travaux de rénovation qui ont suivi la fermeture du cinéma Odyssée est prévue pour la fin du mois d’avril.

La programmation cinématographique de la semaine d’inauguration est encore tenu secret par l’association du Troisième souffle, qui a remporté l’appel à candidatures pour la gestion de ce cinéma municipal en 2022. « On maintient le suspense », glisse Étienne Hunsinger, le directeur du cinéma municipal avec un sourire. La billetterie ouvrira dès le 25 mai.

De gauche à droite : Cécile Becker secrétaire générale du cinéma, Étienne Hunsinger directeur du cinéma, Catherine Muller présidente du collectif Troisième souffle Photo : CG / Rue89 Strasbourg / cc

Dès le mois d’avril, des événements à la Laiterie

Du 26 au 30 avril, le Cosmos a prévu une série d’événements avant l’ouverture du lieu en quatre étapes.

Mercredi 26 avril : « Fabriquer un groupe de rock » avec la projection à 20h du documentaire La Grande Triple Alliance Internationale de l’Est, présenté par Nicolas Drolc et Guillaume Marietta et un concert à partir de 22h à la salle des Colonnes, rue du Hohwald à Strasbourg – Gare.

Jeudi 27 avril : À 19h, projection de Karaoke Paradise d’Einari Paakkanen puis à 20h10 projection du court-métrage Partir un jour d’Amélie Bonnin. À 21h, ce sera le « Kara-super-OK » du Cosmos où les participants chanteront sur des images…

Vendredi 28 avril : À 18h, le Cosmos organise la projection de Wayne’s World de Penelope Spheeris suivi à 19h50 d’un « Ciné bingo » par Ein & Stein avec la remise des prix du Grand Loto du Cosmos. À 21h50, la soirée dérape en « ciné mix ». Soirée à la salle des Colonnes, rue du Hohwald à Strasbourg – Gare.

Samedi 29 avril : À 21h20, projection de Steak de Quentin Dupieux à la salle des Colonnes, au 10 rue du Hohwald à Strasbourg – Gare, pour faire « une passerelle avant le set d’Etienne de Crecy à la Laiterie » à 23h45.

Dimanche 30 avril : Des projections en amont du concert de Flavien Berger à la Laiterie, rue du Hohwald à Strasbourg – Gare. dès 20h.

L’objectif de cette pré-inauguration : « amener le cinéma là où il n’est pas, ou peu, présent » plaide Étienne Hunsinger. « Ce sera l’occasion de faire la démonstration avant l’ouverture de ce que l’équipe du Cosmos pourra réaliser en termes de projets culturels et artistiques et de faire connaître ce projet auprès des Strasbourgeois et Strasbourgeoises ».

Rassemblement ce lundi devant le tribunal de Strasbourg, en soutien aux manifestants interpellés

Rassemblement ce lundi devant le tribunal de Strasbourg, en soutien aux manifestants interpellés

Plusieurs syndicats appellent à un rassemblement devant le tribunal judiciaire de Strasbourg ce lundi 17 avril, à 14h, pour soutenir les manifestants interpellés lors de la précédente manifestation contre la réforme des retraites, jeudi 13 avril.

Dans un communiqué commun, la CGT 67, FO 67, la CFTC 67, FSU Alsace, Solidaires Alsace et à la Fédération Autonome 67 Bas-Rhin appelle à un rassemblement lundi 17 avril devant le tribunal judiciaire de Strasbourg, à 14h. Les syndicats souhaitent apporter leur soutien aux militants interpellés au cours de la précédente journée de mobilisation contre la réforme des retraites, jeudi 13 avril. Ils invitent à rester le temps du jugement.

Plus largement, les organisations dénoncent un durcissement de l’attitude des forces de l’ordre :

« Attaché·es que nous sommes à l’expression pacifique de la contestation, nous ne pouvons que dénoncer les dérives qui traduisent une tentation autoritaire face à cette contestation. Ce n’est pas en criminalisant le mouvement social que des réponses à la crise actuelle pourront s’imposer. »

Le jeudi 13 avril, un service d’ordre solidaire faisait bloc à de nombreux endroits afin d’éviter tout contact avec les forces de l’ordre. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc

Le communiqué mentionne en particulier le cas d’un syndicaliste de la CGT Métallurgie, en détention depuis jeudi – sa garde à vue ayant été prolongée jusqu’à la comparution immédiate.

Racisme, entrainement de boxe et « casser du gaucho » : témoignage d’un infiltré dans un réseau d’extrême droite

Racisme, entrainement de boxe et « casser du gaucho » : témoignage d’un infiltré dans un réseau d’extrême droite

Propos xénophobes, incitation à « casser du gaucho », recrutement de jeunes à travers des entraînements de boxe à Strasbourg ou incitation à mettre en place une patrouille sécuritaire… Infiltré depuis la création du réseau d’extrême droite « FR Deter » et de sa branche bas-rhinoise, un militant antifasciste témoigne.

« Faudrait se rassembler pour casser du gaucho les gars. » Dès janvier 2023, Marco (le prénom a été modifié) a lu ce type de messages tous les jours. Infiltré dans la boucle FR Deter et sa section bas-rhinoise sur la plateforme Telegram, le militant mène son combat antifasciste « de son côté », derrière son ordinateur. « De temps en temps, j’avertis des camarades si des fachos prévoient un rassemblement », explique-t-il, avant de détailler les résultats de son infiltration.

En février, les coordonnées personnelles d’un député La France Insoumise (LFI), Louis Boyard, fuitent sur un canal Telegram d’extrême-droite. Il alerte le parti. Plus tard, une liste de personnalités de gauche est publiée sur cette boucle FR Deter. Sandra Regol, députée Europe Écologie Les Verts (EE-LV) de Strasbourg, en fait partie, elle en est immédiatement avertie.

Liste des « islamo-gauchistes », réalisée par le site FrdeSouche et diffusée sur le canal FR Deter. Photo : Document remis

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Comment poser des Stolpersteine, le combat des passeurs

Comment poser des Stolpersteine, le combat des passeurs

Série « Des pavés dans les mémoires » (1/3). Les « Stolpersteine », ce sont ces pavés sur lesquels une plaque honore le souvenir d’une victime du nazisme. Ce premier épisode raconte l’approche pédagogique de deux associations pour accompagner la pose de ces pavés symboliques.

En ce froid dimanche de mars, un attroupement se remarque dans les rues de Schirmeck. L’assemblée hétéroclite écoute avec attention un groupe de collégiens, qui lisent des textes à voix haute, les épaules serrées les uns contre les autres. Est-ce la solennité de l’instant ou l’heure matinale qui brouille les caractères et les rend durs à déchiffrer ? Les voix tremblent un peu, alors qu’elles rendent hommage à Ernestine Weil, née Woog.

À Schirmeck, des pavés pour Ernestine, Fernand et Marcel

Cette enfant de la ville vivait ici, au 167, Grand’rue. À 74 ans, elle a été arrêtée et déportée à Drancy, où elle mourra. Elle devait ensuite être emmenée avec d’autres déportés juifs vers Auschwitz. Finalement, après presque 80 ans, la voici de retour à la maison : un pavé de mémoire attire désormais le regard des passants devant sa dernière adresse. 

Le souvenir de deux autres habitants de la ville a été marqué plus tôt, place du 17-Novembre. Fernand Lévy et Marcel Alexandre, son oncle, juifs tous les deux. En 1940, ils avaient trouvé refuge en Dordogne, c’est là-bas qu’ils ont été raflés, puis fusillés par la division Brehmer en mars 1944. Ils avaient 36 et 57 ans. 

Écouter Simon, 14 ans, lire l’inscription écrite sur le pavé posé pour Marcel Alexandre à Schirmeck. (Photo SW / Rue89 Strasbourg).

Les pavés de mémoire ou « Stolpersteine » sont de plus en plus nombreux en France. Ces cubes de béton de 9,6 cm de côté sont recouverts d’une plaque de laiton qui brille, où l’on peut lire une inscription qui honore la mémoire d’une victime du nazisme. À l’origine de cette initiative : dans les années 1990, un artiste allemand, Gunter Demnig souhaite commémorer le souvenir de ces victimes en marquant leur ancien domicile ou lieu de travail ou d’études. Encastrés dans le sol, ils sont destinés à « faire trébucher » le passant, la traduction littérale de stolpe : il faut encore buter sur cette histoire douloureuse pour ne pas oublier. 

Tout le monde connaît bébé Berr

Les trois pavés de Schirmeck ont été posés à l’initiative de l’association Stolpersteine France, créée en 2015 par Christophe Woehrlé, historien. Associer des élèves à cette démarche est essentielle et systématique, selon ce professeur au collège du Stockfeld, qui a posé les premiers pavés alsaciens en 2017 :

« À Muttershotlz, où 27 pavés sont installés, la mémoire est entretenue par les élèves de CM2 qui les polissent deux fois par an : il ne s’agit pas juste de poser, mais de faire durer la mémoire dans le temps, c’est une démarche très concrète. Là-bas, avant 2017, personne ne savait que des Juifs vivaient dans la ville, aujourd’hui tout le monde connaît « bébé Berr » (un des enfants de la ville déporté à Drancy puis à Auschwitz où il meurt à 3 ans ), des cailloux et des fleurs sont déposés régulièrement autour de son pavé. » 

Pose des pavés pour Fernand Lévy et Maurice Alexandre à Shirmeck Photo : SW / Rue89 Strasbourg / cc

Un projet qui intéresse et motive les jeunes collégiens

Les élèves ne sont pas juste présents pour l’installation, mais entreprennent auparavant tout un travail de reconstitution des biographies et des évènements. Une façon de s’approprier l’histoire de son pays, de sa région et de sa ville, douloureuse mais nécessaire, selon Cyriak Batlo, enseignant d’histoire et de LCR (Langue et culture régionale) au collège de la Haute-Bruche à Schirmeck.

Ce sont ses élèves qui ont travaillé autour des trois pavés posés ce dimanche. Cette approche, très concrète, est bienvenue vu le vaste programme de troisième estime l’enseignant :  « Je suis très fier d’eux », admet-il dans un sourire en soulignant que certains élèves peu motivés habituellement en histoire, se sont vraiment investis dans ce projet. C’est le cas de Sarah, 14 ans, qui travaillé sur la biographie d’Ernestine Weil : 

« C’est le passé de la France et de Schirmeck. J’ai des lacunes en histoire. Depuis ma première année de collège, je n’y arrive pas. Là, j’ai travaillé parce que ça m’a demandé une implication personnelle, et ça m’a aussi permis de mettre un visage sur des dates. » 

Christophe Woehrlé, historien et professeur au collège du Stockfeld, a créé l’association Stolpersteine France en 2015, qui a posé les premiers pavés en Gironde (photo SW / Rue89Strasbourg).

Recherches historiques rigoureuses

À Strasbourg et dans l’Eurométropole, c’est une autre association qui pose ces pavés : Stolpersteine 67. Jusqu’à sa création en 2019, la collectivité ne voulait pas poser de Stolpersteine, notamment à cause de l’opposition du Consistoire juif de l’époque (on y reviendra dans l’épisode 2, NDLR). Aujourd’hui, 150 pavés existent dans l’EMS, dont 70 à Strasbourg, la plupart pour des citoyens juifs, mais d’autres victimes des nazis seront bientôt honorées. 

Là aussi, le projet pédagogique est un socle de la démarche, comme le revendique Richard Aboaf, chargé de l’action culturelle à l’école ORT de Strasbourg, et à la tête de Stolpersteine 67 qui a impliqué en tout plus de 900 élèves. Parmi eux, des classes du lycée professionnel Oberlin de Strasbourg : 

« L’évocation de millions de victimes a un côté inconcevable, alors que retracer des trajectoires familiales et individuelles permet d’incarner ces drames. Lorsqu’on rencontre des photos, des détails biographiques : c’est une approche particulière. » 

Richard Aboaf est l’un des membres fondateurs de l’association Stolpersteine 67 Photo : SW / Rue89 Strasbourg / cc

Le travail des élèves répond à des critères exigeants, c’est l’autre caractéristique de cette initiative telle qu’elle est mise en place dans la région. Il faut notamment une recherche rigoureuse, qui puise dans les sources historiques ainsi qu’un épluchage des archives. Les informations sont ensuite recoupées entre elles. L’appel aux familles – lorsqu’il y a des descendants –, ou à la communauté, est aussi utilisé.

Audrey Kichelewski est maîtresse de conférence en histoire contemporaine à l’Unistra et membre fondatrice de Stolpersteine 67. Dès le départ, elle a voulu associer des étudiants de licence au projet. 

« Cela les passionne : c’est souvent la première fois qu’ils se plongent dans des sources, des archives. Et puis c’est une démarche ”appliquée”. Les étudiants voient quelques mois plus tard se concrétiser leurs travaux. C’est émouvant, ils réalisent que l’histoire n’est pas juste le savoir mais sert concrètement à quelque chose. » 

Ces étudiants accompagnent les lycéens et collégiens, un premier pas aussi vers le métier d’enseignant que certains d’entre eux choisiront, souligne également Audrey Kichelewski.

Un des pavés posés par des lycéens d’Oberlin à la Krutenau : « Ici habitait Léon Rieger ». (Photo SW/ Rue89Strasbourg).

« Boucler la boucle »

En 2019, alors qu’il est élève en Bac pro vente au lycée Oberlin, Nathan Tardiva voit arriver sur sa table un épais dossier de l’office des biens et des intérêts privés aux archives départementales (OBIP). Le jeune homme de 15 ans mesure que la tâche ne sera pas facile. Il s’agissait, pour sa classe – encadrée par la professeure d’histoire géographie et de lettres Fazia Dergam – de retracer les spoliations des commerces juifs strasbourgeois.

Dans cet épais classeur, les documents sont en allemand, et tout est consigné. Nathan Tardiva raconte :

« On cherchait le mot “jude” qui était mentionné, puis on notait les infos clés. Ensuite, pour savoir ce qui était arrivé au commerçant, on croisait avec les données du mémorial de Yad Vashem, on s’est aussi rapproché de la communauté juive pour faire appel à leurs connaissances, et aux familles. » 

Ce projet de classe va durer trois années durant. Les élèves découvrent que dans certains cas, les commerçants survivant ont pu récupérer leur bien. Le dossier est alors plus épais et complété de pièces en français. Et pour les jeunes lycéens, le travail de fourmi commence : recoupement et croisement des sources. Une quête qui a passionné Nathan Tardiva, dont l’intérêt pour la période avait été éveillé par les jeux vidéos et le cinéma. 

« Au début, on a du mal à réaliser, et puis peu à peu en découvrant les détails, on mesure que c’est réel, et là c’est terrible. Au bout d’un moment, quand on fait face à cette pile de documents de 10 cm ou plus, il y a cette envie de savoir qui ne nous lâche plus : on veut aller au bout, comprendre ce qui s’est passé, boucler la boucle. »

Fazia Dergam est professeur d’histoire, de géographie et de lettres au lycée Oberlin de Strasbourg. Elle a mené plusieurs projets avec ses élèves autour des Stolpersteine. (Photo SW / Rue89Strasbourg).

Le projet, qui s’est clôturé en 2022, a été ponctué d’expositions, de rencontres avec des historiens comme Tal Brutmann, ou des rescapés des camps. Parmi elles : Ginette Kolinka ou Simone Polak, qui vit aujourd’hui à l’Esplanade. Pour ce groupe-là, le voyage à Auschwitz prévu a dû être annulé pour cause de COVID (2020), puis de guerre en Ukraine (2022), mais l’aventure a été marquante tout de même. Et les pavés seront posés en 2024 avec l’association Stolpersteine 67.

C’est aussi toute une histoire du centre-ville de Strasbourg qui a émergé pour Nathan et les autres : les commerçants juifs étaient orfèvres, fourreurs, bonnetiers, menuisiers, antiquaires…

« Connaître ces destins fait prendre une autre tournure à cette période de l’histoire, et puis c’est connaître notre ville aussi. Maintenant, je vois ces plaques sur mon chemin et je sais ce que c’est. J’en ai parlé à ma copine. Mes parents n’étaient pas au courant de ce qu’étaient ces pavés, je leur ai expliqué. »

Fazia Dergam a déjà mené d’autres projets en lien avec la mémoire des victimes nazies. Elle aime les faire plonger dans les archives pour qu’ils assemblent peu à peu les pièces du puzzle. 

« Confronter les élèves aux sources premières, non seulement cela donne vie à des histoires oubliées mais avec ces documents entre les mains, c’est impossible de dire que c’est faux, que ça n’a pas existé, comme le prétendent les fake news, les théories du complot ou encore des posts antisémites. J’aimerais faire de ces élèves des passeurs de mémoire. Certains sont avec moi pendant trois ans, que reste-t-il des connaissances qu’on leur transmet à la fin ? Avec ce projet, ils prennent l’Histoire en pleine face. S’il peuvent en retenir quelque chose, c’est déjà gagné. »

Retracer le passé

Le rôle de passeur n’est pas juste une formule. Les liens avec les familles, ceux entre les générations se font par l’intermédiaire de ces poses de pavés. Les descendants, lorsqu’ils existent, sont systématiquement contactés et consultés sur leur volonté de voir aboutir le projet. André Marx, petit neveu d’Ernestine Weil, était présent à Schirmeck ce dimanche 26 mars. Il en savait très peu sur sa grande tante. Et était très ému de voir où elle avait vécu : 

« C’est important de redonner vie à ces personnes qui l’ont perdue de manière très cruelle. Et cela compte que ce soit des collégiens de 14 ans de cette ville qui retracent ainsi le passé de ces Schirmeckois, morts parce qu’ils étaient Juifs ».

Le pavé en mémoire d’Ernestine Weil, posé à Schirmeck le 26 mars dernier (photo SW / Rue89Strasbourg).

Le lien entre les générations se fait parfois de manière inattendue au détour de la pose. C’est le cas pour Christophe Woehrlé qui, à l’occasion de recherches, a appris à sa grand-mère d’Herrlisheim près de Colmar, le destin terrible de son amie d’enfance, expulsée en Belgique en 1940, qu’elle imaginait avoir poursuivi sa vie, grandi et vieilli là-bas. Elle ignorait que la jeune fille était morte en déportation à Auschwitz. 

Lorsqu’il vient combler des histoires familiales émaillées de non-dits, le passage de relais que représentent les Stolpersteine prend tout son sens, comme l’explique aussi Richard Aboaf faisant référence à son propre vécu. Son père, qui est né et avait grandi en Tunisie, ne lui avait jamais vraiment parlé de la tragédie familiale :

« J’ai appris tardivement que la sœur aînée de mon père et son mari avaient été déportés de Tunisie en janvier 1943 d’abord à Naples puis à Auschwitz. En 1944, ses trois petites filles et les grands parents ont été également déportés de Corfou à Auschwitz. Ils y sont tous morts. Mon père en parlait peu : c’était sa façon d’être résilient. La transmission est très importante, je suis touché par l’implication de ces jeunes. »

Dans le prochain épisode de cette série : pourquoi ce projet lancé au milieu des années 90 en Allemagne a tardé à prendre en France ? Comment expliquer que certaines villes refusent encore la pose de Stolpersteine ? Pourquoi des pavés, quand des monuments ou des mémoriaux existent ? 

Au lycée Marie Curie, le proviseur porte plainte pour trouver les élèves derrière un compte Instagram

Au lycée Marie Curie, le proviseur porte plainte pour trouver les élèves derrière un compte Instagram

Jeudi 6 avril, le proviseur du lycée Marie Curie a informé par mail les parents et élèves qu’il a déposé plainte contre X. Il entend trouver, grâce à l’enquête, les élèves derrière un compte Instagram listant les profs grévistes, les jours de manifestation.

Depuis mi-mars, le lycée Marie Curie à l’Esplanade fait partie des établissements où les élèves se mobilisent contre la réforme des retraites : ateliers pancarte, forums de discussions dans la cour, engagement auprès d’organisations syndicales… Certains appellent leurs pairs à venir manifester avec eux et à ne pas aller en cours.

Pour la première fois jeudi 13 avril, les lycéens rejoints par des dizaines d’autres ont bloqué leur établissement dès 6h, puis les cours ont été annulés toute la journée. Comme dans d’autres cercles militants, des informations circulent aussi sur les réseaux sociaux.

« Les lycéens n’ont pas le droit de grève »

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Après la décision du Conseil constitutionnel : « Tout ce qui nous reste, c’est foutre le bordel, tout bloquer »

Après la décision du Conseil constitutionnel : « Tout ce qui nous reste, c’est foutre le bordel, tout bloquer »

Quelques centaines d’opposants à la réforme des retraites se sont rassemblés vendredi 14 avril pour réagir à la décision du Conseil constitutionnel à l’appel de l’intersyndicale du Bas-Rhin. Désormais sans recours institutionnel, plusieurs manifestants ont pris la parole pour encourager à mener la lutte par des grèves et des blocages.

Place Kléber, la nouvelle se diffuse doucement entre manifestants. Vendredi 14 avril, peu avant 18h, le Conseil constitutionnel vient d’annoncer la validation du report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. L’institution a aussi refusé l’organisation d’un référendum sur ce thème. « Je m’attendais à ça vu le profil des membres du Conseil constitutionnel. Sur les neuf, quatre ont été nommés par Emmanuel Macron, mais c’est quand même très dur à entendre », souffle Anne. Julius, à quelques mètres, voit ça comme « une ultime provocation » :

« Depuis trois mois, on va en manif. Des gens font la grève, organisent des blocages, et on n’est pas entendus. Cela ne peut pas se terminer comme ça. Ils veulent le feu, ils l’auront. »

À partir de 18h, un rassemblement a commencé avec des prises de parole sur la place Kléber. Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

« On ne peut rien attendre de ces institutions »

Esther Bauer, co-secrétaire du syndicat Solidaires Alsace prend la parole au mégaphone : « Cela saute aux yeux maintenant. La lutte, c’est la seule chose qui vaille. On ne peut rien attendre de ces institutions. » Un membre de la CGT Cheminots enchaîne :

« Maintenant les choses sont claires, on n’attend rien de leur part. Il faut faire la grève les amis. Tout ce qu’il nous reste, c’est foutre le bordel, tout bloquer, et on va les obliger à reculer comme ça. »

D’autres syndicalistes de Force Ouvrière et de la CGT promettent que la mobilisation va continuer, sous forme de blocages.

Après les discours, un cortège se forme pour entamer une manifestation non déclarée. Un très important dispositif encadre les manifestants pour les faire sortir du centre-ville. À l’approche de la Cathédrale, les forces de l’ordre usent de gaz lacrymogène. Les militants entament ensuite une longue marche dans les rues de la Krutenau, jusqu’au Nouvel Hôpital Civil. Ils sont régulièrement gazés par la police bien qu’aucune dégradation n’ait été constatée par Rue89 Strasbourg.

Selon la journaliste indépendante Anne Mellier, le cortège s’est peu à peu dispersé en marchant vers les bains municipaux, atteints peu avant 21h30.

Les violences policières alimentent aussi la colère des manifestants. Photo : GK / Rue89 Strasbourg / cc

L’intersyndicale appelle à un « raz de marée populaire » le 1er mai.

Un directeur de recherche CNRS exclu d’une unité de Inserm / Unistra pendant six mois pour des violences sexuelles

Un directeur de recherche CNRS exclu d’une unité de Inserm / Unistra pendant six mois pour des violences sexuelles

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La CFDT Alsace change de méthode : « Si on se coordonne avec l’intersyndicale, on peut tout paralyser »

La CFDT Alsace change de méthode : « Si on se coordonne avec l’intersyndicale, on peut tout paralyser »

Face à un gouvernement qui ne les écoute pas sur la réforme des retraites et la décision défavorable du Conseil constitutionnel, des militants de la CFDT 67, traditionnellement attachés à une posture de dialogue, envisagent un nouveau mode d’action : des blocages de sites stratégiques. Ils ont paralysé une plateforme Auchan à Vendenheim du mardi 11 avril au jeudi 13 au soir. Et depuis vendredi, ils ralentissent le fonctionnement d’un entrepôt logistique à Bischheim.

Groupe électrogène, tonnelles, plancha, camion aménagé avec une douche et des toilettes… Les adhérents de la CFDT sont organisés pour tenir dans la durée. Leur blocage de l’entrepôt logistique Auchan à Vendenheim a commencé à 22h, mardi soir. Jeudi matin, ils se tiennent devant l’accès du site, afin d’empêcher le passage des camions, et donc l’approvisionnement des supermarchés. Le géant de la grande distribution y stocke des produits frais et surgelés. Des équipes d’une dizaine de militants se relaient le matin, l’après-midi et la nuit.

Les blocages de la CFDT sont organisés avec des équipes qui se relaient pour tenir 24h/24. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

C’est toute la posture habituelle de la CFDT qui est remise en question. De tradition réformistes, favorables au dialogue avec le patronat et le gouvernement, ces syndicalistes sont affectés par l’absence d’impact de la mobilisation massive et pacifiste contre la réforme des retraites. Et le Conseil constitutionnel a validé le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Après trois mois d’efforts pour manifester en nombre, Gilles Poyac, militant CFDT qui participe au blocage, ne peut que constater l’inefficacité de la méthode :

« On ne devrait pas avoir à bloquer, Emmanuel Macron devrait écouter nos revendications. Plus de 90% des actifs sont contre son projet, donc c’est juste son rôle de renoncer, on est en démocratie. Nous sommes un syndicat de négociation. Mais là, il n’y en a aucune, c’est une catastrophe. Face à l’arrogance et l’irresponsabilité de ce gouvernement, on utilise les moyens à notre disposition. »

« Les patrons vont dire à Macron qu’il doit reculer »

Martine Wolters, de la CFDT Santé sociaux, abonde : « Ils essayent de nous faire culpabiliser en nous disant qu’il ne faut pas bloquer, mais c’est leur mépris qui nous oblige à passer à la vitesse supérieure. Et on ne lâchera pas avant le retrait de la réforme. »

Pas de banderoles renforcées ou de barricades enflammées. Les syndicalistes de la CFDT bloquent le passage avec des plots et leurs véhicules. Lorsque des gendarmes arrivent dans la matinée de jeudi, ils les accueillent pour négocier. « Ça se passe très bien avec eux », glisse un agent. Vers 17h, face à « l’insistance des forces de l’ordre », les activistes décident de lever le camp… pour enchaîner dès le lendemain, vendredi 14 avril à 4h, avec le blocage de l’entrepôt Stef à Bischheim.

Vers 10h ce jour là, une quinzaine de militants sont présents et affichent des mines sereines. Des dizaines de camions sont bloqués. « On touche Auchan, Super U, Leclerc, Match et Cora », énumère Valérie Delena, déléguée syndicale CFDT à l’EHPAD Bartischgut de la Meinau. À 10h30, ils décident de laisser passer les véhicules qui livrent des restaurants : « On ne veut pas pénaliser les petites entreprises, par contre on bloque complètement l’approvisionnement des supermarchés », explique Martine Wolters. Selon elle, le blocage est le seul moyen « d’aboutir à quelque chose » :

« Si on touche des grosses entreprises au porte-monnaie, que leurs bénéfices sont réduits, les patrons vont commencer à dire à Emmanuel Macron qu’il doit reculer. Quand l’économie sera vraiment affectée, il sera obligé de bouger. »

Martine Wolters (à gauche) et Valérie Delena (à droite), estiment que pour faire reculer le gouvernement, ces blocages sont nécessaires. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

La CFDT se dit capable de mobiliser davantage pour des blocages

Ali et Karim, transporteurs routiers chez Stef, confirment aux militants CFDT que l’action est très impactante : « Là, il y aura des déficits d’approvisionnement pour le week-end. C’est comme ça que le gouvernement peut réagir. » Pascal Vaudin, secrétaire général de la CFDT des transports du Bas-Rhin, ajoute :

« En bloquant les plateformes alimentaires, on touche aussi les caisses de l’État via la TVA. On veut montrer l’exemple. Avec ces actions, on peut avoir un très gros impact. Quinze personnes sur place c’est suffisant pour bloquer un site comme ça. Si on se coordonne avec l’intersyndicale à l’échelle nationale, on peut tout paralyser. »

Pascal Vaudin observe que des blocages coordonnés peuvent avoir un fort impact. (Photo TV / Rue89 Strasbourg / cc)Photo : TV / Rue89 Strasbourg

À Strasbourg, jeudi 13 avril, le collectif On crèvera pas au boulot a bloqué la place de Haguenau et le syndicat Sud a installé un barrage sur le pont de Kehl. Dans le cortège, Laurent Feisthauer, secrétaire départemental de la CGT, relevait aussi la nécessité de changer de stratégie :

« On a atteint les limites des grandes journées interprofessionnelles. Il faut encore fixer le cap au niveau de l’intersyndicale, mais je pense qu’on organisera tous les matins des barrages filtrants, qu’on bloquera des entreprises si le gouvernement ne recule pas… »

Pascal Vaudin donne des indications à un conducteur de camion. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

D’après Valérie Delena, rien qu’à la CFDT, il est possible de mobiliser « largement plus » pour ce type d’actions, afin de bloquer « plusieurs endroits en même temps ». « Avec du recul, on aurait dû commencer plus tôt », souffle Pascal Vaudin. « La fin du quinquennat d’Emmanuel Macron sera très difficile pour lui s’il continue comme ça, il est en train de s’en rendre compte, car nous, on ne lâchera pas », prévient Gilles Poyac, pendant que ses camarades exposent la situation à un routier à l’arrêt.

Rassemblement vendredi soir à Strasbourg place Kléber suite à la décision du Conseil constitutionnel

Rassemblement vendredi soir à Strasbourg place Kléber suite à la décision du Conseil constitutionnel

L’intersyndicale 67 appelle à un rassemblement statique ce vendredi soir à 18h, place Kléber à Strasbourg. La décision du Conseil constitutionnel sur la réforme des retraites sera rendue en fin de journée.

Un nouveau rendez-vous est fixé par l’intersyndicale 67 au lendemain de la journée de mobilisation du jeudi 13 avril. Ce vendredi 14 avril, les syndicats appellent à un rassemblement statique sur la place Kléber à Strasbourg à 18h, à l’occasion de la décision du Conseil constitutionnel sur la loi portant la réforme des retraites, et sur la légalité de la requête d’un référendum d’initiative partagé (RIP) déposée par les députés communistes mi-mars.

Alternative étudiante Strasbourg, CFTC 67, CGT 67, FO 67, FSU Alsace, Solidaires Alsace, Fédération Autonome 67 et UNSA 67 entendent maintenir la mobilisation syndicale jusqu’au retrait du projet de loi sur le financement de la sécurité social, impactant le système des retraites.

Le jeudi 13 avril, environ 8 000 personnes se sont mobilisées à Strasbourg à l’appel de l’intersyndicale. Les manifestants se disent pessimistes sur la décision du Conseil Constitutionnel. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Depuis le jeudi 16 mars, des manifestations spontanées ont régulièrement lieu à Strasbourg suite à l’utilisation du 49.3 par le gouvernement pour passer en force sur cette réforme controversée. La mobilisation du jeudi 13 avril n’y a pas échappé : les forces de l’ordre ont procédé à 15 interpellations de manifestants.

L’intersyndicale 67 exige « la libération immédiate des manifestants interpellés et l’abandon des poursuites ». Elle appelle à un autre rassemblement, toujours ce vendredi 14 avril, à 15h, devant le commissariat central de Strasbourg.