Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Jazz, amours cachées et fraternités toxiques : novembre va secouer

Jazz, amours cachées et fraternités toxiques : novembre va secouer
Souad Asla et Omar Sosa pour Sahravane

Jazzdor qui souffle ses 40 bougies, des femmes qui s’aiment loin des regards, une trilogie choc sur les violences sexuelles, un salon de littérature jeunesse… Voici une sélection pour l’agenda culturel de novembre.

Jazzdor fête ses 40 ans

À partir du 7 novembre, le festival Jazzdor célèbre quatre décennies d’existence avec près de 120 artistes venus de 23 pays, répartis dans 9 salles de concert. Cette 40e édition met le jazz au féminin à l’honneur, avec une programmation qui frôle la parité sur le nombre de groupes dirigés par une femme. Au programme : la trompettiste et compositrice française Airelle Besson ou encore le trio de la canadienne Kris Davis. Le festival célèbre aussi les collaborations internationales, avec, en clôture, Omar Sosa et Souad Asla (Algérie/Cuba/Hongrie/France/Venezuela).

On a repéré Free Space, un spectacle qui interroge la notion d’espace dans la musique, avec le violoncelliste Vincent Courtois et le comédien Pierre Baux autour de l’œuvre de Georges Perec Espèces d’espaces. Et pour celles et ceux prêts à traverser le Rhin, rendez-vous à la Reithalle d’Offenburg avec Les égarés, qui réunit quatre solistes de haut vol : Émile Parisien, Ballaké Sissoko, Vincent Peirani et Vincent Segal. Virtuosité et poésie au programme.

Animaux, tableaux, photos !

Les photos du photographe animalier vosgien Vincent Munier – dont le talent dépasse largement nos frontières – dialoguent avec des œuvres issues de différents musées de Strasbourg (Musée des Beaux-Arts, Cabinet des Estampes et des Dessins, Musée d’Art moderne et contemporain, Musée Tomi Ungerer et Musée Zoologique) et allant du XVIe siècle au XXe siècle. Autour du thème « l’animal et la nature », cette exposition entend rappeler que l’art comme la nature méritent d’être observés, contemplés, et protégés. 81 photographies embarquent les spectateurs en forêt, avant de les perdre dans des paysages d’une blancheur immaculée.

Renne sauvage, Norvège.Photo : Vincent Munier

À noter, le 9 novembre, de 14h30 à 17h30, les étudiants de l’Université de Strasbourg s’invitent dans les collections pour accompagner les visiteurs dans la découverte des œuvres.

Le TJP égaye les déjeuners

Le TJP a décidé de transformer les pauses déjeuner en intermèdes culturels. De courtes représentations artistiques – danse, théâtre, performances culinaires – sont programmées plusieurs mardis midi tout au long de la saison. Le principe : venir avec sa gamelle ou commander sur place pour manger avant, pendant ou après le spectacle.

Les « Midis vivants » du Théâtre jeune public (TJP) de Strasbourg.Photo : Anaïs Baseilhac

En novembre, rendez-vous le 4 du mois avec Arron Mata, artiste originaire de l’Elsau qui reviendra sur son parcours et partagera son amour de la langue et du jeu. Entre ces moments de théâtre sera projeté Elsautopie ou la montagne verte, un chemin vers l’utopie d’Anaïs Baseilhac, réalisé avec les élèves des classes théâtre du collège Hans Arp. Le mardi 18 novembre, c’est un parcours gustatif des plantes de Strasbourg avec le danseur, comédien et performeur Louis Gillard qui réjouira les curieux gourmands.

Señora Tentación

Une concierge et une femme de ménage vivent un amour secret à l’ombre d’une jungle foisonnante qu’arrose la première. Le texte de la féministe Marie Dilasser met en lumière la passion invisible de deux femmes sexagénaires. Mis en scène par les danseuses et chorégraphes Roser Montlló Guberna et Brigitte Seth – habituées des plateaux de Pôle Sud –, Señora Tentación rend hommage à toutes celles et ceux qui, de génération en génération, ont dû taire et dissimuler leur homosexualité. Ces femmes touchantes, par leurs mots et leur gestuelle, défendent le droit de chacun à vivre ses désirs librement.

Le 14 novembre, un atelier autour de ce spectacle est proposé aux femmes de plus de 60 ans. Les deux chorégraphes animeront ce moment créatif entre danse et théâtre, autour du thème du secret, du non-dit.

Brigitte Seth et Roser Montlló Guberna, Señora tentación. Photo : Christophe Raynaud de Lage

The Brotherhood

L’autrice et metteuse en scène brésilienne Carolina Bianchi revient au Maillon avec la suite de son triptyque Cadela Força consacré aux violences sexuelles et à leur représentation dans les arts. Celles et ceux qui ont vu La Mariée et Bonne nuit Cendrillon la saison dernière se souviennent de la performeuse tombant inconsciente après avoir consommé la drogue du violeur, sur scène. Cette fois, elle se penche sur les fraternités masculines : leurs origines, leurs codes, leurs conséquences. Elle interroge la perpétuation du viol et des violences sexuelles comme faisant partie intégrante de leur vocabulaire.

Dans le premier acte de ce long spectacle (3h40 avec entracte), Carolina Bianchi interviewe Klaus Haas, metteur en scène imaginaire de renommée mondiale. Dans le deuxième acte, huit hommes occupent la scène tandis que Carolina Bianchi est reléguée en arrière-plan, illustrant l’annihilation des femmes par les hommes, y compris dans la culture. Ça dérange, ça questionne, c’est le but.

Schilick on carnet

Le salon du livre jeunesse – dont on adore toujours autant le nom – est de retour ce mois-ci ! Il propose pour cette édition un focus sur six maisons d’édition indépendantes. On y découvrira des livres engagés, produits de manière écoresponsable, multiculturels ou encore bilingues. Comme chaque année, une douzaine d’illustrateurs et d’illustratrices seront présents pour dédicacer leurs ouvrages. Au menu : spectacles, lectures orales et lectures signées en langue des signes française (LSF), ateliers pour tout âge et coin restauration durant tout le week-end.

La fondation François Schneider rouvre avec l’exposition Métamorphose

La fondation François Schneider rouvre avec l’exposition Métamorphose
Maryam Khosrovani, Sève, 2025, Différentes techniques, 9 dessins encadrés, 9 x (41 x 61 cm), Collection Fondation François Schneider.

À Wattwiller, la fondation François Schneider inaugure le 1er novembre Métamorphose, exposition des sept lauréats du concours Talents Contemporains. Une treizième édition qui invite à sonder les mirages et réalités que peut générer l’eau, muse du lieu.

L’eau dans tous ses états. Depuis 2011, la fondation haut-rhinoise propose un concours destiné aux artistes plasticiens animés par le monde aquatique. La proximité avec l’histoire du centre d’art, ancienne usine d’embouteillage des eaux thermales Wattwiller, permet de construire une collection exclusivement centrée sur la thématique de l’eau. Elle compte aujourd’hui près d’une centaine d’œuvres.

Regards sur la transformation dans l’art

Les sept lauréats du concours explorent le thème de la transformation : celle des corps, des idées et des récits. Les artistes sculptent, filtrent, figent ou dissolvent pour faire émerger la possibilité du changement. Traversée par une diversité de parcours et de sensibilités, l’exposition fait de l’eau un prisme au travers duquel notre regard, sur ce qui semblait familier, se renouvelle.

Aurélie Scouarnec, Feræ, 2021, Impressions sur papier Fine Art Rag Baryta, encadrement Wengé Foncé, 7 x (40 x 60 cm), Collection François Schneider.Photo : ©Aurélie Scouarne

Pour la photographe lauréate Aurélie Scouarnec, la métamorphose est le soin apporté au vivant blessé. Pour Vardit Goldner, vidéaste et photographe, elle est politique et transforme l’injustice en résistance. La plasticienne Élise Grenois fait de la métamorphose un rituel, un lien entre destruction et préservation. Pascale Ettlin, qui privilégie la peinture, un paysage idyllique teinté de vertige. L’eau, bien sûr, est omniprésente. Elle coule dans les souvenirs brodés de la plasticienne Maryam Khosrovani, sur les fibres du papier du designer Suhail Shaikh et dans les viscères hybrides de Yosra Mojtahedi, sculptrice et plasticienne.

Héritage et renouveau

Logée dans un écrin champêtre, l’architecture contrastée de la fondation François Schneider détonne. À ses pieds s’étend un vaste jardin de sculptures où dialoguent les œuvres de Niki de Saint Phalle, Pol Bury ou celles d’anciens lauréats du concours.

Si elle marque la réouverture du lieu, l’exposition Métamorphose fait aussi écho aux convictions de la fondation : celles d’un engagement en faveur de la scène artistique contemporaine. En filigrane, le thème dessine aussi le portrait d’une institution qui se pense elle-même en mouvement. La métamorphose ne se joue pas seulement dans les œuvres, mais aussi dans la manière d’accompagner la création, d’en renouveler les formes de soutien et de mise en lumière.

Nicolas Schneider entre temps et matière à la Galerie East

Nicolas Schneider entre temps et matière à la Galerie East
Vue d’ensemble de l’œuvre Rain Again de Nicolas Schneider à la galerie EAST

À la Galerie East, la matière s’anime et raconte. Du 24 septembre au 15 novembre 2025, les dessins et sculptures de Nicolas Schneider dialoguent avec celles d’artistes américains d’après-guerre, transformant l’espace strasbourgeois en une scène où se rencontrent précision du geste et subtilité des textures. 

En franchissant la cour donnant sur la rue du Faubourg-de-Pierre, le tumulte de la ville s’efface peu à peu. L’espace de la Galerie East s’ouvre, à la fois intime et vibrant, où deux expositions s’entrelacent. La première est celle de l’artiste strasbourgeois Nicolas Schneider, qui déploie ici sa seconde exposition monographique. Pratiquant la sculpture, l’aquarelle et le dessin, il conçoit la sculpture comme une manière de tracer le temps.

Pour l’occasion, l’artiste a conçu une suite de trente-cinq « dessins en bronze », de petites pièces à l’échelle d’un carnet de dessin, soigneusement accrochées dans des cadres en plâtres. Sous les yeux des visiteurs et des visiteuses, une métamorphose s’opère, le trait devient matière, le dessin se fait métal. Dans un monde pétrifié par le bronze, le temps semble se fondre, le passé et le futur s’y rejoignent dans une transparence suspendue. Rain Again sonde la tension entre l’eau et le feu, deux éléments contraires que le bronze unit dans une alchimie silencieuse.

Nicolas Schneider convie à l’exploration de passages secrets, à suivre les veines de métal comme on suit les méandres d’un souvenir. Chaque forme, chaque reflet porte la trace d’un monde naturel transfiguré : la matière respire, se souvient, murmure. Le rapport à l’eau, récurrent dans le travail de l’artiste et jusque dans les titres de ses œuvres, évoque une temporalité flottante, presque mystérieuse, celle d’une nature en perpétuelle métamorphose.  

Vue d’ensemble de l’exposition Dernières Pluies et US Éditions à la galerie East.Photo : Crédit photo Émilie Vialet Courtsey galerie EAST

Au fond de la salle, un grand dessin à l’aquarelle attire le regard. Né dans les pages d’un petit carnet, il s’est vu agrandi et retravaillé à la main. Dans ce geste, quelque chose se joue, une pensée qui passe par le geste artisanal comme un prolongement de l’esprit. Ici, la main ne se contente pas de tracer, mais elle pense, elle se souvient, et dialogue avec la matière. 

Un murmure entre passé et création 

Sur un mur jaune moutarde, la galerie présente également une sélection de pièces historiques d’artistes majeurs de la scène américaine d’après-guerre entre les années 1960 à 1990. Richard Linder, Richard McLean, Claes Oldenburg, James Rosenquist et Franck Stella repoussent les limites des techniques et redéfinissent le geste artistique. Entre plâtre et peinture, gravure et collagraphie, gaufrage, sculpture ou tapis de laine noué à la main, les œuvres s’inscrivent dans un moment d’audace et d’expérimentation. Les matériaux s’y rencontrent, se superposent, se répondent dans un coexistence vibrante entre texture et surface. La rencontre de ces deux univers instaure un dialogue délicat entre continuité et rupture, tradition et expérimentation. Le spectateur se transforme alors en passeur, invité à explorer ce croisement et à réinventer son regard sur la matière, le temps et leurs résonances. 

Les Écologistes misent sur une gauche protectrice pour garder Strasbourg

Les Écologistes misent sur une gauche protectrice pour garder Strasbourg
La maire de Strasbourg Jeanne Barseghian (Les Écologistes) s’était rendue place Kléber lors de la journée de mobilisation du 10 septembre, en soutien à la mobilisation populaire.

Plutôt discrets dans la campagne, les Écologistes se sont mis en ordre de marche pour les élections municipales 2026. L’objectif est de valoriser le bilan de Jeanne Barseghian, tout en présentant la maire sortante comme la meilleure candidate de gauche.

Depuis que les Écologistes savent que Jeanne Barseghian est prête à solliciter un nouveau mandat, c’est le branle-bas de combat. Parmi les élus et les militants, « on sent une forte envie de partir en campagne », assure Floriane Varieras. Adjointe à la maire en charge de la solidarité, cette « pilier » du mandat a été nommée porte-parole de la campagne en septembre (voir newsletter municipale du 18 septembre). Mais tout ce petit monde doit se retenir car Jeanne Barseghian entend rester « pleinement investie » dans sa fonction de maire de Strasbourg le plus longtemps possible, au moins jusqu’en janvier.

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Après avoir volé au secours de Moscou, Virginie Joron veut « sauver Strasbourg »

Après avoir volé au secours de Moscou, Virginie Joron veut « sauver Strasbourg »
Virginie Joron, lors d’une réunion sur un projet de centre d’hébergement pour réfugiés dans le quartier Montagne Verte à Strasbourg.

Virginie Joron a officialisé sa candidature aux élections municipales 2026 pour le Rassemblement national. Après avoir servi les intérêts russes en légitimant un référendum douteux, l’eurodéputée d’extrême droite veut « sauver Strasbourg ».

Strasbourg est à l’agonie, d’après Virginie Joron. C’est pourquoi l’eurodéputée d’extrême droite veut « sauver Strasbourg », du nom de sa liste. Dans un communiqué daté du jeudi 23 octobre, cette membre du Rassemblement national annonce sa candidature aux élections municipales 2026. « À Strasbourg, trop de décisions sont prises loin des réalités du quotidien, loin des habitants, loin du bon sens. Les écologistes à la tête de la municipalité ont ridiculisé cette ville historique », dénonce l’ancienne conseillère régionale RN. Elle assure ensuite : « Je veux une mairie qui écoute, qui protège et qui agit pour tous. »

Premier raté de communication

Virginie Joron a donné une première idée de son sens de la protection de tous dans un post Facebook daté du vendredi 10 octobre. L’eurodéputée y fustige une ville prétendument sale en filmant des « immondices » dans le centre-ville. L’élue n’était sans doute pas au courant du fait qu’elle faisait face aux affaires d’une personne sans-abri. Dans un post Facebook en réponse, l’adjointe en charge de la tranquillité Nadia Zourgui a souligné le travail des services de propreté de la ville avant de rappeler :

« Si vous vous inquiétez de la personne qui a osé poser ses affaires au pied de cet arbre le temps d’un répit, elle est vivante et essaye de survivre en se raccrochant à tout ce qu’il lui reste et ce « tout » c’est exactement ce qu’il y a sur cette photo. »

Un sens critique à géométrie variable

Virginie Joron rentre de Damas en août 2019 après avoir rencontré le dictateur Bachar Al-Assad. Alors conseillère régionale, elle avait expliqué sur X ne s’être « jamais sentie en insécurité » la nuit dans la capitale syrienne. Le pays était alors en proie à une guerre civile…

Le sens critique de Virginie Joron semble aussi à géométrie variable, selon le pays où elle se trouve. En Europe, elle n’hésite pas à interroger l’existence d’une « dictature européenne ? » dans sa critique de l’action d’Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne. En juillet 2020, elle se montre bien plus docile. Après avoir assisté à un référendum russe, elle souligne « un événement historique pour les Russes, avec une forte mobilisation ». Le scrutin en question a permis, entre autres, à Vladimir Poutine de rester au pouvoir pour deux mandats supplémentaires. Le voyage, luxueux, a eu lieu dans la capitale de la Crimée, annexée par la Russie en 2014. La présence d’eurodéputés français permettait aussi de normaliser cette annexion de la province ukrainienne.

Pour avoir participé à de « faux voyages d’observation électorale », l’élue RN a été placée sur une « liste noire » du Parlement européen. Elle est ainsi interdite de réaliser des missions officielles d’observation électorale au nom du Parlement.

Une popularité liée au Covid

Au contraire du porte-parole de son parti Jordan Bardella, Virginie Joron ne peut pas être taxée d’absentéiste au Parlement européen. Elle est membre de la commission des « affaires juridiques » et du « marché intérieur et de la protection des consommateurs ». L’eurodéputée a ainsi travaillé sur le « Digital Market Act » visant à contraindre les géants du Net – comme Apple ou Amazon – à respecter de nouvelles obligations concurrentielles, sous risque d’importantes sanctions.

Mais ce qui a fait la popularité de Virginie Joron sur les réseaux sociaux, c’est surtout son engagement sur le Covid. Lorsque la pandémie éclate, l’élue se fait remarquer au sein des milieux antivaccins par son opposition vive à l’obligation vaccinale et ses remises en cause répétées de l’efficacité des vaccins. Sa stratégie passe notamment par une série de conférences données dans l’enceinte du Parlement européen à Strasbourg. Dans l’une des salles du bâtiment, elle a invité le professeur référent des complotistes Christian Péronne. En mars 2024, l’ancienne conseillère régionale souhaitait également organiser une exposition dédiée « aux victimes des vaccins du Covid ». Une idée rejetée par le questeur du Parlement.

Une candidature trumpiste

Dans le rapport aux faits, c’est une candidature trumpiste que porte Virginie Joron. Cette dernière nie en bloc la sanction dont elle a fait l’objet au Parlement pour son déplacement en Crimée. Face au rejet de son projet d’exposition sur les « victimes des vaccins du Covid », elle n’hésite pas à créer une polémique sur une artiste exposée au Parlement en parlant d’une exposition « d’inspiration pédophile ». Mais la stratégie de communication n’a rien d’étonnant pour une élue dont le groupe fait sienne la rhétorique de Donald Trump, comme dans cette conférence organisée le 15 octobre 2025 au Parlement européen : « Make Europe Healthy Again ».

Dans son communiqué, Virginie Joron promet de construire un « projet pour Strasbourg (…) quartier par quartier » et de présenter une « équipe diversifiée ». Derrière les formules sybillines, le rêve tout-sécuritaire n’est pas bien loin. Lors de sa déclaration officielle de candidature, l’ancienne conseillère régionale RN a choisi la sécurité comme « première des libertés ». Son modèle : la ville de Nice et ses multiples caméras connectées. Autre promesse de Virginie Joron : la remise en place de l’arrêté anti-mendicité, abrogé en 2020 par Jeanne Barseghian.

Mathieu Schneider devient directeur de l’ENS Louis-Lumière à Paris

Mathieu Schneider devient directeur de l’ENS Louis-Lumière à Paris
Le professeur en musicologie, Mathieu Schneider prendra ses fonction de directeur de l’ENS Louis-Lumière de Paris, le 3 novembre 2025.

Après vingt ans à l’Université de Strasbourg, le musicologue Mathieu Schneider prend la direction de l’École nationale supérieure Louis-Lumière à Paris.

Ancien vice-président de l’Université de Strasbourg (Unistra) en charge de la culture, Mathieu Schneider a été nommé pour un mandat de cinq ans à la direction de l’École nationale supérieure Louis-Lumière à Paris. Il prendra ses nouvelles fonctions le 3 novembre 2025. « Je suis ravi de rejoindre cette école qui forme aux métiers du cinéma. C’est un nouveau chapitre, un retour vers le monde des arts, là d’où je viens », confie le musicologue sur le départ.

Fondée en 1926, l’école fêtera son centenaire l’année prochaine. De quoi motiver Mathieu Schneider qui souhaite « défendre le cinéma français ». Son arrivée à Paris met fin à l’administration provisoire, installée après la démission de l’ancien directeur, Vincent Lowy, en mars 2025.

Diversifier les promotions

Nommé par un arrêté du ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Mathieu Schneider a de grands projets pour l’ENS Louis-Lumière :

« Je crois que le cinéma et le secteur de l’audiovisuel font face à de nombreux défis. Les formats d’image se multiplient. Le cinéma et la vidéo sur les réseaux sociaux ne demandent pas la même technicité. De même pour le son, quand l’intelligence artificielle crée des sons de synthèse. Les métiers du doublage ou de la conception d’effets sonores évoluent. Il faut former les jeunes professionnels à ces transformations. »

Déjà très mobilisé à l’Université de Strasbourg, en faveur de l’accueil des étudiants internationaux, Mathieu Schneider compte poursuivre cet engagement à Paris :

« À l’ENS Louis-Lumière, il n’y a que 3 % d’étudiants internationaux alors que dans les autres universités ils représentent entre 15 et 20 %. C’est dommage. Aujourd’hui, les équipes de cinéma sont internationales, donc on a besoin d’avoir des jeunes capables de travailler avec des techniques ou du matériel d’autres pays. J’espère créer des liens avec l’Allemagne, l’Angleterre, mais aussi avec l’Asie. »

L’héritage strasbourgeois

Mathieu Schneider a mené plusieurs projets importants au sein de l’Unistra, comme la création de la salle de spectacle Pokop ou la réouverture du musée zoologique. Après avoir vu Frédéric Berrod adoubée par l’ancien président de l’Université Michel Deneken, il avait pris la tête de la liste d’opposition Au pluriel. Parmi ses promesses figurait notamment la suppression des droits d’inscription différenciés des étudiants extra-européens. Après avoir échoué à mettre en place une alternance à la présidence de l’Université de Strasbourg, Mathieu Schneider souhaitait prendre une autre direction :

« Je garderai d’excellents souvenirs de mes années sur ce campus et un certain intérêt pour ce qui s’y passe, mais une nouvelle séquence professionnelle s’ouvre à moi. Le groupe d’élus qui s’est constitué derrière ma candidature saura faire vivre notre projet sans moi, j’en suis convaincu. »

Le professeur en musicologie quitte l’Université de Strasbourg après 20 ans d’enseignement. Au conseil d’administration, Mathieu Schneider cède sa place au professeur de chirurgie orthopédique, Philippe Liverneaux. Son mandat à la tête de l’ENS Louis-Lumière est renouvelable une fois.

Privé de fauteuil électrique en prison, Francis obtient la condamnation de l’État

Privé de fauteuil électrique en prison, Francis obtient la condamnation de l’État
En situation de handicap, Francis Grégoire, a fait condamner l’État pour avoir été privé de fauteuil roulant électrique durant sa détention.
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En garde à vue, le gérant du Wagon Souk perd des kilos d’or

En garde à vue, le gérant du Wagon Souk perd des kilos d’or

Les mercredi 24 et jeudi 25 septembre, Mohamed Zahi a été placé en garde à vue. Des saisies révèlent la fortune réalisée grâce au tiers-lieu festif.

« Je me doutais qu’une partie importante de l’argent liquide n’allait pas sur le compte de l’association… » Maxime (le prénom a été modifié) n’est pas étonné quand il apprend les motifs de la garde à vue du gérant du Wagon Souk : abus de confiance, travail dissimulé et blanchiment. Aujourd’hui en conflit avec Mohamed Zahi, plus connu sous le nom de Zaï Mo, le jeune homme se souvient des alertes émises en interne : « Il fallait juste se calmer un peu et mettre fin à tout ce qu’il y avait d’illégal. Mais il ne voulait rien entendre. Il disait qu’il prenait les risques lui-même. » Mohamed Zahi a fini en garde à vue les mercredi et jeudi 24 et 25 septembre. Une interpellation qui a permis de saisir le trésor amassé par le gérant du Wagon Souk.

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Le rassemblement contre les violences policières est annulé

Le rassemblement contre les violences policières est annulé
Manifestation contre le racisme et les violences policières en juin 2020, suite à la mort de Georges Floyd aux Etats-Unis.

Samedi 25 octobre, place de la République, une quinzaine de collectifs strasbourgeois appelaient à manifester contre les violences policières. Déclaré hors délai à la préfecture, le rassemblement a été annulé par les organisateurs.  

« Si tu leur réponds, il y a outrage. Si tu résistes, il y a rébellion. Si tu prends la foule à témoin, il y a incitation à l’émeute. » La phrase de Maurice Rajsfus, rescapé de la rafle du Vel’ d’Hiv et historien de la répression, sert de mot d’ordre pour l’appel à manifester. Porté par une quinzaine de collectifs locaux, un rassemblement contre les violences policières est organisé samedi 25 octobre à 17h, place de la République, à Strasbourg. L’événement, ponctué de prises de parole et de musique, se veut « un moment d’organisation politique ». Les collectifs soulignent qu’il intervient dans un contexte local où ils constatent, depuis le mois de mai, un durcissement de la répression à Strasbourg.

« Justice pour les manifestants tabassés »

Un porte-parole du collectif Diaspora, à l’initiative de la mobilisation, dénonce un climat global défavorable aux libertés publiques :

« C’est une réaction au poids de la répression qui pèse sur les manifestations et aux débordements policiers trop réguliers. Nous souhaitons mettre le doigt sur le caractère systémique du problème. »

Dans un contexte de luttes sociales durement réprimées dans de nombreux pays, de Madagascar au Pérou, l’objectif est de « demander justice pour les manifestants tabassés en France et ailleurs ».

Au lycée Couffignal, des caméras dans les couloirs « contre les dégradations »

Au lycée Couffignal, des caméras dans les couloirs « contre les dégradations »
Au lycée Couffignal, trente caméras de vidéosurveillance ont été installées à la rentrée 2025.

Depuis septembre 2025, trente caméras de vidéosurveillance équipent plusieurs couloirs et extérieurs du lycée Couffignal à Strasbourg. Une mesure soutenue par la majorité des professeurs et des élèves, même si des voix dénoncent la mise en place d’une « surveillance permanente ».

« C’est révoltant, on a vraiment l’impression de se faire fliquer », peste une lycéenne du groupe des lycéen·nes autonomes de Strasbourg contre l’autorité répressive (Lascar), né dans le sillage du mouvement Bloquons tout. La colère de cette militante de terminale concerne des caméras de surveillance présentes dans l’enceinte du lycée Couffignal, à l’extérieur et à l’intérieur de certains bâtiments depuis la rentrée 2025 :

« Les caméras sont apparues comme par magie pendant l’été. Nous n’avons eu aucune information de la part des profs ni de l’administration à ce sujet. On devine que c’est pour renforcer la sécurité, mais on ne nous a rien expliqué du tout alors que nous sommes sur ces images… »

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L’ARS acte la fermeture de l’oncologie à la clinique Saint-François

L’ARS acte la fermeture de l’oncologie à la clinique Saint-François
Le siège de l’Agence régionale de santé du Grand Est à Nancy.

Près d’une semaine après nos informations, l’Agence régionale de santé prend acte de la réorganisation des soins en Alsace du nord et en profite pour adresser une pique à la direction de la clinique Saint-François.

L’Agence régionale de santé (ARS) a réagi à la fermeture de l’oncologie par la clinique Saint-François à Haguenau, dévoilée sur Rue89 Strasbourg jeudi 16 octobre. Dans un communiqué diffusé mardi 21 octobre, l’ARS semble découvrir le problème et indique y être étrangère :

« L’ARS Grand Est a été informée de la fin du partenariat entre la clinique Saint-François et le Groupe hospitalier Saint Vincent (GHSV), qui assurait jusqu’à présent une activité d’oncologie au sein de la clinique. Cette décision résulte d’un différend entre deux établissements privés, auquel l’ARS n’est pas partie prenante. »

Puis l’ARS indique que « les 30 patients suivis en oncologie à la clinique Saint-François » seront transférés à la clinique Sainte-Anne à Strasbourg ou au centre hospitalier de Haguenau « qui disposent des capacités médicales et matérielles nécessaires pour accueillir ces patients en toute sécurité ».

Critique de la gestion de la clinique

Quant à son soutien financier à la clinique Saint-François, L’ARS rappelle qu’elle a versé « environ 2 millions d’euros depuis 2020, comprenant 171 000 € par an pour le financement de son centre de soins
non programmés, et une aide exceptionnelle de 900 000 € en 2024 pour stabiliser son activité,
notamment en oncologie ». C’est raté.

Dans son communiqué, l’ARS se fait plus critique et estime que ses « demandes de réorganisation structurelle pour assurer la viabilité économique de l’établissement » n’ont pas été suivies :

« À ce jour, le plan de performance transmis ne comporte pas de mesures suffisantes pour redresser durablement la situation. L’ARS invite une nouvelle fois la direction de la clinique Saint François à présenter un plan d’action crédible et durable, en cohérence avec les engagements précédemment pris. »

Quant à la fermeture des centres de soins infirmiers de Hochfelden et de Lembach, l’ARS en « prend acte » tout en se rassurant en affirmant que « l’offre de soins infirmiers libéraux sur ces secteurs reste assurée ».

#clinique Saint-François

À Éguelshardt, Cyclamen recouvre les maisons d’une poussière menaçante

À Éguelshardt, Cyclamen recouvre les maisons d’une poussière menaçante

À Éguelshardt, dans le pays de Bitche, l’usine de recyclage Cyclamen émet des particules dans l’air et sur les sols. Des riverains craignent un lien entre cette poussière blanchâtre et l’apparition de symptômes physiques chez eux ou leurs enfants.

« Nous allons déménager, souffle une mère de famille. Nos enfants sont malades, on ne peut pas prendre le risque d’attendre que ça aille mieux. » Elle habite à 500 mètres de l’entreprise Cyclamen, dans le petit village d’Éguelshardt, près de Bitche. Cette infirmière installée dans le parc naturel régional des Vosges du nord ne pensait pas subir un jour une pollution industrielle. Mais c’est là qu’Adrien Antenen, un homme d’affaires suisse, a choisi d’implanter en 2019 son entreprise de recyclage de métaux issus des mâchefers. Ces résidus d’incinération des ordures se présentent sous forme de poussières et de fragments solides. Cyclamen parvient à en extraire de l’aluminium, un élément habituellement recherché dans des mines.

« Le procédé laisse s’échapper énormément de poussières, observe Delphine, une autre habitante d’Éguelshardt. Ce sont des particules blanches ou grises qui se déposent partout. On est très inquiets parce qu’on ne sait pas quelle est leur composition ni leur toxicité. Nous n’avons aucune information là-dessus. »

Les poussières de mâchefers peuvent contenir du mercure, du plomb, du cadmium ou de l’arsenic. Ce dernier composé est particulièrement cancérogène. Et les métaux lourds sont, de manière générale, un enjeu de santé publique à cause de leurs impacts sur le système nerveux ou le développement fœtal.

Une vue des poussières observées par les riverains de l’usine Cyclamen.

Poussières partout

Rue89 Strasbourg a pu visionner 91 photos et vidéos prises par des habitants du village entre septembre 2024 et octobre 2025. Elles présentent des poussières venant, sans aucun doute pour les riverains, de Cyclamen. Les particules s’accumulent sur les voitures, les mobiliers d’extérieur, les arbres ou la surface de l’eau. « Je dois même les nettoyer dans ma maison », affirme Carole, voisine directe de l’usine. On peut aussi voir des nuages de cette poudre blanchâtre s’échappant lors de transferts vers des camions ou émanant de sacs entreposés dehors. Un big-bag apparait troué sur des photos.

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Engagée contre les atteintes à l’environnement, la rédaction suit de près les enjeux écologiques et travaille sur les alertes qui lui sont transmises. Sans Rue89 Strasbourg, la pollution de l’eau potable par les pesticides et des projets comme un stade de biathlon dans les Vosges, ou une route sur la colline de Lorentzen seraient bien moins connus des Alsaciens.

Thibault Vetter suit les collectifs militants et les associations qui se mobilisent partout dans la région face aux projets écocides, comme de nouvelles zones d’activités sur des terres cultivables. Il enquête sur diverses sources de pollution, les pesticides, les usines, et leurs impacts sur la santé publique. Un travail de l’ombre, qui nécessite beaucoup de contacts et le décorticage de nombreuses alertes.

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Dans le Bas-Rhin, les signalements de logements indignes en hausse constante

Dans le Bas-Rhin, les signalements de logements indignes en hausse constante
Minuscule logement visé par un arrêté d’insalubrité à Koenigshoffen, en octobre 2024.

Les pouvoirs publics s’organisent pour lutter plus efficacement contre l’habitat indigne. Le nombre de signalements a augmenté entre 2023 et 2024.

Pompiers, policiers, procureurs, communes, associations de locataires… L’État a rassemblé de nombreux acteurs pour renforcer un plan de lutte contre l’habitat indigne, présenté lundi 20 octobre à la presse. La préfecture estime à 9 200 le nombre de logements potentiellement indignes dans le Bas-Rhin.

Les autorités ont recensé 863 nouveaux signalements en 2024 dans le département, notamment grâce à la plateforme Signal logement (cliquez ici pour signaler un logement insalubre sur cette plateforme). Ce chiffre était de 748 en 2024 et de 630 en 2022. La capitale alsacienne concentre plus de 40% des signalements. Les pouvoirs publics prévoient cinq opérations de rénovation de l’habitat (OPAH-RU), à Sélestat, Saverne, Haguenau, Bischwiller et Koenigshoffen à Strasbourg. Dans ces zones où les cas de mal logement s’accumulent, des plans d’accompagnement financier et administratif sont imposés aux propriétaires pour la mise en œuvre des travaux.

Maryline Poulain, préfète déléguée pour l’égalité des chances dans le Bas-Rhin.Photo : TV / Rue89 Strasbourg

Coopération avec les procureurs

Lorsqu’un logement insalubre est repéré, le préfet signe un arrêté qui peut mettre en demeure le propriétaire de réaliser des travaux, ou interdire la mise en location du bien. 27 arrêtés d’insalubrité ont été signés en 2024 dans le Bas-Rhin. Dans les situations les plus graves, où le propriétaire ne respecte pas les mesures, le parquet peut se saisir de l’affaire et engager des poursuites pénales. Ce 20 octobre, les procureurs de la République de Strasbourg, Saverne et Colmar annoncent améliorer la coopération avec les services de l’État pour systématiser les procédures.

Un propriétaire avait réussi à proposer dix logements dans de petites chambres au 22 rue de la Tour à Strasbourg, avant d’être visé par un arrêté d’insalubrité en 2024.Photo : TV / Rue89 Strasbourg

« Nous avons sept procédures ouvertes à ce jour, précise Clarisse Taron, procureure de la République de Strasbourg. C’est vrai que les affaires peuvent mettre du temps à aboutir mais avant ce n’était même pas un sujet… » Policiers et pompiers ont également été impliqués, en tant que premiers maillons de la chaîne. « Ça arrive qu’on constate une situation d’insalubrité en rentrant dans un appartement », explique Jean Hayet, directeur interdépartemental de la police nationale du Bas-Rhin (DIPN 67). Les policiers et les pompiers pourront désormais remplir un formulaire s’ils remarquent un logement indigne et faire remonter l’information.

Une dizaine d’agents pour les contrôles de tout le Bas-Rhin

« Cela peut nous permettre de toucher les personnes les plus vulnérables, qui n’osent pas faire de signalements, par exemple parce qu’elles n’ont pas de titre de séjour », précise Maryline Poulain, préfète déléguée à l’égalité des chances. Une fois le signalement réalisé, trois employés de l’Agence régionale de santé (ARS) et huit fonctionnaires de la municipalité à Strasbourg, sont chargés de l’instruire.

Les communes doivent aussi s’impliquer en participant au repérage et en mettant un œuvre des mesures de sécurité si nécessaire. « Nous allons créer trois équivalents temps pleins supplémentaire avec l’expérimentation du permis de louer dans le quartier gare », affirme Aurélien Bonnarel, conseiller municipal (Parti communiste) de la Ville de Strasbourg, délégué au mal logement.

Vu le grand nombre de signalements et le peu d’agents dédiés, les procédures s’éternisent souvent, lorsque la situation n’est pas suffisamment grave pour un arrêté d’insalubrité. Et les propriétaires peuvent engager des procédures contre les services qui réalisent les contrôles ou temporiser lorsqu’ils sont visés par ces arrêtés d’insalubrité. La famille Benamran, qui possède via diverses sociétés un empire immobilier à Strasbourg dans lequel les plaintes des locataires sont innombrables, fait perdurer des situations de mal logement pourtant bien connues des autorités depuis plusieurs années.

Fuites d’eau dans un appartement appartenant à la famille Benamran rue de la Broque.Photo : TV / Rue89 Strasbourg

Propriétaires récalcitrants

Ainsi la famille Benamran a contesté un arrêté d’insalubrité devant le tribunal administratif en 2024, concernant le bâtiment au 6 place Sainte-Aurélie. Le tribunal a rejeté la demande mais des locataires continuent de vivre dans des conditions d’insalubrité en attendant une décision d’appel… Les leviers les plus efficaces de l’État face à de tels propriétaires récalcitrants sont la possibilité de leur imposer des travaux avec des astreintes financières, de leur interdire de percevoir des loyers, ou encore l’arrêt des versements des allocations logement par la CAF. Une mesure prononcée 31 fois dans le Bas-Rhin en 2024.

En Alsace, une taxe poids lourds en route pour mécontenter tout le monde

En Alsace, une taxe poids lourds en route pour mécontenter tout le monde
Un camion polonais.

La Collectivité européenne d’Alsace doit voter lundi 20 octobre la mise en place d’une taxe poids lourds. Décrié par le monde économique local, le tarif du R-Pass est aussi jugé insuffisant pour réduire le trafic de camions en Alsace.

Un serpent de mer aussi long qu’un embouteillage sur la A35 aux heures de pointe. Avec deux ans de retard, la taxe poids lourds alsacienne devrait entrer en application à partir du 1er janvier 2027. C’est le sens de la délibération qui sera votée en séance plénière de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA) lundi 20 octobre à partir de 9h30. Au niveau national, cet impôt sur la circulation des camions avait entrainé la mobilisation des camionneurs bretons et la destruction des portiques prévus pour les compter en 2013. Alors ministre de l’Environnement, Ségolène Royal avait abandonné le projet. Mais le président de la CEA, Frédéric Bierry (Les Républicains) reste déterminé à faire voter cette taxe, nommée R-Pass.

Un an après avoir annoncé le projet, des échanges ont eu lieu, avec les acteurs économiques surtout, mais aussi avec les associations d’usagers des transports et autres militant·es pour la qualité de l’air. Mais au terme de ces discussions, la première version de la taxe poids lourds alsacienne risque bien de mécontenter tout le monde.

Cibler les transports internationaux

La taxe poids lourds proposée s’élève à une moyenne de 16,7 centimes par kilomètre. Le montant varie selon le poids et le niveau de pollution atmosphérique du camion de plus de 3,5 tonnes. Ainsi les « véhicules à émission nulle, dont notamment les véhicules électriques » n’auront pas de taxe à payer. Les poids lourds utilisés par les agriculteurs et les sylviculteurs pour transporter leurs récoltes et le bois sont exonérés de taxe. D’autres exonérations sont prévues, pour préserver « les secteurs du bâtiment, de l’artisanat, ainsi que les forains et les services d’urgence ». L’objectif du R-Pass est surtout de cibler les transports internationaux, mais qui alimentent également les industries et les distributeurs alsaciens.

Le R-Pass s’imposera sur un réseau qui inclut l’A35 et l’A36 « pour leurs parties non concédées et situées hors du territoire de l’Eurométropole de Strasbourg ». Les routes départementales 83 – entre Colmar et Sélestat – ainsi que les RD 1363, 502 et 504 font aussi partie du réseau soumis à taxation. Ces axes ont été choisis pour « limiter les comportements d’évitement de la taxe allemande », la LKW-Maut.

Pour l’opposition écologiste et communiste, le conseiller d’Alsace Damien Fremont (Les Écologistes) exprime sa satisfaction face à la mise en application future de la taxe poids lourds. Mais l’élu du canton de l’ouest strasbourgeois critique ensuite le montant de la taxe alsacienne :

« Il y a une frustration de ne pas aller assez loin. Les Alsaciens sont favorables à la taxe et veulent une amélioration de l’environnement et de la qualité de vie. Mais si le taux kilométrique n’est pas aligné sur le taux allemand, les transporteurs européens qui doivent faire la traversée nord sud de la région rhénane continueront de passer par l’Alsace. »

L’opposition à l’exécutif de droite à la CeA a déposé un amendement proposant un calendrier de croissance progressive du montant de la taxe.

Une « connerie monumentale » pour le Medef

Administrateur du Medef Alsace, Arnaud Philibert roule à fond contre le R-Pass. En charge de l’animation du Collectif pour la compétitivité des entreprises alsaciennes (CCEA), ce chef d’entreprise a le monologue facile pour dénoncer le projet de Frédéric Bierry. En résumé : « Notre position : cette taxe est une connerie monumentale. » En détail :

« À quoi sert cette taxe si elle ne repousse pas les camions vers l’Allemagne ? Elle va taxer l’économie alsacienne sans repousser le trafic vers l’Allemagne… En plus, il y aura des stratégies d’évitement de poids lourds qui rouleront sur les routes départementales. C’est dangereux et ça consommera plus de carburant, donc d’un point de vue écologique, ça ne fait pas de sens… »

Défaillance de sociétés alsaciennes de transport, inflation de 5% des tartes flambées produites en Alsace, baisse des investissements et donc des emplois… Arnaud Philibert prédit un funeste avenir à l’économie alsacienne. Puisqu’il sait que la taxe poids lourds n’est plus qu’une question de temps, l’entrepreneur promet désormais de « marquer à la culotte » le président de la CeA sur les recettes de la taxe :

« Frédéric Bierry a indiqué que 100% de ce qui est pris aux entreprises alsaciennes serait reversé aux entreprises alsaciennes. On attend maintenant que ces millions d’euros de taxation nous reviennent par le biais des aides de la Région Grand Est pour la mobilité décarbonée, la décarbonation et la sobriété hydrique des entreprises. »

Une attente qui supposerait que Frédéric Bierry serait d’accord pour que la collectivité qu’il dirige taxe, et que la collectivité qui donne soit la Région Grand Est, la même dont Frédéric Bierry essaie de s’émanciper. Ce sera délicat.

En Alsace, près d’un millier d’entreprises sont inscrites au registre du commerce dans le domaine du transport routier. Ces sociétés représentent 20 000 emplois au total selon la Fédération nationale des transporteurs routiers. La secrétaire générale de la branche alsacienne de cette fédération, Martine Bensa, espère désormais obtenir le vote d’une « loi de répercussion » :

« On est sur un marché tendu niveau des transporteurs. Quand vous êtes en face d’acheteurs de grands groupes, nous ne pouvons pas négocier le tarif, d’autant que des transporteurs étrangers peuvent faire le travail… Il nous faut donc une loi qui dise que les transporteurs doivent répercuter l’impôt de la CeA dans ses prix. »

Une « augmentation indirecte des impôts »

Du côté de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports, la position globale est bien plus favorable au principe de la taxe poids lourds. « Les véhicules qui abiment les routes doivent contribuer à leur réparation », explique le président de la branche Grand Est de la Fnaut, André Lott. Mais ce dernier se dit « réaliste » sur les conséquences financières du R-Pass : « Des prix vont augmenter, la taxe poids lourds est une augmentation indirecte des impôts. »

André Lott se montre ainsi peu critique du montant de la taxe : « L’idée de la taxe c’est de générer une recette. Il ne faut donc pas détourner tout le trafic. » Mais la voix du représentant de la Fnaut s’élève quand il apprend que la délibération votée par le CeA prévoit le financement d’un élargissement de la A35 entre Sélestat et Colmar : « Là c’est clairement non non et non ! On le voit partout : l’augmentation de la largeur des voies provoque une augmentation du trafic automobile et poids lourds. »

Sans doute conscient des critiques de toutes parts que suscitera la taxe poids lourd dans sa première version, le texte de la délibération prévoit « une concertation élargie à la société civile qui se renforcera en 2026 ». De même, un observatoire de la taxe sera mis en place au 1er janvier 2026. L’objectif sera notamment d’évaluer le report de trafic généré par la taxe, suivre les recettes du R-Pass et mesurer la pollution atmosphérique et sonore post-taxe poids lourd.

Le chantier de l’entrepôt logistique à Ensisheim peut commencer dès novembre 2025

Le chantier de l’entrepôt logistique à Ensisheim peut commencer dès novembre 2025
Idéalement placée au cœur de l’Europe, l’Alsace attire le géant du commerce en ligne Amazon. Les manifestations, ici devant la préfecture de Colmar, s’enchaînent depuis ces révélations au printemps. Si le projet à Dambach-la-Ville semble bel et bien abandonné, un entrepôt géant sur-mesure pour les besoins d’Amazon a été validé à Ensisheim, construit par une société prête-nom appelée Eurovia 16. Officiellement. Amazon assure ne pas avoir de projet en Alsace. Puis a précisé « pas avant 5 ans ».

La cour administrative d’appel de Nancy a validé l’autorisation de permis de construire du projet Eurovia 16 à Ensisheim. Pour Alsace Nature et les collectifs de défense de l’environnement, la décision signe la fin d’une mobilisation qui aura duré plus de cinq ans.

C’est la fin d’une mobilisation de cinq ans pour les associations de défense de l’environnement qui se battaient contre l’entrepôt logistique d’Ensisheim. Jeudi 11 septembre 2025, la cour administrative d’appel de Nancy a débouté de leurs demandes les associations Alsace Nature et les Amis de la Terre. Ces dernières contestaient la légalité du permis de construire de l’entrepôt logistique géant Eurovia 16. « Nous n’iront pas devant de Conseil d’État », annonce Michelle Grosjean, la présidente d’Alsace nature. Le premier recours, contre l’autorisation préfectorale d’exploitation, s’était soldé par un rejet du tribunal administratif de Strasbourg en février 2025. Alsace Nature et les Amis de la Terre n’avaient pas fait appel.

Projet cadré

Adhérent d’Alsace Nature, Joseph Baumann a suivi le projet d’entrepôt destiné au e-commerce depuis 2019. Il évoque une décision « crève-cœur » pour « toutes les personnes qui [l’ont] accompagné dans la lutte« . Après avoir « épuisé toutes les voies de recours raisonnables », Joseph Baumann regrette :

« L’excès de consommation foncière aurait dû être contesté au moment du SCOT (Le schéma de cohérence territoriale- ndlr) ou du Plan local d’urbanisme. Car en l’état, le projet était administrativement bien cadré. »

L’entrepôt de 189 000 mètres carrés doit s’implanter sur « une zone déjà particulièrement artificialisée », relève Michelle Grosjean, celle du Parc d’activités de la plaine d’Alsace (PAPA). À ce titre, plusieurs aménagements ont été réalisés. « La desserte a été favorisée par la Communauté européenne d’Alsace », tacle Alain Diot, président de l’antenne locale d’Alternatiba à Soultz et membre du RUCCSA, le réseau urgence climatique et sociale sud Alsace. Et de poursuivre :

« Le terrain était déjà prêt. Nos impôts ont payé des aménagements au profit de ces entreprises ».

Volonté ferme

Pour Maître François Zind, conseil d’Alsace Nature, « l’enjeu des recours était plus une volonté de pression qu’une réelle possibilité d’annulation. Mais il reste difficile de faire perdre pied aux grosses sociétés sur le temps long. »

En novembre 2025, le permis de construire sera purgé de tout recours et les travaux pourront commencer. « Si nous n’avions pas la ferme volonté de réussir, nous aurions déjà jeté l’éponge », glisse Emmanuel Mercier, directeur de construction et développement chez Logistics Capital Partners (LCP), confirmant la ferme intention d’Eurovia 16 de voir sa plateforme sortir de terre. D’ici là, le futur exploitant de l’entrepôt logistique tient à rester discret.

Priscille Cazaux, procureure mobilisée pour « obtenir des réparations de l’environnement »

Priscille Cazaux, procureure mobilisée pour « obtenir des réparations de l’environnement »
À elles seules, Priscille Cazaux et Pauline Guillaume forment le pôle régional de l’environnement (PRE) du parquet de Strasbourg.

Substitute du procureur à Strasbourg, Priscille Cazaux dirige depuis 2024 le pôle régional spécialisé dans les atteintes à l’environnement. Un contentieux encore jeune, qui se heurte au manque de moyens de l’institution.

L’explosion sur le site de Butachimie à Chalampé, la pollution liée au stockage de coke de pétrole de la Société anti-pollution et protection de l’environnement (Sappe) ou le trafic de mygales rapportées de Guyane. Depuis sa création en 2021, le Pôle régional de l’environnement (PRE) du parquet de Strasbourg a traité une vingtaine de procédures, dont deux sont en cours d’instruction. En septembre 2024, Priscille Cazaux, substitute du procureur de la république, en a pris la direction. Épaulée par une attachée de justice, la magistrate initie et coordonne des enquêtes complexes, en dépit d’un temps contraint et du manque de moyens du ministère public.

Rue89 Strasbourg : Quelle était la situation du pôle régional de l’environnement quand vous en avez pris la direction en septembre 2024 ?

Priscille Cazaux : Entre la création des PRE en 2020 et leur mise en place effective, il y a eu un temps de latence. Il a fallu attendre 2023 pour que le premier comité opérationnel de lutte contre la délinquance environnementale (Colden) soit tenu. J’ai choisi de reprendre sa présidence en septembre 2024, intéressée par la richesse de ce contentieux et la diversité des partenaires.

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