Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

À bout, les internes en chirurgie orthopédique de l’hôpital de Strasbourg cessent le travail

À bout, les internes en chirurgie orthopédique de l’hôpital de Strasbourg cessent le travail

Une vingtaine d’internes apprentis-chirurgiens ont cessé le travail au Centre hospitalier de Strasbourg depuis lundi. Épuisés, ils ne peuvent plus répondre aux trop nombreuses sollicitations des urgences.

Depuis lundi 17 juillet, 17 internes, futurs médecins en fin de formation initiale, affectés au Centre hospitalier universitaire de Hautepierre, ont cessé le travail. Ils ont été placés en arrêt maladie pour épuisement (burn out).

Le Syndicat autonome des internes d’Alsace (Saia) dénonce dans un communiqué diffusé jeudi 20 juillet une « détresse psychologique intense », résultat de « profonds dysfonctionnements organisationnels impactant la prise en charge des patients ».

Selon Clémence Guegan, présidente du Saia et interne en gynécologie, les obligations des gardes imposées aux internes en chirurgie orthopédique (traitement des déformations et des accidents du squelette et des muscles) les empêchent de mener leurs missions :

« L’emploi d’un internat en chirurgie est déjà très lourd, les gardes se superposent, pour des interventions qui pourraient largement être traitées par les médecins urgentistes eux-mêmes. Quand une personne vient aux urgences avec une entorse simple, un avis de l’interne orthopédique de garde n’est pas forcément nécessaire… »

Un fonctionnement qui a contraint un patient à attendre plus de huit heures qu’un interne puisse se rendre aux urgences pour une simple suture, détaille Clémence Guegan qui appelle à une amélioration dans le triage des patients aux urgences.

« Un suicide ferait bouger les choses ? »

Mais surtout, depuis le 2 mai, début du semestre des internes, le service SOS Main est en sous-effectif critique. Alors qu’il a besoin de six internes minimum pour assurer les gardes et de quatre autres internes pour les astreintes, le service ne pouvait compter que sur quatre internes au total… puis trois lorsque l’un d’entre eux a été placé en arrêt maladie.

Les gardes de SOS Main ont été fermées une semaine sur deux, avec des redirections vers la clinique Rhéna depuis cette date, mais une enquête du Saia auprès de ces internes a révélé d’importants dégâts liés à ce surmenage permanent, comme l’explique Clémence Guegan :

« On a posé des questions et 70% des internes en orthopédie ont admis être déprimés, tous étaient en grande souffrance avec notamment le sentiment de mal traiter leurs patients. L’un d’eux m’a demandé si “un suicide ferait enfin bouger les choses ?” On a alerté la direction générale sur l’urgence d’une solution pérenne, mais rien n’est venu. »

Alors qu’une reprise des gardes de SOS Main était prévue lundi 17 juillet, aucun des internes ne se sentait en capacité de reprendre cette charge de travail. Ils ont donc été placés en arrêt maladie « pour leur propre protection », détaille Clémence Guegan.

Contactés, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg indiquent par écrit qu’une « réunion pluri-professionnelle est en cours sur le sujet », sans plus de précisions.

Cyclocamp du 21 au 30 juillet à Strasbourg, un festival international de la contre-culture vélo

Cyclocamp du 21 au 30 juillet à Strasbourg, un festival international de la contre-culture vélo

Le festival international de l’auto-réparation de vélo, aussi appelé « Cyclocamp », se tient pour la première fois à Strasbourg à partir du vendredi 21 juillet. L’évènement se présente comme un espace où les participants échangeront durant dix jours sur les pratiques et les savoirs autour du vélo.

Loin des sentiers du Tour de France, des passionnés de vélos convergent vers le parc Saint-Gall à Koenigshoffen, à l’ouest de Strasbourg, pour un festival international de l’auto-réparation de vélo, le « Cyclocamp », prévu du vendredi 21 au dimanche 30 juillet. Tel qu’imaginé lors de sa première édition à Ottensheim (près de Linz, en Autriche) en 2011, la douzième édition du Cyclocamp aspire à être un espace d’échanges autour de la culture cycliste.

Fabien, coordinateur du projet et membre du collectif Cambouis qui organise l’événement, développe :

« L’idée est de partager nos connaissances autour de la thématique du vélo. Il y aura bien sûr des ateliers de réparation, d’initiation, mais aussi des ateliers créatifs où l’on fabriquera des objets à partir de pièces de vélo, ou l’inverse, des ateliers qui proposeront de construire des vélos à partir d’autres objets. »

Aux abords de Koenigshoffen, installation du festival international cyclocamp, deux jours avant son ouverture. (Photo du collectif Cambouis).

Politiser le vélo

Partager des connaissances mais aussi des « problématiques », ajoute le membre du collectif. Le festival se veut être un espace où les cyclistes pourront confronter leurs différentes revendications et y apporter des solutions. Fabien prend l’exemple des pistes cyclables de l’avenue des Vosges et de la Forêt-Noire :

« On va pouvoir expliquer comment nous avons lutté pour les avoir et comment nous les avons obtenues. Ces rencontres permettront de réfléchir ensemble à comment faire avancer la législation, qui peut être très différente d’un endroit à un autre. »

Une lutte nécessaire pour le collectif, qui voit le vélo comme un outil d’émancipation et de réappropriation insiste Fabien :

« C’est un moyen pour transporter nos affaires, notre matériel, ou même des personnes. Le vélo apporte une sécurité de dingue aussi : on a beaucoup moins de chance de se faire emmerder dans la rue. Au-delà de ça, c’est l’un des rares objets dont on comprend réellement la mécanique et qu’il est assez facile de réparer. »

Un festival « auto-géré »

Le festival se fixe également pour objectif d’être le plus accessible possible. Tout fonctionnera sur la base du prix libre, une partie de l’alimentation sera végane et certains ateliers ne seront pas ouverts aux hommes par exemple :

« On va faire en sorte que chacun et chacune puisse trouver sa place, apprendre des choses ou bien les transmettre. On veut aussi laisser tout le monde libre de prendre des initiatives pour que les activités n’émanent pas seulement du collectif. »

Le tout dans un espace « auto-géré » où « chacun mettra les mains à la pâte », précise Fabien, qui n’omet pas de rappeler les concerts programmés pour les vendredi et samedi soir. Une ambiance musicale qui débutera dès la Vélorution organisée par Strasbourg à vélo vendredi avec un itinéraire qui se termine à l’entrée du festival.

« Dès que je sors le soir, j’ai l’impression de prendre un risque »

« Dès que je sors le soir, j’ai l’impression de prendre un risque »

Malgré des associations qui luttent contre les violences sexistes et sexuelles dans le monde de la nuit, et une multiplication d’initiatives locales, l’insécurité est toujours présente pour les femmes et les personnes LGBT+ qui sortent à Strasbourg.

« La dernière fois que j’étais en boîte, je me suis retrouvée un moment seule avec une amie, car les garçons qui nous accompagnaient étaient allés prendre l’air. On s’était mises sur le côté, dos à un mur pour faire une pause. Cinq garçons qu’on ne connaissait pas sont alors arrivés et nous ont encerclées », se rappelle Laura, une Strasbourgeoise de 24 ans qui a l’habitude de sortir en bar ou en boîte plusieurs fois par semaine. 

« Ils ont commencé à nous invectiver, à nous lancer des ”bah alors, on vous fait peur ?” et à en rire. On était très mal à l’aise. On leur a demandé de partir, mais ils continuaient à rire et se rapprocher. Finalement, on a eu besoin de les bousculer physiquement en leur donnant un coup d’épaule pour pouvoir s’extirper de la situation. Sur le moment, on a vraiment eu peur. On était en infériorité numérique et personne ne venait nous aider. »

Si la jeune femme associe ces sorties à des moments de détente et de loisirs, elle s’arrange souvent pour être accompagnée par des amis de sexe masculin, prévoit toujours son itinéraire de retour et reste sur ses gardes. « Je m’attends toujours à avoir au moins des remarques sur mon physique, mais ça peut aller jusqu’à la main aux fesses, à l’insulte ou a des moments beaucoup plus angoissants comme le jour où un homme à vélo m’a suivie pendant une dizaine de minutes à la sortie d’un bar », décrit la jeune femme.  

« On a un peu l’impression que tant que ce n’est pas un viol, ce n’est pas grave. Les autres comportements sont banalisés », se désole Laura. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg

« Une accumulation de micro-agressions »

Pourtant, Laura ne signale presque jamais les auteurs de ces agressions, même si l’établissement dans lequel elle se trouve possède un videur :

« La dernière fois que je suis allée voir un vigile avec une amie parce qu’un homme n’arrêtait pas de la coller et de la toucher, il a dit qu’il n’avait rien vu et donc qu’il ne pouvait rien faire. On a un peu l’impression que tant que ce n’est pas un viol, ce n’est pas grave. Les autres comportements sont banalisés. Mais quand dix inconnus vous touchent la taille, ou vous font une remarque dans la même soirée, ça devient très lourd. On ne va pas porter plainte pour ça, mais l’accumulation de micro-agressions nous gâchent nos soirées. »

Depuis plusieurs années, la parole au sujet des violences sexistes et sexuelles dans les espaces publics s’est libérée, notamment grâce à des associations locales comme Ru’elles ou le compte Instagram Dis Bonjour Sale Pute. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg / cc

Claire, jeune femme lesbienne de 22 ans, raconte également s’être retrouvée à plusieurs reprises dans des situations qui l’ont mise particulièrement mal à l’aise, sans vraiment savoir vers qui se tourner. Il y a un mois, elle s’est rendue dans un bar à rhum strasbourgeois avec sa copine, vers minuit : 

« On était en train de commander au comptoir – ça faisait à peine dix minutes qu’on était entrées – et un homme est arrivé derrière nous, nous a attrapé par les épaules puis a commencé à nous parler. On était déjà mal à l’aise qu’il nous touche sans notre consentement et par surprise. On lui a dit et il a fini par partir, mais au cours de la soirée, au moins cinq hommes se sont approchés pour nous fixer de manière très insistante, avec des sourires en coin assez explicites. Je ne me sens souvent pas en sécurité quand je sors. Ce soir-là, par exemple, on a eu peur qu’une des personnes nous suive à la sortie du bar. Ça m’est déjà arrivé. »

« Les videurs ne sont pas assez bien formés à ce type d’agression »

Alors que le moment devrait être festif, Claire raconte qu’elle reste toujours vigilante en gardant un œil sur son verre ou en le tenant. « Hors de question que je sorte fumer sans. J’ai déjà deux amies qui se sont fait droguer, dont une fois lors d’une soirée à laquelle je participais », raconte-t-elle. 

Elle et son groupe d’amis avaient alors décidé de tester un nouveau bar, le Blue Moon. « Elle s’est sentie mal d’un seul coup, elle avait du mal à bouger et a eu envie de vomir alors qu’elle n’avait pas beaucoup bu », se remémore-t-elle. Claire va lui chercher un verre d’eau et la retrouve dehors, isolée par un videur, en train de vomir. « Non seulement, il ne faisait rien pour l’aider, mais en plus, il voulait m’empêcher de la rejoindre, et même de lui donner l’eau. Le problème, c’est qu’ils ne sont pas du tout formés à réagir face à ce type de situation », déplore-t-elle.

La parole autour des violences sexistes et sexuelles (VSS) et des discriminations s’est beaucoup déliée ces dernières années. Si dans 91 % des cas, les viols ou les tentatives de viol ont été perpétrées par une personne connue de la victime, la rue et le monde de la nuit sont fréquemment dénoncés comme étant des lieux d’agressions qui rendent ces endroits hostiles pour une frange de la population.

Entre banalisation et résilience

De nombreuses personnes victimes de ces propos ou agressions mettent des parades en place. Eva, 24 ans, revient sur ces gestes qui sont devenus de petits rituels : garder son verre, sortir en nombre, aller dans des lieux identifiés comme « sûrs », s’assurer que toutes ses amies sont bien rentrées. « C’est triste de se rendre compte que c’est devenu normal de devoir vérifier que sa pote est toujours en vie et bien en sécurité chez elle à chaque sortie nocturne », laisse-t-elle échapper.

Eva souhaiterait que les personnels des établissements soient mieux formés et plus vigilants. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg / cc

Maria, 31 ans, est fatiguée par ce que sortir en boîte ou en bar implique. Elle décline de plus en plus souvent les propositions de soirées :

« Même s’il ne m’arrive rien de grave, je suis souvent stressée, car je sais que je peux être importunée à tout moment. Par une remarque ou une insulte sur le chemin, puis avec une main aux fesses en boîte ou par un mec bourré qui va insister pour danser avec moi, alors que je lui ai déjà dit non. Je peux rajouter aussi le fait de devoir faire attention à mes copines pour pouvoir les aider si un mec ne veut pas les lâcher non plus. Tout ça accumulé, ça rend dingue. Dès que je sors, j’ai l’impression de prendre un risque. » 

De son côté, Laura refuse de limiter ses sorties, même si pour ça, elle a parfois l’impression de devoir occulter certains souvenirs : 

« Si je commençais à noter tous les moments pendant lesquels quelqu’un m’a emmerdée en soirée, je ne sortirais plus. Mais j’aime ça, donc je mets beaucoup de choses sous le tapis en espérant que ça s’arrangera et que le personnel des établissements sera enfin bien formé partout. »

Conscientes de cette situation, plusieurs associations réfléchissent à des outils pour éviter les agressions et améliorer l’ambiance des lieux publics. Dans de nombreux bars strasbourgeois, les femmes peuvent trouver, dans leurs toilettes, l’affiche du cocktail Mad’EMoiselle, mis en place depuis la rentrée 2020. 

Le fait de demander ce cocktail (qui est en réalité un nom de code) permet à toute personne témoin ou victime d’une agression, ou encore qui ne se sent pas à l’aise avec un rendez-vous, d’appeler à l’aide discrètement. Ce nom de code permet ensuite au personnel de l’établissement de pouvoir intervenir.

. Depuis l’année dernière, la mairie de Strasbourg a été choisie pour participer au programme européen SHINE, consacré à la prévention du harcèlement sexiste et sexuel sur les lieux de vie nocturnes et festifs.
À Strasbourg, plusieurs bars possèdent des affiches du cocktail Mad’EMoiselle et du programme européen qu’a rejoint la Ville consacré à la prévention du harcèlement sexiste et sexuel sur les lieux de vie nocturnes et festifs. (Photo ACC / Rue89 Strasbourg).

La mairie s’empare du problème

Cependant, ce type d’initiative ne semble pas suffire. Depuis 2022, la mairie de Strasbourg a été choisie pour participer au programme européen Shine, consacré à la prévention du harcèlement sexiste et sexuel sur les lieux de vie nocturnes et festifs. Des associations locales, la police, des gérants d’établissement nocturnes ou encore la CTS sont régulièrement conviés à des séminaires de discussion pour trouver des solutions. 

Pour l’instant, à part une première campagne de sensibilisation aux soumissions chimiques lancée fin 2022, le grand public n’a pas vu d’autres actions. Pour Nadia Zourgui, adjointe à la maire en charge de la tranquillité publique qui s’occupe du dossier, le rôle de la ville est surtout celui d’un chef d’orchestre :

« Nous avons de la chance d’être dans une ville dans laquelle beaucoup d’associations se sont saisies du problème. Notre rôle maintenant est de coordonner, de financer et de communiquer sur ces initiatives. Un appel sera bientôt lancé auprès des différentes associations afin de désigner un porteur de projet et d’allouer une subvention. »

Un état des lieux vient également d’être réalisé afin de recenser les potentiels partenaires et initiatives déjà mises en place. En parallèle, les restaurateurs, les gérants de clubs et de bars ont été contactés pour savoir s’ils seraient intéressés par une formation sur les violences sexistes et sexuelles. « J’ai été agréablement surprise de voir que certains d’entre eux mettaient déjà des choses en place », souligne l’adjointe. 

Une application pour identifier les lieux sûrs

C’est le cas de la nouvelle collaboration entre Ru’elles, qui lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans les espaces publics, et Flag !, une association nationale qui regroupe des policiers et autres fonctionnaires du ministère de l’Intérieur et de la Justice, et qui lutte contre les violences anti-LGBT, sensibilise et forme le personnel au sein de ces ministères, pour améliorer la prise en charge des victimes. Ensemble, ces associations veulent installer à Strasbourg un réseau de « safe places », c’est-à-dire des zones sûres, recensées sur leur application.

« Nous participons à beaucoup de discussions avec la mairie. S’ils ont envie d’agir, pour le moment, ça traîne et cela reste flou. Comme on ne veut pas se contenter d’attendre, nous essayons aussi de développer des solutions qui pourront, peut-être, être reprises par la suite », décrit Tiphany Hue, créatrice de Ru’elles.

L’association strasbourgeoise Ru’elles et l’association nationale Flag! ont annoncé en mai 2023 la mise en place d’un partenariat autour d’une application pour identifier les « lieux sûrs » de la ville. (Photo DR Flag! et Ru’elle).

Tiphany Hue et Remy Butin, référent Grand Est de Flag !, ont donc déjà commencé à démarcher ensemble les commerces et établissements de Strasbourg. Depuis mi-mai, ils ont signé une vingtaine de partenariats explique ce dernier : 

« Nous les rencontrons pour leur proposer de rejoindre le dispositif “en lieu sûr”, résumé dans une convention qu’ils doivent signer. Ils s’engagent à apposer un macaron sur leur vitrine, sont géolocalisés sur notre application et doivent assurer un accueil respectueux aux victimes, leur proposer de joindre les secours et leur permettre de rester dans leurs locaux jusqu’à leur arrivée. »

Une formation pilote

Au-delà du monde de la nuit, des bars, boîtes et restaurants, d’autres établissements publics et commerçants seront démarchés pour permettre aux victimes d’agressions dans la rue, même en plein jour, de savoir vers qui se tourner rapidement. « Pour que ça change, il ne faut surtout pas minimiser ces actions. Beaucoup d’entre elles sont condamnables », rappelle Rémy Butin, qui a lui même porté plainte pour une agression homophobe dont il a été victime avec son copain au centre commercial des Halles.

Une fois la prise de contact établie, les signataires sont prévenus que Ru’elles proposera bientôt un module de formation sur la manière de réagir face à une agression, de récolter la parole des victimes, de rappeler quelles sont les peines encourues par l’agresseur, etc. Pour pouvoir proposer cette formation gratuitement, Typhany Hue est actuellement en contact avec la préfecture pour élaborer un premier module pilote qui pourrait être financé par l’État.

L’application permet également de signaler le lieu et l’heure de toute discrimination, soumission chimique ou violence conjugale. L’utilisateur est ensuite orienté vers les différentes possibilités officielles (dépôt de plainte, cellule d’écoute). 

« Les lieux sûrs, ça existe ! » 

Mais comment devient-on un « lieu sûr » ? À plusieurs reprises, le bar Les Berthom est revenu dans les endroits recommandés par les personnes interrogées. Anna, 25 ans, y est serveuse depuis près de six ans. Et elle se souvient très bien, dès son arrivée, son patron a abordé le sujet des propos et agressions sexistes : 

« Lors de la signature du contrat, il explique à chaque nouvel arrivant, surtout aux filles, que cela risque d’arriver. À nous, en tant que serveuses et aux clientes. Il ajoute tout de suite que nous ne devons pas laisser passer, que nous avons le droit de réagir si on nous parle mal ou si on nous met une main au cul, et qu’il faut le faire remonter directement au responsable présent. »

Anna a elle-même été victime de propos insultants et a décidé de porter plainte. « C’était un client qui venait souvent. Il avait des regards très lourds à mon encontre. Il n’arrêtait pas de me fixer, mais on ne peut pas grand-chose contre ça. » Puis un jour, il l’agresse verbalement :

« Ce n’était pas des compliments maladroits ou de la drague un peu lourde sur laquelle on ferme les yeux. Là, je me suis dit que je n’avais pas à subir ça. On a appelé la police et ils l’ont embarqué ». 

Cette fois-ci, même si la démarche peut prendre plusieurs heures, Anna a décidé de porter plainte. « Je vais y aller en dehors de mes heures de travail, mais mon patron m’a proposé de me rémunérer le temps que ça prendrait. »

Même vigilance du côté des clientes. Anna et ses collègues ont mis en place des stratégies pour désamorcer certaines situations, comme surveiller les hommes qui changent de table et vérifier si des clientes valident le fait qu’ils s’invitent auprès d’elles en leur faisant un petit geste discret. 

« Cela nous arrive également de prétexter que la table occupée par des clientes est réservée et qu’on va devoir les déplacer, si on voit que leur voisin de table commence à les mettre mal à l’aise. Cela permet d’éviter un conflit ouvert et de mettre les filles dans une situation encore plus angoissante. »

Selon la jeune serveuse, cette méthode fonctionne bien, car tous les employés, au service ou au bar, sont vigilants sur le sujet. « Cela fait partie de notre travail et ça devrait être le cas partout », conclut-elle.

Les salariés de Clestra organisent un rassemblement jeudi matin pour défendre leurs emplois

Les salariés de Clestra organisent un rassemblement jeudi matin pour défendre leurs emplois

En grève depuis trois semaines, les grévistes de l’entreprise Clestra à Illkirch-Graffenstaden appellent à un rassemblement devant la Direction régionale de l’économie, jeudi 20 juillet. Face au silence de leur direction, ils espèrent être reçus par un représentant de l’État.

Voilà trois semaines que l’usine de cloisons Clestra est à l’arrêt. Depuis 17 jours, une large partie de ses salariés se sont mis en grève, réclamant l’annulation d’un licenciement qu’ils jugent abusif et des réponses aux questions qu’ils portent sur l’avenir de leurs emplois, soupçonnant la direction de vouloir procéder à des suppressions de postes.

Pour obtenir des réponses, les grévistes se mobilisent ; après une médiation ratée avec l’inspection du travail, ils appellent désormais à un rassemblement devant la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets) jeudi 20 juillet à 8h (un précédent appel mentionnait le tribunal et la préfecture). Les ouvriers espèrent qu’une délégation pourra être reçue par un représentant de l’État.

Dialogue social de sourds

Dès la reprise de la société Clestra, en octobre 2022 par le groupe Jestia, spécialisé dans la gestion d’Ehpad, les salariés se sentent maintenus dans le flou sur les intentions du groupe. Quelques mois plus tard, la holding propose à une quarantaine de salariés une rupture conventionnelle collective, que ces derniers refusent. S’ensuit un déménagement du site de la production, d’Illkirch-Graffenstaden au Port du Rhin, prévu pour 2024. Si ce départ était déjà prévu, les salariés découvrent que la surface du nouveau site sera bien trop petite pour accueillir toutes les lignes de production.

Les grévistes de Clestra, devant le siège de l’inspection du travail, lundi 17 juillet. Photo : Roni Gocer / Rue89 Strasbourg / cc

Dès lors, un climat de méfiance et de tensions s’installe durablement au sein de la société. Le licenciement d’un salarié le lundi 3 juillet, que les grévistes juste abusif et injuste, provoque un tollé et enclenche une nouvelle mobilisation. Ils sont en grève depuis cette date. Dans un communiqué diffusé par la section CGT, les salariés exposent leur colère :

« Le groupe Jestia, qui a repris il y a huit mois l’entreprise, refuse systématiquement de répondre aux
revendications légitimes des salariés, en matière d’emploi et de dialogue social. Pire, ils jettent de l’huile sur le feu en décidant en plein conflit social de changer le nom de l’entreprise et de P-DG ! Clestra, qui devait fêter cette année ses 110 ans, disparaît et devient Unterland Metal. Résultat : mécontentement et sentiment d’injustice sociale ne font que grandir, les salariés sont très en colère ! »

Pour le libéral Institut Montaigne, la municipalité écologiste a trop « dégradé les comptes publics »

Pour le libéral Institut Montaigne, la municipalité écologiste a trop « dégradé les comptes publics »

L’Institut Montaigne, un laboratoire d’idées libérales, relève que la municipalité écologiste a augmenté la dette publique, sans vraiment faire progresser la ville sur les marqueurs écologistes. Un bilan auquel réplique Syamak Agha-Babaei, premier adjoint à la maire en charge des Finances.

Dans un rapport publié mardi 18 juillet sur les bilans à mi-mandat des principales municipalités de France, le think-tank libéral Institut Montaigne dresse un état sévère de l’action des écologistes aux commandes de la Ville de Strasbourg depuis 2020.

Pour l’Institut Montaigne, les principales réalisations de l’équipe menée par Jeanne Barseghian sont la « gratuité des transports pour les jeunes », bien qu’il s’agisse d’une mesure mise en œuvre par l’Eurométropole, et « le lancement de la Zone à faible émission » (ZFE), une mesure également pilotée par l’Eurométropole mais surtout imposée par l’État. L’Institut Montaigne reconnaît « certaines avancées environnementales », dont le plan Canopée, crédité de 3 000 arbres plantés en « conformité avec l’objectif annoncé de 10 000 arbres », et la végétalisation de certaines cours d’écoles.

Pour l’Institut Montaigne, Jeanne Barseghian a trop dépensé depuis son élection (Photo Pascal Bastien / Rue89 Strasbourg).

Habituel rapport libéral à la dette publique

Mais l’Institut libéral trouve surtout inquiétante la « dégradation des comptes » de la Ville. Les auteurs déplorent que la municipalité écologiste ait « augmenté la dette de la collectivité de 11,7% », alors qu’elle avait « diminué de 5,6% en moyenne entre 2016 et 2019 ». L’Institut admet cependant que la dette par habitant de Strasbourg en 2021 est toujours « nettement en-dessous de celle des autres communes de la même taille ». Mais les auteurs s’alarment à propos de la capacité de désendettement de la collectivité, qui est passée selon eux de 5 années en 2019 à 7 années en 2021. Les auteurs estiment qu’en 2023, elle pourrait se rapprocher du « seuil d’alerte » de 12 années ! Dans leur conclusion, les auteurs du rapport estiment que « les dégradations de capacité de financement et la hausse prévue de la dette constituent un important point négatif du mandat de Jeanne Barseghian ».

Ces éléments font bondir Syamak Agha-Babaei, premier adjoint à la maire, en charge des Finances :

« Ce rapport est truffé d’erreurs et d’approximations, les auteurs ont confondu des chiffres et utilisé des méthodologies qui ne permettent pas d’effectuer des comparaisons. Sur la capacité de désendettement par exemple, personne ne projette des investissements à venir pour la calculer. Bien au contraire, on s’appuie sur les investissements réalisés, souvent inférieurs aux prévisions. Et notre capacité est dans la norme des villes de notre catégorie. »

Pour l’Institut, la municipalité ne prend pas assez en compte la dégradation sociale qui frappe les habitants de Strasbourg, avec « le troisième taux de chômage le plus élevé parmi les grandes métropoles de France (12,1%), l’augmentation des vols et violences dans les transports en commun (+8%, deux fois plus que la moyenne nationale) ». Une remarque qui permet à Syamak Agha-Babaei de pointer les incohérences du rapport :

« D’un côté, l’Institut Montaigne nous dit qu’on dépense trop et de l’autre, il nous accuse de ne pas aider les ménages les plus modestes. Nous avons investi beaucoup plus que l’équipe précédente, c’est un fait car nous pensons qu’il vaut mieux avoir une dette financière aujourd’hui qu’une dette sociale et écologique demain. »

Dernière du classement pour le bio dans les cantines

L’Institut Montaigne s’est aussi intéressé aux efforts des municipalités françaises pour augmenter la part d’ingrédients biologiques dans leurs cantines. Et là, « Strasbourg se classe dernière, loin derrière les autres villes » relate le document, alors même que « Jeanne Barseghian promettait dans son programme une alimentation 100% biologique et locale dans les cantines scolaires ».

Selon l’Institut, la part de bio servi dans les cantines strasbourgeoises n’est que de 30% en 2021, soit « le plus faible ratio des villes » analysées. Ouch. En outre, l’Institut relève que « le prix d’un repas en cantine pour une famille moyenne s’élève à 5,80€. Si ce prix est exactement le même qu’en 2020, au moment de l’élection, il n’en reste pas moins le plus cher de toutes les villes analysées. Un coût près de deux fois plus élevé qu’à Lille (2,61€), Nice (3,15€) ou Bordeaux (3,32€) ».

Syamak Agha-Babaei conteste ces calculs :

« Il y a dix tranches de prix, selon les revenus des familles, soit de 1,5€ à 6,5€ par repas. Le vrai prix moyen est de 3,49€. En outre, plus de la moitié des enfants de Strasbourg paient moins de 3,25€. Quant à la part de bio dans l’alimentation, elle progresse selon les capacités du marché. Nous ne faisons pas du bio s’il faut faire venir les ingrédients de l’autre bout de l’Europe. À la rentrée 2023, ce sera 50% des aliments et 100% du pain servis aux enfants. »

Quant à la transformation écologique de la ville, l’Institut Montaigne n’en voit guère les effets. « Entre 2020 et 2021, 1,7 hectares ont été artificialisés » à Strasbourg, le « chiffre le plus important de toutes les mairies EE-LV » – notent les auteurs, qui reconnaissent toutefois que ce chiffre « est en nette amélioration : une moyenne de 12,7 hectares avaient été artificialisés entre 2017 et 2019 ».

Dans les chapitres consacrés aux autres villes, les auteurs ont inclus des « commentaires de l’équipe municipale ». Strasbourg n’en a pas envoyé car, indique Syamak Agha-Babaei, « quand on a reçu leur questions, on a compris que le rapport était écrit à l’avance, avec des chiffres faux et une méthodologie douteuse. »

Stocamine : Alsace Nature lance un appel aux dons pour une contre-expertise

Stocamine : Alsace Nature lance un appel aux dons pour une contre-expertise

Après des années de bataille contre l’État et l’entreprise de stockage de déchets toxiques Stocamine, et alors qu’un arrêté préfectoral devrait être publié en septembre pour autoriser leur enfouissement, l’association Alsace Nature lance un dernier appel aux dons. Le but : opposer aux autorités une contre-expertise indépendante.

C’est une bataille sans relâche qui dure depuis octobre 2021. Stocamine, aujourd’hui, ce sont 42 000 tonnes de déchets toxiques (amiante, mercure, cyanure) qui sont enfouis dans les sols d’Alsace, mettant en danger la nappe phréatique rhénane, qui alimente sept millions de personnes en eau potable.

Alsace Nature se bat depuis des années en faveur d’un déstockage de ces déchets toxiques et dangereux, alors que l’État et Stocamine ne cessent de vouloir passer en force, dans le but de les y enfouir pour toujours.

L’entrée du site de Stocamine, à Wittelsheim, près de Mulhouse. (Photo TV / Rue89 Strasbourg / cc).

Malgré une première victoire juridique d’Alsace Nature en octobre 2021 en faveur d’un déstockage des déchets, l’État a tout tenté afin de construire un coffrage en béton (qui rendrait l’enfouissement définitif) en se pourvoyant en cassation.

Plus récemment, en janvier 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a donné raison à Alsace Nature et annulé partiellement le nouvel arrêté préfectoral qui autorisait les travaux nécessaires à l’enfouissement définitif des déchets toxiques. En avril 2023, le préfet du Haut-Rhin a rédigé un nouvel arrêté pour contester cette décision, et lance une enquête publique qui durera trois mois.

Une contre-expertise nécessaire mais trop couteuse

Le 26 juin 2023, le verdict tombe : les commissaires enquêteurs donnent finalement un avis favorable à l’enfouissement à durée illimitée des déchets, alors que 98% des 1 571 contributions à l’enquête publique expriment un avis défavorable.

Selon Alsace Nature, les seuls rapports d’expertise existants, recommandant d’enfouir les déchets toxiques de manière définitive, ont été demandés par l’État et Stocamine. C’est pourquoi l’association souhaite mener une contre-expertise, réalisée par des experts indépendants.

Quel avenir pour les déchets de l’ancienne mine de sel de Wittelsheim, comme ce Bigbag de déchet contenant de l’amiante, situé dans une galerie de stockage à – 500m ? Photo : Pascal Bastien / Divergence

N’ayant pas les moyens de financer seule cette nouvelle étude, Alsace Nature lance donc un appel à la contribution financière du public afin d’y arriver. L’association a besoin de réunir 38 000 euros afin de pouvoir mener à bien cette étude et la cagnotte se clôturera le mardi 31 octobre 2023.

La parution de l’arrêté préfectoral autorisant à nouveau les travaux d’enfouissement de déchets sur le site est prévue en septembre prochain. L’association souhaiterait pouvoir lancer et publier la conclusion de leur contre-expertise avant cette date.

Émilie Girard va diriger les musées de Strasbourg

Émilie Girard va diriger les musées de Strasbourg

Les musées de la Ville de Strasbourg, qui ont connu quelques mois mouvementés en 2022, vont changer de chef. Après Paul Lang, ils seront dirigés en janvier par Émilie Girard, qui vient du Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée de Marseille.

Dans un communiqué daté du 18 juillet, la Ville de Strasbourg annonce la nomination d’Émilie Girard, conservatrice en chef du patrimoine, en qualité de directrice de ses musées à partir du 1er janvier 2024, prenant ainsi la succession de Paul Lang, directeur des musées depuis 2017, qui a fait valoir ses droits à la retraite.

Émilie Girard, 44 ans, est directrice scientifique du Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem) à Marseille, un établissement où elle aura passé 17 ans et l’essentiel de sa carrière. Spécialisée en anthropologie culturelle et archéologie chrétienne, elle s’est diversifiée pour assurer, selon le communiqué, « le commissariat de plusieurs grandes expositions depuis 2013 parmi lesquelles La Galerie de la Méditerranée, Picasso – Un génie sans piédestal ».

Émilie Girard en 2021 (Photo Mucem).

Émilie Girard est en outre présidente du Conseil international des musées (Icom), une instance de coopération entre les musées publics à l’échelle mondiale. Selon la Ville de Strasbourg, les priorités d’Émilie Girard sont le « développement durable » et « le renouvellement des publics ». Strasbourg espère donc de sa nouvelle directrice, qu’elle saura « impulser la transformation de ce réseau de musées formé dès la fin du XIXe siècle, dans une logique vertueuse de mutualisation et de poursuivre cet héritage en l’inscrivant dans la période contemporaine ».

Contactée par Rue89 Strasbourg, Émilie Girard précise :

« Il y a de très importants chantiers à mener pour se conformer aux impératifs écologiques. C’est en outre le moment de le faire : tout le monde est bien conscient des enjeux et demande des décisions en ce sens. J’ai également axé ma candidature sur des efforts à apporter en faveur de l’inclusion et de la diversité des publics. »

Ses chantiers immédiats seront la réouverture du Musée zoologique, en partenariat avec l’Université de Strasbourg, et la politique des expositions temporaires. Mais elle devra aussi trouver des solutions pour régler les problèmes de personnel aux musées, qui les empêchent d’ouvrir en continu les jours de semaine, et le recours trop fréquent aux vacataires. Des enjeux qui n’ont pas rebuté Émilie Girard qui s’avoue en revanche enthousiasmée par le « très vaste éventail et la qualité des collections des musées de Strasbourg ».

Les musées de Strasbourg comprennent onze établissements, dont le musée d’art moderne et contemporain (MAMCS), le musée des beaux-arts, le musée des arts décoratifs, mais aussi le musée de l’Œuvre Notre-Dame, le musée historique et le musée alsacien.

L’État va subventionner une ligne aérienne Strasbourg – Berlin

L’État va subventionner une ligne aérienne Strasbourg – Berlin

Selon L’Informé, une nouvelle ligne aérienne subventionnée par l’État va relier Strasbourg à Berlin.

L’Informé fait état dans un article du mardi 18 juillet d’un appel d’offres de l’État datant du 16 juin pour « concéder à un transporteur aérien (…) le droit d’exploiter à titre exclusif ces services aériens à compter du 1er octobre 2023″ entre Strasbourg et Berlin.

Cette ligne aérienne entre les deux villes distantes de 750 kilomètres avait été abandonnée en 1999 selon L’Informé, faute de trafic. Elle devrait donc renaître grâce à des fonds publics : 4,5 millions d’euros puisés dans le Contrat triennal Strasbourg capitale européenne pour une liaison qui assurera deux allers-retours par semaine, 46 semaines par an.

Une enveloppe de 189 millions d’euros

Ce dispositif entre l’État, la Région Grand Est, la Collectivité d’Alsace, l’Eurométropole et la Ville de Strasbourg, doté de 189 millions d’euros pour les années 2021 à 2024, vise à financer des projets devant conforter le statut européen de Strasbourg. L’objectif affiché est donc de permettre aux parlementaires européens et à leurs équipes d’utiliser cette ligne pour se rendre aux sessions plénières à Strasbourg, une fois par mois. Deux autres lignes sont ainsi subventionnées vers Amsterdam et Madrid.

Selon L’Informé, le Parlement européen a soutenu le projet mais pas l’Allemagne, qui laisse la France subventionner seule cette ligne aérienne. Avec 96 eurodéputés, l’Allemagne envoie le plus gros contingent au Parlement européen, mais la vaste majorité d’entre eux rechigne à se rendre à Strasbourg et préférerait rester à Bruxelles, près de la Commission européenne.

Cette information survient alors que Strasbourg semble avoir perdu sa place sur une future ligne ferroviaire à grande vitesse entre Paris et Berlin au profit de Sarrebruck.

Vélorution « inter-quartiers » restreinte aux pistes cyclables vendredi 21 juillet

Vélorution « inter-quartiers » restreinte aux pistes cyclables vendredi 21 juillet

L’association Strasbourg à vélo organise une manifestation à vélo, appelée vélorution vendredi 21 juillet. Mais pour la première fois, le trajet – qui initialement devait passer par plusieurs axes inadaptés aux cyclistes selon l’association – doit se confiner aux pistes cyclables.

Vendredi 21 juillet à 17h30, une manifestation à vélo doit passer par cinq grands axes de circulation strasbourgeois, afin d’y dénoncer des aménagements inadaptés à la circulation cycliste. Cette vélorution, la quatrième de 2023 mais la première reliant plusieurs quartiers, est organisée par Strasbourg à vélo (SAV), une association née de l’organisation des précédentes vélorutions.

Une vélorution en juillet 2015 Photo : Christine Viale / Alternatiba / cc

Le parcours devait relier la passerelle des Deux-Rives à Koenigshoffen en passant par « les différents axes identifiés qui comportent des failles en matière de sécurité ou de confort pour les vélos », résume Alice Griffard, membre de SAV :

« Le boulevard Poincaré, l’avenue du Rhin… Ce sont des axes très structurants à Strasbourg et certains tronçons manquent de pistes cyclables, ou bien ces pistes existent mais elles ne sont pas suffisamment larges et sont parfois coupées par la circulation des voitures. »

Ce rassemblement de cyclistes se veut revendicatif mais aussi festif. Strasbourg à vélo espère une « déambulation joyeuse qui sera largement sonorisée », prévoit Benoît Écosse, le secrétaire de l’association, avec la promesse d’une surprise à l’arrivée.

Le tracé initialement prévu par Strasbourg à vélo, de la Passerelle des deux rives à Koenigshoffen Photo : Document issu du site de l’association

Un itinéraire stratégique

Les précédentes vélorutions ne se concentraient que sur un axe ou un quartier en particulier. L’itinéraire de vendredi devait mettre en évidence plusieurs difficultés majeures pour les cyclistes. Mais le trajet déposé à la préfecture a été retoqué, la manifestation devant « emprunter les voies cyclables » selon les autorités. Alice de SAV déplore :

« C’est la première fois qu’on nous demande de modifier tout le trajet afin de “ne pas gêner la circulation automobile.” En n’utilisant que les pistes cyclables, on perd le principe même d’une vélorution. »

En choisissant de manifester sur cinq axes de circulation, SAV voulait démontrer la dangerosité des intersections de l’avenue du Rhin, le partage futur des trottoirs de l’avenue des Vosges – après leur réaménagement lié à l’extension du tram nord, l’utilisation de la voie de bus le long boulevard du Président-Wilson… Quant à la route des Romains, « l’aménagement ne laisse que 80 centimètres de large pour les vélos et n’est plus en capacité d’absorber un flux cycliste de plus en plus important » selon Alice de SAV qui ajoute :

« L’itinéraire que nous avions préparé était symbolique et synthétisait les revendications que nous portons depuis des années. Nous voulons des infrastructures sûres mais aussi suffisamment larges, afin qu’elles puissent être utilisées par tous, comme les vélo-cargos par exemple. C’est à partir de ces nouveaux usages qu’il faut penser. On milite pour que chacun ait sa place. »

Selon le palmarès 2021 de la Fub, la Fédération des usagers de la bicyclette, Strasbourg n’occupe plus que la deuxième position nationale.

Samedi 22 juillet, le centre de Strasbourg occupé par une Grande braderie « sans vedettes »

Samedi 22 juillet, le centre de Strasbourg occupé par une Grande braderie « sans vedettes »

La 63e édition de la Grande braderie de Strasbourg se tiendra samedi 22 juillet dans toutes les rues et sur toutes les places de la Grande-Île. Organisée par les Vitrines de Strasbourg et les commerçants non-sédentaires, la braderie mobilise 400 commerçants.

Ce n’est pas la plus grande braderie de France mais presque : samedi 22 juillet de 7h30 à 19h30, 400 commerçants seront installés dans tout le centre-ville de Strasbourg, les étals des « non-sédentaires » s’ajoutant aux boutiques. Des vendeurs particuliers seront également présents place Broglie. L’événement attire chaque année autour de 100 000 visiteurs.

braderie (photo les vitrines de Strasbourg / cc)
Chaque année, la Grande braderie de Strasbourg attire environ 100 000 visiteurs Photo : Vitrines de Strasbourg / doc remis

Pour l’édition 2023, « pas de vedettes, le budget ne le permet pas », déclare Émilie Dufour, directrice des Vitrines de Strasbourg, l’association des commerçants du centre-ville, qui co-organise l’événement :

« La Ville de Strasbourg ne subventionne pas l’événement, contrairement aux années précédentes. En conséquence, nous devons prendre en charge entièrement le budget de la sécurité, qui s’élève à 50 000€. C’est dommage car l’événement profite à toute la ville, mais c’est un choix politique. »

Menaces sur l’édition 2024

Un changement qui en appelle d’autres puisqu’en 2024, la Grande braderie risque de ne pas avoir lieu. Les agents de sécurité, mobilisés par les Jeux olympiques, pourraient ne plus être disponibles. Ce serait l’occasion de « réfléchir et repenser l’évènement », selon Émilie Dufour afin de « diminuer la facture ».

Des concerts de l’orchestre folklorique Perle sont tout de même prévus samedi à partir de 11h place Gutenberg, à 14h30 place du Temple-Neuf et à 16h dans la rue du 22-Novembre.

Comme chaque année, le centre-ville ne sera pas desservi en transports en commun samedi 22 juillet jusqu’à 22h30. Certaines lignes de bus seront déviées de leurs itinéraires au centre-ville dès le vendredi 21 juillet à partir de 22h. En outre, les transports en commun ne seront pas gratuits ce jour-là, comme cela avait pu être le cas en 2022. De plus, les parkings Gutenberg, Kléber et Broglie seront fermés à partir de 4h30 le samedi 22 juillet et jusqu’à 1h le dimanche 23 juillet.

Plan des transports pour la journée de la Grande braderie ce samedi 22 juillet. Photo : Image CTS

Des salariés de l’usine Clestra entament leur troisième semaine de grève

Des salariés de l’usine Clestra entament leur troisième semaine de grève

Après 14 jours de grève, les salariés de l’usine de cloisons Clestra, située à Illkirch-Graffenstaden, poursuivent leur mobilisation. Ils accusent leur nouvelle direction de maintenir le flou sur l’avenir de leurs emplois. Entretien avec Amar Ladraa, délégué CGT du personnel.

« Clestra, il est à nous, s’ils en veulent pas ils dégagent ! Et si y a pas d’avenir pour nous, qu’ils le disent tout de suite ! » Les grévistes de l’usine de cloisons Clestra applaudissent leur représentant devant le siège de l’inspection du travail, en début d’après-midi du lundi 17 juillet. Une trentaine de salariés s’était déplacée pour accompagner deux des leurs à une médiation face à la direction. Le nouveau président de la société, Rémi Taieb, s’y rend à son tour, flanqué de trois policiers et sous les huées.

Cette réunion était censée permettre de trouver une issue à la grève qui dure depuis 14 jours. Le conflit dure depuis lundi 3 juillet, après un licenciement jugé excessif par le syndicat CGT. Mais au-delà de ce cas particulier, c’est l’absence de dialogue avec le repreneur de Clestra en octobre 2022, Jestia, et l’incertitude totale sur le sort réservé à leurs emplois que dénoncent les grévistes.

Représentant du personnel, le syndicaliste CGT Amar Ladraa explique les raisons de cette mobilisation.

Amar Ladraa, délégué du personnel et animateur Grand Est de la CGT Métallurgie. Photo : RG / Rue89 Strasbourg/ cc

Rue89 Strasbourg : Votre grève commence avec le licenciement d’un salarié. Pourquoi cela a-t-il enclenché cette mobilisation ? 

Amar Ladraa : L’un des salariés arrive lundi 3 juillet et apprend qu’il ne peut plus rentrer sur le site, parce qu’il est viré ! Il n’a pas reçu de lettre de licenciement, rien à part un mail dimanche soir. Vu les raisons de son licenciement, on estime que c’était abusif et injuste. Dès qu’on l’a appris on s’est tout de suite mis en grève.

Deux mois plus tôt, la nouvelle direction de Clestra a proposé un accord de rupture conventionnelle collective, qui pouvait concerner 40 salariés dans la production. Nous avons refusé. Je pense qu’à partir de là, ils se sont dit qu’ils allaient se débarrasser de tous les salariés qui ne rentrent pas dans la ligne, un par un. Pour nous, c’est la vraie raison derrière ce licenciement et c’est ce que nous dénonçons aujourd’hui.

Amar Ladraa a lui-même été convoqué pour un entretien disciplinaire. Photo : RG / Rue89 Strasbourg / cc

Depuis la reprise de l’entreprise Clestra par le groupe Jestia en octobre 2022, le dialogue social semble au point mort. Pourquoi ?

Après la reprise, ils sont venus avec un air arrogant, pour nous dire en gros : « Maintenant c’est notre entreprise, plus la vôtre, on va la diriger comme on veut. Et si vous n’êtes pas content, vous partez. » D’ailleurs, 25 à 30% des salariés ont quitté l’entreprise. En fait, on voit très rarement les nouveaux patrons, on n’a pas vraiment d’interlocuteurs face à nous.

L’ancien directeur juridique de Clestra, Rémi Taieb a été nommé président de la nouvelle structure. Photo : Roni Gocer / Rue89 Strasbourg / cc

Et puis ce lundi matin, le Comité social et économique (CSE, instance qui réunit direction et représentants du personnel, NDLR) a tenu une réunion exceptionnelle pour changer le nom de la société. Clestra disparaît et devient Unterland Metal. Et ça en plein conflit social. On ne comprend pas. Clestra c’est presque un bien commun : une entreprise à Strasbourg depuis les années 60. On est très attaché à cette usine et à son histoire. Il y a des familles qui bossent dans cette usine depuis plusieurs générations.

Pourquoi craignez-vous que le déménagement du site de l’usine, d’Illkirch-Graffenstaden vers le Port du Rhin, soit une manière déguisée d’organiser un plan social ?

Notre usine actuelle à Illkirch fait 25 000 mètres carrés (m²). Les locaux qu’ils nous proposent, c’est 5 000 m² seulement ! Quand on leur demande comment ils vont faire pour maintenir la production et les postes, ils nous répondent « on vous informera plus tard, en septembre. » Mais pour nous, physiquement, ça ne tient pas.

En fait, le déménagement se fait en deux phases et concerne deux parties de la production. La première partie, qui concerne le pliage et la fabrication des cloisons, va bien être déménagée mais sur la deuxième partie de la production – la peinture et l’assemblage des cloisons – on n’a aucune information. Ça concerne à peu près 50 emplois et ça fait des semaines qu’on demande à savoir, mais on n’a jamais de réponse. Nous voulons une garantie que cette activité sera maintenue sur un site strasbourgeois et pas transférée à une filiale du groupe Jestia.

Une trentaine de salariés en grève s’était rassemblée devant la Dreets. Photo : RG / Rue89 Strasbourg / cc

L’État et la Région Grand Est se sont impliqués dans le dossier, en fournissant une aide de 5 millions d’euros sous la forme d’un prêt. Qu’est-ce que vous attendez d’eux ?

On a envoyé une lettre commune avec la CFDT au ministre de l’Industrie (Roland Lescure, NDLR) pour solliciter un entretien. Nous voudrions qu’il s’implique et qu’il nous aide à trouver une solution pour l’avenir du site. Avec ça, on interpelle aussi les élus locaux, tout ceux qui peuvent nous aider.

Qu’espérez-vous de cette médiation avec l’inspection du travail, entre vous et la direction ? 

Déjà, nous voulons revenir sur ce licenciement abusif, mais aussi une garantie pour le maintien de l’emploi à Strasbourg, comme cela nous avait été annoncé lors de la reprise par Jestia. Nous voulons également plus d’informations sur le déménagement du site de l’usine. J’espère que les médiateurs arriveront à convaincre la direction, parce que tout seul, on n’y arrive pas. On essaye de discuter mais ils restent bloqués. Pourtant il faudra bien qu’on trouve un terrain d’entente, car les salariés sont déterminés : en deux semaines presque aucun n’a repris le boulot, toute la chaîne est à l’arrêt. On continuera tant qu’il le faudra.

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Huit spectacles de marionnettes et de cirque au Taps

Huit spectacles de marionnettes et de cirque au Taps

Le Théâtre actuel et public de Strasbourg (Taps) propose cet été huit spectacles du 18 juillet au 10 août, liant amour de l’art et thématiques fortes, de l’écologie à l’exil.

Avec l’arrivée des vacances scolaires d’été, les théâtres ont tendance à baisser le rideau. Même le Théâtre national de Strasbourg (TNS) ne reconduit pas sa « Traversée de l’été » en 2023. Heureusement, le Taps (Théâtre actuel et public de Strasbourg) invite petits et grands à venir profiter de huit spectacles, du 18 juillet au 10 août, dans le cadre de la sixième saison d’ »Un été au Taps ». 

Ils seront joués en journée sur la scène du Taps Laiterie, située près du Musée d’art moderne, et en soirée sur celle du Taps Scala au Neudorf, pour que tout le monde puisse y trouver son compte. Le premier lieu accueillera des spectacles jeune public accessibles à partir de trois ans et le second des propositions familiales pour les plus de sept ans et les adultes.

L’art à portée de tous

Cette saison estivale sera lancée mardi 18 juillet à 10h30 avec la pièce « Et puis« , présentée par la compagnie La Soupe, bien connue pour ses créations aux esthétiques puissantes et singulières. À l’origine de ce spectacle, le magnifique livre d’images du même nom réalisé par le duo de dessinateurs Icinori, tous deux sortis de l’école strasbourgeoise des Arts Décos, la HEAR. 

S’inspirant de leurs décors originaux, colorés et fantasmagoriques, la compagnie en propose une adaptation entre le théâtre, la marionnette et la musique. Traversant de luxuriantes forêts aux végétaux rouges et bleus, un personnage mi-homme mi-outils transforme le paysage sauvage en abattant des arbres et hissant des bâtiments. De quoi s’interroger sur les liens entre l’être humain et la nature. Accessible à partir de 4 ans, « Et puis » sera également joué le 18 juillet à 17h et le 19 juillet à 10h30 au Taps Laiterie.

Le spectacle « Et puis » a été largement inspiré par un livre d’images réalisé par deux étudiants de la Haute école des arts du Rhin (HEAR). Photo : Raoul Gilibert

Cirque moderne, épuré et poétique

Après le cabaret du cirque local Graine de Cirque et les performances du cirque Bouffon, installé à Kehl au début du mois, c’est au tour du Taps d’accueillir un numéro de cirque moderne, à la fois épuré, poétique et rempli de sens. Rendez-vous avec la compagnie Manie venue à Strasbourg présenter son spectacle « Au bord du vide« . En s’emparant du sujet de l’identité, du rapport à son passé et à son futur, trois comédiens-circassiens incarneront sur les planches un même personnage à trois âges différents. 

Alors qu’un homme, coincé dans le circuit d’une roue Cyr, se sent paralysé dans sa vie, il se dédouble et rencontre sa version jeune (un acrobate jongleur fougueux), et âgée (un vieux clown philosophe et funambule). Cette étonnante méditation sera jouée le jeudi 20 juillet à 19h au Taps Scala et est conseillée à partir de 9 ans. 

« Au bord du vide », numéro de cirque moderne, épuré et poétique, par la compagnie Manie, au Taps Scala, le 20 juillet. (Photo Valérie Quéméner).

Écologie, exil, quête d’identité…

S’emparant du complexe sujet de l’exil, le conte musical et marionnetique « Dans ta valise«  se place à hauteur d’enfant, puisqu’il est accessible dès 4 ans. Yumna, petite marionnette en ciré jaune, débarque du pays du sable avec toute sa vie contenue dans une valise pour se rendre à l’école de la neige. Grâce à un univers esthétique touchant et l’accompagnement d’une musique jouée en plateau, cette histoire devient un hymne à l’amitié émouvant et joyeux. 

« Dans ta valise », un conte musical et marionnetique sur le thème de l’exil. À voir au Taps Laiterie le mardi 25 juillet. Photo : Vladimir Lutz

Portée par la compagnie « Rêve général ! » (basée à Épinal) qui tourne depuis 2006, ce conte fait partie d’un projet construit autour de trois pièces pour aborder, avec différents publics, les questions de l’immigration et de ce que provoque chez nous l’arrivée de personnes exilées. Elle sera jouée au Taps Laiterie le mardi 25 juillet à 10h30 et 17h et le mercredi 26 juillet à 10h30.

Les amoureux de marionnettes pourront profiter de trois autres spectacles : « l’histoire d’amour de Nicolette et Aucassin », par la compagnie Atelier Mobile, « La grande traversée d’Anoki », un petit manchot perdu dans le désert de glace, par la compagnie Croqueti, et le conte poétique et anticapitaliste « Des larmes d’eau douce » de la compagnie La mandarine Blanche

Dans cette dernière pièce, Sofia, une petite fille pleurant de l’eau douce sauve son village de la sécheresse avant que certains ne voient en cette capacité un intérêt financier. Une belle programmation qui permettra aux Strasbourgeois amoureux des arts de la scène de tenir jusqu’au FARSe, le traditionnel Festival des arts de la rue de Strasbourg qui se déroulera du 11 au 13 août 2023.

« Des larmes d’eau douce« , conte poétique et anti-capitaliste de la compagnie La Mandarine Blanche. Photo : Doc Remis / Patrick Kuhn

Avec Mustapha El Hamdani, Strasbourgeois engagé pour les luttes des immigrés

Avec Mustapha El Hamdani, Strasbourgeois engagé pour les luttes des immigrés

« Les Strasbourgeoises et Strasbourgeois engagés », un podcast de Rue89 Strasbourg. Dans cette série de portraits sonores, des militants racontent leur engagement, leur parcours. Quinzième épisode avec Mustapha El Hamdani, président de l’association Calima.

En 1983, un jeune Marocain débarque en France pour poursuivre des études de chimie. Déjà engagé dans les mouvements étudiants de son pays, Mustapha El Hamdani est séduit par le bouillonnement politique des universités françaises et rejoint les mouvements de défense des travailleurs immigrés.

Militant de l’Association des Travailleurs Maghrébins de France (ATMF), c’est finalement un véritable coup de foudre pour la ville de Strasbourg qui l’amènera à se fixer définitivement en Alsace. À la fin des années 1980, il s’engage pour le droit de vote des immigrés aux élections locales et sera élu au Conseil consultatif des étrangers (CCE) de Strasbourg, créé par la maire socialiste Catherine Trautmann.

« L’immigration participe à la richesse de notre ville, mais elle n’a pas le droit à la parole car elle est exclue des choix démocratiques. Catherine Trautmann lors de sa campagne de 1989, nous avait fait la promesse de mettre en place une institution dans laquelle nous pourrions nous exprimer en attendant d’obtenir le droit de vote. »

Mustapha El Hamdani, président de l’association Calima Alsace.

« On ne va pas au bout de nos idées, c’est dommage »

Le droit de vote n’est jamais venu, mais le CCE a bien été mis en place. Jusqu’à sa suppression par le tandem formé par Fabienne Keller et Robert Grossmann quand Strasbourg repasse à droite en 2001. L’union RPR-UDF jugeant l’institution trop proche de l’ancienne municipalité. Poussé par l’envie de changer plus profondément les choses, Mustapha El Hamdani demande la nationalité française pour pouvoir s’engager en politique.

Sitôt sa naturalisation obtenue, il rejoint les Verts et participe à la campagne municipale de 2008. Mustapha El Hamdani sera élu conseiller municipal avant de quitter le parti écolo, puis le groupe majoritaire. À la fin de son mandat, dégoûté de la politique, il retourne militer dans l’associatif.

« C’est noble de s’engager en politique. J’admire les militants qui le font, mais je trouve qu’il y a trop d’hypocrisie et c’est ce qui m’a tué. On ne va pas au bout de nos idées. »

Mustapha El Hamdani, président de l’association Calima Alsace. (Photo AL / Rue89 Strasbourg).

Défendre la dignité des travailleurs immigrés

De retour dans le monde associatif, Mustapha El Hamdani se réengage pleinement dans son combat pour la défense des chibanis (anciens travailleurs immigrés maghrébins) au sein de l’association qu’il a créée en 2008 : Calima Alsace (« parole » en arabe).

Pour le militant, il s’agit au départ d’aider ces travailleurs immigrés à percevoir leurs retraites. Plus qu’une assistance administrative, il s’agit aussi de défendre la dignité de ces travailleurs « bousillés par des travaux pénibles » face à l’administration. Nombre d’entre eux, percevant le minimum vieillesse, sont tenus de résider en France six mois par an alors que rien ne les attache ici, si ce n’est une vie de labeur.

« On va les contrôler, les harceler, faire des descentes dans les foyers pendant l’Aïd quand ils sont au pays pour prouver qu’ils n’étaient pas là », tempête le militant associatif. De nombreux chibanis se retrouvent ainsi contraints de rembourser une partie des sommes perçues, parfois sur plusieurs années. Une situation qui pourrait s’aggraver suite aux déclarations de Bruno Lemaire, ministre de l’Économie, souhaitant porter l’obligation de résidence à 9 mois contre 6 actuellement pour toucher les prestations sociales.

Les portraits de chibanis réalisés par Jean-Louis Hess pour Calima Alsace lors d’une exposition au CSC Meinau. Photo : Document remis par Calima Alsace

Inquiet de la montée en puissance de l’extrême-droite et du racisme décomplexé que connaît la France depuis une vingtaine d’années, Mustapha El Hamdani ne baisse pas les bras : « J’ai trois enfants, je n’ai pas le droit de me résigner. » Au contraire, pour le militant, il faut faire rentrer ces histoires de migration pleinement dans l’Histoire de France. C’est ce qu’il s’applique à faire à son échelle au sein de son association. Pour ses enfants, là aussi :

« Tant que le récit de leurs parents ne fera pas partie du récit national, ils se sentiront toujours exclus. C’est indispensable de faire ce travail de mémoire pour donner du sens à leur citoyenneté, pour construire du collectif. Que ces jeunes puissent, enfin, dire : ”Je suis Français et je suis fier de l’être.” »

À Liederschiedt, des jeunes maraîchers créent un modèle agricole sans pesticide et accessible

À Liederschiedt, des jeunes maraîchers créent un modèle agricole sans pesticide et accessible

Vosges alternatives, notre série d’été sur la vie militante en zone rurale (2/8) – Trois amis ont décidé de quitter Strasbourg pour cultiver des légumes dans un petit village du pays de Bitche. Ils proposent des produits sans pesticides à bas prix, et des événements créateurs de lien.

Les étalages de la petite pièce qui sert d’épicerie sont vides en cet après-midi d’été. Johann l’assure, quand le magasin est ouvert, entre 80 et 100 personnes viennent acheter les légumes de la ferme Affable à Liederschiedt, dans le pays de Bitche. Ici, la salade ou la botte de radis s’achètent à 1€, la botte de carotte est à 2,20€, celle de betterave à 2€, comme le kilo de tomates.

Les prix bas, c’est l’un des engagements de cette petite exploitation portée à bout de bras par trois trentenaires. « Sinon, les personnes modestes, elles mangent quoi ? J’ai toujours trouvé horrible que la nourriture de bonne qualité soit inaccessible aux pauvres », souffle Lorène, conjointe et associée de Johann. Antoine, un ami d’ami, a rejoint l’aventure en cours de route. Les jeunes maraîchers produisent tout sans pesticide mais ne demandent pas le label « bio », comme l’explique Lorène :

« Ça nous semble superflu de payer pour un label, nos clients voient comment on travaille au quotidien et nous font confiance. On n’en a pas besoin. »

La ferme Affable vend des légumes au marché de Meisenthal, à 25 kilomètres de Liederschiedt. (Photo AL / Rue89 Strasbourg / cc)Photo : AL / Rue89 Strasbourg

« On a des clients de toutes les classes sociales »

À les entendre, leur projet trouve son public. « En général, à l’ouverture de la boutique le samedi matin, il y a une longue file d’attente devant la porte. On vend aussi au marché de Meisenthal », poursuit Johann :

« Les gens se passent le mot de bouche à oreille parce que c’est rare des légumes sans pesticides à ce prix-là. On veut être à peu près au même tarif que dans les supermarchés. Des bobos allemands, des punks, des retraités au minimum vieillesse… On a vraiment des clients de toutes les classes sociales. »

Lorène se souvient qu’une femme au RSA lui a avoué que c’était la première fois qu’elle pouvait se permettre de faire ses courses directement chez le producteur. Pour Johann, le but est notamment de « montrer que c’est possible de vivre du maraîchage sans pesticide, avec une petite surface, en vendant les légumes pas cher » :

« La bonne nourriture peut devenir accessible. On préfère avoir des prix bas et davantage de clients plutôt que des légumes plus chers et moins de d’acheteurs. C’est juste un choix de modèle : on a peu de frais et comme on est en vente directe, on n’a pas d’intermédiaires qui se font des marges. »

L’essentiel du matériel de la ferme Affable. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Un matériel très limité

Dans la salle attenante à l’épicerie, des pelles, des fourches, des bineuses manuelles et des pioches reposent contre un mur. « On fait tout à la main, parce qu’on est pauvres, que les tracteurs coûtent très cher, et aussi parce qu’on aime ça », glousse Johann. La tondeuse rangée à quelques mètres passe presque pour du matériel sophistiqué. Le jeune homme poursuit :

« C’est faisable parce qu’on a une toute petite surface, on cultive sur 4 000 mètres carrés. Notre voisin agriculteur ne comprend pas ce qu’on fait, il nous dit : ”vous jouez”, mais il est sympa avec nous. On ne veut pas faire la morale, dire “on est les bienfaiteurs écologistes” en pointant du doigt les exploitants conventionnels. Ils ont leurs raisons. »

Johann était ingénieur du son, notamment au Molodoï à Strasbourg. Lorène était éducatrice spécialisée dans la protection de l’enfance. Comme beaucoup de citadins, le couple a décidé de se tourner vers la campagne et a acheté une maison à Liederschiedt. « On avait l’impression d’avoir fait le tour de ce que propose la vie en ville. Rentrer le soir et se retrouver dans notre appart’ pour repartir le lendemain, ça ne faisait plus sens », expose Johann. Lorène embraie :

« On voit moins de concerts, mais on a quand même une bonne vie sociale. Ici, tout le monde se parle et s’entraide. Quand on a un problème, on peut compter sur plein de gens. À nos portes ouvertes, c’est le maire qui a fait les tartes flambées. Même au niveau de l’engagement, j’avais l’impression de ne servir à rien en ville, de n’avoir aucun impact. Ça ne m’intéresse plus d’aller à une marche pour le climat, je préfère agir concrètement. Ici, notre projet est simple et concret : on produit des aliments pour que les gens puissent bien manger. »

« On a le cul bordé de nouilles »

Si tout roule aujourd’hui, la partie n’était pas gagnée d’avance. Sans terres dans la famille, il est très difficile de trouver une parcelle et de lancer une exploitation maraîchère. Arrivé à la campagne, Johann a commencé à se renseigner en discutant avec ses nouveaux voisins. Il a appris qu’une ferme avec un terrain était à vendre dans le village avec la Safer (Société d’aménagement foncier et d’établissement rural), qui a le rôle d’attribuer des champs que des propriétaires veulent céder. « On a vraiment le cul bordé de nouilles » estime Johann :

« L’exploitation faisait une cinquantaine d’hectares, on n’avait pas du tout besoin d’une telle surface. Le référent de ce dossier pour la Safer a apprécié notre projet. C’est rare que des jeunes s’installent. Il a proposé qu’une personne reprenne la majorité du site en nous laissant un hectare. »

Grâce à des techniques ingénieuses, la ferme Affable peut vendre des légumes comme des tomates et des courgettes tôt dans l’année. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

En 2020, peu de temps avant le confinement, le couple a commencé à monter son exploitation. « Clairement, il faut énormément travailler, on est loin des fantasmes de ceux qui se disent qu’ils vont vivre tranquillement à la campagne. C’est très difficile, mais moi je suis un nerveux, j’aime ça », lance Johann, espiègle. Idem pour Lorène :

« Si on n’aime pas ça, c’est impossible. Toute notre vie tourne autour de la ferme. On se lève à 5h, on a deux semaines de vacances dans l’année, et encore, c’est beaucoup. Arrêter de travailler, on ne connait plus. »

Une organisation millimétrée

Dans les moments les plus intenses, les gérants de la ferme Affable peuvent faire des semaines de 90 heures. Dans les périodes calmes, ils sont à 50 heures. « C’est simple, je ne connais aucun néorural qui a réussi à créer une activité pérenne en montant une ferme. Beaucoup renoncent après quelques années », souffle Johann, qui a passé un Brevet professionnel de responsable d’entreprise agricole (BPREA) avant de se lancer. En juin, il anticipe déjà le mois de novembre :

« On doit préparer certaines parcelles et les ensevelir sous des couvertures avant le gel, pour les garder au chaud tout l’hiver. Grâce à ça, la terre reste meuble, et on peut planter très tôt dans l’année, pour avoir beaucoup de légumes dès le début du printemps. Sinon, le sol est trop compacte et on ne peut pas semer quand il faut. Mais pour avoir le temps de faire ça, nos cycles de récolte doivent bien s’enchaîner maintenant. »

L’exploitation de la ferme Affable demande beaucoup de travail à ses gérants. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Les genoux à terre, Lorène arrache des mauvaises herbes. Dans la serre qui provoque une température bien supérieure à 40 degrés, Johann marche entre les plants de tomates, de concombres, de melons et de courgettes : « Grâce à des arceaux et des couvertures, on arrive à avoir des courgettes primeur dès avril. »

Il précise la rotation millimétrée des cultures, organisée pour optimiser les 4 000 mètres carrés exploités. « On plante et on récolte successivement plusieurs légumes au même endroit tous les ans. Ici il y a d’abord des carottes, puis des oignons, et enfin de la mâche », indique t-il en désignant des pousses du doigt. Le tout est irrigué à partir d’un bassin qui récupère l’eau de pluie tombée sur le toit d’un bâtiment.

Le bassin de rétention d’eau de la Ferme Affable est alimenté par de l’eau de pluie. Il fait plusieurs mètres de profondeur. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Des banquets ouverts à tous le dimanche

« L’un des aspects importants à mon avis, c’est qu’il faut avoir un projet très solide économiquement pour survivre. Il faut faire de l’argent. C’est négligé par certaines personnes qui se lancent dans le maraîchage », observe Johann, qui dévoile les comptes de son entreprise :

« Les deux dernières années, on a fait environ 70 000 euros de chiffre d’affaires. On pourrait sortir facilement deux salaires de 1 400 euros. En 2023 on devrait augmenter à 80 000. L’objectif c’est 100 000. On a une grande marge de progression parce qu’il y a encore des choses qu’on fait mal, certaines récoltes ont été perdues cette année.

Pour l’instant, on ne se paye presque pas pour se sécuriser : on rentre 1 500 euros pour Lorène et moi, et Antoine touche l’allocation de pôle emploi au titre de l’aide à la création d’entreprise. On arrive à vivre parce qu’on mange ce qu’on produit. »

La ferme Affable a conçu des outils pédagogiques pour les enfants. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Antoine était manager au Philibar et souhaitait quitter le monde de la nuit. Après être passé souvent pour « filer des coups de main », il est devenu associé de la Ferme Affable, afin d’y apporter sa touche personnelle : sa passion de la cuisine, en plus de son aide sur les cultures. Un dimanche sur deux, il prépare un grand banquet pour 70 personnes avec les légumes de la ferme :

« J’aime l’idée d’aller plus loin que la production. On veut créer des moments conviviaux, participer à la vie du village. Il y a des personnes qui se sont rencontrées pour la première fois à nos banquets alors qu’elles habitent à Liederschiedt depuis des décennies. Des jeunes, des vieux, des personnes d’univers très différents passent la journée ensemble. »

À terme, Antoine prévoit d’ouvrir un restaurant. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

De la transformation sur place et de l’accueil social

Ces prochains mois, les nouveaux paysans planifient de réaménager l’un de leurs hangars agricoles en laboratoire pour Antoine. « J’ai plein d’idées de préparations avec nos produits : des conserves, des plats surgelés, des pestos, des pots pour bébé… À terme, j’aimerais ouvrir un restaurant, mais on en est encore loin », détaille t-il.

Sur leur terrain, les jeunes maraîchers ont gardé un espace dédié aux banquets du dimanche. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Outre la culture de légumes, la transformation de produits et l’organisation d’événements, la ferme Affable a aussi des projets sociaux portés par Lorène. L’une des parcelles est dédiée à l’école maternelle de la commune.

« Les enfants sèment, arrosent, entretiennent et récoltent. Chaque semaine ils peuvent repartir avec un petit panier des légumes qu’ils cultivent : des salades, des choux, des petits pois… J’aimerais aussi créer des partenariats avec la protection de l’enfance, ou des établissements d’accueil de personnes en situation de handicap. »

Lorène apprend à cultiver des légumes aux enfants de l’école de la commune. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

« Je n’ai pas l’impression de bosser »

Désherbage, décompaction de la terre, récolte… Chacun à un bout de la ferme, Antoine, Johann et Lorène vaquent à leurs occupations. Même si leur vie toute entière tourne désormais autour de la ferme, ils ne retourneraient pas en arrière. « Il y a beaucoup de moments où on est en train de travailler sans en avoir l’impression, c’est très agréable. Si on livre des légumes quelque part, on est au boulot, mais on discute avec les gens et on boit un coup en même temps », raconte Lorène.

« Je suis toute la journée dans ce décor, je n’ai pas l’impression de bosser, on fait les choses pour nous, pas pour des patrons, et on se sent beaucoup plus libres. Quand je lève la tête, je vois le ciel et les arbres. Je n’ai jamais été aussi zen », confie Antoine, les mains dans les poches. Deux jeunes arrivent à l’improviste pour aider les maraîchers. Ces derniers semblent parfaitement habitués à ce type de visite. Ils les accueillent avec le sourire avant de se remettre au travail, profitant des heures plus douces de la fin d’après-midi.